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13/02/2008 | FRANCE | N°07/00722

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale, 13 février 2008, 07/00722


AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR

R. G : 07 / 00722

SOCIETE DI FINANCES

C / Y...

APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 25 Janvier 2007 RG : F 05 / 04272

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 FEVRIER 2008
APPELANTE :
SOCIETE DI FINANCES 31 rue des Poissonniers 92200 NEUILLY SUR SEINE

représentée par Me Patricia TALIMI, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Helyett LE NABOUR, avocat au barreau de PARIS

INTIME :

Monsieur Bernard Y...... 69450 SAINT-CYR AU MONT D'OR
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AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR

R. G : 07 / 00722

SOCIETE DI FINANCES

C / Y...

APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 25 Janvier 2007 RG : F 05 / 04272

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 FEVRIER 2008
APPELANTE :
SOCIETE DI FINANCES 31 rue des Poissonniers 92200 NEUILLY SUR SEINE

représentée par Me Patricia TALIMI, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Helyett LE NABOUR, avocat au barreau de PARIS

INTIME :

Monsieur Bernard Y...... 69450 SAINT-CYR AU MONT D'OR

comparant en personne, assisté de Me Robert DEMAHIS, avocat au barreau de LYON substitué par Me Denis ROUANET, avocat au barreau de LYON
PARTIES CONVOQUEES LE : 19 Avril 2007
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 12 Décembre 2007
Présidée par Madame Danièle COLLIN-JELENSPERGER, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Madame Annick PELLETIER, Adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Monsieur Didier JOLY, Président Madame Marie-Pierre GUIGUE, Conseiller Madame Danièle COLLIN-JELENSPERGER, Conseiller

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 13 Février 2008 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
Signé par Monsieur Didier JOLY, Président, et par Mademoiselle Eléonore BRUEL, Adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Monsieur Bernard Y... a été engagé par la société DI FINANCES, à compter du 10 septembre 2001, en qualité de directeur de l'Agence RHONE-ALPES qui inclut l'Agence de LYON. L'activité de la société est le placement de directeurs financiers experts " DFE " pour l'exécution de missions auprès de la clientèle.
La rémunération est composée d'une partie fixe et d'une partie prime de bilan.
Un litige a opposé monsieur Y... au cours de l'année 2005, à la suite de décisions, qui selon lui, auraient réalisé une modification substantielle de son contrat de travail.
Par un courrier en date du 29 juillet 2005, monsieur Y... a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur, avec un préavis de trois mois, dans les termes suivants :
"... je considère avoir été licencié par votre Société en raison des modifications substantielles que vous avez apportées et mises en oeuvre (unilatéralement) en mars et avril avec effet rétroactif au 1er janvier 2005 non pas à mes conditions de travail mais à mon contrat de travail de directeur de l'agence de Lyon.
Les raisons qui m'obligent à prendre cette décision sont les suivantes :
Je vous rappelle qu'aux termes de mon contrat de travail en date de septembre 2001, j'étais rémunéré par un salaire fixe auquel s'ajoutait une rémunération variable égale à 15 % de la marge de contribution totale de l'agence Rhône Alpes (après prime de bilan des opérateurs).
Vos décisions de mars et avril 2005 que vous avez déjà mises en oeuvre unilatéralement et qui sont détaillées, notamment par le document intitulé " procédure de fonctionnement interne entre agences et Directeurs associés " (et qui sont entrées en application avec effet rétroactif au 1er janvier 2005) ont eu pour effet de réduire la rémunération variable qui était la mienne antérieurement de même qu'elles ont de manière significative modifiée mes prérogatives.
Ces décisions et leurs effets, entre autres et sans que les quelques exemples ci-après soient exhaustifs, sont les suivants :
1) La mutualisation des " moyens humains " impactera le compte de l'agence de LYON et par conséquent l'assiette de calcul de ma rémunération variable dès lors que même si les DFE (Directeurs Financiers Experts) restent attachés à leur agence d'origine, ils peuvent être, par décision de la Direction Générale parisienne, affectés au traitement d'un dossier ne relevant pas de la compétence territoriale de LYON ;
En d'autres termes, l'agence de LYON supportera leur coût directement mais ne bénéficiera plus en contrepartie de 30 % ou 40 % de la marge brute de l'opération considérée.
A titre d'exemple sur ce point, les résultats de l'agence de LYON ont été impactés du coût du licenciement de monsieur D... décidé par la Direction générale parisienne pour un montant de 30 000 euros.
2) La Direction Générale parisienne s'est réservée le droit lorsqu'une affaire est générée sur le territoire de l'agence de LYON, de ne pas autoriser la poursuite de cette affaire par des rendez-vous pris sur PARIS par le Responsable de l'agence de LYON (note du 24 mars 2005, chapitre 3, paragraphe b règle no1).
Il en résulte automatiquement une perte de chance majeure pour que cette affaire puisse être traitée par l'agence de LYON ce qui impactera ma rémunération variable calculée en fonction des résultats de l'agence de LYON.
3) Les décisions précitées ont conféré à l'agence de PARIS une compétence territoriale qui comprend désormais le siège national des Sociétés d'importance mais aussi les clients situés à l'étranger (même document, article 3 paragraphe A1).
Dès lors et compte tenu de ce qui précède, tout prospect généré par l'agence de LYON concernant une Société en un établissement dans son ressort, mais dont le siège, comme c'est fréquent, est à PARIS ou à l'étranger, ne pourra pas être mené à bonne fin par l'agence de LYON et par là même échappera aux résultats de l'agence de LYON, d'où un impact sur ma rémunération variable.
Il convient de noter qu'auparavant, c'est à dire avant les décisions modificatrices précitées, l'agence de LYON avait la possibilité de remonter en prospection sur les décideurs basés en région parisienne pour autant que la mission y relative se situait géographiquement sur le quart sud est (BRAKE, EXCELLA, LABO NPC, UGITECH, SINT0, EURODEC...).
Tel n'est plus le cas aujourd'hui.
Enfin, je viens d'être exclu du Comité exécutif alors que j'étais membre auparavant.
Il s'en suit que les modifications considérées ont affecté non seulement ma rémunération variable mais aussi mes prérogatives.
Par un courrier en date du 5 septembre 2005, monsieur Y... a été dispensé de l'exécution du solde de son préavis.
Monsieur Y... a été engagé par la société MCH MANAGERS, à compter du 1er octobre 2005, pour occuper les fonctions de Vice Président Opérations salarié sans mandat social.
La société DI FINANCES, par un courrier en date du 28 octobre 2005, a mis en demeure monsieur Y... de cesser ses actes de concurrence déloyale.
Monsieur Y... a saisi le Conseil de prud'hommes de LYON le 10 novembre 2005 pour voir juger que la rupture du contrat de travail en date du 29 juillet 2005 s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société DI FINANCES à lui payer les sommes suivantes :-12 945,20 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,-137 877,84 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-1 500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre intérêts de droit au jour de l'instance.

Par un jugement rendu le 25 janvier 2007, sur le dernier état des demandes, le Conseil de prud'hommes a dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et que la clause de non-concurrence est nulle en l'absence de contrepartie financière ; le jugement a condamné la société DI FINANCES à payer à monsieur Bernard Y... les sommes suivantes :-10 533,33 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,-50 000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-5 000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour usage abusif de la clause de non concurrence nulle du fait de l'employeur-1 000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile. Le jugement a débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Le jugement a été notifié à la société DI FINANCES le 29 janvier 2007. Celle-ci a déclaré faire appel le 1er février 2007.
Vu les conclusions de la société DI FINANCES soutenues oralement à l'audience, tendant à l'infirmation du jugement et au constat de ce que la prise d'acte de la rupture s'analyse en démission ; au rejet des demandes en paiement, et au remboursement des sommes payées dans le cadre de l'exécution provisoire ainsi qu'à la condamnation de monsieur Y... à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens.
Vu les conclusions de monsieur Y... soutenues oralement à l'audience, tendant à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et y ajoutant, à la condamnation de la société DI FINANCES à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts en raison des manoeuvres de celle-ci à l'égard tant de lui-même que de la société MGC MANAGERS, ainsi que celle de 4 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

DISCUSSION

LE CONTRAT DE TRAVAIL
Monsieur Y... est nommé à compter du 10 septembre 2001, directeur de l'agence de LYON " en collaboration étroite avec monsieur Jean-Patrick E..., directeur de l'Agence Rhône Alpes qui inclut l'Agence de Lyon " : monsieur Y... n'est pas dirigeant.
Le contrat ne contient aucune autre définition des fonctions, ou du périmètre de l'Agence, aucune " prérogative " particulière du directeur de l'Agence de Lyon.
Le contrat ne définit aucune autonomie particulière de l'agence.
Chacun des directeurs fait un rapport commercial (cf compte rendu de la réunion des directeurs associés du 27 janvier 2005).
Le contrat prévoit que c'est la direction générale qui établira un compte d'exploitation de l'agence Rhône Alpes " établi suivant les modalités en usage au sein du Cabinet ".
Le contrat ne définit pas le périmètre géographique de l'agence Rhône Alpes et ne contient aucune disposition relative à une exclusivité de l'une ou l'autre des deux seules agences (PARIS et LYON) ou du siège.
Contractuellement l'agence de LYON n'a donc pas d'autonomie : il en résulte que la politique commerciale, relève du seul dirigeant.
Le contrat indique que dans la mesure où monsieur Y... démontrerait dans ses activités une faculté d'autonomie, les associés pourraient le coopter pour le faire entrer dans le capital : " enfin, il est convenu que, dans la mesure où vos activités démontreront votre autonomie et vos succès dans le poste de Directeur d'agence, le capital de DI Finances puisse vous être ouvert, si les associés décident de vous coopter, ce qui est notre souhait commun " : monsieur Y... ne soutient pas qu'il ait été appelé à participer au capital.
Le contrat prévoit une rémunération mensuelle de 6 098 euros bruts et une partie variable :
" Cette rémunération mensuelle de base pourra être complétée par une prime de bilan dès lors, qu'à la date de la clôture de l'exercice de l'année de référence, les conditions cumulatives suivantes seront ainsi remplies :
-......-Le compte d'exploitation de l'Agence Rhône Alpes devra avoir dégagé une marge de contribution avant impôt supérieure à 10 % de son chiffre d'affaires.

Le montant de cette prime, toutes charges comprises y inclus la part patronale des cotisations, sera égal en valeur totale pour le Directeur de l'Agence Rhône Alpes et le Directeur de l'Agence de Lyon, à 15 % de la marge de contribution totale de l'Agence Rhône Alpes, après prime de bilan des opérateurs. La quote part revenant à chacun sera calculée en fonction de l'apport commercial de chacun suivant les critères en usage dans le Cabinet. Elle sera versée après l'arrêté de bilan annuel. "
SUR LA PRISE D'ACTE DE LA RUPTURE DU 29 JUILLET 2005.
EN DROIT
Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire d'une démission.
L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige. Le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.
EN FAIT
Monsieur Y... reproche à la société DI FINANCES, " des modifications substantielles que vous avez apportées et mises en oeuvre (unilatéralement) en mars et avril avec effet rétroactif au 1er janvier 2005 non pas à mes conditions de travail mais à mon contrat de travail de directeur de l'Agence de Lyon ".
Il affirme que l'employeur a pris des mesures qui auraient eu pour effet de réduire la rémunération variable qui était la sienne antérieurement, de même qu'elles auraient de manière significative modifié ses prérogatives ".
-La procédure de fonctionnement interne entre agences et directeurs associés :
Monsieur Y... fonde sa démonstration sur la mise en place d'une " procédure de fonctionnement interne entre agences et Directeurs associés " (document de mars 2005 repris dans le document d'avril 2005).
La société DI FINANCES expose que cette procédure consacre de nouvelles règles de fonctionnement commercial, soit une révision de sa politique commerciale dans l'intérêt de tous.
De fait, la société DI FINANCES a toute liberté pour organiser ses agences et notamment les relations contre elles ; aucune des parties ne produit un quelconque document antérieur sur le fonctionnement interne entre agences : la société DI FINANCES n'a concédé aucune exclusivité.
Le document mis en cause par monsieur Y... a pour finalité une " mutualisation " des moyens humains, une gestion au niveau central, (" Di Finances se gère comme une seule entreprise, même si elle comporte deux agences "), avec toutefois un rattachement des DFE à leur agence d'origine.
La procédure mise en place ne comporte aucune mesure discriminatoire concernant l'agence de LYON par rapport à celle de PARIS : les dispositions sont identiques pour les deux agences.
Monsieur Y... soutient que cette " mutualisation " " impactera le compte de l'agence de LYON ", et par conséquent selon lui, l'assiette du calcul de sa rémunération variable, du fait que les DFE rattachés à l'agence de LYON peuvent être affectés au traitement d'un dossier extérieur. Il convient de constater principalement qu'aucun engagement contractuel ne limite la société DI FINANCES dans ses prérogatives de direction, et secondairement que la " mutualisation " étant réciproque, la règle mise en place peut jouer tant au " profit " du chiffre d'affaires de l'agence de PARIS ou de l'agence de LYON. La mise en place de la mutualisation ne constitue pas une modification d'un élément du contrat de travail.
Monsieur Y... reproche à la société de " s'être réservée le droit lorsqu'une affaire est générée sur le territoire de l'agence de LYON, de ne pas autoriser la poursuite de cette affaire par des rendez-vous pris sur PARIS par le responsable de l'agence de LYON ".
Le texte précis est le suivant, au titre des règles de fonctionnement commercial : " chaque agence prospecte sur son territoire et n'intervient sur le territoire de l'autre qu'en parfaite coordination (aucun rendez-vous à Paris qui ne soit coordonnée avec Y... et réciproquement ". Cette règle, qui impose une réciprocité entre agences participe du pouvoir de direction de la société et monsieur Y... qui ne démontre aucun engagement contractuel contraire à son égard de la part de la société ne peut se plaindre d'une " perte de chance " qui impacterait l'assiette de sa rémunération variable.

Monsieur Y... reproche à la société d'avoir ainsi conféré à l'agence de PARIS une compétence territoriale qui comprendrait le siège social des sociétés d'importance ainsi que des clients situés à l'étranger. Ainsi qu'il a été dit, monsieur Y... ne peut contractuellement revendiquer une quelconque exclusivité géographique pour l'agence de LYON. Le règles de fonctionnement commercial critiquées ne mettent de fait pas en place une exclusivité absolue mais des règles d'application réciproque dans le cas de prospection sur le territoire de l'autre :
" Règle No 1 : chaque agence prospecte sur son territoire et n'intervient sur le territoire de l'autre qu'en parfaite coordination (aucun rendez-vous à Paris qui ne soit coordonnée avec DB et réciproquement).
Règle No 2 : tout prospect qui entraînera une proposition d'intervention situé dans le territoire de l'autre doit fait l'objet d'une information préalable de celle-ci avec coordination.
Règle No 3 : En cas de commercialisation commune le premier apporteur du dossier reste le coordinateur de la négociation.
Règle No 4 : L'agence qui a commercialisé un dossier reste seule responsable des négociations des prix.
Il s'évince des écrits de monsieur Y... qu'il revendique, pour l'agence de LYON " les plus gros pourvoyeurs de missions dont les sièges se trouvent sur PARIS ", et ce, sans aucun fondement contractuel.
Monsieur Y... ne rapporte pas la preuve de ce que la procédure de fonctionnement soit contraire aux dispositions de son contrat de travail, que ce soit en terme de rémunération variable ou de " prérogatives ".
Il ne rapporte pas non plus la preuve de ce que, de fait, la mise en place rétroactive au 1er janvier 2005 de la procédure de fonctionnement interne ait été défavorable à l'agence de LYON. La société DI FINANCES affirme sans être démentie, que dans les faits le chiffre d'affaires de l'Agence RHONE-ALPES de 2005 a été meilleur que celui de 2004 (pièce 11).
-l'exclusion du comité exécutif dont il était membre auparavant.
Monsieur Y... ne produit aucune pièce relative à cette affirmation alors que la société DI FINANCES précise que le comité n'existait pas avant mars 2005 et que monsieur Y... a toujours participé aux réunions des directeurs associés (qui comprend ces derniers, les directeurs " business development " ; les directeurs superviseurs ; la responsabilité administrative et financière et le président) ainsi qu'aux réunions de toute l'équipe (Directeurs d'Agence + Directeurs Financiers Expert). La société DI FINANCES produit le procès-verbal de la réunion des directeurs associés du 27 janvier qui porte les initiales de BDB et celui de la réunion des DFE du 25 avril 2005 à laquelle monsieur Y... est noté comme présent.
En l'absence de modification substantielle du contrat de travail, et de comportement gravement fautif de la société DI FINANCES, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail s'analyse en une démission.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
Monsieur Y... sera en conséquence débouté des ses demandes d'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
SUR LA CLAUSE DE NON CONCURRENCE ET SUR LA DEMANDE DE DOMMAGE-INTERETS EN RAISON DES MANOEUVRES DE LA SOCIETE D et I FINANCES A L'EGARD DE LA SOCIETE MCG MANAGERS ET DE MONSIEUR Y...
Le contrat de travail dispose que, " compte tenu de la nature de nos activités, et donc du risque de conflit d'intérêt, vous vous interdisez d'entrer au service, sous quelque forme que ce soit (notamment en qualité de salarié, mandataire, prestataire de service etc...) d'une société pour le compte de laquelle votre agence aurait contracté dans le cadre de vos fonctions au sein de DI FINANCES.
Cette interdiction sera valable pendant toute la durée de votre contrat de travail et pendant une année, courant à compter de la date de la rupture de votre contrat de travail (fin du préavis, que celui-ci soit travaillé ou non) quelle que soit la partie ayant pris l'initiative de cette rupture ou son motif ".
La société DI FINANCES soutient que cette clause est une clause " de respect de clientèle " qui ne serait pas une véritable clause de non-concurrence.
L'article L 120-2 du Code du travail dispose que " nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnée au but recherché ". Au titre de ces droits et libertés, figure le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle.
Une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives.
Le respect par un salarié d'une clause de non-concurrence illicite lui cause nécessairement un préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue.
La clause dite de respect de clientèle constitue une restriction apportée à l'exercice professionnel du salarié qui doit s'interpréter nécessairement comme étant une clause de non-concurrence, certes limitée.
A défaut de contrepartie financière, cette clause est nulle.
Force est cependant de constater que monsieur Y... n'a pas respecté cette clause : le contrat de travail qu'il a signé avec la société MCG MANAGERS le 10 octobre 2005, en qualité de vice-président opérations, contient la clause suivante : " Le salarié qui accepte cet engagement, déclare formellement n'être lié à aucune entreprise et être libre de tout engagement envers son précédent employeur, et notamment d'être libre de toute clause de non-concurrence, (toute fausse déclaration sur ce point étant de nature à mettre en jeu sa responsabilité).
S'il est exact que la société DI FINANCES, informée du démarchage de son client le groupe ARCELOR, a, par lettre du 28 octobre 2005, mis en demeure monsieur Y... de cesser ses actes contraires à la clause du contrat de travail ce qui constitueraient également, selon elle, des actes de concurrence déloyale, monsieur Y... n'établit pas qu'il a pris cette mise en demeure en considération dans le cadre de son nouvel emploi, et cela, même s'il a engagé une procédure de référé en inopposabilité de la clause.
La société DI FINANCES a également adressé un courrier le 28 octobre 2005 à la société MCG MANAGERS pour l'informer de la clause et la mettre en demeure de cesser les actes qu'elle qualifiait de " constitutifs de comportement et de concurrence déloyaux ". Aucun élément ne permet de considérer que la société MCG MANAGERS ait obtempéré à cette mise en demeure.
Monsieur Y... argumente sur le préjudice qui lui aurait été causé par le fait qu'il aurait été licencié par la société MCG MANAGERS à la suite des " nombreuses intimidations de la société DI FINANCES ".
Il produit la lettre de licenciement qui est intervenu le 19 mai 2006 pour faute grave : le fait en avril 2006 d'avoir informé un collaborateur d'un projet confidentiel, " projet relatif à la prise de participation accompagnée d'un éventuel mandat de directeur général... Il est apparu que vous aviez indiqué que les méthodes de travail allaient changer et que vous aviez désormais tout pouvoir... "
Monsieur Y... ne démontre pas que les courriers de la société DI FINANCES ait été l'un des motifs du licenciement pour faute grave dont il a été l'objet plus de cinq mois plus tard.
La société DI FINANCES établit que monsieur Y... n'a pas respecté la clause de concurrence par ailleurs nulle pour défaut de contrepartie financière.
Monsieur Y... ne rapporte pas la preuve du préjudice qui lui aurait été causé par les mises en demeure de la société DI FINANCES, à une époque où la cause de nullité de la clause ne lui était pas connue.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la société DI FINANCES à titre de dommages-intérêts pour usage abusif de la clause de non-concurrence nulle.
SUR LES FRAIS IRREPETIBLES ET LES DEPENS
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la société DI FINANCES à payer à monsieur Y... la somme de 1 000 euros, ainsi que les dépens.
Monsieur Y... sera débouté de ses demandes à ces titres et devra payer à la société DI FINANCES la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les dépens de première instance et d'appel.
SUR LA DEMANDE DE REMBOURSEMENT DES SOMMES VERSEES AU TITRE DE L'EXECUTION PROVISOIRE
En droit, l'infirmation d'un jugement qui prononce condamnation entraîne nécessairement restitution des sommes versées en vertu de cette condamnation. L'obligation de remboursement résulte de plein droit de la réformation de la décision.
Il n'y a en conséquence pas lieu de prononcer une condamnation au remboursement des sommes versées.

PAR CES MOTIFS

LA COUR
Infirme le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,
Dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail s'analyse en une démission de la part de monsieur Bernard Y....
Déboute monsieur Bernard Y... de l'ensemble de ses demandes.
Condamne monsieur Bernard Y... à payer à la société DI FINANCES la somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07/00722
Date de la décision : 13/02/2008
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Clause de non-concurrence - Validité - Conditions - Contrepartie financière - Défaut - Portée

La société soutient que la clause insérée dans le contrat de travail est une clause "de respect de clientèle" qui ne serait pas une véritable clause de non-concurrence. L'article L 120-2 du Code du travail dispose que "nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnée au but recherché". Au titre de ces droits et libertés, figure le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle. Une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives. Le respect par un salarié d'une clause de non-concurrence illicite lui cause nécessairement un préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue. La clause dite de respect de clientèle constitue une restriction apportée à l'exercice professionnel du salarié qui doit s'interpréter nécessairement comme étant une clause de non-concurrence, certes limitée. A défaut de contrepartie financière, cette clause est nulle. Force est cependant de constater que le salarié n'a pas respecté cette clause : le contrat de travail qu'il a signé avec la société, en qualité de vice-président opérations, contient la clause suivante : "Le salarié qui accepte cet engagem- ent, déclare formellement n'être lié à aucune entreprise et être libre de tout engagement envers son précédent employeur, et notamment d'être libre de toute clause de non-concurrence". S'il est exact que la société, informée du démarchage de son client le groupe ARCELOR, a mis en demeure le salarié de cesser ses actes contraires à la clause du contrat de travail (ce qui constituerait également, selon elle, des actes de concurrence déloyale), le salarié n'établit pas qu'il a pris cette mise en demeure en considération dans le cadre de son nouvel emploi, et cela, même s'il a engagé une procédure de référé en inopposabilité de la clause. La société établit que le salarié n'a pas respecté la clause de concurrence par ailleurs nulle pour défaut de contrepartie financière. Le salarié ne rapporte pas la preuve du préjudice qui lui aurait été causé par les mises en demeure de la société, à une époque où la cause de nullité de la clause ne lui était pas connue. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la société à titre de dommages-intérêts pour usage abusif de la clause de non-concurrence nulle.


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Lyon, 25 janvier 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-02-13;07.00722 ?
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