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16/11/2010 | FRANCE | N°10/00112

France | France, Cour d'appel de Lyon, Sécurité sociale, 16 novembre 2010, 10/00112


AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE



COLLÉGIALE



RG : 10/00112





SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO



C/

[A]

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU RHONE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 02 Décembre 2009

RG : 072118











COUR D'APPEL DE LYON



Sécurité sociale



ARRÊT DU 16 NOVEMBRE 2010











APPELANTE :



SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO

Zone Industrielle

[E]

[Localité 1]



représenté par Monsieur [I], muni d'un pouvoir spécial



assisté de Me Ralph BOUSSIER, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Charlotte CRET, avocat au barreau de PARIS









INTIMÉS :



[U] [A]...

AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE

COLLÉGIALE

RG : 10/00112

SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO

C/

[A]

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU RHONE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON

du 02 Décembre 2009

RG : 072118

COUR D'APPEL DE LYON

Sécurité sociale

ARRÊT DU 16 NOVEMBRE 2010

APPELANTE :

SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO

Zone Industrielle

[E]

[Localité 1]

représenté par Monsieur [I], muni d'un pouvoir spécial

assisté de Me Ralph BOUSSIER, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Charlotte CRET, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

[U] [A]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne

assisté de Me Jérôme LAVOCAT, avocat au barreau de LYON substitué par Me Johanne BERGER-BONAMOUR, avocat au barreau de LYON

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU RHONE

Service Affaires Juridiques

[Localité 4]

représentée par Monsieur [L] [J]

muni d'un pouvoir général

PARTIES CONVOQUÉES LE : 28 Janvier 2010

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 05 Octobre 2010

Présidée par Michel GAGET, Président rapporteur (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Michel GAGET, Président de Chambre

Hélène HOMS, Conseiller

Marie-Claude REVOL, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 16 Novembre 2010 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Michel GAGET, Président de Chambre et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Vu le jugement du 02 décembre 2009 du Tribunal des affaires de sécurité sociales de LYON qui déclare que l'accident du travail dont a été victime [U] [A] est dû à la faute inexcusable de la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO et :

Fixe à 100% la majoration de rente servie à [U] [A],

Alloue la somme de 3.000 € à [U] [A] à titre de provision sur l'indemnisation de son préjudice,

Ordonne une expertise médicale d'[U] [A] aux frais avancés de la Caisse primaire d'assurance maladie de LYON en vue de déterminer le préjudice subi,

Condamne la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO au paiement d'une somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'appel formé par la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO par lettre recommandée avec accusé de réception du 05 janvier 2010 reçue au greffe de la Cour le 07 janvier 2010, et vu les conclusions déposées le 29 septembre 2010 soutenues à l'audience dans lesquelles elle sollicite la réformation de la décision dans toutes ses dispositions et demande à ce que [U] [A] soit débouté de toutes ses demandes ;

Vu les conclusions en réponse d'[U] [A] déposées le 31 août 2010 et soutenues à l'audience qui conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit que l'accident du travail est dû à la faute inexcusable de l'employeur et fait droit à ses demandes de majoration maximale de la rente et d'expertise médicale, et réclame la condamnation de la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO au versement d'une somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions de la Caisse primaire d'assurance maladie de LYON déposées le 13 septembre 2010 et soutenues à l'audience dans lesquelles elle demande, si la faute inexcusable est reconnue, d'une part, à ce que les sommes allouées en application des articles L.452-2 et suivants du Code de la sécurité sociale soit recouvrées par la Caisse auprès de l'employeur, et, d'autre part, à ce que l'avance des frais liés aux préjudices non prévus à l'article L.452-3 du même Code ne soit pas mise à sa charge ;

Les parties ont donné à l'audience du 05 octobre 2010, leurs explications orales explicitant leur argumentation et ont convenu qu'elles avaient, entre elles, communiqué, en temps utile et contradictoirement, leurs pièces et conclusions ;

DÉCISION

[U] [A] a été embauché par la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO à compter du 1er septembre 2001 en qualité de conducteur de rame.

Il a été victime d'un accident du travail le 24 juin 2003 dans les conditions décrites sur la déclaration d'accident du travail : « au démarrage de la production de la rame sécheuse ; en présentant le tissu devant le foulard et en voulant le déplisser, s'est fait prendre la main dans la vis élargisseuse ».

L'état de santé d'[U] [A] a été déclaré consolidé le 04 décembre 2005 avec un taux d'incapacité permanente partielle de 23%.

[U] [A] prétend que l'accident dont il a été victime est dû à une faute inexcusable imputable à son employeur.

Sur la faute inexcusable

L'employeur est tenu à l'égard de son salarié d'une obligation de sécurité de résultat.

Le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article
L.452-1 du Code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

L'accident est survenu sur une machine décrite comme une rame de marque MONTFORT, dans laquelle le tissu est entrainé par un système de rouleaux, et dont la fonction principale est d'assurer une qualité d'apprêt par lissage du tissu.

Cette machine a été achetée par la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO et livrée en juin 2002.

Avant sa mise en fonctionnement, la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO a fait procéder à la vérification de la machine par l'APAVE, organisme agréé par le ministère du travail.

Au terme de deux visites de l'APAVE, le rapport de l'organisme sur la sécurité de l'appareil ne relevait aucun dysfonctionnement de « nature à déconseiller l'utilisation de l'équipement ».

Pour sa part, [U] [A] prétend qu'au jour de l'accident, et depuis de nombreuses semaines, l'une des vis élargisseuses de la rame était inadaptée à son utilisation et créait des plis sur le tissu.

C'est en voulant corriger l'un de ces plis, pendant que la machine était en marche, qu'[U] [A] s'est d'ailleurs blessé.

Le salarié prétend avoir constaté l'inadaptation de la vis avant son accident et avoir informé son employeur à plusieurs reprises sur ce point, sans que ce dernier ne réagisse.

[U] [A] ajoute que la vis défectueuse a été changée peu de temps après l'accident dont il a été victime, ce qui tend à démontrer la faute commise par son employeur.

La SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO répond que la vis ne présentait, au jour de l'accident, aucun défaut ni inadaptation particulière, comme le démontre le rapport de l'APAVE.

Et l'employeur souligne, à juste titre, que [U] [A] n'apporte pas la preuve qu'il a effectivement alerté sa hiérarchie sur les prétendus problèmes de vis, et rappelle que cette vis a été changé plus d'an et demi après la date de l'accident d'[U] [A], ce qui démontre l'absence totale de problème lié à cette vis.

Il ressort de ces éléments que [U] [A] ne démontre pas en quoi cette vis aurait participé, directement ou indirectement, à la réalisation de son préjudice.

En tout état de cause, la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO prétend qu'elle n'ignorait pas le danger auquel le salarié était exposé, mais qu'elle a tout mis en 'uvre afin de l'en préserver.

Il est établi que cette machine est entièrement automatique et que l'intervention humaine est totalement exclue lorsque la machine est en marche, ce qui est confirmé par le manuel de l'appareil produit par l'employeur.

Il est aussi établi que la machine a été vérifiée à la fois par un organisme de vérification italien lors de la construction, mais également par l'APAVE, en France, lors de la livraison et de l'installation.

Il ressort de ces vérifications que la machine était, à la date de l'accident, conforme à la réglementation du travail.

La SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO rapporte la preuve qu'à l'occasion de l'installation de la machine dans son usine, les salariés qui avaient vocation à l'utiliser ont reçu, de la part du fabricant, une formation d'une durée de quatre jours, ainsi que l'attestent les salariés [J] [N], [V] [R] et [X] [F].

[U] [A] était présent à cette formation, durant laquelle les règles de sécurité spécifiques à la machine ont été évoquées, et particulièrement l'interdiction d'intervenir sur la machine lorsqu'elle est en marche.

La SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO justifie également que cette interdiction faite aux salariés d'intervenir directement sur une machine en marche, a été réitérée par la Direction, ainsi que le confirment les témoins [V] [R] et [J] [N].

Cette interdiction est ainsi rappelé par le temoin.

La Cour relève sur ce point, que la pratique habituelle au sein de l'entreprise évoquée dans l'attestation de Monsieur [Z], consistant, pour les conducteurs de rames, à déplier le tissu à la main pendant que la machine est en marche, est contestée par l'employeur et contredite par le responsable de fabrication et par le Directeur.

Il ressort clairement des pièces produites aux débats, que les informations relatives aux règles de sécurité sur l'utilisation des machines, ont été diffusées dans l'entreprise aux salariés exposés.

Il est par ailleurs démontré que la machine était munie de dispositifs d'arrêt d'urgence, à portée immédiate des salariés, ce qui est confirmé par l'arrêt provoqué le jour de l'accident par [U] [A] lui-même.

La Cour constate enfin que des pictogrammes, particulièrement visibles et intelligibles, étaient disposés sur la machine aux endroits où des dangers étaient identifiés.

A ce titre, à vingt centimètres de l'endroit précis où [U] [A] a vu sa main entrainée par l'un des rouleaux, figurait de manière visible, face au salarié, un pictogramme illustrant l'interdiction pour l'utilisateur de présenter sa main devant un rouleau en marche.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments, que l'employeur, qui avait conscience du danger auquel était exposé le salarié, a mis en 'uvre tous les moyens dont il disposait, tant en terme de conformité de la machine, que de formation du salarié ou de moyens de préventions signalétiques, pour l'en préserver.

Dans ces conditions, il ne saurait être imputé à la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO une faute inexcusable au sens de l'article L.452-1 du Code de la sécurité sociale, à l'égard d'un salarié dont l'expérience est certaine dans l'emploi qu'il occupait.

La Cour infirme le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu l'existence d'une faute inexcusable de la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO, et déboute, par voie de conséquence, [U] [A] de ses demandes de majoration de rente, et d'expertise médicale.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'équité commande de débouter [U] [A] de se demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le jugement entrepris est infirmé sur ce point.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

Fixé à 100% la majoration de rente servie à [U] [A],

Alloué la somme de 3.000 € à [U] [A] à titre de provision sur l'indemnisation de son préjudice,

Ordonné une expertise médicale d'[U] [A] aux frais avancés de la Caisse primaire d'assurance maladie de LYON en vue de déterminer le préjudice subi,

Condamné la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO au paiement d'une somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

Dit qu'aucune faute inexcusable ne peut être imputée à la SA ETABLISSEMENTS PROVERBIO,

Déboute [U] [A] de l'ensemble de ses demandes,

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article R.144-10 du Code de la sécurité sociale.

La Greffière,Le Président,

Evelyne FERRIERMichel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 10/00112
Date de la décision : 16/11/2010

Références :

Cour d'appel de Lyon 51, arrêt n°10/00112 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-11-16;10.00112 ?
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