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22/11/2007 | FRANCE | N°06/07015

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0173, 22 novembre 2007, 06/07015


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE

R.G : 06 / 07015

X...

C /
SAS MOREL

APPEL D'UNE DECISION DU :
Conseil de Prud'hommes de BOURG-EN-BRESSE
du 08 Septembre 2005
RG : F 04 / 00399

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2007

APPELANT :

Monsieur Michel X...
...
71240 SENNECEY LE GRAND

comparant en personne, assisté de Me CEDRIC PUTAGNIER, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

SAS MOREL
Malafretaz
B.P 68
01340 MONTREVEL EN BRESSE

représentée p

ar Me Eric DEZ, avocat au barreau de BOURG-EN-BRESSE

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Octobre 2007

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIB...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE

R.G : 06 / 07015

X...

C /
SAS MOREL

APPEL D'UNE DECISION DU :
Conseil de Prud'hommes de BOURG-EN-BRESSE
du 08 Septembre 2005
RG : F 04 / 00399

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2007

APPELANT :

Monsieur Michel X...
...
71240 SENNECEY LE GRAND

comparant en personne, assisté de Me CEDRIC PUTAGNIER, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

SAS MOREL
Malafretaz
B.P 68
01340 MONTREVEL EN BRESSE

représentée par Me Eric DEZ, avocat au barreau de BOURG-EN-BRESSE

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Octobre 2007

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Louis GAYAT DE WECKER, Président
Monsieur Dominique DEFRASNE, Conseiller
Mme Catherine ZAGALA, Conseiller

Assistés pendant les débats de Madame Anita RATION, Greffier.

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 22 Novembre 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Monsieur Louis GAYAT DE WECKER, Président, et par Madame Anita RATION, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Monsieur Michel X... a été engagé le 6 octobre 2000 par la SAS MOREL dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée en qualité de vendeur sur la base d'un traitement fixe mensuel équivalant au SMIC avec en sus le bénéfice d'une commission de 5 % lorsque le chiffre d'affaires mensuel réalisé était supérieur à 15. 245 euros.

Consécutivement à la création à l'initiative de la gérante de la SAS MOREL de la société M / M, le salarié a adressé le 26 juillet 2004 à son employeur un courrier dénonçant le fait que ladite société aurait prospecté sur le secteur géographique dont il avait l'exclusivité.

Convoqué le 31 août 2004 à un entretien préalable à un éventuel licenciement et mis à pied à titre conservatoire, M X... a été licencié le 14 septembre 2004 pour faute lourde motif pris de ce qu'il avait détourné une somme de 450 euros.

Saisi le 22 septembre 2004 d'une contestation de son licenciement, le Conseil de Prud'hommes de BOURG-EN-BRESSE, suivant jugement rendu le 8 septembre 2005, a dit que le licenciement querellé reposait bien sur une faute lourde et débouté M X... de l'ensemble de ses demandes, débouté la SAS MOREL de l'ensemble de ses demandes et condamné le salarié aux entiers dépens.

Le 19 septembre 2005, Monsieur X... a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 14 septembre 2005.

M Michel X... demande, réformant, de dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, et de condamner la SAS MOREL à lui payer les sommes de :
-5. 265 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 526,50 euros pour congés payés y afférents,
-700 euros à titre d'indemnité de licenciement,
-877,50 euros a titre du rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire, outre 87,55 euros au titre des congés payés y afférents,
-20. 000 euros à titre de dommages et intérêts,
-1. 500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux entiers dépens.

Il conteste avoir commis détourné au détriment de son employeur la somme de 450 euros, en sous-évaluant, en accord avec le client en question (M Y...), le montant du marché à l'effet de se faire remettre une partie du prix en espèces.

Il expose qu'il avait comme instructions, en relation avec l'obtention du paiement de sommes en espéces destinées à son employeur, de sous-estimer le devis élaboré par lui pour permettre au client d'échapper au paiement de partie de la TVA ce qui explique que la facture litigieuse établie au nom de M Y... à hauteur d'un montant de 3809,60 euros ait correspondu aux travaux effectivement réalisés ;

Il fait observer que si son intention avait été de conserver par devers lui la somme de 450 euros reçue en espèce, il n'aurait pas pris le risque de délivrer un reçu comme cela a été le cas

Il observe enfin qu'eu à la production par lui de plusieurs copies de devis faisant tous état d'un coût très sensiblement supérieur à la facturation, la société MOREL n'est pas crédible lorsqu'elle soutient qu'elle n'aurait découvert les faits litigieux qu'au mois d'août 2004

Il soutient que la procédure de licenciement ayant été engagée plus de deux mois après les faits du 22 juillet 2003, aucune sanction n'était plus possible alors même que l'employeur ne démontre pas les avoir ignorés pendant près d'un an.

Il estime que s'il a été licencié c'est en raison du courrier adressé à son employeur le 26 juillet 2004.

La SAS MOREL maintient que l'acompte de 450 euros en espèces que Monsieur X... s'est fait remettre le 22 juillet 2003 par le client Monsieur Y... ne lui a jamais été remis.

Elle soutient que n'en ayant eu connaissance que le 3 août 2004 à la suite des confidences faites par M Y..., il ne peut lui être opposé la prescription de l'article L 122-44 du code du travail

Elle observe que l'appelant, sauf à user de la calomnie, est dans l'incapacité de justifier qu'il lui aurait été demandé de se faire remettre des espèces par les clients sous le prétexte d'échapper pour partie au paiement de la TVA.

Concernant le prétendu lien avec le courrier du salarié dénonçant la violation par l'employeur des droits qui lui avaient été reconnus, elle fait valoir que la clause selon laquelle le salarié bénéficiait d'une exclusivité sur les " département de l'Ain et limitrophes " relève d'une erreur matérielle manifeste qui a été depuis corrigée (la même erreur ayant été commise dans le contrat de travail de l'autre vendeur avec lequel il travaillait sur le même secteur).

Elle fait valoir que M X... n'ayant pas hésité à user de chantage en la menaçant d'un contrôle fiscal, une vérification de comptabilité effectuée du 5 décembre 2005 au 6 mars 2006 n'a pas donné lieu aux redressements espérés par le salarié.

Sur quoi la Cour

Sur la recevabilité

L'appel, interjeté dans le délai d'un mois prévu par les articles 538 du nouveau Code de procédure civile et R. 517-7 du Code du travail, est régulier en la forme ce qui rend recevable l'appel incident qui s'y est greffé.

Sur le fond

Sur le licenciement querellé :

-les principes

La faute lourde est définie comme celle commise par le salarié dans l'intention de nuire à l'employeur ou à l'entreprise.

La charge de la preuve en incombe à l'employeur qui l'invoque et la détermination de la gravité de la faute est laissée à l'appréciation des Juges qui restent tenus d'appliquer la législation de droit public énoncée par le Code du Travail.

La faute lourde impliquant un licenciement disciplinaire, " aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance... "

Dés lors que les faits sanctionnés ont été commis plus de deux mois avant l'engagement des poursuites disciplinaires, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve qu'il n'en a eu connaissance que dans les deux mois qui ont précédé l'engagement des poursuites

La lettre de licenciement fixant les limites du litige, elle doit énoncer le ou les motifs du licenciement, lesquels doivent être précis, objectifs, vérifiables et, en matière de faute, situés dans le temps.

-l'espèce

Fixant les limites du litige, la lettre de licenciement pour faute lourde est motivée comme suit :
" (..) Nous avons mis en place depuis le début de l'année 2004 un système de calcul de marge et de coût chantier par chantier ;

Nos diverses discussions et les contrôles effectués ont porté leurs fruits puisque nous avons assisté à une amélioration progressive de vos ratios sur les huit premiers mois de l'année.

Nous avons cependant récemment découvert (sur le dossier Marco Jacky) que vous aviez reçu, au préjudice de la société, de Monsieur Marco une somme de 450 euros le 22 juillet 2003 que vous aviez détournée.

Un tel comportement frauduleux caractérise un abus de confiance et permet de comprendre l'anormalité de certains ratios de marge (...) "

Au terme du contrat de travail il était prévu qu'en sa qualité de représentant de la société, M X... était tenu d'agir en conformité absolue avec les directives de celle-ci et d'appliquer les méthodes commerciales qui lui seront indiquées, qu'a cette fin, il devra notamment :
-appliquer les tarifs et conditions de vente de la société sans aucune dérogation à moins d'autorisation expresse
-enregistrer les commandes et les transmettre aussitôt, en veillant à servir correctement les documents en usage dans la société.

La société MOREL soutient que ce serait à l'occasion d'une intervention dans le cadre de son service aprés vente sur un volet roulant vendu à M Jacky Y... qu'elle aurait appris du client mécontent de l'incident technique que celui-ci avait payé en sus de la somme indiquée sur le devis dûment reprise dans la facturation une somme en espèces de 450 euros ;

Il ressort des pièces versées aux débats que la somme de 450 euros remise à M RIBOREL le 22 juillet 2003 en acompte sur la commande du rideau pour la véranda n'a pas été reprise lors de la facturation.

Il reste que la société MOREL ne justifie pas au vu de la seule attestation délivrée le 3 août 2004 par M Y... que c'est à cette occasion qu'elle aurait appris le détournement allégué.

Il est en effet pour le moins singulier de constater que l'attestation fournie par M Y... ne comporte aucune appréciation quant aux conséquences d'une telle remise alors même que si la remise litigieuse avait été dépourvue de cause comme il est soutenu, le client en question n'aurait pas manqué de réclamer au minimum la restitution de la somme versée en trop.

Par ailleurs l'explication fournie quant aux prétendues circonstances de la découverte des faits litigieux ne correspond pas à celle sous-entendue dans la lettre de licenciement dans laquelle il a été rappelé la mise en place depuis le début de l'année 2004 d'un système de vérification des coûts et marge chantier par chantier.

Enfin il y a lieu de constater que la procédure de licenciement a fait suite de quelques jours seulement à l'initiative prise par M MOREL de dénoncer le non respect par l'employeur de la clause d'exclusivité qui lui avait été consentie.

A supposer que les faits reprochés aient effectivement présenté un caractère fautif, il est pour le moins étonnant que la société MOREL n'ait pas mis à profit l'espace de temps ayant séparé la prétendue découverte des faits litigieux de l'engagement de la procédure pour tenter de trouver d'autres faits de même nature échappant à la prescription de l'article L 122-44 du code du travail ce qu'elle ne prétend pas.

Les faits de détournement reprochés remontant au milieu de l'année 2003 (remise de la somme de 450 euros le 22 juillet 2003 et paiement de la facture le 14 mai 2004), la société MOREL ne justifie pas de ce qu'elle n'a eu connaissance des faits litigieux que dans le délai de deux mois ayant précédé l'engagement des poursuites (31 août 2004).

La lettre de licenciement ne faisant état d'aucun autre grief, il y a lieu, réformant, de dire que le licenciement querellé est dépourvu de cause réelle.

Il sera en conséquence fait droit aux demandes de M X... tant en ce qui concerne le rappel de salaire sollicité au titre de la période de mise à pied conservatoire que des indemnités de rupture en l'absence de toute contestation quant aux modalités de calcul des sommes réclamées.

En ce qui concerne les dommages et intérêts réclamés, compte tenu des éléments dont la Cour dispose, il sera fait droit à la demande de M RIBOREL à hauteur de la somme de 14 000 euros, le jugement étant la encore réformé en conséquence.

Sur les droits de l'ASSEDIC

Le salarié comptant plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise occupant habituellement plus de dix travailleurs et le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, il y a lieu de condamner d'office la SAS MOREL à rembourser à l'ASSEDIC le montant, plafonné à six mois de telles indemnités, des prestations de base de l'allocation chômage susceptibles d'avoir été versées à l'intéressé à la suite de son licenciement.

Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Il sera fait droit aux demandes de M RIBOREL dans les limites du dispositif.

La SAS MOREL qui succombe sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par ces motifs

Déclare l'appel recevable ;

le dit bien fondé ;

Réformant et statuant à nouveau :

Dit le licenciement querellé dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SAS MOREL au paiement des sommes suivantes :
-877,50 euros à titre du rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire, outre 87,55 euros au titre des congés payés y afférents,
-5. 265 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 526,50 euros pour congés payés y afférents,
-700 euros à titre d'indemnité de licenciement,
-14. 000 euros à titre de dommages et intérêts,
-1. 500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Condamne d'office la SAS MOREL à rembourser à l'ASSEDIC le montant, plafonné à six mois de telles indemnités, des prestations de base de l'allocation chômage susceptibles d'avoir été versées au salarié à la suite de son licenciement ;

Dit qu'une expédition du présent arrêt sera envoyée par le secrétariat greffe de la Cour à l'ASSEDIC et à l'UNEDIC ;

Condamne la société MOREL aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La GreffièreLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0173
Numéro d'arrêt : 06/07015
Date de la décision : 22/11/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Bourg-en-Bresse, 08 septembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2007-11-22;06.07015 ?
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