R. G : 06 / 03904
décision du Tribunal de Grande Instance de SAINT ETIENNE Au fond du 31 mai 2006
RG No 1998 / 1638
Z... X... X...
C /
X... Y... Scp MOULARD BOURET Y... FOURNEL ET MARTIN
COUR D'APPEL DE LYON
PREMIERE CHAMBRE CIVILE A
ARRET DU 15 NOVEMBRE 2007
APPELANTES :
Madame Cécile Z... épouse X...... 38000 GRENOBLE
représentée par la SCP LIGIER DE MAUROY-LIGIER, avoués à la Cour
assistée de Me REY, avocat au barreau de Lyon
Madame Béatrice X... divorcée A... ...38210 TULLINS
représentée par la SCP LIGIER DE MAUROY-LIGIER, avoués à la Cour
assistée de Me REY, avocat au barreau de Lyon
Madame Isabelle X... épouse B... ...01400 SANDRANS
représentée par la SCP LIGIER DE MAUROY-LIGIER, avoués à la Cour
assistée de Me REY, avocat au barreau de Lyon
INTIMES :
Monsieur Henri X... ...38950 QUAIX EN CHARTREUSE
représenté par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour
assisté de Me ARDUIN avocat au barreau de Lyon
Maître André Y... ... 42000 SAINT ETIENNE
représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour
assisté de Me RINCK avocat au barreau de Lyon
Scp MOULARD BOURET Y... FOURNEL ET MARTIN 13, Place de l'Hotel de Ville 38000 GRENOBLE
représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour
assisté de Me RINCK avocat au barreau de Lyon L'instruction a été clôturée le 07 Septembre 2007
L'audience de plaidoiries a eu lieu le 11 Octobre 2007
L'affaire a été mise en délibéré au 15 Novembre 2007
COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :
Président : Monsieur VOUAUX-MASSEL Conseiller : Madame BIOT Conseiller : Monsieur GOURD Greffier : Mme JANKOV pendant les débats uniquement
A l'audience M. VOUAUX-MASSEL a fait le rapport conformément à l'article 785 du NCPC.
ARRET : contradictoire
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile ;
signé par Monsieur VOUAUX-MASSEL, président et par Madame WICKER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur Alain X..., docteur en médecine et chirurgie, est décédé le 12 juin 1980.
Sa succession se composait notamment de divers biens immobiliers sis à TULLINS (Isère) et à QUAIX-EN-CHARTREUSE (Isère), d'une propriété rurale à LIERNOLLES (Allier), d'un fonds de commerce de clinique médicale, chirurgicale et maternité à TULLINS (Isère), de 2966 actions de la SA STEARINERIE Z... ET FILS, ayant son siège à SCOURY (Indre).
Il a laissé pour lui succéder son épouse, Madame Cécile Z..., veuve X..., avec laquelle il était marié sous le régime de la séparation de biens pure et simple aux termes de leur contrat de mariage, et les trois enfants issus de l'union :
-Monsieur Henri X...,-Madame Isabelle X..., épouse B...,-Madame Béatrice X..., divorcée A....
Antérieurement à son décès, Monsieur Alain X... avait légué à son épouse la quotité disponible la plus large suivant acte du 23 octobre 1978 de Me E..., notaire à TULLINS (Isère). Madame Cécile Z..., veuve X... a opté pour la quotité de 1 / 4 en pleine propriété des biens dépendant de la succession.
Suivant acte reçu par Me E... du 1er juillet 1980, Madame Cécile Z..., veuve X..., Madame Isabelle X..., épouse B... et Madame Béatrice X..., divorcée A... donnaient à Monsieur Henri X... procuration pour gérer la succession.
Par acte de Maître André Y..., Notaire associé de la SCP MOULARD-BOURET-Y...-FOURNEL-MARTIN à SAINT-ETIENNE, un partage partiel intervenait entre les co-indivisaires le 9 mai 1988. Il concernait une masse de 5. 000. 000 francs répartie comme suit :
* Madame Cécile Z..., veuve X... :-usufruit sa vie durant de la propriété qu'elle occupe à TULLINS (Isère) 160. 000 francs-liquidités740. 000 francs-soulte à recevoir de Monsieur Henri X... 350. 000 francs
* Monsieur Henri X...-propriété de QUAIX-EN-CHARTREUSE (Isère) 900. 000 francs-totalité des actions de la SA STEARINERIE Z... ET FILS 700. 000 francs à charge pour lui de payer à Madame Cécile Z..., veuve X... une soulte de :-350. 000 francs
* Madame Isabelle X..., épouse B...-nue-propriété de la maison TULLINS (Isère) 640. 000 francs-liquidités 610. 000 francs
* Madame Béatrice X..., divorcée A...-une maison à TULLINS (4, place Gambetta) 600. 000 francs-liquidités 650. 000 francs
Par acte du 6 mai 1998, Madame Cécile Z..., veuve X..., Madame Isabelle X..., épouse B... et Madame Béatrice X..., divorcée A... ont fait assigner Maître André Y... et la SCP MOULARD-BOURET-Y...-FOURNEL-MARTIN aux fins de voir constater que Maître André Y... a manqué à son obligation de conseil à l'égard de Madame Cécile Z..., veuve X... et de ses deux filles à l'occasion de la rédaction de l'acte de partage, de voir condamner solidairement Maître André Y... et la SCP MOULARD-BOURET-Y...-FOURNEL-MARTIN à réparer le préjudice qu'elles estiment avoir subi, de voir désigner, pour la détermination de ce préjudice, un expert afin de fixer la valeur des biens immobiliers et mobiliers inclus dans l'acte de partage partiel du 9 mai 1998 à la date de l'établissement de cet acte et enfin de condamner solidairement Maître André Y... et la SCP MOULARD-BOURET-Y...-FOURNEL-MARTIN à leur verser une somme provisionnelle de 1. 000. 000 francs.
Mesdames X... ont également fait assigner, par acte d'huissier du 30 mars 1999, Monsieur Henri X... afin, d'une part, qu'il soit constaté que son intervention est nécessaire en sa qualité de co-indivisaire de la succession de Monsieur Alain X... et mandataire dans le cadre de l'indivision successorale et, d'autre part, qu'il lui soit fait injonction de justifier des conditions d'acquisition des actions qu'il détient dans la SA STEARINERIE Z... ET FILS, autres que celles de l'indivision, et notamment de celles de la SA GATTEFOSSE.
Par jugement du 10 janvier 2001, le Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE rejetait l'exception d'incompétence territoriale soulevée par Monsieur Henri X... et avant dire droit au fond, ordonnait une expertise aux fins d'estimation des biens immobiliers et mobiliers, ayant fait l'objet du partage partiel du 9 mai 1988.
Par arrêt en date du 3 mai 2001, la Cour d'appel de LYON déclarait mal fondé le contredit formé contre cette décision.
Parallèlement à cette procédure, Madame Cécile Z..., veuve X..., Madame Isabelle X..., épouse B... et Madame Béatrice X..., divorcée A... ont dénoncé le mandat confié à Monsieur Henri X... et l'ont assigné en liquidation partage de l'indivision devant le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE.
Par jugement du 28 février 2002, le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE a prononcé la nullité du partage partiel par application de l'article 887 du Code civil en raison des réticences dolosives de Monsieur Henri X... qui n'auraient été connues de ses co-indivisaires qu'à compter de l'année 1998.
Sur appel de Monsieur Henri X..., la Cour d'appel de GRENOBLE a, par arrêt du 5 septembre 2005, infirmé le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la nullité du partage partiel dressé le 9 mai 1988 par Maître André Y..., Notaire associé à SAINT-ETIENNE. Il a déclaré bon et valable ce partage et dit qu'il devait recevoir son plein et entier effet.
Par arrêt du 22 mai 2007, la Cour de cassation a rejeté le pourvoir formé par Mesdames X... à l'encontre de cet arrêt.
Après dépôt du rapport d'expertise, le Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE a, dans l'instance en responsabilité engagée par Mesdames X... à l'encontre du notaire, Maître André Y..., débouté ces dernières de l'ensemble de leurs demandes, suivant jugement en date du 31 mai 2006. Il a également débouté les défendeurs, Maître André Y..., la SCP MOULARD-BOURET-Y...-FOURNEL-MARTIN et Monsieur Henri X..., de leur demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive. Il a condamné solidairement Madame Cécile Z..., veuve X..., Madame Isabelle X..., épouse B... et Madame Béatrice X..., divorcée A... à verser, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, une indemnité de 4. 000 € à Maître André Y... et à la SCP MOULARD-BOURET-Y...-FOURNEL-MARTIN et une indemnité du même montant à Monsieur Henri X....
Le Tribunal a considéré, pour débouter Mesdames X..., que celles-ci ne rapportaient la preuve ni du préjudice qu'elles invoquaient, ni du défaut de conseil du notaire qu'elles alléguaient, puisqu'il a été définitivement jugé par la Cour d'appel de GRENOBLE que le partage traduit l'exact volonté des parties et que c'est volontairement que Mesdames X... avaient choisi de fixer la valeur des actions à un prix inférieur à leur valeur au jour du partage.
Madame Cécile Z..., veuve X..., Madame Isabelle X..., épouse B... et Madame Béatrice X..., divorcée A... on relevé appel de cette décision du Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE suivant acte du 20 juin 2006.
Dans des écritures auxquelles la Cour se réfère expressément, les appelantes concluent à l'infirmation du jugement. Elle soutiennent qu'à l'occasion de l'établissement du partage partiel du 9 mai 1988, le notaire, Maître André Y..., a manqué à leur égard à son devoir de conseil. Elles estiment, alors que la règle jurisprudentielle est celle de l'évaluation des biens au jour du partage et non au jour du décès, que le notaire ne les a pas informées de la possibilité qui était la leur de revendiquer une évaluation au jour du partage des biens inclus dans l'acte. Cette faute subsiste quelles que soient les considérations sur la volonté exprimée par Mesdames X..., mère et filles, à l'occasion du partage, de sorte que la décision de la Cour d'appel de GRENOBLE ne peut avoir d'incidence sur la responsabilité encourue par le notaire. Elles estiment que le préjudice qui en résulte pour elles doit être calculé sur la base d'une masse à partager de 11. 347. 775 francs (ainsi évaluée sur la base du rapport de l'expert F..., mais aussi des autres documents produits aux débats), alors que la mase à partager dans l'acte de partage litigieux avait été fixée à la somme de 5. 000. 000 francs. Elles demandent en conséquence, selon leurs droits respectifs dans la succession, la condamnation de Maître André Y... et de la SCP MOULARD-BOURET-Y...-FOURNEL-MARTIN à verser, outre les intérêts au taux légal,-à Madame Cécile Z..., veuve X... la somme de 436. 672 €-à Madame Isabelle X..., épouse B... la somme de 339. 785 €-à Madame Béatrice X..., divorcée A... la somme de 407. 497 €.
Les appelantes sollicitent en outre la condamnation de Maître André Y... et de la SCP MOULARD-BOURET-Y...-FOURNEL-MARTIN à leur verser la somme de 15. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Dans des écritures auxquelles la Cour se réfère expressément, Maître André Y... et la SCP MOULARD-BOURET-Y...-FOURNEL-MARTIN concluent à la confirmation du jugement qui a débouté Mesdames X... de l'ensemble de leurs demandes, sauf à voir ces dernières être condamnées à régler à chacun des intimés la somme de 10. 000 € an réparation du préjudice moral causé par 8 années de procédure dilatoire et infamante, outre une indemnité de 15. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Les intimés se prévalent notamment de l'arrêt de la Cour d'appel de GRENOBLE du 5 septembre 2005 qui, pour déclarer bon et valable le partage partiel intervenu le 8 mai 1988, a relevé qu'il résultait nécessairement d'un accord entre les héritiers, qui avaient disposé préalablement de tous les éléments d'évaluation et d'une parfaite connaissance de la situation patrimoniale. Il estiment que se trouve ainsi confirmé par l'arrêt de la Cour d'appel de GRENOBLE que l'acte établi par Maître André Y... n'était pas sujet à critique, démontrant par là même que le notaire n'avait commis aucune faute, l'acte ayant était passé dans le but poursuivi à l'époque par les indivisaires.
Dans des écritures auxquelles la Cour se réfère expressément, Monsieur Henri X... a, au vu de l'arrêt de la Cour d'appel de GRENOBLE, à présent définitif, conclu à la confirmation du jugement qui a débouté Mesdames X..., mère et filles de toutes leurs prétentions. Il estime que les appelantes, qui n'ont formulé aucune demande contre lui, l'ont obligé à se défendre dans le cadre d'une procédure malveillante qui mettait en cause son honorabilité. Il sollicite, à ce titre, la condamnation de Mesdames X... à lui verser des dommages-intérêts à hauteur de 40. 000 €, outre une indemnité de 15. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Par un arrêt, à présent définitif, en date du 5 septembre 2005, la Cour d'appel de GRENOBLE a établi, en premier lieu, que l'évaluation des immeubles lors du partage partiel du 9 mai 1988 et notamment celle du Château de Quaix, et ce alors qu'il n'était pas certain que Monsieur Henri X... en serait attributaire, a été fixée en toute connaissance de cause par les héritiers, ceux-ci étant notamment tous au fait de la valeur qui avait été attribuée à ces immeubles lors de la déclaration de succession déposée le 27 septembre 1985.
Le même arrêt a établi que Mesdames X... qui participaient directement à la vie sociale de la SA STEARINERIE Z... ET FILS, notamment en leur qualité d'administrateurs, étaient parfaitement informées du redressement spectaculaire de la société amorcée dès 1983 sous la direction de leur frère, Monsieur Henri X... et dès lors de sa valeur au jour du partage partiel ; qu'elles étaient, ainsi que le révélaient notamment des échanges de correspondance, parfaitement conscientes de leurs droits et que c'est en toute connaissance de cause qu'elles ont accepté de fixer la valeur des actions à un prix plus faible que la valeur réelle, estimant par la même que leur frère devait pouvoir profiter de l'industrie qu'il avait développée.
C'est dans ces conditions que la Cour d'appel de GRENOBLE, après avoir écarté toutes allégations de manoeuvres dolosives de la part de Monsieur Henri X..., a définitivement jugé bon et valable le partage partiel établi suivant acte en date du 9 mai 1988 par Maître André Y..., notaire associé à SAINT-ETIENNE et dit qu'il devait recevoir son plein et entier effet.
Mesdames X..., mère et filles, ne peuvent, en présence d'une telle décision qui consacre la validité du partage partiel du 9 mai 1988, prétendre avoir subi un préjudice consistant dans une sous-évaluation des biens à partager et qui résulterait d'un prétendu manquement du notaire à son devoir de conseil sur la date à la quelle il convenait de se placer pour apprécier la valeur de ces biens, alors qu'il a été établi que l'évaluation fixée dans le cadre du partage, n'avait pu résulter que d'un accord entre les héritiers, chacun ayant une parfaite connaissance de la valeur actuelle des biens et une parfaite conscience de ses droits.
Le jugement du Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Mesdames X... de l'ensemble de leurs demandes.
C'est par des motifs pertinents-adoptés par la Cour-que le premier juge a également débouté tant Maître André Y... et la SCP MOULARD-BOURET-Y...-FOURNEL-MARTIN que Monsieur Henri X... des demandes de dommages-intérêts qu'ils ont respectivement formés au titre d'une procédure prétendument abusive.
Il convient en outre de confirmer les condamnations prononcées par le Tribunal tant au profit de Maître André Y... et de la SCP MOULARD-BOURET-Y...-FOURNEL-MARTIN qu'à celui de Monsieur Henri X... sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, sans toutefois que l'équité commande une quelconque majoration des indemnités allouées sur ce fondement.
DECISION
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 31 mai 2006 par le Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE ;
Dit n'y avoir lieu à majoration en cause d'appel des indemnités allouées aux intimés par le dit jugement sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Condamne in solidum Madame Cécile Z..., Veuve de Monsieur Alain X..., Madame Isabelle X..., épouse B... et Madame Béatrice X..., divorcée A... aux dépens de première instance (en ce compris les frais de l'expertise judiciaire) et d'appel et autorise la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués, et la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués, à recouvrer directement contre elles les sommes dont ces avoués ont fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante.