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09/04/2010 | FRANCE | N°08/04380

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 09 avril 2010, 08/04380


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 08/04380





[X]



C/

CASINO GUICHARD PERRACHON







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes de SAINT-ETIENNE

du 25 Juin 2008

RG : F 07/00458











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 09 AVRIL 2010













APPELANT :



[S] [X]

né le [Date naissance 1] 1964

[Adresse 2]
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comparant en personne, assisté de Maître André PETITJEAN, avocat au barreau de LYON



Intimé sur appel incident,





INTIMÉE :



CASINO GUICHARD PERRACHON

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]



représentée par Maître Joseph AGUERA, avocat au barreau de LYON

...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 08/04380

[X]

C/

CASINO GUICHARD PERRACHON

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes de SAINT-ETIENNE

du 25 Juin 2008

RG : F 07/00458

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 09 AVRIL 2010

APPELANT :

[S] [X]

né le [Date naissance 1] 1964

[Adresse 2]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Maître André PETITJEAN, avocat au barreau de LYON

Intimé sur appel incident,

INTIMÉE :

CASINO GUICHARD PERRACHON

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Maître Joseph AGUERA, avocat au barreau de LYON

Appelant incident,

PARTIES CONVOQUÉES LE : 29 octobre 2008

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 05 Mars 2010

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Michel GAGET, Président de Chambre

Hélène HOMS, Conseiller

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 09 Avril 2010, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel GAGET, Président de Chambre, et par Radia GRAIRI, adjoint administratif, faisant fonction de Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

.

*************

Vu le jugement prononcé le 25 juin 2008 par le conseil de prud'hommes de SAINT -ETIENNE qui condamne la SA CASINO GUICHARD PERRACHON à verser à [S] [X] les sommes de 345 000€ au titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement , outre 1500 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et qui le déboute de ses autres demandes au motif que son licenciement intervenu le 26 octobre 2006 est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Vu l'appel formé par lettre recommandée du 27 juin 2008, reçue au greffe le 30 juin 2008par [S] [X], et vu ses conclusions déposées le19 juin 2009 dans lesquelles il sollicite le paiement des sommes suivantes :

1) licenciement sans cause réelle et sérieuse : 370 000 €

2) prime de développement : 130 000 €

3) Indemnité contractuelle de licenciement : 345 000 €

4) réparation du préjudice subi du fait de

la perte des bénéfice des stocks options : 676 490€

5) article 700 du code de procédure civile : 5000 €

aux motifs que son licenciement ne repose pas sur des griefs matériellement vérifiables et qui lui sont directement et personnellement imputables, et que les documents apportés au dossier ne caractérisent pas un grief réel et sérieux imputable, compte tenu des responsabilités qu'il assurait personnellement, de sorte que le doute doit lui bénéficier ;

Vu les conclusions de la SA CASINO GUICHARD PERRACHON soutenant, à titre d'appel incident, la réformation de la décision entreprise, et le mal fondé de l'appel limité de [S] [X] qui doit être débouté de toutes ses demandes, et condamné à verser 5000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, aux motifs qu'il a bien manqué, dans l'exercice des missions de directeur financier, notamment dans celle de sa mission d'anticipation et d'alerte de la direction générale et en ne prenant pas d'initiative pour entretenir des relations régulières avec les agences de notations pour expliciter la situation créée par la prise de décision dans la filiale brésilienne, et que donc le licenciement repose bien sur une cause réelle et sérieuse ;

Les parties ont donné leurs explications orales à l'audience du 5 mars 2010 pour expliciter leurs écritures et ont convenu qu'elle avaient, en temps utile et contradictoirement échangé leurs pièces et argumentations.

DECISION

Sur la cause réelle et sérieuse :

Après avoir été 'embauché le 15 janvier 1990, [S] [X] a exercé, à compter du 1er juin 2005, les fonctions de directeur financier du groupe CASINO, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, avec un avenant du 2 juillet 2001 stipulant une clause de versement d'une indemnité de licenciement.

[S] [X] bénéficiait, au dernier stade de la relation contractuelle du statut de cadre hors catégorie, prévoyant une rémunération brute mensuelle de 16 000 €.

Après un entretien préalable auquel il avait été convoqué par une lettre remise en mains propres 13 octobre 2006 et qui a eu lieu le 23 octobre 2006, il a été licencié par une lettre recommandée avec accusé de réception du 26 octobre 2006, pour une cause réelle et sérieuse, et avec dispense d'effectuer le préavis de six mois auquel il était tenu par l'avenant du 2 juillet 2001.

La lettre de licenciement qui fixe les termes du litige reproche à [S] [X] de ne pas avoir anticipé les besoins de financement, de ne pas avoir évalué les évolutions de la structure financière du groupe, de ne pas avoir alerté la Direction générale du groupe, de ne pas avoir pris la mesure du poste qui lui avait été confié, de ne pas avoir mis en place les indicateurs et les outils nécessaires dans le cadre de la bonne exécution de sa mission.

Cette lettre reproche, d'une manière générale, dans l'interface avec les agences de notation ( en anglais rating) un manquement qui a conduit à faire assumer au groupe CASINO un risque de dégradation du 'rating' pouvant déboucher sur l'impossibilité d'accéder au marché de la dette.

[S] [X] soutient que ces griefs reposent sur des considérations générales et que l'interface avec les agences de notation était une responsabilité partagée entre le directeur général, le directeur administratif et financier et le directeur financier lui même.

Il ajoute que l'information de la Direction générale était faite consciencieusement au cours de réunions régulières et par la mise en place d'indicateurs.

Il fait observer que la dégradation de la notation était le résultat d'une poursuite de la stratégie d'acquisitions agressives , décidée et source d'une argumentation d'endettement.

Il affirme qu'il n'est pas possible de s'appuyer sur l'attestation de [L] [M] qui a été recruté en septembre 2006, et qui donne un témoignage de complaisance.

Mais il est certain, comme les premiers juges l'ont, à juste titre, observé, que les fonctions de directeur financier du groupe CASINO comme [S] [X] lui même les décrit et comme il ne peut pas sérieusement le nier, comprenaient la mission de veille, avec attention, de gestion de la trésorerie, des opérations financières et de la dette de l'ensemble du groupe, et donc d'anticiper tous les besoins de financement, toutes les évolutions de la structure financière et donc de l'endettement, compte tenu de la stratégie du groupe.

Dans le cadre de cette mission, il lui appartenait d'entretenir des relations régulières et suivies avec les agences de notation pour expliquer et pour expliciter les conséquences crées par l'investissement agressif fait au Brésil qui pouvait avoir des conséquences momentanées sur l'endettement de telle sorte que la notation du groupe pouvait s'en trouver affectée, comme ce fut le cas en novembre 2005 et janvier 2006.

Cette responsabilité n'est pas partagée dans la mesure où son niveau de responsabilité quant aux finances est très élevé puis qu'il doit assurer la coordination financière et internationale et où il a, sous sa responsabilité la gestion de la direction financière des filiales étrangères, que suit l'un de ses proches collaborateurs, [Z] [D] [Y].

Il ressort clairement de la baisse des notations intervenues en novembre 2005 et janvier 2007 que [S] [X] a failli dans sa mission d'anticipation des conséquences financières et d'alerte quant aux conséquences de l'opération qui pouvait avoir une influence sur les notation du groupe dont la stratégie repose sur une bonne capacité d'emprunter pour croître ce qui nécessite une bonne cotation des agences qui doivent être pleinement informées des opérations en cours et des stratégies à long terme.

Le passage de la cotation BBB à BBB - en novembre 2007 témoigne bien que l'information des agences n'a pas été faite à temps pour l'opération brésilienne dont les caractéristiques financières n'avaient pas été complètement étudiées et envisagées.

Comme le relève l'attestation de [L] [M] dont l'attestation ne peut pas être qualifiée de complaisance dans la mesure où elle analyse des faits objectifs contre lesquels la preuve contraire n'est pas rapportée, [S] [X] a manqué dans l'accompagnement des agences de notation et dans le système d'alerte des agences et de la direction générale en ne prévoyant pas cette baisse et ne mettant pas un plan d'action pour accompagner la dégradation dans la notation, prévisible dès septembre 2005.

Compte tenu du niveau très élevé de responsabilité, les manquements que l'employeur reproche à [S] [X], directeur financier du Groupe CASINO, dont il ne peut ignorer la stratégie et dont il ne peut ignorer l'importance de la notation faite par les agences de notation quant à l'endettement et quant à la stratégie de la dette, constituent bien une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Sur ce point le jugement attaqué doit être confirmé et la demande de dommages et intérêts pour absence de cause réelle et sérieuse n'est pas fondée.

Sur l'indemnité contractuelle de licenciement :

[S] [X] réclame une indemnité contractuelle en application de l'avenant au contrat de travail du 2 juillet 2001 dont le solde est de 345 000 € comme les premiers juges l'ont admis.

La société CASINO demande la réformation de la décision sur ce point au motif que l'indemnité que prévoit le contrat est manifestement disproportionnée par rapport à la réalité du préjudice subi.

[S] [X] a déjà perçu une indemnité conventionnelle de licenciement de 214 067 €.

L'avenant du 2 juillet 2001 prévoit une indemnité contractuelle de licenciement qui se substitue aux indemnités prévues dans l'accord d'entreprise.

Cette indemnité contractuelle peut être, en application de l'article 1152 du code civil, réduite si elle présente un caractère manifestement excessif.

L'employeur soutient que le caractère manifestement excessif résulte de la comparaison entre l'indemnité de la convention collective nationale du commerce de gros et de détail à prédominance alimentaire dont le montant aurait été de 127 784,94 € et la somme globale allouées si le contrat est appliqué à savoir la somme de 559 067 € ( 214 067+345 000 €) , somme qui est sans commune mesure avec la réalité du préjudice et la durée de son emploi au sein du groupe. L'employeur observe donc que l'indemnité qu'il réclame est de plus de quatre fois supérieur à l'indemnité conventionnelle et que le calcul effectif sans erreur est de 539 464,56 € pour observer une fois et demie la meilleure rémunération annuelle des trois dernières années.

Mais s'il est vrai que la somme allouée au titre de la clause contractuelle est importante et s'élève à 539 464,56 € comme le montre le calcul fait dans la pièce n°27 de l'employeur, le calcul de cette somme qui résulte de la convention des parties n'est pas manifestement excessif eu égard aux responsabilité exercées dans l'entreprise.

Il doit donc être alloué la somme de 325 394,56 € de solde d'indemnité contractuelle de licenciement.

Sur ce point le jugement attaqué doit être réformé pour ajuster la somme.

Sur la prime de développement :

[S] [X] demande le paiement d'une prime de développement de 130 000 € en se fondant sur une note interne qui précise que cette prime s'applique à tous les membres du comité de direction générale et aux cadres hors catégorie, prime déterminée en fonction de l'atteinte de critères qui sont définis.

L'employeur s'oppose au versement de cette prime en soutenant qu'elle ne résulte ni d'un usage ayant un caractère constant , fixe et général ni d'un engagement unilatéral de l'employeur issu d'une volonté explicite de l'employeur.

En l'espèce, la prime n'est prévue ni dans le contrat de travail ni dans un accord collectif.

Elle ne résulte pas non plus d'un engagement unilatéral de l'employeur.

Il appartient donc à [S] [X] de prouver que cette prime résulte d'un usage d'entreprise.

En l'espèce, il apporte à l'appui de sa demande une note interne qui fixe le mécanisme de la gratification qui s'applique au cadre hors catégorie.

Toutefois, la Cour observe que cette prime qui lui a été versée quatre fois a varié, chaque année dans son montant et que les critères d'attribution portent sur une appréciation discrétionnaire des qualités et des compétences.

Il n'est pas établi par [S] [X] que cet avantage résulte d'une pratique constante, générale et fondée sur des critères précis et fixe, alors que le document produit au débat montre clairement que l'attribution résulte d'une appréciation discrétionnaire de l'employeur qui n'est pas contraint à verser cette prime à tous les cadres hors catégorie.

D'autre part, [S] [X] ne prouve pas que tous les cadres de direction et tous les cadres hors catégorie recevaient effectivement cette prime.

Enfin, l'employeur qui n'entend pas verser cette gratification en raison des performances insuffisantes qu'il reproche au salarié ne peut y être contraint puisqu'il s'agit d'une libéralité dont il apprécie, en toute liberté, l'opportunité.

La demande de [S] [X] est donc mal fondée en fait et en droit.

Sur la perte de bénéfice des stocks options :

Le licenciement de [S] [X] repose sur une cause réelle et sérieuse, et la perte dont le salarié se plaint n'est pas imputable à l'employeur qui n'est tenu d'aucune obligation de réparer en application des articles 1134,1135 et 1147 du code civil parce qu'il n'a commis aucun manquement contractuel à l'origine directe et certaine du préjudice dont la réalité n'a pas l'ampleur revendiquée.

Cette demande est donc mal fondée en fait et en droit.

En conséquence de ce qui précède, il convient de réformer le jugement attaqué en son quantum, de déclarer l'appel formé par [S] [X] mal fondé et de rejeter ses demandes faites en appel.

L'équité commande de ne pas appliquer, en l'espèce, l'article 700 du code de procédure civile, au profit de l'une ou l'autre des parties.

La SA CASINO GUICHARD PERRACHON doit supporter tous les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Confirme le jugement du 25 juin 2008 en ce qu'il déclare le licenciement de [S] [X] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

- Réforme cette décision pour le surplus et statuant à nouveau sur l'ensemble des demandes faites en appel ;

- condamne la SA CASINO GUICHARD PERRACHON à payer à [S] [X] la somme de 325 394,56 € de solde d'indemnité contractuelle de licenciement ;

- Déboute [S] [X] de ses autres demandes ;

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la SA CASINO GUICHARD PERRACHON aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Radia GRAiRI Michel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 08/04380
Date de la décision : 09/04/2010

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°08/04380 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-04-09;08.04380 ?
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