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27/03/2009 | FRANCE | N°08/01562

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0535, 27 mars 2009, 08/01562


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R. G : 08 / 01562

X...
C / SA DIRRA

APPEL D'UNE DÉCISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 14 Février 2008 RG : F 06 / 01261

COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 27 MARS 2009

APPELANT :
Laurent X...... 69390 CHARLY
représenté par Me Christian BAILLOT, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :
Société DIRRA (SA) exerçant sous le nom commercial FMI, prise en la personne de son représentant légal en exercice 44 Chemin de Thahor BP 122 26905 VALENCE CEDEX 9
représentÃ

©e par Me Frédéric RENAUD, avocat au barreau de LYON, en présnec de M. Y...

PARTIES CONVOQUÉES LE : 14 Mai 2008
DÉB...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R. G : 08 / 01562

X...
C / SA DIRRA

APPEL D'UNE DÉCISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 14 Février 2008 RG : F 06 / 01261

COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 27 MARS 2009

APPELANT :
Laurent X...... 69390 CHARLY
représenté par Me Christian BAILLOT, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :
Société DIRRA (SA) exerçant sous le nom commercial FMI, prise en la personne de son représentant légal en exercice 44 Chemin de Thahor BP 122 26905 VALENCE CEDEX 9
représentée par Me Frédéric RENAUD, avocat au barreau de LYON, en présnec de M. Y...

PARTIES CONVOQUÉES LE : 14 Mai 2008
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 15 Décembre 2008
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Didier JOLY, Président Danièle COLLIN-JELENSPERGER, Conseiller Françoise CONTAT, Conseiller
Assistés pendant les débats de Marion RUGGERI-GUIRAUDOU, Greffier.

Délibéré au 09 Février prorogé au 27 Mars 2009

ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 27 Mars 2009, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Didier JOLY, Président, et par Marion RUGGERI-GUIRAUDOU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur Laurent Z... a été engagé par la société DIRRA exerçant sous le nom commercial FMI, une activité d'infogérance micro informatique pour les PME PMI, à compter du 1er février 2005, en qualité d'ingénieur commercial, moyennant le paiement d'une rémunération composée d'une partie fixe de 3 000 euros et une partie variable à son activité commerciale basée sur un plan de commissions joint au contrat. Les objectifs de chiffres d'affaires devaient être fixés au début de chaque trimestre civil par la direction.
Il était précisé que pendant les trois premiers mois, serait versée une avance sur commissions garantie de 1 000 euros brut par mois, avance non remboursable quel que soit le résultat, et une avance sur commissions de 1 000 euros par mois, remboursable qui sera déduite au fur et à mesure des commissions acquises lors de signatures de contrats.
Il était en outre notamment prévu une clause de non-concurrence limitée à une durée d'un an sur le secteur géographiques de la région Rhône Alpes et départements limitrophes.
Par un courrier remis en main propre le 13 décembre 2005, l'employeur a notifié à monsieur Z... un avertissement confirmant un entretien du même jour ; il était reproché au salarié son manque de motivation, de professionnalisme, et même de tout contrat depuis son intégration dans l'entreprise. Il lui était fait grief de n'avoir pas informé le directeur de son activité et même d'avoir triché sur ses horaires pour pouvoir partir rapidement en week end. Il lui était demandé de se " mettre au travail et de retrouver une certaine honnêteté envers l'entreprise qui vous emploie. Vous avez un objectif à atteindre au T4-2005, j'espère que vous avez les affaires nécessaires pour vous permettre de tels écarts de conduite et d'honnêteté. Je ne saurai accepter à l'avenir de tels mensonges. "
Par un courrier en date du 21 décembre 2005, monsieur Z... a réfuté les reproches qui lui étaient faits, affirmé que lors de son embauche, il n'y avait aucune base de prospects ou de clients pour le type de marché à conquérir, et notamment qu'il fallait plusieurs mois de prospection pour conclure les premiers contrats " ce qui d'ailleurs est en train de se produire ".
Par un courrier remis en main propre en date du 7 mars 2006, l'employeur a alerté monsieur Z... sur le caractère quasi-nul de ses résultats commerciaux, sur une baisse d'activité à compter du 20 mars 2006, " (très peu de rendez vous prospects sont prévus) ", et a conclu : " il est absolument inenvisageable de vous voir passer ce mois de mars 2006 sans une signature, en effet, cela mettrait l'entreprise dans de sérieuses difficultés quant à son développement commercial... "
La société DIRRA a, par un courrier en date du 10 mars 2006, notifié à monsieur Z..., sa mise à pied à titre conservatoire, et l'a convoqué à un entretien préalable pour le 20 mars 2006.

Par un courrier en date du 27 mars 2006, la société DIRRA a notifié à monsieur Z... son licenciement pour faute grave pour les motifs suivants :- non implication au sein de votre poste,- non respect des heures de rendez-vous,- incompétences,- absence de résultats,- abus de confiance suite à de fausses déclarations de note de frais.
Vous avez intégré notre entreprise en date du 1er février 2005 en qualité d'ingénieur commercial. Conformément à nos divers entretiens avant votre embauche et à votre demande, vous avez eu à votre disposition une ressource de téléprospection pour vous permettre de compléter votre agenda en terme de rendez-vous, les principaux rendez-vous devant être pris par vos soins. Je vous rappelle également que vous m'avez fait part très rapidement de votre souhait de disposer d'un bureau dans lequel vous seriez seul, le prétexte étant que c'était plus facile pour vous d'effectuer de la téléprospection ; je dois constater que je suis en droit de me demander ce que vous faisiez de votre temps lorsque vous étiez au bureau, puisque je constate une moyenne de 5, 5 appels / jour et 2 appels / demi-journée (pour rappel, une activité dite normale serait d'au minimum 40 appels / jour). Ces remarques ont été écrites à plusieurs reprises dans mes différents courriers et notamment dans l'avertissement qui vous a été remis le 13 décembre 2005, ainsi que les courriers du 30 août 2005 et 7 mars 2006.
Je tiens également, pour vous motiver la non implication au sein de votre poste ainsi que vous incompétences, à vous remémorer la proposition que vous avez remis au prospect " le Tanneur ", le rendez-vous chez Mas d'Auge, Clos d'Aguzon ainsi que votre refus de passer quelques instants avec votre responsable hiérarchique Franck A... le mercredi 8 mars 2006.
En ce qui concerne " le Tanneur ", vous avez remis à ce prospect une proposition qui n'était absolument pas préparée, pensée et professionnelle ; en effet, vous avez compté dans votre proposition des serveurs qui n'en étaient pas, ce qui a eu pour conséquence d'afficher un prix de vente hors marché, je vous rappelle également à propos que l'exemplaire remis au directeur financier n'était pas complet puisque certaines pages étaient manquantes.
Pour ce qui est du rendez-vous chez Mas d'Auge, rendez-vous que je devais effectuer avec vous le 8 février 2006 à 15h00, vous n'avez pris le soin malgré mes recommandations de valider ce rendez-vous, le résultat étant que nous sommes arrivés chez ce client après plus de 2h30 de route et que notre interlocuteur était absent ; vous motiviez d'ailleurs le fait de ne pas rappeler par peur que ce prospect annule le rendez-vous.
A propos du rendez-vous chez Clos d'Aguzon le 8 mars 2006 à 11h30 (pour information, pour se rendre à ce rendez-vous, il vous fallait au minimum 2h45 de route pour vous y rendre), je vous ai croisé dans nos locaux de Bron (69) arrivant ce même jour à 8h55, et vous ai vu repartir de nos locaux à 9h25 ; comment pouviez-vous penser arriver à l'heure à ce rendez-vous en partant de Bron à 9h25 pour un rendez-vous à 11h30 sachant qu'il vous fallait au minimum 2h45 de trajet ? Vous avez donc appelé votre interlocuteur pour décaler le rendez-vous le même jour à 14h00. Je tiens à vous signaler, pour conclure sur ce 8 mars 2006, que je ne vous ai pas revu de la journée.
D'autre part, afin de compléter le chapitre " non implication au sein de votre poste et incompétences ", Franck A..., votre responsable hiérarchique, vous a demandé le lundi 6 mars 2006 à 17h50 de voir avec vous le dossier " F... " et notamment la proposition que vous aviez préparée le lundi 6 mars 2006 après-midi pour le mardi 7 mars 2006 matin (une preuve une fois de plus que votre implication n'était guère présente) ; vous lui avez clairement dit que vous aviez un rendez-vous personnel à 18h00 et que vous ne pouviez répondre favorablement à sa demande, sachant que vous m'avez dit lors d'un entretien avec moi-même le 7 mars 2006 que vous n'aviez aucun rendez-vous personnel et que vous avez refusé pour le plaisir de refuser. Je souhaite d'autant plus attirer votre attention sur cet épisode puisque nous avons, Franck A... et moi-même, été obligés de corriger cette proposition qui comportait de nombreuses erreurs.
Je dois également mentionner le courriel que je vous avais demandé d'envoyer à plusieurs reprises suite à notre rendez-vous chez G... en date du 20 février 2006, courrier que vous avez fini par m'envoyer en date du 7 mars 2006 (soit 15 jours plus tard) pour validation ; vous trouverez ci-joint le projet de courriel que vous souhaitiez envoyer à G... en annexe ; encore une fois, je suis en droit de me demander si vous avez bien lu ce que vous aviez écrit (relance semaine 31 au lieu de semaine 10, " UN autre part G... " au lieu " d'autre part ", le plus grave étant que vous auriez envoyé le courriel en l'état si je ne vous avais pas demandé de le valider avant.
En date du 9 décembre 2005, vous aviez déjeuné avec monsieur B... de la société SAMSE, affaire très importante que vous traitiez. Je vous ai appelé sur votre téléphone portable professionnel ce même jour en fin d'après-midi pour connaître les termes de votre entrevue avec monsieur B..., vous ne vous êtes jamais donné la peine de me rappeler, étant parti directement en week-end de ski selon vos dires.
Pour finir sur ce chapitre, je vous avais demandé de faire envoyer des fleurs à l'épouse de monsieur Didier C..., responsable achats chez Billon, affaire que vous traitiez pour la naissance de leur fils, après entretien avec Didier C..., il s'avère qu'aucun bouquet de fleurs n'a été envoyé de votre part à l'épouse de monsieur C....
Tous ces exemples prouvent malheureusement les non-implication au sein de votre poste ainsi que les incompétences dont vous faisiez preuve.
Pour ce qui est de vos résultats au sein de notre entreprise, ils sont à ce jour quasi nuls ; en effet, vous avez signé en date : du 13 mai 2005 vos objectifs pour la période du 1er mai au 31 juillet 2005 qui étaient de 450 000 euros HT de chiffre d'affaires, du 30 août 2005 pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2005 qui étaient de 1 000 000 euros HT de chiffre d'affaires, du 9 janvier 2006 pour la période du 1er janvier au 31 mars 2006 qui étaient de 1 000 000 euros HT de chiffre d'affaires.
Le résultat fut le suivant :- période du 1 / 5 / 05 au 31 / 7 / 05 Objectif : 450K € Résultat = 0 (0 %)- période du 1 / 9 / 05 au 31 / 12 / 05 Objectif : 1000K € Résultat = 225. 5K € (23 %),
sachant que le dossier signé en décembre 2005 est un dossier de financement-avec quelques jours d'audit) et non pas un dossier d'infogérance comme vous êtes censé en commercialiser (je vous joins à cet effet la lettre du 27 décembre 2005 confirmant cela et stipulant un accord sur la commission spéciale que vous avez été amené à percevoir pour cette affaire).
- période du 1 / 1 / 06 au 31 / 03 / 06 Objectif : 1000k € résultat = 0K € (0 %)
Pour conclure sur les résultats, sur un objectif cumulé de 2450 K €, 225. 5 K € (contrat de financement) ont été signés soit 9, 20 %.
Pour motiver le motif concernant l'abus de confiance, suite à tous les éléments énoncés ci-dessus, j'ai demandé à notre responsable administrative de vérifier vos notes de frais.
Il s'avère que nous nous sommes aperçus que vous comptiez dans vos notes de frais de nombreux kilomètres supplémentaires et non fondés (puisque vous étiez remboursés sur la base d'indemnités kilométriques).
Après avoir recalculé les kilomètres des différents déplacements professionnels sur les mois de juin, juillet et août 2005, il s'avère que vous nous avez comptez 7359 kilomètres en trop, soit une somme de 2 694, 00 euros.
Vous devez imaginer notre grande surprise quant à cette tromperie dont vous avez fait preuve une fois de plus.... "
Par un courrier du 28 mars 2006, monsieur Z... a contesté les motifs du licenciement ; il soutenait notamment que c'était monsieur Y..., le directeur général signataire de la lettre de licenciement qui, à la fin du mois d'avril à l'issue de la période d'essai, lui avait suggéré de " majorer le montant des kilomètres parcourus de façon à compenser l'avance auparavant consentie ", des difficultés économiques ne permettant pas de maintenir l'avance sur commissions, ce qui permettrait l'économie de charges sociales ; Il faisait valoir en outre que ces faits anciens de six mois, étaient par nature amnistiés.

Monsieur Z... a saisi le Conseil de prud'hommes le 10 avril 2006 pour contester le licenciement et demander le paiement des sommes suivantes :-12 096, 00 euros à titre de préavis,-1 209, 60 euros au titre des congés payés sur préavis,- mémoire au titre des heures supplémentaires,- congés payés afférents,-7 500, 00 euros à titre d'indemnité pour repos compensateur non pris,-48 000, 00 euros à titre de dommages intérêts pour rupture sans cause réelle et sérieuse,-2 500, 00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre intérêts de droit à compter de la première demande avec capitalisation en application de l'article 1154 du Code civil.

Par un jugement rendu sur le dernier état des demandes en date du 14 février 2008, le Conseil de prud'hommes a dit que le licenciement ne repose pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse et a condamné la société DIRRA à payer à monsieur Z... les sommes suivantes :-10 742, 85 euros à titre de préavis,-1 074, 28 euros au titre des congés payés afférents,-800, 00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre intérêts de droit à compter de la saisine.
Le Conseil de prud'hommes a analysé les faits comme relevant de l'insuffisance professionnelle qui ne peut pas fonder un licenciement pour faute grave.
Le jugement a rejeté la demande en paiement d'heures supplémentaires, alors qu'il existait un horaire collectif et que des attestations confirment que le salarié respectait cet horaire ; il a rejeté également la demande au titre de la clause de non-concurrence dont le salarié a été délié par la lettre de licenciement.

Monsieur Z... a déclaré faire appel le 6 mars 2008.

Vu les conclusions de monsieur Z..., soutenues oralement à l'audience, tendant à l'infirmation du jugement sur le licenciement et à sa confirmation sur l'indemnité de préavis et les congés payés afférents.

Il demande à la Cour de dire que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse et de condamner la société DIRRA à lui payer les sommes suivantes :-6 664, 44 euros à titre d'heures supplémentaires,-666, 44 euros au titre des congés payés afférents,-48 000, 00 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-24 192, 00 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,-48 384, 00 euros à titre de dommages intérêts au titre de la clause de non-concurrence, outre intérêts de droit sur ces sommes à compter de la demande, avec capitalisation,-3 500, 00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu les conclusions de la société DIRRA, soutenue oralement à l'audience, tendant à la réformation du jugement et à ce qu'il soit jugé que le licenciement repose sur une faute grave et pour le surplus, à la confirmation du jugement. Cette société demande la condamnation de monsieur Z... à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

DISCUSSION
EN DROIT
L'employeur qui a notifié un avertissement écrit a épuisé ainsi son pouvoir disciplinaire ; qu'il peut cependant prononcer ensuite un licenciement disciplinaire fondé à la fois d'une part sur les griefs anciens déjà sanctionnés, d'autre part sur un fait nouveau postérieur à la première sanction ou sur des faits antérieurs à celle-ci, à condition de rapporter la preuve de ce qu'il n'avait pas connaissance de ces derniers à la date de la première sanction.
Les motifs invoqués par l'employeur doivent être précis, objectifs et vérifiables.
Il résulte des dispositions combinées des articles L 1232-6 et L 1235-1 du Code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis.
Le licenciement prononcé pour faute grave a nécessairement un caractère disciplinaire. L'insuffisance professionnelle non fautive ne peut être qualifiée de faute grave.
EN FAIT
La société DIRRA a notifié un avertissement le 13 décembre 2005, ce qui constitue une mesure disciplinaire ; elle a en conséquence purgé son pouvoir disciplinaire relativement aux faits reprochés, soit une tricherie sur les horaires d'un vendredi, veille de week end et un manque d'implication et de résultats.
La convocation à l'entretien préalable avec mise à pied à titre conservatoire s'inscrit également dans le cadre d'une procédure disciplinaire, ce que confirme le prononcé d'un licenciement pour faute grave.
C'est à tort que le jugement a cru devoir retenir qu'à défaut de faute grave, l'insuffisance professionnelle pouvait fonder un licenciement disciplinaire pour cause réelle et sérieuse sans caractériser le caractère fautif de cette insuffisance professionnelle, soit son caractère intentionnel.

Le 7 mars 2006, la société DIRRA a alerté monsieur Z... sur l'absence de résultats et sur le fait que l'agenda n'avait enregistré que très peu de rendez-vous prospects ce qui signifiait une baisse d'activité future, à compter du 20 mars 2006, stigmatisant le manque de sérieux et d'implication au sein de l'entreprise.
Le 9 mars 2006, monsieur Z... a envoyé un compte rendu de la réunion du 20 février 2006 au client G... qui a appelé la critique du dirigeant monsieur Y..., qui en a reçu copie le 10 mars 2006 à 9 heures, et a répondu le même jour à 9H28 : ce dernier discute tant le fond que la forme du compte rendu concluant : " l'as-tu relu avant de l'envoyer ? Je te demande des compte rendu par mail et voici le résultat du premier ! ! ! un junior sortant de l'école ferait mieux ! ! C'est ni fait ni à faire, quelle image devons nous avoir vis à vis de M E... aujourd'hui ? Je m'occupe personnellement de rappeler le client. "
La lettre de mise à pied à titre conservatoire avec convocation à l'entretien préalable est du 10 mars 2006 ; la critique du compte rendu litigieux relève de l'insuffisance professionnelle et non de fautes délibérées du salarié.
La lettre de licenciement dénonce une insuffisance professionnelle et une insuffisance de résultats et les pièces du dossier attestent de ces insuffisances, les résultats étant quasi nuls, alors que contrairement à ce que soutient monsieur Z..., il n'est pas établi que son activité concernait les grands comptes.
Les faits fautifs dont la société DIRRA a la charge de la preuve doivent avoir été commis après le 10 janvier 2006 : seuls les faits suivants peuvent relever du pouvoir disciplinaire :
- la non implication volontaire au sein du poste, il est reproché la quasi absence de prospection : 5, 5 appels / jour et 2 appels demi-journée alors qu'une activité normale serait de 40 appels ; le refus de passer quelques instants avec monsieur A..., responsable hiérarchique le 6 mars 2006 à 17H50 au prétexte d'un rendez-vous personnel à 18h de fait inexistant, ainsi que le mercredi 8 mars 2006 :
La pièce 6-4 (janvier 2006) et la pièce 6-5 (avril 3006) sont insuffisantes pour caractériser l'absence de prospection volontaire ; le relevé des appels téléphoniques n'est pas produit.
- l'abus de confiance relatif au remboursement de frais kilométriques : il n'est produit aucune pièce.
Il résulte du compte rendu de l'entretien préalable que ce fait relatif au remboursement de frais n'a d'ailleurs pas été évoqué dans le cadre de cet entretien, et qu'aucun fait fautif n'a été caractérisé.
La société DIRRA ne rapporte en conséquence ni la preuve d'une faute grave, ni un quelconque fait fautif de nature à justifier un licenciement de nature disciplinaire : le jugement sera infirmé : le licenciement est sans cause réelle et sérieuse prouvée.

SUR LE PREAVIS, LES CONGES PAYES AFFERENTS ET LES DOMMAGES INTERETS POUR LICENCIEMENT SANS CAUSE REELLE ET SERIEUSE
Le jugement a fixé la rémunération moyenne de monsieur Z... à la somme de 3 580, 95 euros, ce qui n'est pas contesté par la société DIRRA.
Le jugement sera en conséquence confirmé sur le montant de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents, outre intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation du Conseil de prud'hommes soit, le 12 avril 2006.
L'ancienneté de monsieur Z... est de 14 mois. Celui-ci est né en 1963, et ne justifie pas de sa situation après la rupture du contrat de travail.
Les dommages intérêts seront fixés à la somme de 10 000 euros.

SUR LES HEURES SUPPLEMENTAIRES, LES CONGES PAYES AFFERENTS ET L'INDEMNITE POUR TRAVAIL DISSIMULE
EN DROIT
L'article L 3171-4 du Code du travail (ancien article L 212-1-1) dispose qu'" en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail effectuées par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être faible et infalsifiable. "
Il appartient cependant au salarié de fournir préalablement au juge, des éléments de nature à étayer sa demande.
EN FAIT
Monsieur Z... est cadre et amené à avoir des rendez-vous à l'extérieur de l'entreprise dans laquelle existe un horaire collectif du lundi au vendredi de 8H30 à 12H30 et de 14H à 17H.
Pour prétendre au paiement d'heures supplémentaires, celui-ci produit deux courriels de la direction qui s'étonne que les commerciaux soient absents à 17H05 et le salarié procède à un calcul forfaitaire sur son affirmation selon laquelle l'équipe commerciale s'est attachée à demeurer jusqu'à 18 heures.
Monsieur Z... ne rapporte pas la preuve de ce qu'il restait chaque jour jusqu'à 18 heures, ce qu'infirme d'ailleurs le courriel de monsieur Y... qui constate qu'à 17H05, il n'y a aucun commercial sur place. Deux attestations manuscrites du directeur de services et du responsable achats et qualité attestent de ce que monsieur Z... ne respectait ni l'heure de début de l'horaire de 8H30, arrivant plutôt aux alentours de 9H et ne respectait pas la durée de la pause de midi soit une heure et demi, s'absentant souvent de 12 heures à 14 heures, soit deux heures, voire plus.
Monsieur Z... ne rapporte en conséquence pas la preuve d'éléments pouvant laisser présumer l'existence d'heures supplémentaires.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de ces demandes.

SUR L'INDEMNITE AU TITRE DE LA CLAUSE DE NON CONCURRENCE
La clause contractuelle de non-concurrence a prévu le droit de la société DIRRA de libérer le salarié de la clause de non-concurrence.
La lettre de licenciement du 27 mars 2006 a notifié au salarié que la société le déliait de la clause de non-concurrence.
La procédure est en conséquence régulière et le jugement qui a rejeté cette demande doit être confirmé.

SUR LES FRAIS IRREPETIBLES ET LES DEPENS
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société DIRRA à payer au salarié la somme de 800 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens de première instance.
La société DIRRA sera déboutée de ses demandes à ces titres contre monsieur Z... et elle paiera à ce dernier la somme supplémentaire de 1 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement de monsieur Laurent Z... repose sur une cause réelle et sérieuse : dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Confirme le jugement au titre du préavis et des congés payés afférents ainsi que la somme de 800 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, et les dépens de première instance.
Confirme le jugement en ce qu'il a débouté monsieur Laurent Z... de ses demandes en paiement d'heures supplémentaires et congés payés afférents, indemnité pour travail dissimulé et au titre de la clause de non-concurrence.

Infirme le jugement pour le surplus.
Dit que les intérêts au taux légal sur les indemnités de préavis et de congés payés afférents sont dus à compter du 12 avril 2006 avec capitalisation en application des dispositions de l'article 1154 du Code civil.
Condamne la société DIRRA à payer à monsieur Laurent Z... la somme de dix mille euros (10 000 euros) à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de mille euros (1 000 euros) en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens de la procédure d'appel

Le Greffier Le Président. M. RUGGERI D. JOLY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0535
Numéro d'arrêt : 08/01562
Date de la décision : 27/03/2009

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Licenciement disciplinaire - Faute du salarié -

L'employeur qui a notifié un avertissement écrit a épuisé ainsi son pouvoir disciplinaire. Il peut cependant prononcer ensuite un licenciement disciplinaire fondé à la fois sur les griefs anciens déjà sanctionnés et d'autre part sur un fait nouveau postérieur à la sanction ou des faits antérieurs à celle-ci à condition de rapporter la preuve de ce qu'il n'avait pas connaissance de ces derniers à la date de la première sanction


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Lyon, 14 février 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2009-03-27;08.01562 ?
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