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26/11/2008 | FRANCE | N°07/06183

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 26 novembre 2008, 07/06183


AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR

R.G : 07/06183

SOCIETE NESPRESSO FRANCE
C/X...

APPEL D'UNE DÉCISION DU :Conseil de Prud'hommes de LYONdu 17 Septembre 2007RG : R O7/00666

COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 26 NOVEMBRE 2008

APPELANTE :
SOCIETE NESPRESSO prise en la personne de son représentant légal en exercice7 rue de la Paix75002 PARIS
représentée par Me Laurent BELJEAN, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :
Vanessa X......69190 SAINT-FONS
comparant en personne, assistée de Me Florence NEPLE, avocat au barreau

de LYON
PARTIES CONVOQUÉES LE : 14 Mars 2008 et 30 Avril 2008
AUDIENCE DU : 30 Avril 2008 (renvoi non contradictoi...

AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR

R.G : 07/06183

SOCIETE NESPRESSO FRANCE
C/X...

APPEL D'UNE DÉCISION DU :Conseil de Prud'hommes de LYONdu 17 Septembre 2007RG : R O7/00666

COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 26 NOVEMBRE 2008

APPELANTE :
SOCIETE NESPRESSO prise en la personne de son représentant légal en exercice7 rue de la Paix75002 PARIS
représentée par Me Laurent BELJEAN, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :
Vanessa X......69190 SAINT-FONS
comparant en personne, assistée de Me Florence NEPLE, avocat au barreau de LYON
PARTIES CONVOQUÉES LE : 14 Mars 2008 et 30 Avril 2008
AUDIENCE DU : 30 Avril 2008 (renvoi non contradictoire)
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 17 Septembre 2008
Présidée par Danièle COLLIN-JELENSPERGER, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Marion RUGGERI-GUIRAUDOU, Greffier.
Délibéré du 22 Octobre 2008 prorogé au 26 Novembre 2008.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Didier JOLY, PrésidentDanièle COLLIN-JELENSPERGER, ConseillerFrançoise CONTAT, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 26 Novembre 2008 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Didier JOLY, Président, et par Eléonore BRUEL, Adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
Madame Vanessa X... a été engagée, en qualité de conseillère clientèle, par la société NESPRESSO, à compter du 13 juin 2005.
Le 20 septembre 2006, une alerte à la bombe a eu lieu sur le lieu du travail, immeuble le DAUPHINE PART DIEU, entraînant l'évacuation du personnel pendant 45 minutes ; madame X... a fait une chute dans l'escalier et a été blessée au niveau du dos.
Celle-ci a été placée en arrêt maladie non professionnelle du 19 octobre 2006 au 31 décembre 2006 : la garantie de salaire a été mise en oeuvre au-delà du délai de carence au taux de 75 % du salaire.
Un premier avis d'arrêt de travail pour accident du travail a été délivré en date du 2 janvier 2007, prolongé le 26 janvier 2007 jusqu'au 31 mars 2007 : la garantie salaire a été augmentée de 75 à 90 %, avec augmentation de la période de prise en charge de 150 à 180 jours.
La société NESPRESSO a écrit à la CPAM de LYON le 9 janvier 2007 pour émettre des réserves sur la situation.
Un arrêt de travail pour maladie a été délivré le 2 avril 2007 jusqu'au 31 mai 2007 : la garantie de salaire est revenue à 75 %.
Par un courrier en date du 26 avril 2007, la CPAM de LYON a indiqué à l'employeur qu'elle n'avait pas connaissance d'un accident du travail et qu'en l'absence de déclaration d'accident du travail établie par l'employeur et d'un certificat médical initial établi par le médecin, elle ne pouvait se prononcer sur une prise en charge au titre de l'accident du travail.
Par un courrier en date du 29 mai 2007, la société NESPRESSO a informé madame X... qu'après vérification, il s'avérait que la CPAM n'avait pas reconnu l'accident du travail et que dès lors, elle n'aurait pas dû payer le salaire à hauteur de 90 % mais à hauteur de 75 % du 53o au 180o jours d'arrêt de travail et qu'elle régularisera les salaires indûment versés sur le bulletin de salaire du mois de mai 2007.
La société NESPRESSO a édité un bulletin de paie pour le mois de mai 2007, mentionnant un net à payer de 1 737,24 euros, un bulletin de paie pour le mois de juin 2007 également négatif de - 420 euros, un bulletin de paie pour le mois de juillet de + 484,17 euros et un bulletin de paie pour le mois d'août 2007 à nouveau négatif de - 407,35 euros. Elle déclare qu'elle a défalqué des salaires, la somme de 3 031,43 euros brut.
Le certificat final en arrêt de travail pour accident du travail est du 31 mai 2007.
Madame X... a engagé une procédure de reconnaissance de l'accident du travail du 20 septembre 2006, le 2 juillet 2007.
Elle a saisi la formation de référé du Conseil de prud'hommes de LYON le 11 juillet 2007 pour obtenir le paiement de la somme de 4 350,81 euros brut au titre de ces salaires des mois de mai, juin et juillet 2007, ainsi que la délivrance sous astreinte des bulletins de paie.
Par une ordonnance de référé du 17 septembre 2007, le Conseil de prud'hommes a fait droit à la demande outre intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation devant la formation de référé, et la somme de 200 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile. La remise des bulletins de paie a été ordonnée sous astreinte.
La juridiction a dit que l'employeur ne pouvait effectuer des retenues telles qu'elles privaient la salariée de tout revenu, une somme égale au montant du RMI devant être laissée à sa disposition, à charge par la société, ultérieurement, de mettre en oeuvre, tous les mois, les retenues sur les sommes saisissables ou cessibles jusqu'à épuisement de l'éventuel trop perçu.
L'ordonnance a été notifiée à la société NESPRESSO le 19 septembre 2007 ; celle-ci a déclaré faire appel le 27 septembre 2007.
Après un premier refus, la CPAM, a, le 26 octobre 2007, soit postérieurement à l'ordonnance de référé, accordé à madame X... le bénéfice des accidents du travail, pour la période du 19 octobre 2006 jusqu'au 31 mai 2007. Madame X... a ensuite été placée en arrêt maladie, puis maternité et enfin en congé parental.
La société NESPRESSO a adressé à madame X... un chèque d'un montant de 2 875,39 euros le 24 octobre 2007 accompagné de nouvelles fiches de paie, sans décompte.
Vu les conclusions de la société NESPRESSO soutenues oralement à l'audience, tendant :
- à titre principal, à l'incompétence du bureau des référés, à l'infirmation de l'ordonnance, et à ce que soit ordonnée la restitution des sommes versées en exécution de l'ordonnance ;
- à titre subsidiaire, à l'inapplicabilité à la cause des articles L 144-1 et L 145-2 et R 145-1 et s du Code du travail, au constat de ce que madame X... se reconnaît débitrice d'un trop perçu envers elle et à la restitution des sommes versées en exécution de l'ordonnance ;
- à titre infiniment subsidiaire, au constat de ce qu'elle n'a pas opéré de compensation sur une somme supérieure à 3 031,43 euros brut, et qu'aucune indemnité compensatrice de congés payés ne peut être perçue sur cette somme ; en conséquence à la restitution de la somme de 1 319,38 euros brut.
Vu les conclusions de madame X..., soutenues oralement à l'audience, tendant à la confirmation de l'ordonnance et, ajoutant à celle-ci, à la condamnation de la société NESPRESSO à lui payer la somme de 7 933,07 euros brut sauf à déduire la somme de 2 875,39 euros net versée le 24 octobre 2007 à titre de solde dû par l'employeur au titre de la garantie de salaire ainsi que la somme de 3 000 euros à titre de provision sur dommages-intérêts et à la délivrance sous astreinte de nouvelles fiches de paie pour la période de novembre 2006 à octobre 2007. Madame X... demande la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, sous réserve de renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
A l'audience, la société NESPRESSO répond, sur la demande reconventionnelle en paiement de rappel de salaires à la suite de la reconnaissance de l'accident du travail, que cette demande se fonde sur une application rétroactive de la décision de la CPAM qui n'a aucun effet à son égard.

DISCUSSION
SUR L'ORDONNANCE DE REFERE DU 17 SEPTEMBRE 2007
EN DROIT
La compensation s'opère au profit des employeurs entre le montant des salaires dus par eux et leurs salariés et les sommes qui leur seraient dues à eux-mêmes, pour fournitures diverses, quelle qu'en soit la nature, à l'exception des outils, instruments nécessaires au travail, des matières ou matériaux dont le salarié a la charge et l'usage, des sommes avancées pour l'acquisition de ces mêmes objets.
Toutefois, l'article L 3252-2 du Code du travail limite la compensation dès lors que les sommes dues à titre de rémunération ne sont saisissables que dans les proportions et selon des seuils de rémunération affectés d'un correctif pour toute personne à charge.
EN FAIT
La société NESPRESSO a opéré des retenues dans les proportions suivantes :- sur le salaire de mai 2007 sur 100 %, la retenue ayant absorbé la totalité du salaire, (- 1 737,24)- sur le salaire de juin 2007, sur 100 %, la retenue ayant absorbé la totalité du salaire, (- 420,00) - sur le salaire de juillet 2007, la retenue ayant absorbé 17,20 % du salaire.
La compensation opérée est contraire aux dispositions de la loi qui limite dans l'intérêt des salariés, toute compensation sur salaires : cette compensation est abusive.
Dès lors, la juridiction des référés est compétente pour connaître des retenues ainsi abusivement pratiquées et faire cesser le trouble manifestement illicite qui consiste à supprimer à un salarié, au surplus en l'espèce en arrêt de maladie, la totalité des salaires dus au titre de la garantie de salaire, et prescrire la remise en état qui s'impose, soit la restitution pure et simple à la salariée de la totalité des retenues ainsi opérées illicitement.
L'ordonnance de référé sera confirmée en ce qu'elle a déclaré la formation de référé compétente et ordonné la restitution des sommes retenues.
L'ordonnance a condamné la société NESPRESSO FRANCE à rembourser la somme de 4 350,81 euros brut, somme demandée par madame X..., outre intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation devant la formation de référé.
Devant la Cour, cette société conteste la somme de 4 350,81 euros et affirme qu'elle a défalqué des salaires, la somme de 3 031,43 euros. De fait elle n'a exécuté l'ordonnance de référé qu'à hauteur de la somme de 2 875,39 euros net.

Le compte de madame X... était le suivant en première instance :- mai 2007 :la somme due était de 1 400 euros brut, l'employeur ne pouvant retenir plus de 10 % du salaire, il était dû : 1 260 euros brut- juin 2007 :la somme due compte tenu du 13o mois était de 1 830,81 euros brut- juillet 2007, sur la même base que le mois de juin : 1 260 euros brutsoit au total : 4 351,80 euros.
Aux mois de mai, juin et juillet, avant reconnaissance de l'accident du travail, la société NESPRESSO était bien fondée à payer 75 % du salaire soit :- mai 2007 : 1 050,03 euros- juin 2007 : 1 652,02 euros- juillet 2007 : 1 050,03 euros
soit un total de 3 753,08 euros brutalors qu'elle n'a payé que 484,17 euros net qu'il convient de déduire après l'avoir converti en brut.
La société NESPRESSO ne donnant pas le détail du calcul qui lui a permis de parvenir à la somme, en brut de 3 031,43, il convient de retenir la somme restant due de 3 131,50 euros en brut.
L'ordonnance de référé sera réformée et la société NESPRESSO sera condamnée à payer à madame X... la somme de 3 131,50 euros brut, outre les intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2007.

SUR LA DEMANDE NOUVELLE DE MADAME X...
La société NESPRESSO a décidé de notifier la "régularisation" du trop perçu sur la simple lettre de la CPAM de LYON selon laquelle elle n'avait pas connaissance de l'accident du travail, alors qu'elle était en possession des arrêts de travail du médecin qui portait la mention de l'accident du travail.
La reconnaissance par la CPAM de LYON de l'accident du travail notifiée à la salariée le 26 octobre 2007 opère rétroactivement et est opposable à l'employeur au titre des sommes dues au titre de la garantie de ressources : cette obligation n'est pas sérieusement contestable.
La société NESPRESSO a pu confondre l'opposabilité de la décision en faveur de la salariée au titre des indemnités journalières ou compléments de salaries dus avec la question de l'opposabilité de la décision au regard des obligations de cotisation dans le cas où l'employeur conteste la reconnaissance de l'accident du travail par la CPAM.
La juridiction des référés est compétente pour ordonner une provision au créancier dans le cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable : la société NESPRESSO sera condamnée à payer une provision à ce titre de 600 euros.

SUR LA PROVISION SUR LES DOMMAGES-INTERETS
La privation abusive de ressources pendant deux mois justifie qu'il soit accordé une provision à valoir sur les dommages-intérêts de 2 000 euros.
SUR LA DELIVRANCE DE NOUVELLES FICHES DE PAIE
La société NESPRESSO devra délivrer à madame X... des nouvelles fiches de paie, depuis la date de l'accident du travail.
Il n'y a aucun motif de considérer que la société NESPRESSO n'exécutera pas cette décision ; il n'y a pas lieu d'assortir l'injonction d'une astreinte.
SUR LES FRAIS IRREPETIBLES ET LES DEPENS
Il convient de confirmer l'ordonnance de référé qui a condamné la société NESPRESSO à payer la somme de 200 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens de première instance.
La société NESPRESSO paiera une somme complémentaire de 1 500 euros au titre de la procédure d'appel, ainsi que les dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme l'ordonnance de référé en ce qu'elle a dit que le non-respect des règles entourant le salaire, créance alimentaire, constitue un trouble manifestement illicite dont le juge des référés a le pouvoir d'y mettre fin et a condamné la société NESPRESSO à payer à madame Vanessa X... la somme de 200 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens de première instance.
Infirme l'ordonnance sur le montant des sommes dues par la société NESPRESSO et statuant à nouveau.
Condamne la société NESPRESSO à payer à madame Vanessa X... la somme de trois mille cent trente et un et cinquante centimes (3 131,50 euros) brut, outre les intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2007.
Ajoutant à l'ordonnance.
Condamne la société NESPRESSO à payer à madame Vanessa X... une provision à valoir sur la régularisation des salaires au vu de la reconnaissance de l'accident du travail, de la somme de six cents euros (600 euros).
Condamne la société NESPRESSO à payer à madame Vanessa X... une provision de deux mille euros (2 000 euros) à valoir sur le montant des dommages-intérêts.
Ordonne à la société NESPRESSO de délivrer des fiches de paie rectifiées pour toute la période depuis la date de l'accident du travail.
Dit n'y avoir lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Condamne la société NESPRESSO à payer à madame Vanessa X... la somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens de la procédure d'appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT.E. BRUEL D. JOLY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 07/06183
Date de la décision : 26/11/2008
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Salaire - Paiement - Compensation - Compensation avec des fournitures faites par l'employeur -

La compensation s'opère au profit des employeurs entre le montant des salaires dus par eux et leurs salariés et les sommes qui leur seraient dues à eux-mêmes, pour fournitures diverses, quelle qu'en soit la nature, à l'exception des outils, instruments nécessaires au travail, des matières ou matériaux dont le salarié a la charge et l'usage, des sommes avancées pour l'acquisition de ces mêmes objets


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Lyon, 17 septembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-11-26;07.06183 ?
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