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29/04/2010 | FRANCE | N°09/01847

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 29 avril 2010, 09/01847


R.G : 09/01847









décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du

10 février 2009



ch n° 3



RG N°07/02499



















COUR D'APPEL DE LYON



PREMIERE CHAMBRE CIVILE A



ARRET DU 29 AVRIL 2010







APPELANTS :



Monsieur [D] [G] [T]

né le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 9] (TUNISIE)

[Adresse 8]

[Localité 6]



représenté pa

r Me André BARRIQUAND, avoué à la Cour



assisté de Maître Malika BOUAZA, avocat au barreau de LYON





Monsieur [R] [T]

né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 9] (TUNISIE)

[Adresse 8]

[Localité 6]



représenté par Maître André BARRIQUAND, avoué à la Cour



assisté de ...

R.G : 09/01847

décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du

10 février 2009

ch n° 3

RG N°07/02499

COUR D'APPEL DE LYON

PREMIERE CHAMBRE CIVILE A

ARRET DU 29 AVRIL 2010

APPELANTS :

Monsieur [D] [G] [T]

né le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 9] (TUNISIE)

[Adresse 8]

[Localité 6]

représenté par Me André BARRIQUAND, avoué à la Cour

assisté de Maître Malika BOUAZA, avocat au barreau de LYON

Monsieur [R] [T]

né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 9] (TUNISIE)

[Adresse 8]

[Localité 6]

représenté par Maître André BARRIQUAND, avoué à la Cour

assisté de Maître Malika BOUAZA, avocat au barreau de LYON

INTIMEES :

Mademoiselle [I] [X]

née le [Date naissance 4] 1976 à [Localité 10] (RHONE)

[Adresse 5]

[Localité 7]

représentée par Maître Christian MOREL, avoué à la Cour

assistée de Maître Luc CHAUPLANNAZ, avocat au barreau de LYON

Mademoiselle [U] [X]

née le [Date naissance 1] 1966 à EN TURQUIE

[Adresse 5]

[Localité 7]

représentée par Maître Christian MOREL, avoué à la Cour

assistée de Maître Luc CHAUPLANNAZ, avocat au barreau de LYON

L'instruction a été clôturée le 05 Février 2010

L'audience de plaidoiries a eu lieu le 18 Mars 2010

L'affaire a été mise en délibéré au 29 Avril 2010

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :

Président : Madame MARTIN

Conseiller : Madame BIOT

Conseiller : Madame DEVALETTE

Greffier : Madame POITOUX pendant les débats uniquement

A l'audience Madame MARTIN a fait le rapport conformément à l'article 785 du Code de procédure civile .

ARRET : Contradictoire

prononcé publiquement le 29 Avril 2010 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

signé par Madame MARTIN, présidente et par Madame POITOUX, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

**************

FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES

Par acte sous seing privé à effet à compter du 1er juin 1995, la Société des Immeubles de [Localité 7] donnait à bail à M. [D] [G] [T] des locaux situés [Adresse 8] à usage de fabrication et vente de pâtisseries tunisiennes, salon de thé, sandwicherie pour une durée de neuf années expirant le 31 mai 2004 moyennant un loyer annuel de 36.427 F.

Le local était vendu à Mlle [I] [X] et à Mlle [U] [X].

Le 14 mars 2006, M. [T] faisait signifier aux bailleresses une demande de renouvellement du bail commercial.

Le 15 septembre 2006, M. [T] cédait son fonds de commerce à M. [R] [T]. La société [V] et [C], mandataire de Mlles [X], était informée de la date de signature de l'acte et les propriétaires étaient invitées à y assister.

L'acte de cession était signifié à Mlles [X] à la requête de l'acquéreur par acte du 7 novembre 2006.

Par acte du 22 janvier 2007, Mlles [X] faisaient assigner M. [T] et M. [T] devant le tribunal de grande instance de Lyon afin que soit prononcée la résiliation du bail consenti à M. [T] et ordonnée son expulsion ainsi que celle de M. [T].

Par jugement du 10 février 2009, le tribunal a prononcé la résiliation du bail au motif qu'en cédant le droit au bail sans avoir l'agrément des bailleresses M. [T] a violé l'article 8 du bail ; il a ordonné tant à M. [T] qu'à M. [T] de quitter les lieux sous peine d'expulsion par la force publique, et condamné in solidum M. [T] et M. [T] à payer la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [T] et M. [T] ont relevé appel du jugement.

Aux termes de leurs dernières conclusions, ils demandent à la Cour d'infirmer le jugement en faisant valoir que les bailleresses étaient parfaitement informées depuis 2004 du projet de cession par le preneur de son fonds de commerce, que pendant près de deux ans celles-ci n'ont jamais répondu aux demandes d'agrément de M. [T] pourtant réitérées, qu'elles n'ont pas répondu à son invitation de concourir à l'acte de cession, qu'elles ne lui ont jamais adressé l'offre de vente du local annoncée dans leur courrier du 23 août 2005 dans le but de justifier de leur silence, qu'en réalité ce silence était délibéré ainsi qu'il résulte de la pièce n°5 qu'elles versent aux débats, puisqu'elles avaient pour seul dessein de pousser leur locataire à la faute et reprendre ainsi la libre disposition de leur local sans bourse délier.

Ils soutiennent en conséquence que l'infraction commise à l'article 8 du bail ne présente pas un caractère de gravité suffisant pour justifier le prononcé de la résiliation du bail et ils demandent à la Cour de dire et juger que l'arrêt à intervenir vaudra autorisation des bailleurs à la cession et agrément du cessionnaire comme locataire.

Mlles [I] et [U] [X], intimées, concluent à la confirmation du jugement

Elles font valoir qu'il ne peut être affirmé que les bailleresses ou leur régie ont voulu piéger M. [T], que la lettre qui lui a été adressée le 21 mars 2005 était loyale, que celui-ci n'avait pas à passer outre en l'absence d'accord des bailleresses, mais devait saisir le juge des référés ou le tribunal statuant au fond, que M. [T] demandait d'ailleurs seulement que le bail soit mis au nom de son frère, que la signification de cession a été tardive alors que la cession avait un effet rétroactif au 1er juillet 2006.

Elles indiquent encore que si la Cour dispose d'un pouvoir d'appréciation sur la sanction à appliquer, une jurisprudence constante considère que la violation d'une clause d'agrément constitue une cause de résiliation du bail commercial.

Elles demandent la condamnation in solidum des appelants à leur payer une somme de 10.000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive, celle de 2.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et celle de 3.000 euros sur le même fondement pour la procédure d'appel.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que le bail signé entre la Société des Immeubles de [Localité 7] et M. [T] comporte une clause selon laquelle le preneur ne pourra céder son droit au bail qu'à l'acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise qui devra avoir obtenu au préalable et par écrit l'agrément du bailleur ;

Attendu qu'il n'est pas contesté que M. [T] ou son acquéreur n'ont pas obtenu l'agrément écrit des bailleresses avant de convenir de la cession du fonds de commerce par acte du 15 septembre 2006 ;

Attendu qu'il convient de rechercher si ce manquement aux clauses du bail est suffisamment grave pour justifier la résiliation du bail consenti à M. [T] ;

Attendu qu'il résulte des courriers versés aux débats que de nombreux mois avant la cession critiquée, M. [T] avait informé le bailleur de son intention de céder son bail à son frère ; que déjà sa lettre du 14 mars 2005 adressée au mandataire du bailleur révélait qu'il attendait depuis le mois de juin 2004 une réponse à sa demande (laquelle avait donné lieu à des rencontres et de multiples conversations téléphoniques); que copie de cette lettre était envoyées aux bailleresses intimées à qui il était demandé d'intervenir auprès de la régie afin de faciliter la procédure ; que par lettre du 21 mars 2005 la Régie des Immeubles de [Localité 7] répondait à M. [T] qu'elle transmettait à nouveau la demande aux propriétaires 'qui ne nous ont pas officiellement notifié leur accord pour un changement de titulaire du bail au profit de votre frère' et qu'elle restait à disposition pour la signature du bail selon l'augmentation proposée;

Que le même jour la Régie des Immeubles de [Localité 7] adressait à Mlles [X] copie du courrier de M. [T] et de sa réponse et s'exprimait en ces termes:

'Vous n'avez nullement l'obligation d'accepter le changement du titulaire du bail. Visiblement c'est un point important pour le locataire. Si vous souhaitez reprendre le local peut-être est-ce le moyen de pression qui peut s'avérer efficace à terme'';

Que le 23 août 2005, répondant à une lettre de Me [H] notaire, dont l'objet était la 'cession du fonds de commerce [T]', la Régie des Immeubles de [Localité 7] informait celui-ci de ce qu'un nouveau bail ne pouvait être établi dans l'immédiat car 'une offre de vente sera adressée très prochainement à vos clients' ;

Qu'aucune offre de vente n'ayant été faite par les bailleresses, M. [T] faisait signifier, par acte de Me [E] huissier de justice en date du 14 mars 2006, à Mlles [X] une demande de renouvellement du bail commercial ;

Que le 6 juillet 2006 , Me [S], avocat et conseil de M. [T], s'enquérait auprès de la société [V] & [C], nouvel administrateur de biens, du projet de vente des murs ;

Qu'en l'absence de réponse, Me [S] informait la société [V] & [C] de ce que la cession du fonds de commerce aurait lieu le 15 septembre 2006 et lui demandait d'informer les propriétaires et de les inviter à y assister ;

Que le 11 septembre 2006, le cabinet Lazare Conseil, consultant immobilier, rappelait à la société [V] & [C] que les propriétaires faisaient obstruction et lui indiquait que M. [T] et M. [T] étaient disposés à les rencontrer à tout moment, ajoutant: 'Cette situation de statu quo entretenue par les propriétaires n'a que trop duré; les premières démarches remontent à fin 2004" ;

Que c'est dans ces conditions que l'acte de cession du fonds de commerce était signé le 15 septembre 2006, les bailleresses ne s'étant pas manifestées ;

Attendu que la chronologie ainsi rappelée montre que les bailleresses se sont délibérément abstenues de fournir réponse à M. [T] lequel a pourtant à de multiples reprises sollicité leur consentement ; qu'elles ne sauraient sérieusement soutenir que M. [T] ayant sollicité un simple changement de titulaire du bail elles ne pouvaient accepter une telle opération qui se serait révélée illégale sur le plan fiscal ; que M [T] de nationalité tunisienne, et peu au courant des questions juridiques, s'est en effet exprimé dans les termes qui étaient les siens mais qui étaient aisément compréhensibles, la cession d'un fonds de commerce entraînant d'ailleurs le changement de titulaire du bail ; qu'en tout état de cause Mlles [X] n'ont jamais demandé la moindre information concernant l'opération projetée et l'acquéreur potentiel ; qu'elles ont encore voulu gagner du temps en faisant répondre à Me [H] en 2005 qu'une offre de vente allait être faite, qu'elles n'ont pas fait d'offre et n'ont pas davantage donné suite à la demande de renouvellement de bail commercial qui leur a été signifiée en mars 2006 ; que les interventions de divers professionnels pour le compte du locataire étaient sans équivoque sur la nature juridique de l'opération et la personnalité de l'acquéreur mais que les bailleresses sont obstinément restées taisantes, se contentant d'entretenir l'illusion d'un éventuel projet de vente qui est resté lettre morte ;

Attendu que sont ainsi caractérisées des manoeuvres dilatoires de la part des bailleresses pour éluder l'obligation qui leur incombait d'examiner le projet de cession qui leur était soumis, de donner leur agrément ou d'indiquer les motifs sérieux pour lesquels elles s'y opposaient ; que la lettre adressée par leur mandataire le 21 mars 2005 montre qu'il s'agissait d'une attitude calculée dans le but soit de décourager le locataire, soit de le pousser à la faute -ce qui s'est produit- et reprendre le local sans bourse délier ; qu'elles ont donc commis un abus de droit à l'origine du comportement des intimés ;

Attendu que si les premiers juges ont exactement indiqué que M. [T] aurait dû saisir le tribunal compétent afin d'obtenir une autorisation judiciaire pour que l'exercice de la clause d'agrément soit contrôlé, il convient de considérer que compte tenu des manoeuvres dilatoires et de l'abus de droit commis par Mlles [X], l'infraction aux clauses du bail dont elles se prévalent n'est pas suffisamment grave pour justifier le prononcé de la résiliation de ce bail ;

Attendu qu'il y a lieu, en conséquence, d'infirmer le jugement et de rejeter l'ensemble des demandes de Mlles [X] ;

Attendu que les appelantes ne formulent aucune observation sur la demande de MM. [T] et [T] tendant à voir dire que l'arrêt à intervenir vaudra autorisation des bailleurs à la cession et agrément du cessionnaire comme locataire ; que cette demande est justifiée par l'abus de droit commis par les appelantes lesquelles s'abstenant de répondre en tentant de lasser leur locataire n'ont jamais opposé le moindre motif sérieux à la cession envisagée ;

PAR CES MOTIFS, LA COUR

Infirmant le jugement entrepris,

Déboute Mlles [I] et [U] [X] de leur demande tendant à voir prononcer la résiliation du bail et voir ordonner l'expulsion de M. [T] et de M. [T].

Rejette toutes leurs demandes comme mal fondées.

Constatant qu'aucun motif sérieux n'est opposé à la demande d'agrément de M. [T] comme cessionnaire, dit que le présent arrêt vaut agrément du cessionnaire comme locataire et autorisation des bailleresses à la cession.

Condamne Mlles [X] aux dépens de première instance et d'appel avec pour ces derniers droit de recouvrement direct au profit de Me BARRIQUAND avoué.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 09/01847
Date de la décision : 29/04/2010

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°09/01847 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-04-29;09.01847 ?
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