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24/06/2009 | FRANCE | N°05/06512

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 24 juin 2009, 05/06512


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 05/06512





[B]

C/

[V]







ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION



Jugement du Tribunal paritaire des baux ruraux de Montluçon du 27septembre 2002

RG : 5-96-0007



Arrêt de la Cour d'appel de Riom

du 13 janvier 2004

RG : 02/3074



Arrêt de la Cour de cassation du 27 septembre 2005

RG : 1034 F-D



Arrêt de la Cour d'appel de Lyon du 10 avril 2006

RG : 05/6512











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 24 JUIN 2009







APPELANTE :



[I] [B]

[Adresse 2]

[Localité 1]



représentée par Maître CHASSAIGNE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND



INTIMÉE :



[N] [...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 05/06512

[B]

C/

[V]

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

Jugement du Tribunal paritaire des baux ruraux de Montluçon du 27septembre 2002

RG : 5-96-0007

Arrêt de la Cour d'appel de Riom

du 13 janvier 2004

RG : 02/3074

Arrêt de la Cour de cassation du 27 septembre 2005

RG : 1034 F-D

Arrêt de la Cour d'appel de Lyon du 10 avril 2006

RG : 05/6512

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 24 JUIN 2009

APPELANTE :

[I] [B]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Maître CHASSAIGNE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMÉE :

[N] [V]

[Adresse 8]

[Localité 3]

comparante en personne

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 29 avril 2009

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Louis GAYAT DE WECKER, Président

Dominique DEFRASNE, Conseiller

Hervé GUILBERT, Conseiller

Assistés pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 24 juin 2009, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Louis GAYAT DE WECKER, Président, et par Anita RATION, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

EXPOSE DU LITIGE

Par actes sous seings privés d'août 1984 et de décembre 1985, Monsieur [A] [B] a consenti un bail à métayage sur une propriété agricole sise à '[Localité 5]' et sur un domaine agricole dépendant de la propriété '[Adresse 7]', sur la commune de [Localité 4] (03), le tout au profit de Monsieur [S] [M] et de Madame [N] [J] son épouse.

Monsieur [M] est décédé en 1987 et Madame [N] [J] est devenue par la suite l'épouse de Monsieur [V].

Le 2 mai 1996, Mademoiselle [I] [B] venant aux droits de Monsieur [A] [B] a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Montluçon pour voir prononcer la résiliation du bail à métayage conclu entre les parties ainsi que l'organisation d'une expertise.

Par jugement du 30 mai 1997, le dit tribunal a jugé que les parties étaient toujours tenues par une relation de bail à métayage et ordonné une expertise confiée à Monsieur [E].

Après dépôt du rapport d'expertise, le tribunal, par jugement du 29 janvier 1999, a débouté Mademoiselle [B] de sa demande en résiliation de bail et ordonné un complément d'expertise pour faire le compte entre les parties.

Ce jugement a été confirmé par la Cour d'appel de Riom le 8 février 2000.

A la suite du dépôt du rapport complémentaire de Monsieur [E], le tribunal paritaire des baux ruraux de Montluçon, par jugement du 29 septembre 2000, a condamné Mademoiselle [B] à effectuer des réparations nécessaires sur le domaine de la 'Torrière' ainsi que sur un bâtiment d'exploitation détruit par un incendie sur le domaine de '[Adresse 7]', débouté Madame [V] de ses prétentions au titre de l'exception d'inexécution, ordonné une nouvelle expertise, confiée à Monsieur [Y], avec mission de faire les comptes de métayage.

Ce jugement a été également confirmé par la Cour d'appel de Riom dans son arrêt du 26 juin 2001.

Le 10 septembre 2001, Madame [V] a introduit une nouvelle procédure devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Montluçon pour obtenir la conversion du bail à métayage en bail à ferme à compter du 11 novembre 2000.

Entre-temps Monsieur [Y] avait déposé son rapport.

Par jugement du 27 septembre 2002, le tribunal paritaire des baux ruraux a :

- ordonné la jonction des procédures en cours ;

- condamné Madame [V] à payer à Mademoiselle [B] la somme de 55 299,59 euros en deniers ou quittances au titre de la régularisation des comptes de métayage ;

- rejeté la demande en complément d'expertise formée par Mademoiselle [I] [B] ;

- constaté que la mésintelligence entre les parties était de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds au sens de l'article L411-53 et fait droit à la demande de Mademoiselle [B] en résiliation de bail et expulsion ;

- rejeté la demande de conversion en bail à ferme sollicitée par Madame [V] ;

- rejeté les demandes en paiement de dommages et intérêts formées tant par les deux parties ;

- condamné Madame [V] aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur appel de Madame [V], la Cour de Riom, réformant le jugement par arrêt du 13 janvier 2004 a :

- déclaré recevable et fondée la fin de non recevoir tirée de l'autorité de chose jugée sur la résiliation du bail et l'expulsion de Madame [V] ;

- dit n'y avoir lieu à prononcer la résiliation du bail à métayage ;

- prononcé la conversion du bail à métayage en bail à ferme à compter du 11 novembre 2000 ;

- ordonné une expertise confiée à Monsieur [Y] avec mission d'établir un compte de sortie du métayage et d'élaborer un projet de bail à ferme ;

- confirmé le jugement en ses autres dispositions ;

- rejeté la demande de complément d'expertise formée par la bailleresse ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- réservé les dépens.

Mademoiselle [B] ayant formé un pourvoi, la Cour de cassation par arrêt du 27 septembre 2005 a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 13 janvier 2004 et renvoyé les parties devant la Cour d'appel de Lyon.

Devant la Cour de renvoi, les parties ont repris la plupart de leurs prétentions et ont demandé toutes les deux l'organisation d'une expertise pour effectuer les comptes de sorties du métayage.

Par arrêt du 10 avril 2006, la Cour d'appel de Lyon, sous le visa de l'arrêt de la Cour de cassation, a :

- confirmé le jugement du 27 septembre 2002 du tribunal paritaire des baux ruraux de Montluçon en ce qu'il avait :

* ordonné la jonction des procédures,

* prononcé la résiliation du bail à colonat partiaire établi entre les parties, en ajoutant que cette résiliation portait sur les baux d'août 1984 et décembre 1985, concernant l'ensemble du domaine de '[Adresse 6]' et l'ensemble du domaine de '[Adresse 7]',

* rejeté la demande de conversion du bail à ferme sollicitée par Madame [V] ainsi que la demande d'élaboration d'un bail à ferme,

* ordonné l'expulsion de Madame [V] et de tout occupant de son chef au besoin avec le recours de la force publique,

* débouté Madame [V] de sa demande en dommages et intérêts,

* condamné Madame [V] à payer à Mademoiselle [B] la somme de

55 299,59 euros en deniers ou quittances ;

- dit que cette somme était allouée à titre de provision à valoir sur le solde des comptes des années 1993 à 2000 et constaté que Mademoiselle [B] déclarait que compte tenu de différentes saisies et des différents paiements, le solde provisoire se trouvait ramené à la somme de 17 092,12 euros, sauf à parfaire, somme que devrait acquitter Madame [V] à titre de solde provisoire de la provision ;

- réformé partiellement le jugement en ce qui concernait le rejet de la demande de nouvelle expertise et statuant à nouveau de ce chef :

- ordonné une nouvelle expertise et désigné pour l'effectuer Monsieur [O] [Y], expert agricole et foncier avec pour mission :

1) de procéder à une vérification approfondie des comptes de métayage des années 1993 à 1998, en se faisant communiquer l'intégralité des documents justificatifs de base (factures d'achat et de vente, documents d'attributions et de paiement d'aides diverses...) détenus par le CENTRE BOURBONNAIS D'ECONOMIE RURALE, ou à fournir par Madame [V], au besoin, établir les dits comptes à partir des dits documents,donner, pour chaque année, les résultats de l'exploitation et les sommes devant revenir à chacune des parties

2) de procéder à une vérification, et, si besoin est, à l'établissement des comptes de métayage pour l'année 2001, et pour l'année 2002 jusqu'à la date d'effet de résiliation (27 septembre 2002),

de donner pour chaque année, les résultats de l'exploitation et les sommes devant revenir à chacune des parties

3) de rechercher tous éléments permettant de fixer le montant de l'indemnité d'occupation, pour la période comprise entre le 27 septembre 2002 et la date à laquelle Madame [V] aura effectivement libéré et rendu les deux domaines ;

4) de rechercher et vérifier l'ensemble de règlements effectués par Madame [V],

ou obtenus par saisies par Mademoiselle [B], au titre des exercices 1993 et suivants, jusqu'à complète libération des lieux et en donner la liste avec le détail des sommes et des dates de règlement

5) de rechercher les éléments et d'établir le compte final de sortie, tenant compte éventuellement

- de l'accroissement du cheptel

- des travaux éventuellement payés par Madame [V] pour ceux incombant et revenant à la propriétaire

- de tous autres éléments qui pourraient être soumis par les parties.'

- débouté Madame [V] de toutes ses demandes ;

- condamné Madame [V] à payer à Mademoiselle [B] la somme de 5 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance, celle devant la Cour de Riom et celle devant la Cour de Lyon jusqu'au dernier arrêt ;

- condamné Madame [V] aux dépens de première instance et d'appel y compris l'intégralité des frais d'expertise de Messieurs [E] et [X] d'une part, et de Monsieur [Y] d'autre part.

Madame [V] a formé contre cet arrêt un pourvoi qui a été rejeté par la Cour de cassation dans sa décision du 7 mars 2007.

L'expert [Y] a déposé son rapport le 6 juillet 2008.

Par conclusions régulièrement communiquées à l'appui de ses observations orales à l'audience du 29 avril 2009, Madame [V] demande aujourd'hui à la Cour :

- de fixer sa créance à l'égard de Mademoiselle [B] à la somme de 292 594,36 euros ;

- de fixer la créance de Mademoiselle [B] à son égard à la somme de 110 459,65 euros ;

- de dire en conséquence qu'après compensation Mademoiselle [B] devra lui verser la somme de 182 134,71 euros ;

- subsidiairement, de dire que Mademoiselle [B] après compensation devra lui verser la somme de 53 616,71 euros ;

- de débouter Mademoiselle [B] de ses demandes complémentaires ;

- de condamner Mademoiselle [B] aux dépens ainsi qu'au paiement de 5 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [V] qui conteste les conclusions du dernier rapport de Monsieur [Y] fait valoir que l'indemnité d'occupation due par elle à Mademoiselle [B] ne saurait excéder 8 000,00 euros par an compte tenu des travaux qu'elle a effectués sur la propriété et de la superficie de celle-ci.

Elle affirme avoir apporté en cours de bail un cheptel financé par ses soins et avoir remboursé à ce titre à Mademoiselle [B] la somme de 7 088,28 euros qui doit à tout le moins être déduite.

Elle prétend qu'ayant fait l'acquisition de matériels financés au moyen d'un emprunt , elle doit être indemnisée de ce chef à hauteur de 180 000,00 euros ou à tout le moins à hauteur du montant de l'emprunt de 51 482,00 euros.

Elle excipe de l'existence d'un excédent de fourrages lors de la sortie qu'elle évalue à 2 320,00 euros ainsi que des travaux réalisés par elle dans la maison, dans la stabulation ainsi que de la construction d'un hangar, la réparation d'un grenier, de travaux de drainage et d'améliorations culturales.

Elle réclame pour ces divers travaux une indemnisation à hauteur de 110 274,36 euros.

Par conclusions régulièrement communiquées à l'appui de ses observations orales à la barre, le 23 avril 2009, Mademoiselle [B] demande de son côté à la Cour :

- d'homologuer partiellement le rapport de Monsieur [Y], l'expert ayant omis de compter un intérêt à la valeur du cheptel de fer, et n'ayant pas eu connaissance du coût de nettoyage de la propriété après l'état des lieux de sortie, ni de tous les bénéfices tirés par Madame [V] au détriment de la bailleresse, notamment les indemnités d'assurance ;

- en conséquence, de condamner Madame [V] à lui payer la somme de 162 873,96 euros, déduction faite de ses versements ;

- de condamner également Madame [V] à lui payer la somme de 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et tracasserie judiciaire ainsi que 10 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de rejeter les demandes de Madame [V] ;

- de condamner celle-ci aux entiers dépens y compris le coût du rapport d'expertise de Monsieur [Y] et le coût du procès-verbal de constat de Maître [R], huissier de justice en date du 3 juin 2008.

Mademoiselle [B] sollicite le remboursement des intérêts d'un emprunt à hauteur de 8 991,94 euros pour des travaux qu'elle a dû effectuer sur la maison d'habitation en exécution du jugement du tribunal de grande instance de Montluçon du 8 octobre 2003 car elle n'avait pas l'argent disponible qui aurait dû lui provenir des sommes dues par Madame [V].

Elle sollicite également au titre des indemnités d'assurance une somme de 9 846,04 euros correspondant à sa quote-part sur les remboursements de sinistres perçus par Madame [V].

Elle demande le remboursement des frais de nettoyage des bâtiments de la cour et du grenier à la suite du départ de Madame [V].

Mademoiselle [B] réclame par ailleurs au titre du compte final de sortie le paiement d'intérêts sur la valeur du cheptel de fer, pendant six années à compter du 27 septembre 2002 au motif que Madame [V] pendant cette longue période a conservé abusivement les animaux mis à sa disposition au début du bail ;

MOTIFS DE LA COUR

1 - Sur les comptes de métayage de 1993 à 2002

Attendu que Monsieur [Y] conformément à sa mission, a procédé à des vérifications aussi approfondies que possible en se servant des éléments dont il disposait en se référant principalement aux documents comptables établis par le CENTRE BOURBONNAIS D'ECONOMIE RURALE (CBER) et pour les années 1999 et 2000, à son premier rapport du 17 novembre 2001, non critiqué sur ce point par l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon du 10 avril 2006 ;

Qu'après application de la règle du tiercement, il a retenu pour la quote-part revenant à Mademoiselle [B] la somme totale de 104 930,00 euros, laquelle n'est pas contestée par les parties devant la Cour ;

2 - Sur l'indemnité d'occupation

Attendu que dans son rapport l'expert explique avoir pris en considération le revenu dégagé par les trois dernières années de métayage, le montant du fermage évalué dans son deuxième rapport de mai 2004 et la rentabilité locative établie après évaluation de la propriété soit pour une valeur vénale de

375 000,00 euros et un taux de rentabilité d'un placement financier de 3 %, une rentabilité annuelle de 11 250,00 euros ;

Que toutefois, l'expert a retenu une superficie de terres et prés de 87 hectares alors qu'il ressort des baux initiaux et des relevés parcellaires MSA produits par les deux parties que cette superficie n'excède pas 75 hectares ;

Que la prise en compte des travaux réalisés sur la propriété est en revanche justifiée ;

Qu'il y a lieu de fixer l'indemnité d'occupation due par Madame [V] à la somme annuelle de 10 425,00 euros, soit au total depuis le 27 septembre 2002, date du jugement ordonnant son expulsion jusqu'au 3 juin 2008, date de reprise des lieux par Mademoiselle [B], la somme totale de 59 253 euros ;

3 - Sur le compte final de sortie

- Sur le cheptel bovin

Attendu que Monsieur [Y] a évalué le cheptel bovin à l'entrée à 62 113,00 euros et au 27 septembre 2002 à 60 793,00 euros, d'où un décroît de cheptel de 1 320,00 euros qu'il a répartis entre les parties en faisant application de la règle du tiercement ;

Que Madame [V] qui soutient avoir remboursé à la partie adverse des sommes au titre du cheptel et acquis elle-même du cheptel supplémentaire n'en rapporte nullement la preuve ;

Que Mademoiselle [B], de son côté, réclame un intérêt annuel de 3 % sur la somme de 61 673,00 euros qui lui revient au titre du cheptel, pour la période du 27 septembre 2002 au 27 septembre 2008, motif pris que Madame [V] n'a pas restitué les animaux comme elle en avait l'obligation en septembre 2002 pour les avoir détournés ;

Qu'il y a lieu de constater que la créance de la bailleresse au titre du cheptel bovin n'étant pas liquide au moment de la décision d'expulsion, celle-ci n'était pas susceptible de produire intérêts ;

Que si Mademoiselle [B] a été contrainte de saisir le juge des référés à l'effet d'obtenir sous astreinte la restitution des animaux , le comportement reproché à Madame [V] ne pourrait cependant ouvrir droit qu'à l'allocation de dommages et intérêts ;

Que la demande de Mademoiselle [B] telle qu'elle est formulée ne peut donc prospérer;

Que le cheptel n'ayant pas été restitué, il revient à la bailleresse la somme de 61673,00 euros ;

- Sur le cheptel mort

Attendu que l'expert qui dans son deuxième rapport avait évalué à 1 727,00 euros la somme à rembourser par Madame [V] a repris cette évaluation dans son dernier rapport ;

Que Madame [V] , exposant avoir fait l'acquisition de matériels financés au moyen d'un emprunt de 51 482,00 euros, en déduit que son indemnisation, calculée sur la base d'une somme annuelle de 10 000,00 euros, ne saurait être inférieure à 180 000,00 euros ;

Que cette prétention non étayée par des documents probants sera rejetée ;

- Sur les fourrages

Attendu que l'expert relève la présence en début de bail de 58 tonnes de foin et de 20 tonnes de paille et au jour de sa visite sur l'exploitation, de 45 tonnes de foin, 60 tonnes d'enrubannage et 2 tonnes de paille ;

Qu'il considère que la paille manquante est compensée par l'enrubannage, à valeur aléatoire et que rien n'est dû de part et d'autre ;

Que Madame [V] argue d'un excédent global de 29 tonnes , ajoutant qu'au moment de la sortie, il y avait 15 hectares de céréales en terre et autant de paille à récolter ;

Que l'appréciation de l'expert apparaît réaliste, s'agissant de la valeur du fourrage en cause ;

- Sur la maison d'habitation et les bâtiments d'exploitation

Monsieur [Y] a évalué dans la maison d'habitation les travaux réalisés par Madame [V] et normalement à la charge du bailleur (carrelage dans la salle de bain et alimentation en eau, pose baignoire, carrelage dans la pièce principale, électricité dans la pièce principale et deux chambres, pose de fenêtre dans une chambre) à leur valeur résiduelle savoir 980,00 euros ;

Que Madame [V] conteste cette estimation sans toutefois apporter d'éléments probants de nature à justifier la contestation élevée ;

Que le procès-verbal d'état des lieux de sortie, dressé le 3 juin 2008, ne met pas en évidence une valeur ajoutée importante ;

Que l'expert a fixé à 2 800,00 euros l'indemnisation due à Madame [V] pour les bâtiments d'exploitation en prenant en considération la construction d'un hangar à paille et des travaux de béton dans la stabulation libre ;

Que l'expert précise que le hangar a été construit au moyen de matériaux de récupération, qu'il est atteint de corrosion, de sorte que sa valeur est minime ;

Que la somme réclamée à ce titre par Madame [V] ne peut être retenue ;

Que s'agissant des travaux effectués dans la stabulation, Madame [V] fait état de dépenses engagées, lesquelles ne doivent pas être confondues avec la valeur ajoutée ;

Que Madame [V] ayant produit devant l'expert, puis devant la Cour, un grand nombre de factures de travaux ou de fournitures, il y a lieu de constater que ces factures, pour la plupart, soit ne permettent pas de localiser les travaux, soit correspondent à des travaux de nature locative à la charge du métayer ;

Que l'estimation de l'expert apparaît satisfactoire ;

- Sur les terres et les prés

Attendu que Madame [V] excipe de travaux d'entretien réalisés dans les terres et prés ainsi que de travaux de drainage ;

Que l'expert a justement relevé que ces travaux s'inscrivent dans le cadre de l'exploitation en métayage avec répartition des charges entre bailleur et métayer et non dans le compte final de sortie ;

Que l'expert expose avoir visité les parcelles mises en culture la dernière année par Madame [V] et constaté à cette occasion leur mauvais état cultural, de nature à compromettre le potentiel de rendement des parcelles dans l'avenir ;

Que dans ce contexte, la mise en céréales de certaines parcelles dont se prévaut Madame [V] doit être relativisée ;

Que sa réclamation tendant à la fixation d'une indemnité totale de 55 000,00 euros sera rejetée;

4 - Sur les intérêts d'emprunt

Attendu que Mademoiselle [B] sollicite le remboursement des intérêts d'un emprunt qu'elle a contracté afin d'effectuer sur la propriété des travaux qui lui incombaient en sa qualité de bailleresse et qui avaient été mis à sa charge par décision de justice ;

Que s'il est exact que l'exécution par Madame [V] de ses obligations lui aurait apporté des liquidités, rien ne permet d'affirmer toutefois que ces dernières auraient été suffisantes pour lui permettre de financer les travaux en cause ;

Que par ailleurs, il a été jugé que Mademoiselle [B] n'exécutait pas ses propres obligations de sorte qu'elle doit assumer sa part de responsabilité dans la situation évoquée ;

Qu'en conséquence, sa demande doit être rejetée ;

5 - Sur les indemnités d'assurance

Attendu que Mademoiselle [B] réclame une somme de 9 846,04 euros correspondant au tiers des indemnités d'assurance perçues par Madame [V] au cours des années 1990 à 1996 ;

Qu'elle produit une liste de sinistres établie par la CRAMA CENTRE SUD ALLIER et par GROUPAMA ASSURANCES ;

Que Madame [V], de son côté, soutient que Mademoiselle [B] a perçu les indemnités devant lui revenir en sa qualité de bailleresse et qu'il s'agit pour certaines sommes, d'indemnités journalières ;

Qu'il ne résulte pas du listing produit que Mademoiselle [B] soit titulaire d'un droit sur les sommes versées à Madame [V] ;

Que par ailleurs, aucun élément ne permet d'assimiler les indemnités en cause à des produits du métayage soumis à la règle du tiercement ;

Que ce chef de demande doit en conséquence être rejeté ;

6 - Sur les frais de nettoyage

Attendu que le procès-verbal de constat dressé le 3 juin 2008 par Maître [R], huissier de justice, après la reprise des lieux par Mademoiselle [B], révèle que les écuries des domaines de '[Adresse 6]' et de '[Adresse 7]' n'ont pas été nettoyées , que le grenier de '[Adresse 6]' est encombré d'objets divers, que les abords des bâtiments d'exploitation sont envahis par la végétation, que le hangar de '[Adresse 7]' n'a pas non plus été nettoyé ;

Que Mademoiselle [B] aujourd'hui dans la situation de devoir nettoyer les lieux alors qu'il appartenait au métayer sortant de le faire, peut valablement réclamer une indemnisation de ce chef;

Qu'au vu du devis de la société ONET versé aux débats et daté du 12 juin 2008, il convient de lui allouer la somme de 3 430,00 euros ;

7 - Sur les règlements effectués par Madame [V]

Attendu qu'il résulte des calculs détaillés de l'expert et non contestés devant la Cour que Madame [V] a réglé à la bailleresse la somme totale de 99 569,80 euros ;

Attendu que compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le compte général entre les parties s'établit comme suit :

a) sommes dues par Madame [V] à Mademoiselle [B] :

- part de résultats sur compte de métayage de 1993 à 2002 : 104 930,00 euros

- indemnité d'occupation au 3 juin 2008 : 59 253,00 euros

- compte final de sortie après compensation des créances respectives des parties : 59 620,00 euros

- frais de nettoyage : 3 430,00 euros

TOTAL : 227 233, 00 euros

b) somme versée par Madame [V] à Mademoiselle [B] :

- 99 569,80 euros

c) solde revenant à Mademoiselle [B] :

127 663, 20 euros ;

8 - Sur la demande en paiement de dommages et intérêts formée par Mademoiselle [B]

Attendu que Mademoiselle [B] motive cette demande par l'existence d'un préjudice moral résultant des tracasseries de la part de Madame [V] qui l'ont contrainte à engager une procédure usante psychologiquement et coûteuse économiquement ;

Qu'il y a lieu de constater que la longueur de la procédure et les 'inconvénients' dont se plaint Mademoiselle [B] ont pour origine l'usage par chacune des parties des voies de droit mises à leur disposition et aussi les divergences des décisions rendues ;

Que la Cour ne relève pas d'abus imputable à Madame [V] dans l'usage de ses voies de droit ;

Que par ailleurs, Mademoiselle [B] n'apporte pas d'éléments de nature à caractériser un préjudice distinct de ceux réparés par le présent arrêt ;

Qu'en conséquence, sa demande en paiement de dommages et intérêts complémentaires ne peut prospérer ;

Qu'en revanche, Mademoiselle [B] est en droit de réclamer le coût du procès-verbal de constat de Maître [R] en date du 3 juin 2003, constat rendu nécessaire du fait de la carence de Madame [V] ;

9 - Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Attendu que Madame [V] supportera les dépens y compris les frais de la dernière expertise de Monsieur [Y] ;

Qu'il convient d'allouer à Mademoiselle [B] au titre des frais irrépétibles exposés depuis l'arrêt du 10 avril 2006, la somme de 3 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Vu l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon, chambre sociale du 10 avril 2006,

Vu le rapport déposé par Monsieur [Y] le 6 juillet 2008,

Condamne Madame [N] [V] à payer à Mademoiselle [I] [B] la somme de 127 663,20 euros en deniers ou quittances pour les motifs précédemment exposés ;

Condamne Madame [N] [V] à rembourser à Mademoiselle [I] [B] le coût du procès-verbal de constat de Maître [R] en date du 3 juin 2008 ;

Déboute les parties du surplus ;

Condamne Madame [N] [V] à payer à Mademoiselle [I] [B] la somme de 3 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Madame [N] [V] aux dépens y compris les frais de la dernière expertise de Monsieur [Y].

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 05/06512
Date de la décision : 24/06/2009

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°05/06512 : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-06-24;05.06512 ?
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