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27/02/2008 | FRANCE | N°07/02202

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0268, 27 février 2008, 07/02202


AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR
R. G : 07 / 02202
A...
C / ASSOCIATION ARALIS

APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 15 Mars 2007 RG : F 05 / 03862

COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 27 FEVRIER 2008
APPELANT :
Monsieur Charles A... ...69100 VILLEURBANNE

comparant en personne, assisté de Me Patrick SOREL, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
ASSOCIATION ARALIS 14 place Jules Ferry Espace Brotteaux 69456 LYON CEDEX

représentée par Me André PETITJEAN, avocat au barreau de LYON substitué par

Me Juliette PEROL-FRANQUEVILLE, avocat au barreau de LYON
PARTIES CONVOQUEES LE : 09 Juillet 2007
DEBATS...

AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR
R. G : 07 / 02202
A...
C / ASSOCIATION ARALIS

APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 15 Mars 2007 RG : F 05 / 03862

COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 27 FEVRIER 2008
APPELANT :
Monsieur Charles A... ...69100 VILLEURBANNE

comparant en personne, assisté de Me Patrick SOREL, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
ASSOCIATION ARALIS 14 place Jules Ferry Espace Brotteaux 69456 LYON CEDEX

représentée par Me André PETITJEAN, avocat au barreau de LYON substitué par Me Juliette PEROL-FRANQUEVILLE, avocat au barreau de LYON
PARTIES CONVOQUEES LE : 09 Juillet 2007
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 23 Janvier 2008
Présidée par Madame Marie-Pierre GUIGUE, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Madame Radia GRAIRI, Adjoint administratif faisant fonction de greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Monsieur Didier JOLY, Président Madame Marie-Pierre GUIGUE, Conseiller Madame Danièle COLLIN JELENSPERGER, Conseiller

ARRET : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 27 Février 2008 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
Signé par Monsieur Didier JOLY, Président, et par Mademoiselle Eléonore BRUEL, Adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. ********************

Monsieur Charles A... a été engagé par la maison du travailleur étranger aux droits de laquelle se trouve l'association ARALIS en qualité de directeur de foyer, à compter du 1er juin 1982 et exerçait au dernier état de la collaboration les fonctions de responsable du foyer d'accueil et d'hébergement de Meyzieu, sans formalisation d'un contrat de travail écrit. Au dernier état de la collaboration, Monsieur A... avait une rémunération brute mensuelle de 2 561,22 euros.
Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 12 septembre 2005, l'association ARALIS a convoqué Monsieur A... à un entretien préalable à un éventuel licenciement et lui a notifié sa mise à pied conservatoire.
Par lettre recommandée avec avis de réception datée du 29 septembre 2005, l'association ARALIS a notifié à Monsieur A... son licenciement pour faute grave dans les termes suivants : « Ces dernières semaines ont été portés à notre connaissance un certain nombre de faits graves qui se déroulent sur le site de 4 Chemins / Oasis dont vous avez la responsabilité, qui nous ont amenés à vous notifier une mise à pied à titre conservatoire dans l'attente de l'entretien préalable qui s'est tenu le 22 septembre 2005. Ces faits, qui vous ont été relatés lors de l'entretien préalable sont les suivants :-un trafic de cigarettes dans l'enceinte de l'établissement qui a pris une telle ampleur que les « consommateurs » n'hésitent pas à s'adresser au personnel en place sur ce site pour lui demander où l'on peut se procurer des cigarettes ;-un trafic de drogue dans l'enceinte de l'établissement qui entraîne des allées et venues régulières d'acheteurs auprès d'un résident connu, ainsi qu'une consommation sur place de drogue.-un trafic de carburant dans l'enceinte de l'établissement ayant pour conséquence le stockage de bidons de carburants dans des gaines techniques de l'établissement.

Lors de notre entretien vous avez affirmé que le trafic de cigarette n'était qu'un « ouï-dire », que le trafic de drogue n'avait pas été prouvé et que vous aviez résolu le problème de trafic de carburant. Or il s'avère que ce trafic a été régulièrement porté à votre connaissance par le personnel que vous encadrez sur ce site mais que vous n'avez pas jugé nécessaire de prendre les mesures qui s'imposent en pareils cas, ni même d'en informer votre hiérarchie. Votre fonction de cadre responsable d'un établissement, vous impose, par délégation de la direction générale, de garantir la sécurité des biens et des personnes que vous accueillez dans votre établissement. En qualité de professionnel confirmé de cette fonction, vous maîtrisez parfaitement les procédures à mettre en oeuvre dans de le cas de situations graves, notamment la procédure qui impose une information écrite de la direction générale. Il ne vous a jamais été demandé de gérer seul des situations telles que celles citées ci-dessus. Il est cependant constitutif d'une faute grave le fait de ne pas avoir informé la direction de ces situations afin qu'elle puisse mettre en oeuvre des actions sur le plan institutionnel en lien avec les services de l'Etat pour y remédier. Notre fonction de logeur des plus démunis nous impose d'être particulièrement vigilants sur la sécurité des personnes que nous accueillons. Aucune zone de non-droit ne peut être tolérée au sein de notre association. Un trafic de carburant, des bidons cachés dans des gaines techniques génèrent un risque d'incendie, voire d'explosion sur cet établissement, pouvant entraîner des risques physiques pour les résidents et les salariés, dont la cinquantaine d'enfants présents sur ce site en permanence. Cette posture professionnelle est inadmissible car vous n'avez pas su apprécier la gravité de la situation bien qu'ayant été alerté régulièrement par le personnel en poste sur ce site. Les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien du 22 septembre 2005 ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation sur les faits qui vous sont reprochés ; nous vous informons que nous avons, en conséquence, pris la décision de vous licencier pour faute grave. Compte tenu de la gravité de ces faits, votre maintien au sein de l'association s'avère impossible, le licenciement prendra donc effet à la date de première présentation de cette lettre recommandée, sans indemnité de préavis ni de licenciement. ».

Monsieur A... a saisi le conseil des prud'hommes de Lyon.
Par jugement du 15 mars 2007, le conseil des prud'hommes de Lyon (section encadrement) a :-dit que le licenciement de Monsieur A... repose sur une cause réelle et sérieuse,-condamné l'association ARALIS à payer à Monsieur A... les sommes de : Ø7 683,66 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,640,30 euros au titre du 13ème mois sur préavis outre celle de 832,37 euros au titre des congés payés afférents, Ø8 252,80 euros à titre d'indemnité de licenciement, Ø1 536,73 euros à titre de rappel de salaires pendant la mise à pied,128,06 euros à titre de rappel de 13ème mois sur mise à pied outre 166,48 euros au titre des congés payés afférents, Ø1 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.

Monsieur A... a interjeté appel du jugement.
LA COUR
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales à l'audience par Monsieur A... qui demande à la cour de :-infirmer le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,-statuant à nouveau, dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,-condamner l'association ARALIS au paiement de la somme de 70 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-confirmer le jugement pour le surplus,-y ajoutant,-dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2005 et ordonner la capitalisation des intérêts,-condamner l'association ARALIS au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales à l'audience par l'association ARALIS qui demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de dire que le licenciement de Monsieur A... est fondé sur une faute grave, de débouter Monsieur A... de l'intégralité de ses demandes et de le condamner aux dépens de première instance et d'appel ;
DISCUSSION
Sur le licenciement
Attendu qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 122-6, L. 122-14-2 alinéa 1 et L. 122-14-3 du Code du travail que devant la juridiction saisie d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié le salarié pour faute grave, d'une part, d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre de licenciement, d'autre part, de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis ;
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 122-44 du code du travail qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ;
que l'association ARALIS reproche à Monsieur A... de ne lui avoir transmis aucune information sur les différents trafics au sein du foyer alors que la dénonciation lui en était faite par les employés à plusieurs reprises ; que Monsieur A... soulève la fin de non-recevoir tirée de la prescription des faits fautifs, datés pour les plus récents d'entre eux de juin 2005 alors que la procédure de licenciement a été initiée le 12 septembre 2005 ; qu'il résulte du compte-rendu de l'entretien préalable et de l'attestation de Monsieur B... que la direction de l'association ARALIS a été informée des difficultés résultant du soupçon de trafics à l'intérieur au foyer-résidence de Meyzieu au cours d'une réunion du 7 septembre 2005 ; que le défaut d'information invoqué par l'employeur constitue un comportement fautif continu de sorte que la prescription des faits fautifs n'était pas acquise lors de l'engagement de la procédure disciplinaire le 12 septembre 2005 ;
Que Madame Claude C..., directrice de développement social, déclare : « Le 14 juin 2005, j'ai été nommée directrice de développement social sur le territoire de l'Est à ARALIS. Dès lors, je suis devenue la supérieure hiérarchique de Monsieur A.... A aucun moment, Monsieur A... ne m'a fait part de dysfonctionnements liés à des trafics quelconques, ni à l'oral, ni à l'écrit, ni même lors de l'entretien individuel que j'ai eu avec lui le 13 juillet 2005 et ce, malgré des demandes insistantes de ma part concernant le climat social des établissements OASIS et 4 Chemins (Meyzieu) » ;
Que Monsieur Bruno D..., directeur de gestion locative, qui a précédé cette dernière dans ses fonctions de septembre 2004 à mai 2005 déclare : « Dans le cadre de nos réunions mensuelles, Monsieur A... nous informe : intervention de la police sur le problème de stockage d'essence site de Meyzieu. « CR du 810312005 » en pièce jointe. Aucune information communiquée par la suite par Monsieur A... jusqu'au 13 juin 2005 date à laquelle je n'ai plus été son responsable » ;
Que Monsieur Mohamed B..., gardien réceptionniste, déclare : « Mai 2005 : Le trafic de stupéfiants qui a lieu quotidiennement dans le site Aralis de Meyzieu. Pour les informations, ils ont été remontés au responsable de site Monsieur A... à plusieurs reprisse et toutes les informations sur les personnes concernées et le véhicule de ou des personnes. Car j'ai vu les personnes « sniffer » de la drogue dans la salle de jeux et au 3ème étage (sanitaire). Fin mai 2005 : Au sujet du trafic de tabac, qui a lieu déjà bien longtemps, me concernant les informations ont été remontées fin mai 2005 à Monsieur A... avec les noms des familles concernées. Début juin 2005 : Toutes les informations à propos du trafic de carburant ont été remontées au responsable de site Mr A... avec les nom des familles concernées. Ce trafic a lieu même le week-end les informations sont remontées la semaine qui suit. J'ai trouvé des bidons dans les sanitaires du 7ème étage que j'ai fait descendre. »

Que Madame Maria F..., agent d'entretien, atteste : « Avril 2005 j'ai remonté les informations au responsable de site. Mr A... au sujet du trafic de drogue qui a lieu régulièrement dans le foyer et aussi dans la salle de jeu. Par la suite le trafic de carburant il y a de cela 2 ans que je l'ai mis au courant et il n'y pas eu de changement même pour l'année 2005. Mars 2005 : Au sujet du trafic de tabac, les informations ont été remontées au responsable de site : Mr A... et les noms des familles concernées. PS : Mr A... me disait à plusieurs reprises si il y a un souci majeur de ne pas le remonter au siège et que ça reste entre nous. » ;

Que Monsieur Georges G..., agent d'entretien, déclare : « Début mai 2005 : Pendant mon ménage quotidien que j'effectuai j'ai aperçu des bidons de 20 litres (7 ou 8) de carburant qui se trouvait dans les douches du 4ème étage. Les informations ont été remontées à Mr A..., et le trafic qui a lieu. Fin mai 2005 : Je nettoie l'étage du 3ème où a lieu le trafic de drogue que je vois quotidiennement, avec des allées et venues de personnes (10 personnes sur 1 H 30 du temps de ménage). Depuis sept mois que je travaille chez ARALIS Meyzieu à chaque fois qu'il y a du trafic ou qu'il y a un problème quelconque j'ai remonté les informations au responsable de site : Mr A... qui lui ça ne l'inquiétait pas du tout. » ;

Que Madame Jesenka H..., animatrice sociale de proximité, déclare : « Je pris mon poste sur le site MEYZIEU le 15 décembre 2004. J'ai été accueilli par Mr A... responsable de site qui m'a présenté le site comme un site sans problème, en me précisant si il y a des problèmes de ne pas remonter au siège. Février : A partir du mois de février 2005 avec Mme I... nous avons commencé à faire tour sur les étages et nous avons constaté la présence les bidons carburants vides sur 5ème et 7ème étages. Nous avons informé le responsable de site et demandé agir. Le trafic continue. Mais en fin de mois d'avril 2005, j'ai vu deux personnes sortir de la salle de jeux. J'ai posé la question à Mr B... et Mme F... sur les personnes. Ils m'ont expliqué que deux Messieurs étaient dans la sale de jeux en train de se sniffer. De suite j'ai informé Mr A... et lui demandé d'agir et de nous informer sur la suite. A partir de ce moment, j'ai essayé d'observer les arrivées des personnes non résidents dans le foyer sur site. Mr B... m'a signalé la voiture grise 206 sensée de faire le trafic sur site. J'ai commencé de surveiller la présence de cette voiture ; les jours et le temps qu'il reste au foyer. J'ai constaté la présence 2-3 fois dans la semaine. Le trafic continue à ce jour là. Au début de mois de septembre avec Mme I... nous avons constaté la présence des bidons de carburant vides au 5ème étage. » ;

Que Madame Juliette I..., animatrice d'insertion chargée d'asile, déclare : « J'ai pris mon poste le 30 juin 2003. Le 17 décembre 2003, M. A... a souhaité me parler dans son bureau, suite à la réunion de la veille sur site avec la Directrice Générale, la Directrice Générale adjointe et le Directeur de Gestion locative après l'agression d'un demandeur d'asile. M. A... m'a dit qu'il ne fallait pas prévenir la direction pour ce genre d'incident, que les problèmes du foyer se règlent entre nous, qu'il ne faut rien faire remonter. Pendant l'hiver 2003, il y avait une odeur d'essence dans mon bureau, j'en ai parlé à M. A.... Lorsque je montais sur les étages pour distribuer le courrier, il y avait souvent cette même odeur sur certains étages (7è et 5è). Cette information a été transmise au responsable de site. En juillet 2004, j'ai appris par des anciens résidents qui venaient me voir qu'il y avait effectivement des trafics au foyer (essence, cigarettes) J'en ai parlé au responsable de site. Depuis mon arrivée sur le site, il n'y a jamais eu de réunions d'équipe qui aurait permis d'échanger tous ensembles sur ces éléments concernant les trafics. En février 2005, depuis l'arrivée d'une collègue (en décembre 2004) Jesenka H... et les tours sur les étages que nous avons faits, nous a permis de découvrir précisément les étages concernés par le trafic d'essence (le 7è et le 5è) par la présence de bidons vides. Au 4è nous avons trouvé une veste qui sentait l'essence, Ces informations ont été transmises au responsable de site. Nous lui avons demandé d'agir. Le trafic continue. Courant mai 2005, l'agent d'entretien a retrouvé des bidons vides (5è) et il nous en a parlé. Début septembre 2005, j'ai trouvé sous une bâche au 5ème dix bidons vides. Fin Avril 2005, M. B... et Mme F... trouvent deux personnes extérieures au foyer, dans la salle de jeux, je les voir sortir dans le grand hall. On s'interroge entre nous. M. B... nous explique qu'il a constaté la présence d'une voiture 206 grise qui vient très souvent au foyer. Le conducteur vient voir une personne du foyer et après plusieurs autres personnes viennent chez le résident. Après recherches, on sait qu'il s'agit d'un trafic de drogues divers. Je constate la venue régulière du fournisseur qui reste environ 20 min à chaque fois. Cette information a été remontée à Monsieur A... par Mme H.... Concernant le trafic de cigarettes, j'ai surpris des personnes étrangères au foyer acheter des cigarettes à la porte d'un résident (mai-juin 2005). De plus, à l'entrée du foyer, une personne extérieure au foyer (que j'interpelle) me dit qu'elle cherche à acheter des cigarettes. Quelques temps après juillet 2005, au cours d'une discussion dans mon bureau, je dis à M. A... que maintenant le trafic est en plein jour et que la personne qui vient acheter me l'a dit ouvertement (qu'elle cherchait des cigarettes à acheter au foyer parce qu'elles sont moins chères). » ;

Que Monsieur A... demande à la cour d'écarter les témoignages de Madame F... et de Messieurs G... et B... au motif qu'ils sont rédigés de la même main ; que s'il est exact que l'écriture est identique, les trois témoignages comportent la signature de leur auteur avec copie de leurs pièces d'identité, ne sont pas rédigés en des termes identiques et ne relatent pas les mêmes faits ; que la fausseté des déclarations qui y sont contenues n'est pas établie ;
Que Monsieur A... soutient qu'il a régulièrement informé la direction du trafic de gasoil lors des réunions de janvier 2005 ; que cependant, les attestations produites, notamment celles de Mesdames H... et I... établissent que les employés du centre ont constaté la présence de bidons après janvier 2005 sans qu'il soit rapporté que le responsable du centre en ait informé la direction ou la gendarmerie précédemment intervenue sur le site ;
que ces témoignages circonstanciés, s'ils n'établissent pas à eux seuls la matérialité de trafics internes au foyer résidence, établissent de manière concordante que Monsieur A... avait connaissance d'éléments de fait mettant sérieusement en cause la sécurité du foyer-résidence hébergeant 250 personnes, dont de nombreux enfants, et a délibérément choisi de ne pas informer la direction de l'association ARALIS des problèmes de sécurité et de garantie du climat social en résultant ;
qu'il résulte du descriptif de la fonction de responsable de structure d'hébergement produit par le salarié que sous l'autorité du directeur de gestion locative auquel il était tenu de rendre compte, Monsieur A... était notamment chargé de garantir le maintien d'un bon climat social dans l'établissement, de veiller à l'évolution de certaines situations sociales en liaison avec l'intervention sociale et les organismes extérieurs et d'assurer un rôle préventif en matière de gestion des situations délicates ; que l'association ARALIS, garante de la sécurité des personnes et des biens en qualité de structure d'hébergement, ne peut, sans information du responsable de structure, mettre en oeuvre les mesures qu'elle estime appropriées en lien avec les services de l'Etat ;
que la rétention volontaire d'informations de nature à révéler une atteinte à la sécurité des personnes et de la structure d'hébergement, imputable à Monsieur A... en sa qualité de responsable, constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis ;
que le licenciement pour faute grave de Monsieur A... est justifié ;
que Monsieur A... doit être débouté de l'intégralité de ses demandes de rappel de salaires au titre de la mise à pied, de rappel de 13ème mois sur mise à pied et préavis, d'indemnités de rupture et de licenciement abusif ;
Sur les frais irrépétibles
Attendu qu'il est équitable de laisser Monsieur A... supporter les frais qu'il a exposés, tant en première instance que devant la cour, et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS,
Reçoit l'appel régulier en la forme ;
Infirme le jugement ;
Statuant à nouveau :
Dit que le licenciement de Monsieur A... repose sur une faute grave ;
Déboute Monsieur A... de l'intégralité de ses demandes ;
Déboute Monsieur A... de sa demande en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Condamne Monsieur A... aux dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0268
Numéro d'arrêt : 07/02202
Date de la décision : 27/02/2008

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement disciplinaire - Faute du salarié - Appréciation - / JDF

La rétention volontaire d'informations de nature à révéler une atteinte à la sécurité des personnes et de la structure d'un foyer hébergement, par le responsable de ce foyer, auprès de ses dirigeants, constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée limitée du préavis.


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Lyon, 15 mars 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-02-27;07.02202 ?
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