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06/01/2010 | FRANCE | N°08/07955

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 06 janvier 2010, 08/07955


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 08/07955





[Adresse 8]

C/

S.A. ADT FRANCE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes de LYON

du 16 octobre 2008

RG : F.07/04551











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 06 JANVIER 2010













APPELANTE :



[E] [P]

née le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 10]

[Adresse 1]



[Localité 4]



comparant en personne, assistée de Maître Cécile RITOUET, avocat au barreau de LYON









INTIMÉE :



S.A. ADT FRANCE

[Adresse 3]

[Localité 5]



représentée par Maître Myriam ANOUARI, avocat au barreau de PARIS







































...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 08/07955

[Adresse 8]

C/

S.A. ADT FRANCE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes de LYON

du 16 octobre 2008

RG : F.07/04551

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 06 JANVIER 2010

APPELANTE :

[E] [P]

née le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 10]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparant en personne, assistée de Maître Cécile RITOUET, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

S.A. ADT FRANCE

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Maître Myriam ANOUARI, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 novembre 2009

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Louis GAYAT DE WECKER, Président

Dominique DEFRASNE, Conseiller

Catherine ZAGALA, Conseiller

Assistés pendant les débats de Anita RATION, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 06 janvier 2010, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Louis GAYAT DE WECKER, Président, et par Anita RATION, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Initialement embauchée dans le cadre de contrats de mission temporaires du 17 mai 2004 au 15 octobre 2004 par la société A.D.T. FRANCE, Mme [E] [P] a continué à travailler à l'issue du dernier d'entre eux pour le compte de la dite société dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de 'réviseur comptable' puis à compter du 30 mai 2005 de 'responsable administratif régional'.

La société A.D.T. FRANCE fait partie du Groupe américain TYCO INTERNATIONAL et plus spécialement de sa division Sécurité (FIRE & SECURITY) elle-même composée sur le continent européen de plusieurs sociétés : EUROPINTER, A.D.T. TÉLÉSURVEILLANCE et A.D.T. FRANCE, TYCO France Security, ECSAS S.A.R.L., EUROP TELESECURITE ;

Informée par courrier daté du 8 août 2007 que dans le cadre d'une refonte de l'organisation de la société son poste était supprimé et de ce qu'il lui était fait l'offre de reclassement suivante : 'Fonction : Responsable administratif régional. Rémunération fixe : 3.081,98 € bruts mensuels sur 12 mois pour un horaire de 37 heures hebdomadaires. Statut : cadres, coefficient 3, cadre position I. Lieu de travail : [Localité 6] ou [Localité 7] ou [Localité 9].', Madame [P] n'a pas estimé devoir se positionner sur celle-ci ;

Par courrier du 21 septembre 2007, Madame [E] [P] a été licenciée pour motif économique ;

Saisi le 18 décembre 2007 à l'initiative de Madame [E] [P], d'une contestation de son licenciement, le Conseil de Prud'hommes de Lyon, au terme d'un jugement rendu le 16 octobre 2008 :

- l'a dit remplie de ses droits et l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes ;

- a débouté la société A.D.T. FRANCE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 18 novembre 2008, Madame [E] [P] a interjeté appel général de ce jugement qui lui avait été notifié le 17 octobre 2008.

Madame [E] [P], concluant à la réformation, demande de dire qu'elle a fait l'objet d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de condamner la société A.D.T. FRANCE à lui verser les sommes suivantes :

- dommages et intérêts nets de C.S.G. et C.R.D.S.40.000 €

- article 700 du code de procédure civile2.000 €

Elle fait plus spécialement valoir que :

- la lettre de licenciement ne fait pas référence à la situation du groupe américain TYCO INTERNATIONAL ni davantage à la nécessité d'assurer la sauvegarde de la compétitivité de celui-ci;

- qu'en tout état de cause il n'est fourni aucune information relative aux difficultés économiques susceptibles d'affecter le secteur d'activité Sécurité au sein duquel l'intimée évolue.

Faisant grief à l'employeur de n'avoir pas respecté son obligation de reclassement, elle expose que :

- bien que le plan de sauvegarde de l'emploi ait prévu dans un premier temps l'identification des postes disponibles relevant de la même typologie que celui occupé par elle et dans un second temps la recherche de postes différents ou de catégorie inférieure, un seul poste de qualification identique lui a été proposé ;

- elle avait des raisons sérieuses de ne pas donner suite à l'offre de reclassement au motif que non seulement son emploi n'a pas été supprimé mais que le poste de responsable à [Localité 6] proposé ne s'est jamais libéré ;

- son silence valant refus, il appartenait à l'employeur de lui chercher un autre poste conformément au plan de sauvegarde de l'emploi ;

- l'obligation de reclassement doit s'apprécier au niveau du Groupe dans son ensemble ;

- l'étendue de ses compétences professionnelles lui permettait de prétendre à de nombreuses fonctions;

L'appelante fait valoir que si elle a retrouvé du travail il y a lieu de tenir compte que c'est dans le cadre d'un contrat à durée déterminée et sur la base d'une rémunération nettement inférieure;

La société A.D.T. FRANCE, concluant à la confirmation, demande de débouter [E] [P] de l'intégralité de ses demandes et de la condamner au paiement d'une indemnité de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Elle soutient que la motivation de la lettre de licenciement n'est pas critiquable en ce sens qu'il est bien fait état de la cause économique du licenciement et de son incidence sur le contrat de travail;

En ce qui concerne les difficultés économiques visées dans celle-ci, elle observe que l'expert comptable mandaté par le comité d'entreprise a lui- même constaté l'existence de difficultés économiques importantes et durables ainsi que la nécessité de sauvegarder la compétitivité de la division 'Sécurité' du Groupe TYCO INTERNATIONAL et la pérennité de l'entreprise ;

Elle soutient de même avoir satisfait à son obligation de reclassement aux motifs que :

- une proposition de reclassement lui ayant été faite, la salariée n'a pas daigné répondre ;

- le plan de sauvegarde de l'emploi ne lui faisait pas obligation de proposer deux offres de reclassement mais une offre individualisée adressée par courrier recommandé ;

Elle fait enfin valoir qu'il y a lieu de tenir compte de ce que la salariée a bénéficié des prestations de la cellule de reclassement ce qui lui a permis de retrouver un emploi dès le mois de janvier 2008 ;

SUR QUOI LA COUR

Sur la recevabilité de l'appel :

L'appel interjeté dans le délai d'un mois prévu par les articles 538 du code de procédure civile et R 1464-1 du code du travail est régulier en la forme ;

Sur le fond :

Sur le licenciement pour motif économique querellé :

Il résulte des dispositions de l'article L.122-14-2 du Code du travail devenu L 1232-6 que l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement, que le défaut de précision des motifs équivaut à leur absence, que lorsque le licenciement est prononcé pour un motif économique, cette lettre doit énoncer les motifs économiques ou de changement technologique invoqués par l'employeur (article L 1233-16 du code du travail) ;

Fixant les limites du litige, la lettre de licenciement pour motif économique de Madame [P] est motivée comme suit :

' La société ADT FRANCE face à des résultats d'exploitation déficitaires, accompagnés d'une dégradation constante de ses marges, a fait le constat de son manque de compétitivité et de l'inadaptation de sa structure.

La baisse inquiétante de la productivité de la force de vente, trop centrée sur le parc client existant, la diminution constante des revenus de services, ont rendu impératif une refonte de l'organisation de l'entreprise, pour assurer sa pérennité face à une concurrence bien organisée et très active sur le marché.

La création de segments commerciaux par typologie de clientèle, la création d'un pôle transversal dédié aux services clients, la centralisation d'activités et la réduction des structures régionales font, notamment , partie des mesures d'économie et de mise en place d'une structure plus adaptée au marché

Dans ce cadre, il a été décidé de réduire le nombre de Directions Régionales d'Exploitation de neuf à cinq, de concentrer certaines fonctions de support et de management sur les sites restant, en les adaptant à la structure de l'entreprise et aux nouvelles nécessités de fonctionnement, ce qui entraîne la suppression de postes de Responsable Administratif Régional.

Dans ces conditions, nous vous avons proposé à titre de reclassement interne, par courrier recommandé du 8 août 2007, le poste de Responsable Administratif Régional, à [Localité 6], [Localité 7] et [Localité 9].

Vous n'avez pas répondu dans les délais, dès lors nous avons pris acte de votre refus.

Dans ces conditions, après votre refus d'accepter nos solutions de reclassement interne, nous sommes au regret de vous notifier votre licenciement pour motif économique

(.....) ;

La réorganisation, si elle n'est pas justifiée par des difficultés économiques ou par des mutations technologiques, doit être indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ;

Ainsi, la réalité du motif économique doit s'apprécier à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur concerné, parmi les entreprises dont les activités ou l'organisation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ;

Au cas d'espèce, preuve n'est pas rapportée de ce que la réorganisation de la S.A ADT FRANCE découlant comme indiqué dans la lettre de licenciement du constat de son manque de compétitivité et de l'inadaptation de sa structure était indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de ce secteur.

Dès lors, et à ce titre, le licenciement n'est pas justifié ;

Par ailleurs la lettre de licenciement ne précise pas l'incidence des motifs prévus par la loi sur l'emploi ou le contrat de travail, l'employeur n'ayant pas indiqué dans la lettre de licenciement que l'emploi de Responsable Administratif Régional supprimé était précisément celui occupé par la salariée;

Elle ne répond donc pas, comme le soulève exactement l'appelante, aux exigences de motivation prévues par l'article L.1232-6 précité, ce dont il résulte, l'employeur ne pouvant invoquer ultérieurement des motifs non visés dans cette lettre, que le licenciement litigieux est dépourvu de motifs suffisants et, partant, de cause réelle et sérieuse ;

Il y a lieu en conséquence, réformant le jugement attaqué, de dire Madame [P] bien fondée à réclamer l'indemnisation du préjudice découlant de son licenciement;

Compte tenu des éléments dont la Cour dispose au regard en particulier de l'ancienneté du salarié au jour de la rupture des relations salariales et du niveau de rémunération atteint par lui, il sera fait droit à la demande en paiement de dommages et intérêts à hauteur d'une somme qui sera fixée à

20 000 €, le jugement étant réformé en conséquence ;

La salariée comptant plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise occupant habituellement plus de dix travailleurs et le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, il y a lieu de condamner d'office la société ADT FRANCE à rembourser le montant, plafonné à six mois de telles indemnités, des prestations de base de l'allocation chômage susceptibles d'avoir été versées à l'intéressée à la suite de son licenciement ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Il sera fait droit à la demande de Madame [P] dans les limites du dispositif;

La société ADT qui succombe sera condamnée aux dépens ce qui prive de fondement sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Déclare l'appel recevable ;

Le dit bien fondé ;

Réformant et statuant à nouveau :

Dit le licenciement querellé dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société ADT FRANCE au paiement d'une somme de 20 000 € nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne d'office la société ADT FRANCE à rembourser à PÔLE EMPLOI le montant, plafonné à six mois de telles indemnités, des prestations de base de l'allocation chômage susceptibles d'avoir été versées à la salariée à la suite de son licenciement ;

Dit qu'une copie certifiée conforme du présent arrêt sera envoyée par les soins du greffe à POLE EMPLOI ;

Condamne la société ADT FRANCE au paiement d'une indemnité de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

La condamne aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 08/07955
Date de la décision : 06/01/2010

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°08/07955 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-01-06;08.07955 ?
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