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14/03/2008 | FRANCE | N°07/03892

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0075, 14 mars 2008, 07/03892


AFFAIRE PRUD' HOMALE
RAPPORTEUR
R. G : 07 / 03892
X...
C / SA FOCAL JM LAB

APPEL D' UNE DECISION DU : Conseil de Prud' hommes de SAINT- ETIENNE du 23 Mai 2007 RG : F 06 / 00452

COUR D' APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE C
ARRÊT DU 14 MARS 2008
APPELANT :
Monsieur Philippe X......

ECOSSE
comparant en personne, assisté de Maître Pierre ROBILLARD, avocat au barreau de SAINT- ETIENNE
INTIMEE :
SA FOCAL JM LAB 108 rue de l' Avenir 42350 LA TALAUDIERE

représentée par Maître Pascal GARCIA, avocat au barreau de SAINT- ETIENNE


PARTIES CONVOQUEES LE : 10 juillet 2007
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Février 2008
Présidée par Mada...

AFFAIRE PRUD' HOMALE
RAPPORTEUR
R. G : 07 / 03892
X...
C / SA FOCAL JM LAB

APPEL D' UNE DECISION DU : Conseil de Prud' hommes de SAINT- ETIENNE du 23 Mai 2007 RG : F 06 / 00452

COUR D' APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE C
ARRÊT DU 14 MARS 2008
APPELANT :
Monsieur Philippe X......

ECOSSE
comparant en personne, assisté de Maître Pierre ROBILLARD, avocat au barreau de SAINT- ETIENNE
INTIMEE :
SA FOCAL JM LAB 108 rue de l' Avenir 42350 LA TALAUDIERE

représentée par Maître Pascal GARCIA, avocat au barreau de SAINT- ETIENNE
PARTIES CONVOQUEES LE : 10 juillet 2007
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Février 2008
Présidée par Madame Hélène HOMS, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Madame Malika CHINOUNE, Greffier
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Monsieur Bruno LIOTARD, Président Madame Hélène HOMS, Conseiller Madame Marie- Claude REVOL, Conseiller

ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 14 Mars 2008 par mise à disposition de l' arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l' article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
Signé par Monsieur Bruno LIOTARD, Président, et par Madame Malika CHINOUNE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur Philippe X... a été engagé par la SA FOCAL JM LAB (la SA FOCAL) en qualité de directeur du développement de la division professionnelle de l' établissement de Saint- Etienne, selon contrat à durée indéterminée du 19 décembre 2001.
L' organisation du service recherche et développement a été modifié à plusieurs reprises et en janvier 2005, le président directeur général de la SA FOCAL a pris en charge ce service avant de le déléguer à son directeur général.
Au début de l' année 2006, la SA FOCAL a fermé son établissement de Pau. Cette réorganisation a également concerné son établissement de La Talaudière à Saint- Etienne, notamment le service recherche et développement et il a été décidé de supprimer le poste de directeur du développement de la division professionnelle.
Par lettre du 23 juin 2006, la SA FOCAL a proposé à Monsieur X... le poste d' ingénieur développement enceintes acoustiques home et professionnel au sein de l' équipe développement, avec maintien de sa rémunération.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er août 2006, Monsieur X... a refusé cette offre.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 août 2006, la SA FOCAL l' a convoqué à un entretien préalable à un licenciement fixé au 4 septembre suivant, au cours duquel une convention de reclassement personnalisée lui a été proposée et à laquelle il a accepté d' adhérer le 8 septembre 2006.
La SA FOCAL a notifié à monsieur X... par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 septembre 2006 la rupture de son contrat de travail pour motif économique.
Monsieur X... a saisi le Conseil de Prud' hommes de Saint- Etienne le 18 octobre 2006 aux fins de contester le motif économique de la rupture de son contrat de travail et obtenir la condamnation de la SA FOCAL à lui payer des dommages- intérêts à ce titre.
Par jugement du 23 mai 2007, le Conseil de Prud' hommes de Saint- Etienne a condamné la SA FOCAL à payer à Monsieur X... la somme de 5. 672 € à titre de dommages- intérêts pour non respect des critères d' ordre des licenciements et l' a débouté de ses autres demandes.
Monsieur X... a interjeté appel de cette décision, dont la notification a été retournée avec la mention " n' habite pas à l' adresse indiquée ", par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 juin 2007.
Vu les conclusions du 19 décembre 2007 maintenues et soutenues à l' audience par Monsieur X... qui demande à la Cour par infirmation du jugement entrepris de :- constater que le licenciement dont il a fait l' objet pour motif économique ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse en l' absence de véritables difficultés économiques et de suppression de poste,- constater que la SA FOCAL n' a respecté ni les critères d' ordre des licenciements dès lors qu' elle n' en n' a mis aucun en oeuvre, ni son obligation de reclassement,- condamner en conséquence la SA FOCAL à lui verser la somme de 110. 000 € à titre de dommages- intérêts,- constater que la SA FOCAL n' a pas respecté la priorité de réembauchage dont il bénéficiait et la condamner à ce titre à lui verser la somme de 12. 400 €,- condamner la SA FOCAL à lui verser 2. 000 € sur le fondement de l' article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions du 24 janvier 2008 maintenues et soutenues à l' audience de la SA FOCAL qui demande à la Cour de : à titre principal,- constater que l' acceptation par Monsieur X... d' adhérer à la convention de reclassement personnalisée a eu pour conséquence de rompre le contrat de travail d' un commun accord, ce qui l' empêche de contester le caractère économique de la rupture, à titre subsidiaire,- constater le caractère réel et sérieux des difficultés économiques rencontrées par la SA FOCAL,- constater que le poste occupé par Monsieur X... a été supprimé, que l' obligation de reclassement a été respectée, tandis que l' ordre des licenciement n' avait pas à l' être,- débouter Monsieur X... de sa demande de dommages- intérêts pour licenciement injustifié,- constater que la priorité de réembauchage n' a pas été violée et débouter en conséquence Monsieur X... de sa demande à ce titre,- condamner Monsieur X... à lui verser 2. 500 € sur le fondement de l' article 700 du Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les conséquences de l' adhésion à une convention de reclassement personnalisée :
Aux termes de l' article L. 321- 4- 2 du code du travail, " dans les entreprises non soumises aux dispositions de l' article L. 321- 4- 3, l' employeur est tenu de proposer à chaque salarié dont il envisage de prononcer le licenciement pour motif économique le bénéfice d' une convention de reclassement personnalisé lui permettant de bénéficier, après la rupture de son contrat de travail, d' actions de soutien psychologique, d' orientation, d' accompagnement, d' évaluation des compétences professionnelles et de formation destinées à favoriser son reclassement (...) En cas d' accord du salarié, le contrat de travail est réputé rompu du commun accord des parties ".
Contrairement à ce que soutient la SA FOCAL, l' acceptation par le salarié de la convention de reclassement personnalisé ne saurait priver ce dernier de son droit de contester le caractère réel et sérieux de la rupture du contrat de travail.
En effet, l' article L. 321- 4- 2 précité réserve le bénéfice de cette convention aux seuls salariés dont l' employeur envisage de prononcer le licenciement pour motif économique, ceux- ci étant nécessairement licenciés à défaut d' acceptation.
De plus, l' article 1er de l' accord national interprofessionnel du 5 avril 2005 conclu en application de ce texte précise qu' il est institué des conventions de reclassement personnalisé dont l' objet est de permettre aux salariés licenciés pour motif économique de bénéficier, après la rupture de leur contrat de travail, d' un ensemble de mesures leur permettant un reclassement accéléré.
En tout état de cause, l' article L. 321- 1 du code du travail définissant le licenciement pour motif économique dispose dans son alinéa 2 que " les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant de l' une des causes énoncées à l' alinéa précédent ".
Ainsi, en adhérant à la convention de reclassement personnalisé dont l' objet est de régler les conséquence de la rupture, Monsieur X... n' a pas entendu se priver de la possibilité de pouvoir contester les motifs de la rupture du contrat de travail devant le juge compétent, comme il lui était rappelé dans la lettre de rupture du contrat de travail du 22 septembre 2006 qui précise " qu' en application de l' article L. 321- 16 du code du travail, les actions en contestation de la régularité ou de la validité du licenciement doivent être engagées dans le délai de douze mois à compter de la notification de la présente ".
La Cour confirme le jugement entrepris de ce chef.
Sur l' obligation de reclassement :
L' article L. 321- 1 alinéa 3 du code du travail prévoit que le licenciement pour motif économique d' un salarié ne peut intervenir qu' à défaut de reclassement possible dans l' entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel elle appartient parmi les entreprises dont les activités, l' organisation ou le lieu d' exploitation leur permettent d' effectuer une permutation du personnel, même si certaines de ces entreprises sont situées à l' étranger, sauf à démontrer que la législation applicable localement aux salariés étrangers ne permet pas le reclassement.
L' obligation de reclassement doit être exécutée loyalement et sérieusement.
La charge de la preuve de l' impossibilité de proposer un reclassement au salarié pèse sur l' employeur.
En l' espèce, la SA FOCAL a proposé à monsieur X... un poste d' ingénieur développement du secteur professionnel au sein de l' équipe développement aux mêmes conditions de rémunération que son précédent poste. A la date des faits, les organigrammes de l' entreprise versés aux débats démontrent que Monsieur X... aurait intégré, suite au départ d' un salarié, l' équipe qu' il dirigeait précédemment et qu' il aurait été placé sous la direction de Monsieur Y... qui était placé sous sa direction auparavant. L' article 30 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie applicable stipule que le reclassement doit être réalisé sans déclassement ni perte de salaire.

Il apparaît dans ces conditions que cette recherche de reclassement n' était pas loyale.
Par ailleurs, la SA FOCAL ne rapporte pas la preuve qu' elle a recherché un reclassement au sein de l' entreprise en dehors du poste proposé, ou au sein de l' entreprise située en Grande- Bretagne et appartenant au même groupe, alors que le niveau de compétence de Monsieur X... et l' expérience acquise par lui dans ce pays lui permettaient de prétendre à un reclassement en dehors des limites de l' entreprise d' origine.
Ainsi, la SA FOCAL ne rapporte pas la preuve des éléments de faits rendant impossible le reclassement de Monsieur X....
La SA FOCAL n' ayant pas respecté son obligation de reclassement, le licenciement de Monsieur X... se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse.
La Cour infirme le jugement entrepris de ce chef.
En application de l' article L. 122- 14- 4 du code du travail, monsieur X... a droit à des dommages et intérêts d' un montant égal aux salaires des six derniers mois et en fonction du préjudice au- delà de ce montant.
Compte tenu des éléments d' appréciation dont dispose la Cour, le préjudice de monsieur X... doit être évalué à 48. 000 €.
Toujours en application de l' article L. 122- 14- 4 du code du travail, la Cour doit ordonner le remboursement par l' employeur des indemnités de chômage versées à monsieur X... à compter du jour du licenciement et dans la limite de six mois.
Sur la priorité de réembauchage :
L' article L. 321- 14 du code du travail prévoit que le salarié licencié pour motif économique bénéficie d' une priorité de réembauchage durant un délai d' un an à compter de la date de rupture de son contrat s' il manifeste le désir d' user de cette priorité au cours de cette année. Dans ce cas, l' employeur l' informe de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification.
L' article L. 122- 14- 4, dernier alinéa, prévoit qu' en cas de non- respect de la priorité de réembauchage prévue à l' article L. 321- 14, le tribunal octroie au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure à deux mois de salaire.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 octobre 2006, Monsieur X... a informé la SA FOCAL de ce qu' il souhaitait bénéficier de la priorité de réembauchage.
Il produit une offre d' emploi parue sur le site internet de la SA FOCAL de laquelle il ressort que cette dernière recherchait un ingénieur pour le développement des produits de la division au sein du service recherche et développement, pour encadrer une équipe sur un projet donné en relation avec le chef de projet. L' expérience souhaitée est d' avoir occupé 5 ans au minimum un poste similaire et de maîtriser l' anglais.
Monsieur X... ne s' est pas vu proposer cette offre par la SA FOCAL, alors que cette dernière ne démontre pas que Monsieur X... ne pouvait pas occuper le poste vacant. La SA FOCAL n' a pas respecté son obligation de réembauchage.

La Cour infirme le jugement entrepris de ce chef et alloue à monsieur X... une indemnité d' un montant de 12. 400 €.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement entrepris en ce qu' il a dit que l' adhésion de Monsieur X... à une convention de reclassement personnalisé ne faisait pas obstacle à ce qu' il conteste son licenciement,
Infirme pour le surplus le jugement entrepris,
Dit que le licenciement de Monsieur X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Dit que la SA FOCAL n' a pas respecté la priorité de réembauchage de Monsieur X...,
En conséquence, condamne la SA FOCAL à verser à Monsieur X... les sommes de 48. 000 € à titre de dommages- intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 12. 400 € à titre de d' indemnité pour non respect de la priorité de réembauchage,
Ordonne le remboursement par la SA FOCAL JM LAB aux organismes concernés des allocations chômage versées à monsieur X... à compter du jour du licenciement dans la limite de six mois,
Condamne la société FOCAL JM LAB à verser à monsieur X... une indemnité de 2. 000 € en application de l' article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société FOCAL JM LAB aux dépens de première instance et d' appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0075
Numéro d'arrêt : 07/03892
Date de la décision : 14/03/2008

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Reclassement - Obligation de l'employeur - Etendue - // JDF

L'obligation de reclassement doit être exécutée loyalement et sérieusement. La charge de la preuve de l'impossibilité de proposer un reclassement au salarié pèse sur l'employeur


Références :

Articles L. 321-4-2 et L. 321-4-3 du code du travail

article L. 321-1, alinéa 3, du code du travail

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Saint-Etienne, 23 mai 2007

N1 Soc., 5 mars 2008, pourvoi n° 07-41964, Bull. 2008, V, n° 47 (cassation) et l'arrêt cité.N2 Soc., 26 juin 2006, pourvoi n° 05-43841, Bull. 2006, V, n° 288 (1) (rejet)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-03-14;07.03892 ?
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