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13/02/2008 | FRANCE | N°07/00263

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale, 13 février 2008, 07/00263


AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR

R. G : 07 / 00263

Y... NEE X...

C / SA LA HALLE REPRESENTEE PAR SON PDG EN EXERCICE

APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 15 Décembre 2006 RG : F 05 / 01712

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 FEVRIER 2008
APPELANTE :
Madame Zohra Y... NEE X...... 69100 VILLEURBANNE

représentée par Me Céline MISSLIN, avocat au barreau de LYON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2007 / 1519 du 24 / 05 / 2007 accordée par le bureau d'aide juri

dictionnelle de LYON)

INTIMEE :
SA LA HALLE REPRESENTEE PAR SON PDG EN EXERCICE 17 avenue Charles de Gaulle 69544...

AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR

R. G : 07 / 00263

Y... NEE X...

C / SA LA HALLE REPRESENTEE PAR SON PDG EN EXERCICE

APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 15 Décembre 2006 RG : F 05 / 01712

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 13 FEVRIER 2008
APPELANTE :
Madame Zohra Y... NEE X...... 69100 VILLEURBANNE

représentée par Me Céline MISSLIN, avocat au barreau de LYON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2007 / 1519 du 24 / 05 / 2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIMEE :
SA LA HALLE REPRESENTEE PAR SON PDG EN EXERCICE 17 avenue Charles de Gaulle 69544 CHAMPAGNE AU MONT D'OR

représentée par Me Pierre-André DUBUS, avocat au barreau de PARIS substitué par Me MONY, avocat au barreau de PARIS
PARTIES CONVOQUEES LE : 24 Mai 2007
DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 12 Décembre 2007
Présidée par Madame Danièle COLLIN-JELENSPERGER, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Madame Annick PELLETIER, Adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Monsieur Didier JOLY, Président Madame Marie-Pierre GUIGUE, Conseiller Madame Danièle COLLIN-JELENSPERGER, Conseiller

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 13 Février 2008 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
Signé par Monsieur Didier JOLY, Président, et par Mademoiselle Eléonore BRUEL, Adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
Par un contrat à durée indéterminée en date du 8 juin 2000, à temps partiel, avec une répartition du travail du lundi au vendredi, tous les matins de 9H15 à 12H, succédant à un contrat initiative emploi d'un an à compter du 8 juin 1999, madame Zohra X... épouse Y... a été engagée par la société SOGEIVET DEFI CLUB, en qualité d'agent d'entretien : le lieu du travail est situé à VILLEURBANNE,291 cours Emile Zola. Le domicile de madame Y... est à VILLEURBANNE,..., à cinquante mètres de son lieu de travail.
Le contrat de travail contient la clause suivante : " LIEU DE TRAVAIL ET MOBILITE Le lieu de travail du salarié sera situé à Villeurbanne étant précisé que celui-ci pourra être amené à se déplacer partout où les nécessités de son travail l'exigeront. Cette obligation constitue un élément déterminant dans la décision de la société de l'embaucher. "

Le contrat de travail a été transféré à la société LA HALLE, le 31 janvier 2005, par l'effet des dispositions de l'article L 122-12 du Code du travail ; le transfert a été confirmé à madame Y... par lettre du 1er février 2005, qui, a convié la salariée à participer à une formation pendant la durée des travaux affectant le magasin de VILLEURBANNE.
Par lettre en date du 16 mars 2005, madame Y... a refusé la proposition de mutation à CHAMPAGNE AU MONT D'OR au motif de la durée du temps de transport qui était largement supérieur à son temps de travail ; elle déclarait rejeter l'offre de transaction de 1 900 euros qu'elle considérait comme inacceptable et ajoutait qu'elle n'était pas démissionnaire, la modification de son contrat étant substantielle.
Par un courrier en date du 21 mars 2005, la société LA HALLE a confirmé le nouveau rattachement géographique de la salariée, et fait une nouvelle proposition pour tenir compte des contraintes personnelles de celle-ci, consistant en une répartition des horaires de travail concentrée sur trois jours au lieu de cinq.
La société la HALLE contestait l'analyse de la salariée sur la nature de la modification du contrat de travail faisant valoir la clause de mobilité et imposait à la salariée un délai de réponse expirant au 31 mars 2005.
Par un courrier en date du 4 avril 2005 (AR signé le 5 avril 2005), la société LA HALLE a rappelé à madame Y... cette date butoir du 31 mars 2005, faisant état de ce que la proposition de mutation était liée à l'organisation globale de l'entreprise ; elle demandait à la salariée de justifier de son absence, ce qui sera réitéré par un courrier du 11 avril 2005 (AR signé le 12 avril 2005).
Après avoir convoqué madame Y... à une entretien préalable du 21 avril 2005, la société LA HALLE, par un courrier en date du 26 avril 2005, a licencié madame X... pour faute grave :
" En effet, nous vous avions informée dès le 3 mars 2005 de votre prochaine affectation sur le site de Champagne au Mont d'Or. Ce nouveau rattachement géographique était lié à l'organisation globale de l'entreprise. Nous soulignons que cette affectation sur le seul site de l'agglomération lyonnaise correspondant à vos emplois et qualification était prévue par la clause de mobilité contenue à votre contrat de travail.
Pour mieux répondre à vos contraintes personnelles, nous vous avions indiqué dans notre courrier du 21 mars 2005 que nous consentirions à modifier votre répartition horaire. Dans cette même correspondance, nous vous demandions de nous faire part de votre position définitive quant à cette affectation.
Malgré nos relances des 4 et 11 avril 2005, nous sommes restés sans nouvelles de votre part. Vous ne vous êtes présentée depuis le 15 mars 2005 ni sur le magasin de Villeurbanne, ni sur le site de Champagne au Mont d'Or et n'avez répondu à aucun de nos courriers pourtant systématiquement réceptionnés le lendemain de leur expédition.
Nous précisons que cette absence injustifiée, constatée depuis le 15 mars pénalise la bonne organisation de l'entreprise et rend impossible la poursuite de nos relations professionnelles... "
Madame Y... a contesté la faute grave par un courrier du 27 avril 2005. Elle a saisi le Conseil de prud'hommes de LYON, le 9 mai 2006, en paiement des sommes de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non respect de la procédure de licenciement, et de 6 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, ainsi qu'en réintégration.

Par un jugement de départage en date du 15 décembre 2006, le Conseil de prud'hommes, a dit que le licenciement repose sur une faute grave et a débouté madame Y... de toutes ses demandes.
Ce jugement a été notifiée à madame Y... le 18 décembre 2006. Celle-ci a déclaré faire appel le 5 janvier 2007.
Vu les conclusions de madame Y..., soutenues oralement à l'audience, tendant à la réformation du jugement et au constat de la modification unilatérale du contrat de travail par la société HALLE, et de l'absence de faute grave, ainsi qu'à la condamnation de cette société à lui payer les sommes suivantes :-8 000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-964,90 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,-257,90 euros à titre d'indemnité de licenciement, outre les intérêts au taux légal sur ces condamnations,-2 000,00 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile. Elle soutient que la clause de mobilité qui est générale, ne lui est pas opposable, et qu'elle était bien fondée à refuser la modification alors au surplus que la société LA HALLE poursuit le marché sur le lieu du travail à VILLEURBANNE : qu'il n'y a pas abandon de poste de sa part.

Elle ajoute que l'horaire contractuel a été minoré, étant de 7,90 euros en janvier 2005 et 7,03 euros en mars 2005.
Vu les conclusions de la société LA HALLE soutenues oralement à l'audience, tendant à la confirmation du jugement, au rejet des demandes de madame Y... et à sa condamnation à lui payer la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle soutient que la nouvelle affectation de madame Y... est un simple changement des conditions de travail, conforme à la clause de mobilité, et ce d'autant que cette affectation se situe dans le même secteur géographique (11 km), bien desservi par les transports publics et qu'elle a proposé une nouvelle répartition d'horaires pour satisfaire la salariée. Elle précise que, compte tenu de sa dimension, le site de VILLEURBANNE ne nécessite pas de femme d'entretien pour le nombre d'heures de madame Y....
Elle conteste toute modification de la rémunération, l'erreur sur le nombre d'heures ayant été rectifiée.
Elle conclut en conséquence qu'elle démontre l'absence injustifiée de la salariée, constitutive de faute grave.

DISCUSSION

SUR LA CLAUSE DE MOBILITE ET LA MODIFICATION DU LIEU DU TRAVAIL
EN DROIT
La mention du lieu de travail dans le contrat de travail a valeur d'information, à moins qu'il ne soit stipulé par une clause claire et précise que le salarié exécutera exclusivement dans ce lieu ou qu'au contraire il soit inséré une clause de mobilité. Toute clause de mobilité doit être limitée géographiquement.
La modification du lieu du travail dans un même secteur géographique constitue une modification des conditions de travail qui relève du pouvoir de direction de l'employeur, et non d'une modification du contrat de travail.
La bonne foi contractuelle étant présumée, les juges n'ont pas à rechercher si la décision de modifier les conditions de travail d'un salarié, ou de faire jouer une clause de mobilité stipulée dans le contrat de travail est conforme à l'intérêt de l'entreprise ; il incombe au salarié de démontrer que cette décision a été en réalité prise pour des raisons étrangères à cet intérêt, ou bien qu'elle a été mise en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi.
EN FAIT
La clause de mobilité figurant au contrat de travail n'est pas limitée géographiquement, ce qui la rend illicite : elle est inopposable à madame Y... ;
L'indication du lieu du travail à VILLEURBANNE constitue cependant une simple information, étant observé qu'aucune clause n'a été insérée pour contractualiser le lieu du travail dans l'intérêt de la salariée.
La modification du lieu du travail ressort en conséquence du pouvoir de direction de l'employeur si cette modification intervient dans le même secteur géographique.
En l'espèce, le nouveau lieu de travail est desservi par les transports publics : il ressort du même secteur géographique.
Madame Y... ne soutient ni ne justifie qu'elle aurait accompli un autre travail à temps partiel connu de l'employeur et incompatible avec la modification du lieu du travail. La société LA HALLE lui a proposé au surplus une nouvelle répartition d'horaire sur trois jours au lieu de cinq.
Madame Y... est en conséquence mal fondée à soutenir que la société LA HALLE a modifié son contrat de travail, en transférant l'exécution du contrat de travail à CHAMPAGNE AU MONT D'OR.
SUR LA MODIFICATION DE LA REMUNERATION
Le bulletin de paie du mois de janvier 2005 est établi par la société SOGEIVET DEFI CLUB sur la base de 54 heures au taux de 7,9 euros, soit un salaire brut de 426,60 euros.
Le bulletin de paie du mois de mars 2005 est établi par la société LA HALLE sur la base du même salaire mensuel brut de 426,60 euros pour un nombre d'heures de 60,67 au taux de 7,0315.
Madame Y... ne justifie pas avoir effectué plus de 54 heures, ce qui accrédite l'affirmation de la société LA HALLE selon laquelle elle a commis une erreur sur le nombre d'heures et le taux horaire, mais que madame Y... a été payée sur la même base mensuelle de 426,60 euros brut.
SUR LE LICENCIEMENT POUR FAUTE GRAVE
EN DROIT
Il résulte des dispositions combinées des articles L 122-6, L 122-14-2 (alinéa1) et L 122-14-3 du Code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis.
EN FAIT
Madame Y... ne rapporte pas la preuve de modifications apportées à son contrat de travail, et donc de fautes de la société LA HALLE à son égard, alors que cette dernière justifie d'un abandon de poste caractérisé.
Le refus de madame Y... de poursuivre l'exécution du contrat de travail en raison du simple changement du lieu du travail décidé par l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction, la rend responsable de l'inexécution du préavis qu'elle a nécessairement refusé d'exécuter aux nouvelles conditions, en ne se rendant ni sur l'ancien, ni sur le nouveau lieu du travail, et en ne répondant ni à la mise en demeure du 11 avril 2005, ni à la convocation à l'entretien préalable fixé au 21 avril 2005 : le maintien de madame Y... dans l'entreprise, même pendant la durée limitée du préavis était impossible.
Le jugement, qui a dit que le licenciement repose sur une faute grave et qui a rejeté les demandes de madame Y... sera confirmé en toutes ses dispositions.
SUR LES FRAIS IRREPETIBLES ET LES DEPENS
Madame Y... sera déboutée de ses demandes à ces titres.
Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Madame Y... sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR
Confirme le jugement en toutes ses dispositions.
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamne madame Zohra X... épouse Y... aux dépens d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07/00263
Date de la décision : 13/02/2008
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Modification - Modification imposée par l'employeur - Modification du lieu de travail - Appréciation - Office du juge

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Pouvoir de direction - Etendue - / JDF

La mention du lieu de travail dans le contrat de travail a valeur d'information, à moins qu'il ne soit stipulé par une clause claire et précise que le salarié exécutera exclusivement dans ce lieu ou qu'au contraire il soit inséré une clause de mobilité. Toute clause de mobilité doit être limitée géographiquement. La modification du lieu du travail dans un même secteur géographique constitue une modification des conditions de travail qui relève du pouvoir de direction de l'employeur, et non d'une modification du contrat de travail. La bonne foi contractuelle étant présumée, les juges n'ont pas à rechercher si la décision de modifier les conditions de travail d'un salarié, ou de faire jouer une clause de mobilité stipulée dans le contrat de travail est conforme à l'intérêt de l'entreprise ; il incombe au salarié de démontrer que cette décision a été en réalité prise pour des raisons étrangères à cet intérêt, ou bien qu'elle a été mise en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi. En l'espèce, la clause de mobilité figurant au contrat de travail n'est pas limitée géographiquement, ce qui la rend illicite : elle est inopposable à la salariée. L'indication du lieu du travail à Villeurbanne constitue cependant une simple information, étant observé qu'aucune clause n'a été insérée pour contractualiser le lieu du travail dans l'intérêt de la salariée. La modification du lieu du travail ressort en conséquence du pouvoir de direction de l'employeur si cette modification intervient dans le même secteur géographique. En l'espèce, le nouveau lieu de travail est desservi par les transports publics : il ressort du même secteur géographique. La salariée ne soutient ni ne justifie qu'elle aurait accompli un autre travail à temps partiel connu de l'employeur et incompatible avec la modification du lieu du travail. La société lui a proposé au surplus une nouvelle répartition d'horaire sur trois jours au lieu de cinq. La salariée est en conséquence mal fondée à soutenir que la société a modifié son contrat de travail, en transférant l'exécution du contrat de travail à Champagne au Mont d'Or.


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Lyon, 15 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-02-13;07.00263 ?
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