AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE
R. G : 07 / 00823
X...
C / SOCIETE BOURGUIGNON- WURTZ ET ASSOCIES
APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de GIVORS du 16 Janvier 2007 RG : F 06 / 00085
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 12 MARS 2008
APPELANT :
Monsieur Jean- Pierre X... ......
représenté par Me Mustapha BAICHE, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
SOCIETE BOURGUIGNON- WURTZ ET ASSOCIES 22 rue du 11 Novembre Résidence de l'Atrium 38200 VIENNE
représentée par Me Jacques THOIZET, avocat au barreau de VIENNE
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 31 Octobre 2007
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Louis GAYAT DE WECKER, Président Monsieur Dominique DEFRASNE, Conseiller Mme Catherine ZAGALA, Conseiller
Assistés pendant les débats de Monsieur Julien MIGNOT, Greffier.
ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 12 Mars 2008, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
Signé par Monsieur Louis GAYAT DE WECKER, Président, et par Madame Anita RATION, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Statuant sur l'appel formé par Monsieur Jean- Pierre X... d'un jugement du Conseil de prud'hommes de Givors, en date du 16 janvier 2007 qui a : – débouté Monsieur Jean- Pierre X... de l'ensemble de ses demandes – débouté la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES de ses propres demandes – partagé les dépens par moitié entre les parties.
Vu les écritures et les observations orales à la barre, le 31 octobre 2007, de Monsieur Jean- Pierre X..., appelant qui demande à la Cour :
à titre principal : – de dire que les faits invoqués par lui pour prendre acte de la rupture de son contrat de travail sont justifiés – de dire que cette rupture doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse – de condamner la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES à lui payer : * 7 842, 36 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis * 784, 24 € à titre de congés payés afférents * 2614, 11 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement * 31 369, 32 à titre de dommages- intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse – de condamner la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES à lui remettre sous astreinte de 50 € par jour de retard une attestation ASSEDIC rectifiée et un certificat de travail complété avec la mention de son emploi de cadre depuis le 1er février 2004
à titre subsidiaire : – de dire que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse – de condamner la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES à lui payer les mêmes sommes, à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages- intérêts
en tout état de cause : – de condamner la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES à lui payer : * 18 375 € à titre de rappel sur prime d'activité * 1837, 50 € à titre de congés payés afférents * 1399, 70 € au titre de la majoration des heures supplémentaires effectuées en 2001, 2002 et 2003 * 139, 97 € à titre de congés payés afférents * 8 129, 89 € au titre des heures supplémentaires effectuées en 2004 et 2005 * 812, 99 € à titre de congés payés afférents * 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile – de condamner la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES aux dépens
Vu les écritures et les observations orales à la barre, le 31 octobre 2007, de la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES, intimée qui demande, de son côté, à la Cour : – de débouter Monsieur Jean- Pierre X... de l'intégralité de ses demandes – de condamner Monsieur Jean- Pierre X... au paiement de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens
EXPOSÉ DU LITIGE
Attendu que Monsieur Jean- Pierre X... a été embauché par la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES en qualité de technicien géomètre, niveau 3, coefficient 364 de la convention collective des géomètres experts, suivant contrat à durée déterminée du 22 avril 2001 au 23 juillet 2001, moyennant une rémunération mensuelle brute de 11 000 F pour 151, 67 heures, plus une prime d'activité de 2500 F ; que ce contrat a été renouvelé pour une nouvelle période de trois mois et que par avenant du 11 octobre 2001 il a été transformé en contrat à durée indéterminée, les clauses initiales demeurant inchangées
que le 1er février 2004, Monsieur Jean- Pierre X... a acquis le statut de cadre avec le coefficient 600 ;
qu'en 2005, des difficultés sont apparues entre les parties et que Monsieur Jean- Pierre X..., par lettre recommandée du 1er juillet 2005, a mis en demeure l'employeur d'avoir à lui payer certaines sommes (prime d'activité, heures supplémentaires, frais professionnels) en lui précisant qu'à défaut de règlement il serait contraint de prendre acte de la rupture à ses torts exclusifs ;
que la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES, par courrier du 8 juillet 2005, l'a convoqué à un entretien préalable en vue d'un licenciement ;
que par lettre recommandée du 12 juillet 2005, Monsieur Jean- Pierre X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail en reprochant à son employeur le non- paiement de plusieurs éléments de rémunération précédemment réclamés ;
que par lettre recommandée du 22 août 2005, la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES lui a notifié son licenciement pour faute grave aux motifs suivants : – absence injustifiée du 12 juillet 2005 – comportements violents à l'égard de M. Y..., autre salarié de l'entreprise – erreurs et négligences graves dans six dossiers – saisie- arrêt sur son salaire pour non- respect de ses obligations alimentaires alors qu'il avait affirmé n'être pas débiteur à cet égard ;
que dans ce contexte, Monsieur Jean- Pierre X... demande à la juridiction du travail de lui allouer les rappels de salaire sollicités et de juger la rupture de son contrat de travail sans cause réelle et sérieuse ;
MOTIFS DE LA COUR
1) Sur les demandes salariales
– sur la prime d'activité
Attendu que Monsieur Jean- Pierre X... fait valoir que la prime d'activité mensuelle de 2500 F, prévue à son contrat de travail ne lui a été versée qu'à trois reprises ; que la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES soutient que cette prime a été intégrée dans le salaire de base à compter de juin 2001 ; que l'examen des bulletins de paie révèle effectivement que le salarié n'a perçu au titre de la prime ou d'un complément de salaire que 700 F en avril 2001, 2500 F en juin 2001 et 300 F en novembre 2004 ;
que l'explication de l'employeur n'apparaît pas sérieuse dès lors que le salaire de base versé à Monsieur Jean- Pierre X... jusqu'en février 2004 était d'un montant inférieur au salaire initial augmenté de la prime d'activité et que surtout, rien n'indique que la prime ait été intégrée dans le salaire de base, le passage au statut de cadre et les augmentations périodiques de ce salaire étant des éléments inopérants ;
que la demande en paiement du rappel de prime étant ainsi fondée, il convient d'y faire droit à hauteur de la somme réclamée de 18 375 €, outre l'indemnité compensatrice de congés payés afférente ;
– sur les heures supplémentaires :
Attendu que Monsieur Jean- Pierre X... réclame le paiement des majorations applicables aux heures supplémentaires accomplies par lui en 2001, 2002 et 2003, ce, au taux de 25 % ; que la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES indique que son entreprise employant moins de 20 salariés, le taux de majoration ne peut excéder 10 % ;
qu'en réalité, la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES a un effectif de 32 salariés, répartis sur quatre établissements, de sorte que cet effectif exclut l'application à l'entreprise des dispositions transitoires de l'article 5 de la loi du 19 janvier 2000, dite loi Aubry II, modifiée par la loi du 17 janvier 2003 ;
qu'en l'absence de dispositions conventionnelles particulières et comme le prévoit l'article L. 212 – 5 du code du travail, le salarié est en droit de prétendre au taux de 25 % pour les huit premières heures supplémentaires ; qu'il convient de lui allouer au titre des majorations dues la somme de 1399, 70 €, outre les congés payés afférents ;
Attendu que M X... fait valoir aussi qu'il a accompli en 2004 et 2005, 257 heures supplémentaires qui n'ont pas été rémunérées ; que la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES conteste la réalité de ces heures supplémentaires de même que la sincérité des documents produits par le salarié ;
Attendu que s'il résulte de l'article L 212- 1- 1 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;
qu'en l'espèce, Monsieur Jean- Pierre X... verse aux débats des plannings de travail et quatre attestations indiquant qu'il quittait son travail à des heures tardives ; que ces plannings sont difficilement exploitables et que les attestations manquent totalement de précision ;
que l'employeur produit de son côté d'autres attestations émanant d'une assistante de gestion, d'une secrétaire comptable et d'un ingénieur géomètre de l'entreprise d'où il ressort que le salarié ne remettait pas régulièrement ses fiches d'attachement et qu'il avait réduit son assiduité au travail en 2005 ;
que la Cour n'a pas la conviction que Monsieur Jean- Pierre X... a effectué les heures supplémentaires en cause et que sa demande de ce chef doit être rejetée ;
2) Sur la rupture du contrat de travail :
Attendu que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ;
que la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES, en l'espèce, a manifestement manqué à ses obligations en s'abstenant de payer au salarié la prime d'activité contractuelle et les majorations d'heures supplémentaires prévues par la loi ; qu'il résulte également de la correspondance produite que l'employeur n'a soldé que postérieurement à la prise d'acte de la rupture le montant de la revalorisation du salaire minimum conventionnel applicable au 1er janvier 2005 ;
que ces manquements présentent un caractère de gravité tel qu'ils justifient que la rupture du contrat de travail soit mise à la charge de l'employeur de sorte que la prise d'acte de la rupture à l'initiative de Monsieur Jean- Pierre X..., le 12 juillet 2005, entraîne les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
que le licenciement pour faute grave notifié ultérieurement au salarié est sans objet ;
Attendu que Monsieur Jean- Pierre X... qui avait plus de deux ans d'ancienneté au moment de la rupture dans une entreprise occupant plus de 10 salariés est en droit de prétendre à l'indemnité prévue par l'article L. 122 – 14 – 4 du code du travail ; qu'l a retrouvé un emploi dès le 1er septembre 2005 ; que compte tenu des éléments de la cause, il convient de lui allouer une indemnité correspondante au minimum légal des six derniers mois de salaire, soit la somme de 15 654 € 02 ;
qu'en application du deuxième alinéa de l'article 122 – 14 – 4 précité, la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES devra rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées à Monsieur Jean- Pierre X..., du jour de la rupture au jour du présent arrêt, dans la limite de trois mois d'indemnités de chômage ;
que le salarié a droit également à l'indemnité compensatrice de préavis sur la base de trois mois de salaire et à l'indemnité de licenciement, égale à 3 / 10 de mois de salaire par année d'ancienneté, qui sont prévues par la convention collective applicable ; qu'il lui sera accordé, respectivement, la somme de 7 842, 36 €, outre les congés payés afférents et celle de 2614, 11 €, conformément à sa demande ;
Attendu qu'il y a lieu d'ordonner la remise par la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES d'une attestation ASSEDIC rectifiée et d'un certificat de travail mentionnant la qualité de cadre depuis le 1er février 2004 ; qu'une astreinte n'apparaît pas nécessaire ;
Attendu que la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES qui succombe supportera les dépens ; qu'il convient d'allouer à Monsieur Jean- Pierre X... la somme de 2500 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Dit l'appel recevable
Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau :
Condamne la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES à payer à Monsieur Jean- Pierre X... les sommes de : – 18 375 € à titre de rappel sur prime d'activité – 1837, 50 € à titre de congés payés afférents – 1399, 70 € au titre de la majoration des heures supplémentaires effectuées en 2001, 2002 et 2003 – 139, 97 € à titre de congés payés afférents
Dit que la prise d'acte par Monsieur Jean- Pierre X... de la rupture de son contrat de travail, le 12 juillet 2005, produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse
Condamne la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES à payer à Monsieur Jean- Pierre X... du fait de cette rupture les sommes de : – 7 842, 36 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis – 784, 24 € à titre de congés payés afférents – 2614, 11 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement – 15 654, 02 € à titre de dommages- intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Dit que la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES devra rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées à Monsieur Jean- Pierre X... du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de trois mois d'indemnités de chômage
Dit que la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES devra remettre à Monsieur Jean- Pierre X... une attestation ASSEDIC rectifiée conformément à la présente décision ainsi qu'un certificat de travail mentionnant son statut de cadre à compter du 1er février 2004
Condamne la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES à payer à Monsieur Jean- Pierre X... la somme de 2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile
Déboute Monsieur Jean- Pierre X... du surplus de ses prétentions
Condamne la société BOURGUIGNON- WURTZ et ASSOCIES aux dépens de première instance et d'appel.