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02/04/2009 | FRANCE | N°08/06225

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3e chambre civile, 02 avril 2009, 08/06225


COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile SECTION A

ARRÊT DU 02 Avril 2009
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 25 juillet 2008 - No rôle : 2007j2277

N° RG : 08 / 06225
Nature du recours : Appel
APPELANT :
Maître Patrick-Paul X..., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de Mme Jeanine Y......

représenté par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assisté de la SELARL SEIGLE PATRICIA AVOCAT ET ASSOCIE, avocats au barreau de LYON
INTIMEE :
SAS CAFEIN RHONE ALPES, venant aux droi

ts de la société TAILLEFERT FABRE, elle-même aux droits de la société TAILLEFERT BOISSON 870 avenue de...

COUR D'APPEL DE LYON Troisième Chambre Civile SECTION A

ARRÊT DU 02 Avril 2009
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 25 juillet 2008 - No rôle : 2007j2277

N° RG : 08 / 06225
Nature du recours : Appel
APPELANT :
Maître Patrick-Paul X..., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de Mme Jeanine Y......

représenté par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assisté de la SELARL SEIGLE PATRICIA AVOCAT ET ASSOCIE, avocats au barreau de LYON
INTIMEE :
SAS CAFEIN RHONE ALPES, venant aux droits de la société TAILLEFERT FABRE, elle-même aux droits de la société TAILLEFERT BOISSON 870 avenue des Frères-Lumière 69250 NEUVILLE-SUR-SAONE

représentée par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à la Cour
assistée de la SCP PIOT-MOUNY JEANTET LOYE et associés, avocats au barreau de LYON
Instruction clôturée le 03 Février 2009
Audience publique du 04 Mars 2009
LA TROISIÈME CHAMBRE SECTION A DE LA COUR D'APPEL DE LYON,
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Monsieur Bernard CHAUVET, Président Monsieur Bernard SANTELLI, Conseiller Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Conseiller

DEBATS : à l'audience publique du 04 Mars 2009 sur le rapport de Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Conseiller

GREFFIER : la Cour était assistée lors des débats de Mademoiselle Patricia LE FLOCH, adjoint administratif faisant fonction de greffier
ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 02 Avril 2009, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile ;
Signé par Monsieur Bernard CHAUVET, Président, et par Mademoiselle Patricia LE FLOCH, adjoint administratif faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LES FAITS ET LES DÉCISIONS ANTÉRIEURES
Jeanine Y..., qui avait souscrit un emprunt de 500 000 Francs afin d'acquérir le 21 décembre 1990 un fonds de commerce de café-restaurant situé à LYON 7e, a conclu un contrat d'approvisionnement avec la SA TAILLEFERT BOISSONS qui, en contrepartie, s'est engagée en qualité de caution simple auprès de la banque pour garantir, pendant une durée de 5 ans, le remboursement de 25 % de la somme due. Jeanine Y... a consenti au prêteur un nantissement de premier rang sur le fonds de commerce et à la société TAILLEFERT BOISSONS un nantissement de second rang. La société TAILLEFERT a fait inscrire ce nantissement le 7 janvier 1991.
Par jugement en date du 23 mars 1998, le Tribunal de Commerce de LYON a ouvert la liquidation judiciaire de Jeanine Y... et désigné Maître X... en qualité de mandataire liquidateur.
Le 12 avril 1998, la société TAILLEFERT BOISSONS (qui avait déclaré une créance privilégiée de 15 161,42 euros et chirographaire de 13 753,23 euros) a proposé d'acquérir le fonds pour une somme de 97. 500 Francs.
Par ordonnance du 4 août 1998, le juge-commissaire a autorisé Maître X... à céder le fonds de commerce aux époux B... au prix de 110 000 Francs. Cependant cette vente n'a pu se réaliser.
Par une seconde ordonnance en date du 5 novembre 1998, le juge-commissaire a autorisé Maître X... à céder le fonds de commerce à Azziz C... au prix de 80 000 Francs.
Le 14 janvier 1998, la société TAILLEFERT BOISSONS, à laquelle l'ordonnance du 5 novembre 1998 n'avait pas été régulièrement notifiée et qui invoquait une proposition d'acquisition téléphonique du 23 octobre 1998 au prix de 130 000 Francs, a annoncé qu'elle mettrait en oeuvre son droit de surenchère.
L'acte de cession du fonds a été passé les 11 et 19 janvier 1999 entre Maître X... ès qualités et Azziz C... qui a payé le prix et est entré en possession du fonds.
Le 12 février 1999, Azziz C... a aussi conclu un nouveau bail.
Par exploit du 15 février 1999, la société TAILLEFERT BOISONS a délivré à Maître X... ès qualités et à Azziz C... une réquisition de surenchère du dixième en application de l'article 23 de la loi du 17 mars 1909, en les faisant citer devant le Tribunal de Commerce de LYON pour l'audience du 15 mars 1999 pour voir valider la surenchère et ordonner la mise à prix du fonds pour le prix de 85 800 Francs.
Par jugement en date du 20 Mars 2000, le Tribunal de Commerce de LYON, qui a considéré que la société TAILLEFERT BOISSONS ne justifiait pas d'un intérêt légitime, a annulé cette surenchère. Toutefois, par un arrêt en date du 14 février 2002 la Cour a :
- infirmé ce jugement- adjugé à la société TAILLEFERT BOISSONS le bénéfice de sa réquisition de surenchère du 15 février 1999 et ordonné en conséquence la vente du fonds aux enchères publiques- renvoyé à cette fin devant le Tribunal de Commerce de LYON pour qu'il soit procédé à la vente aux enchères publiques conformément aux dispositions de la loi du 17 mars 1909 codifiée partiellement aux articles L. 141-5 et suivants du Code de Commerce- dit que les impenses, ainsi que les frais et débours exposés par Monsieur C..., devraient être portés dans le cahier des charges de l'adjudication- débouté la société TAILLEFERT BOISSONS de sa demande en dommages et intérêts pour résistance abusive- condamné in solidum Maître X... ès qualités et Monsieur C... à payer à la société TAILLEFERT BOISSONS une indemnité de procédure de 1 067 euros- dit que les dépens seraient tirés en frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire.

Par jugement en date du 17 février 2003, rectifié par une seconde décision rendue le 23 juin 2003, le Tribunal de Commerce de LYON a notamment :- ordonné la mise aux enchères publiques du fonds devant notaire sur la mise à prix de 13 080,13 euros- commis le Président de la Chambre des notaires ou son délégataire pour y procéder- nommé Maître D..." en qualité de séquestre des fonds si le surenchéri n'acceptait pas ce mandat "- désigné, aux frais avancés de la société TAILLEFERT BOISSONS, Monsieur E... en qualité d'expert avec mission de chiffrer les impenses, ainsi que les frais et débours exposés par Monsieur C... .

Le 24 juillet 2003, Monsieur C...a fait savoir à Maître D... qu'il n'acceptait pas d'être séquestre du fonds de commerce et lui a demandé de prendre les mesures nécessaires. Le 5 mars 2004, il a écrit à Maître X... qu'en raison de ce qu'il était dépossédé du fonds il estimait que les loyers ne lui incombaient plus et qu'il convenait de prendre toute mesure pour éviter la résiliation du bail.
Saisi par exploit délivré le 13 avril 2004 à la requête du bailleur F... qui invoquait le bénéfice de la clause résolutoire du bail consenti le 12 février 1999 en raison du défaut de paiement des loyers malgré un commandement délivré le 21 août 2003, le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de LYON qui a considéré que la désignation d'un administrateur ne privait pas l'acquéreur surenchéri de sa qualité de propriétaire du fonds qu'il conservait jusqu'à l'adjudication sur surenchère et que l'acquéreur restait personnellement tenu aux obligations souscrites envers les tiers pour l'exploitation du fonds, par ordonnance en date du 22 novembre 2004 rendue en présence de Maître X... ès qualités de liquidateur judiciaire de Madame Y..., de Maître D... ès qualités de séquestre du fonds de commerce, et de la société TAILLEFERT BOISSONS surenchérisseur, a :- constaté la résiliation du bail commercial consenti le 19 février 1999 à Azziz C... et ordonné son expulsion- condamné Azziz C... à payer à Georges F... une provision de 5 410,83 euros sur les loyers échus et une indemnité d'occupation à compter du 1er janvier 2005.

L'expert E... a déposé le 18 novembre 2005 un rapport aux termes duquel il a chiffré à 339 euros les impenses, frais et débours exposés par Monsieur C... .
Le délégataire du Président de la Chambre des notaires a estimé le 19 janvier 2006 que le jugement rendu le 17 février 2003 ne pouvait être exécuté en raison de la reprise des lieux par le bailleur et de l'absence de matériel et de marchandises.
LE JUGEMENT ENTREPRIS, LA PROCÉDURE, LES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par exploit du 6 août 2007, Maître X..., ès qualités de mandataire liquidateur de Jeanine Y..., a fait citer devant le Tribunal de Commerce de LYON la SAS CAFEIN RHÔNE ALPES, venue aux droits de la société TAILLEFERT BOISSONS, à laquelle il reprochait de n'avoir pas payé les loyers, ce qui avait entraîné la résiliation du bail commercial,- à titre principal pour la voir condamner à lui payer la somme de 13 080,12 euros représentant la valeur du fonds, outre intérêts légaux avec capitalisation- à titre subsidiaire pour la voir garantir à la liquidation judiciaire le versement du prix minimum fixé par le Tribunal. La SAS CAFEIN s'est opposée à la demande en sollicitant reconventionnellement l'indemnisation d'un préjudice de 90 000 euros occasionné par la faute du mandataire liquidateur.

Par jugement en date du 25 juillet 2008, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal a :- dit que la SAS CAFEIN n'avait pas commis de faute et que Maître X... ne justifiait pas d'un préjudice- débouté Maître X... de toutes ses demandes- condamné Maître X... ès qualités à payer à la SAS CAFEIN la somme de 65 000 euros à titre de dommages et intérêts et une indemnité de 5 000 euros et à supporter les dépens.

Par déclaration remise au greffe le 22 août 2008, Maître X..., ès qualités de mandataire liquidateur de Jeanine Y..., a interjeté appel de ce jugement dans toutes ses dispositions.
Par conclusions déposées le 5 septembre 2008 et signifiées le 25 novembre 2008, Maître X..., ès qualités, demande à la Cour au visa des articles L. 143-14 du Code de Commerce et 1153-1, 1154 et 1382 du Code Civil :- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris- de condamner la SAS CAFEIN à lui payer la somme de 13 080,12 euros représentant la valeur du fonds, outre intérêts légaux à compter de l'assignation, avec capitalisation et une indemnité de procédure de 5 000 euros- de débouter la SAS CAFEIN de toutes ses demandes.

A titre principal, Maître X... soutient que la société TAILLEFERT, créancier surenchérisseur, était tenue de fournir les sommes nécessaires à l'exploitation du fonds de commerce nanti.
Il se prévaut d'un jugement rendu par le Tribunal de Commerce de NANTES le 17 février 1912 et expose que la procédure de surenchère se fait aux frais, risques et périls du surenchérisseur qui à défaut d'enchères sera déclaré adjudicataire.
Il ajoute que l'ordonnance de référé du 22 novembre 2004 n'a pas l'autorité de la chose jugée au principal.
Il fait valoir que la société TAILLEFERT a commis dans le cadre de l'exercice de la procédure de surenchère une faute délictuelle, alors qu'en raison de son abstention à fournir les fonds nécessaires à l'exploitation, le bail a été résilié, ce qui a entraîné la disparition du fonds de commerce dépendant de la procédure collective.
Maître X... convient avoir perçu d'Azziz C... le prix de cession de 80 000 Francs, soit 12 195,12 euros, mais souligne qu'en raison de la surenchère du créancier nanti, Azziz C... dispose d'une créance de restitution du prix de ce montant qui vient augmenter le passif de la liquidation judiciaire.
Il estime que la collectivité des créanciers et Jeanine Y... subissent un préjudice du montant de la mise à prix.
Subsidiairement, Maître X... soutient que si la Cour devait considérer que le créancier surenchérisseur n'a pas commis de faute, elle devrait retenir qu'il incombe à la SAS CAFEIN en vertu des dispositions de l'article L. 143-14 du Code de Commerce de supporter les risques de la procédure de surenchère et de garantir à la liquidation judiciaire le prix minimum de 13 080,13 euros.
Il ajoute que seule l'adjudication sur surenchère entraîne la résolution de la cession du fonds initialement intervenue et qu'en l'état il a perdu la propriété du fonds et il ne peut lui être reproché de n'avoir pas satisfait à l'obligation de délivrance du fonds puisque le surenchéri C... en a conservé la propriété faute d'adjudication sur surenchère.
Il conteste avoir dû faire l'avance des loyers alors qu'il n'était plus propriétaire du fonds et ne disposait pas de fonds.
Maître X... s'oppose à la demande reconventionnelle de la SAS CAFEIN et soutient qu'il n'a pas commis de faute ni à l'occasion de la vente du fonds, ni dans le cadre de la procédure de surenchère.
Il soutient qu'il n'avait pas à adresser mise en demeure de payer les loyers ni à Azziz C... cessionnaire, ni à Maître D... séquestre. Il conteste la qualité d'acquéreur de la SAS CAFEIN, faute d'adjudication sur surenchère, et tout lien de causalité entre l'absence de mise en demeure et la résiliation du bail à l'initiative du bailleur.

Il ajoute qu'il ne saurait être condamné à payer des dommages et intérêts au titre de frais engagés depuis la date de la surenchère alors que la Cour le 14 février 2002 puis le Tribunal le 17 février 2003 ont statué sur les demandes formées au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Il conteste enfin devoir supporter des dommages et intérêts au titre de la perte de marge brute susceptible d'être réalisée par le créancier surenchérisseur sur 8 ans.
Par conclusions signifiées le 23 décembre 2008, la SAS CAFEIN demande à la Cour au visa des articles L. 143-14 et suivants du Code de Commerce et 1382 du Code Civil :- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Maître X... ès qualités de toutes ses demandes et dit qu'il avait commis des fautes à son égard- d'infirmer sur le quantum le jugement entrepris et de condamner Maître X... ès qualités à lui payer la somme de 90 000 euros à titre de dommages et intérêts et une indemnité de procédure de 5 000 euros.

D'abord la SAS CAFEIN soutient qu'après la réquisition du surenchère l'acquéreur surenchéri devient administrateur séquestre du fonds qu'il administre pour le compte du vendeur ; que si le fonds a commerce a péri après la notification de la surenchère, les risques incombent au vendeur, alors que le créancier surenchérisseur n'est propriétaire que lorsqu'il est déclaré adjudicataire.
Elle ajoute qu'aucun texte n'impose au surenchérisseur de payer les loyers ; qu'en raison de la crainte de l'absence de diligences du propriétaire du fonds et de l'acquéreur évincé, la loi a prévu la désignation d'un administrateur, en l'occurrence Maître D..., qui doit assurer pour le compte de qui il appartiendra la conservation du fonds et en assurer l'administration jusqu'à la vente.
La SAS CAFEIN conteste avoir dû payer le montant des loyers et se prévaut de l'ordonnance de référé du 22 novembre 2004, dont Maître X... n'a pas interjeté appel, et qui a jugé que seule l'adjudication sur surenchère emportait résolution de la vente initiale et transfert de propriété au surenchérisseur. Elle en conclut qu'elle n'a pas commis de faute.
Elle ajoute que Maître X..., qui a perçu le prix de cession versé par Azziz C... qu'il n'indique pas avoir dédommagé, ne justifie d'aucun préjudice. Elle observe que Maître X... mentionne une simple créance de restitution de 12 195,12 euros venant augmenter le passif, qui n'est ni certaine ni liquide ni exigible.
Elle estime que l'absence de vente du fonds ne lui est pas imputable et qu'il appartiendrait à Maître X..., s'il justifiait avoir indemnisé Azziz C..., d'exercer un recours contre Maître D..., séquestre du fonds qui a manqué à sa fonction.
Elle souligne que " le gâchis procédural " reproché résulte de ce que Maître X... n'a pas donné suite à ses offres qui étaient pourtant supérieures à celles formulées par Azziz C... et qu'il a élevé une contestation à sa procédure de surenchère.
La SAS CAFEIN soutient aussi que les dispositions de l'article L. 143-14 du Code de Commerce ne prévoient pas qu'après la signification de la surenchère, la perte du fonds incombe au surenchérisseur. Elle expose qu'il appartient au vendeur de veiller à la conservation du fonds dont il est censé être resté propriétaire jusqu'à l'adjudication.
Sur sa demande reconventionnelle, la SAS CAFEIN reproche à Maître X... :- d'avoir cédé le fonds acquis 72 224 euros en 1990 à un prix inférieur à ses propositions- d'avoir contesté sa procédure de surenchère initiée alors que l'ordonnance autorisant la cession ne lui avait pas été notifiée- de s'être abstenu de veiller à la conservation du fonds et au paiement des loyers par Azziz C... qui n'a jamais prétendu ne pouvoir les payer- de s'être abstenu de mettre en demeure le séquestre du fonds Maître D...

Elle précise que les fautes commises par Maître X... lui ont occasionné un préjudice moral de 10 000 euros en ce comprenant les frais de procédure exposés et non indemnisés et un préjudice économique de 80 000 euros correspondant à la perte d'une marge brute annuelle de 10 000 euros sur le fonds pendant 8 ans.

Une ordonnance en date du 3 février 2009 clôture la procédure.
SUR CE LA COUR
Attendu, en cas de vente amiable d'un fonds de commerce donnant lieu à surenchère du dixième par un créancier inscrit, conséquence et attribut du droit de suite, que l'article L. 143-14 du Code de Commerce prévoit que la signification de la surenchère a pour effet de constituer l'acquéreur surenchéri administrateur séquestre s'il est entré en possession du fonds ; que l'acquéreur ne peut plus accomplir que des actes d'administration sur le fonds qu'il doit administrer, c'est-à-dire exploiter pour ne pas le laisser dépérir ; que l'acquéreur surenchéri ou tout créancier peut toutefois solliciter du Tribunal la désignation d'un autre administrateur ; que l'article L. 143-14 ajoute que les formalités de la procédure et de la vente sont accomplies aux frais, risques et périls du créancier surenchérisseur qui à défaut d'enchère est déclaré adjudicataire ;
Que ces dispositions, qui sont différentes de celles prévues par l'article L. 141-19 relatif à la surenchère du sixième, et qui ont pour objet de rendre certaine la vente du fonds en améliorant son prix de 10 % puisqu'à défaut d'enchère le créancier surenchérisseur est obligatoirement déclaré adjudicataire, n'ont pas pour effet si l'adjudication n'est pas intervenue en raison de la perte du fonds avant toute vente aux enchères, de mettre les dépenses nécessaires à l'exploitation du fonds à la charge du créancier inscrit surenchérisseur ; que l'article L. 143-15 prévoit d'ailleurs en cas d'adjudication les frais susceptibles d'être remboursés par l'adjudicataire (et non par le créancier surenchérisseur) à l'acquéreur surenchéri dépossédé ;
Qu'en l'espèce le fonds de commerce a été perdu plus de 4 ans après la notification par la société TAILLEFERT BOISSONS d'une réquisition de surenchère du dixième et alors que, en raison des contestations émises par Maître X... ès qualités et par l'acquéreur surenchéri, la vente aux enchères n'était pas encore organisée ;
Qu'il s'ensuit que Maître X... ne saurait reprocher à la SAS CAFEIN d'avoir occasionné la perte du fonds ; qu'il ne saurait non plus lui faire supporter la perte d'un fonds de commerce dont elle n'a pas été déclarée adjudicataire ;
Qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Maître X... ès qualités de toutes ses demandes ;
Attendu sur la demande reconventionnelle de la SAS CAFEIN, que la SAS TAILLEFERT BOISSONS, créancier nanti qui avait fait élection de domicile, avait proposé le 12 avril 1998 d'acquérir le fonds au prix de 97 500 Francs ; qu'ainsi et même si la preuve n'est pas rapportée que ce créancier aurait téléphoniquement adressé le 23 octobre 1998 au mandataire liquidateur une nouvelle proposition au prix de 130 000 Francs, Maître X... ès qualités a manqué à ses obligations en s'abstenant d'interroger à nouveau ce créancier sur ses intentions avant de soumettre au juge-commissaire la proposition d'achat pour un montant de 80 000 Francs reçue d'Azziz C... ;
Que par cette carence il a interdit à la SAS TAILLEFERT BOISSONS de voir le juge-commissaire statuer sur son offre d'acquisition ; qu'elle a ainsi perdu une chance de se voir céder le fonds, ce qui l'a conduite à mettre en oeuvre une procédure de surenchère du dixième au cours de laquelle le fonds a péri ; Que si l'intimée a déjà formé des demandes d'indemnités de procédure à l'occasion de précédentes instances, elle a subi un préjudice moral justifiant l'allocation d'une somme de 5 000 euros en raison de la durée de la procédure de surenchère vainement engagée, puis de l'introduction de la présente instance par Maître X... ;

Que si les premiers juges ont à tort retenu un préjudice tenant à une perte de marge brute pendant une durée de 6 ans, il convient de retenir une perte de chance justifiant l'allocation de la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Qu'ainsi il y a lieu d'infirmer sur le quantum le jugement entrepris et statuant à nouveau de condamner Maître X... à payer à la SAS CAFEIN la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts et à supporter les dépens ;
PAR CES MOTIFS
Infirme mais seulement sur le quantum des dommages et intérêts alloués à la SA CAFEIN RHONE ALPES le jugement rendu le 25 juillet 2008 par le Tribunal de Commerce de LYON ;
Statuant à nouveau de ce seul chef, condamne Maître X..., ès qualités de mandataire liquidateur de Jeanine Y..., à payer à la SAS CAFEIN RHONE ALPES la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Confirme le jugement entrepris dans toutes ses autres dispositions ;
Vu les dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, dit n'y avoir lieu d'allouer une indemnité de procédure complémentaire à la SAS CAFEIN RHONE ALPES ;
Condamne Maître X... ès qualités aux dépens, recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 08/06225
Date de la décision : 02/04/2009
Type d'affaire : Civile

Analyses

FONDS DE COMMERCE - Vente - LOI DU 17 MARS 1909

Les dispositions de l'article L. 143-14 du Code de Commerce n'ont pas pour effet, si l'adjudication n'est pas intervenue en raison de la perte du fonds avant toute vente aux enchères, de mettre les dépenses nécessaires à l'exploitation du fonds à la charge du créancier inscrit surenchérisseur.


Références :

article L143-14 du Code de Commerce

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 25 juillet 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2009-04-02;08.06225 ?
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