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26/10/2007 | FRANCE | N°06/06346

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0173, 26 octobre 2007, 06/06346


AFFAIRE PRUD'HOMALE

Collégiale

R.G : 06/06346

X...

X...

C/

Société DISTRIBUTION CASINO FRANCE

APPEL D'UNE DECISION DU :

Conseil de Prud'hommes de SAINT-ETIENNE

du 21 Septembre 2006

RG : 06.152

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 26 OCTOBRE 2007

APPELANTS :

Monsieur Gilles X...

...

App 3

49360 MAULEVRIER

représenté par Maître GUEDJ, avocat au barreau de l'ESSONNE substitué par Maître Nathalie Y..., avocat au barreau de LYON

Madame Corinne

X...

68 bld Clémenceau

17200 ROYAN

représenté par Maître GUEDJ, avocat au barreau de l'ESSONNE substitué par Maître Nathalie Y..., avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Soc...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

Collégiale

R.G : 06/06346

X...

X...

C/

Société DISTRIBUTION CASINO FRANCE

APPEL D'UNE DECISION DU :

Conseil de Prud'hommes de SAINT-ETIENNE

du 21 Septembre 2006

RG : 06.152

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 26 OCTOBRE 2007

APPELANTS :

Monsieur Gilles X...

...

App 3

49360 MAULEVRIER

représenté par Maître GUEDJ, avocat au barreau de l'ESSONNE substitué par Maître Nathalie Y..., avocat au barreau de LYON

Madame Corinne X...

68 bld Clémenceau

17200 ROYAN

représenté par Maître GUEDJ, avocat au barreau de l'ESSONNE substitué par Maître Nathalie Y..., avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Société DISTRIBUTION CASINO FRANCE

24 rue de la montat

42000 SAINT-ETIENNE

représentée par Maître CHAPUT-DUMAS, avocat au barreau de CLERMONT FERRAND

PARTIES CONVOQUEES LE : 27 février 2007

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 28 Septembre 2007

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Bruno LIOTARD, Président

Madame Hélène HOMS, Conseiller

Madame Marie - Claude REVOL, Conseiller

Assistés pendant les débats de Madame Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 26 octobre 2007 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Monsieur Bruno LIOTARD, Président, et par Madame Annick A..., Adjoint administratif assermenté faisant fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

EXPOSE DU LITIGE :

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, société d'alimentation à succursales multiples, a confié à Monsieur et Madame X... la gestion et l'exploitation d'un magasin de vente au détail situé rue Chevreuil à CLERMONT-FERRAND, en vertu d'un contrat de co-gérance non salariée du 23 juin 1998.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 décembre 2001 Monsieur et Madame X... ont informé la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de ce qu'ils résiliaient leur contrat et que conformément à l'article 15 de leur contrat, ils cesseraient leur activité le 19 janvier 2002.

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a, par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 décembre 2001, pris acte de la rupture du contrat et a confirmé le 11 janvier 2002 que l'inventaire de cession se déroulerait le 19 janvier 2002.

Le 17 février 2004 Monsieur et Madame X... ont saisi le Conseil des Prud'hommes de SAINT-ETIENNE pour demander la requalification de leur relation contractuelle en contrat de travail et en conséquence le paiement de rappel de salaires et de diverses indemnités consécutives à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement en date du 21 septembre 2006 le Conseil des Prud'hommes de SAINT-ETIENNE a dit et jugé qu'il n'y avait aucun lien de subordination entre la société DCF et les gérants mandataires, Monsieur et Madame X... et a débouté ces derniers de leurs demandes.

Monsieur et Madame X... ont relevé appel de cette décision le 6 octobre 2006.

*******************

Vu les conclusions déposées, maintenues et soutenues oralement à l'audience de Monsieur et Madame X... tendant à la requalification des relations contractuelles en contrat de travail et au paiement de rappel de salaires et d'indemnités consécutives à un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Vu les conclusions du 11 septembre 2007 maintenues et soutenues à l'audience de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE tendant principalement à la confirmation de la décision entreprise ;

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la requalification des relations contractuelles entre les parties :

Aux termes de l'article L 782-1 du code du travail sont des gérants non salariés les personnes qui exploitent notamment des succursales de magasins d'alimentation moyennant le paiement de commissions proportionnelles au montant des ventes, lorsque le contrat ne fixe pas les conditions de leur travail et leur laisse toute liberté d'embaucher du personnel ou de se substituer des remplaçants à leurs frais et sous leur entière responsabilité.

En revanche, la relation de travail salariée se caractérise par l'état de subordination, l'existence d'une rémunération et d'une prestation de travail.

Le lien de subordination est défini par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

La qualification d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait, dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs.

En l'espèce, en la forme le contrat liant les parties a été qualifié de " co-gérance", se réfère expressément dans son article 1er à l'article L. 782-1 du code du travail et à l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés du 18 juillet 1963 modifié.

Pour pouvoir prétendre à la requalification de ce contrat en contrat de travail, il incombe à Monsieur et Madame X... de démontrer que les conditions dans lesquelles était exécuté le contrat étaient exorbitantes de celles prévues par les textes et les plaçaient dans un lien de subordination juridique vis à vis de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE .

Cette démonstration ne peut résulter des décisions de justice afférentes à d'autres secteurs d'activité et concernant des mandats autres que ceux prévues par l'article L 782-1 du code du travail qui sont produites par les époux X....

De même est inopérante l'analyse de leur situation opérée par les époux X... au regard du mandat prévu par l'article 1984 du code civil.

L'exploitation des locaux, dont le mandant est propriétaire , est prévue par l'article 26 de l'accord national.

La clause de fourniture avec vente à prix imposé prévu par l'article 3 du contrat n'est qu'une modalité commerciale prévue par l'article L. 782-1 du code du travail et l'article 34 de l'accord collectif national ; sans incidence sur la nature du contrat.

En application des dispositions de ce texte, les gérants doivent suivre la politique commerciale de l'entreprise et notamment :

- participer obligatoirement aux actions promotionnelles et publicitaires proposées,

- apposer le matériel publicitaire par la société,

- se conformer à l'utilisation des documents fournis par la société.

Sont conformes au même texte , les notes de service diffusées notamment au moyen de messages envoyés par minitel, qui révèlent le souci de la société DCF de parvenir à une harmonisation des pratiques sur l'ensemble des points de vente et d'apporter aux gérants des informations utiles sur la réglementation applicable.

Monsieur et Madame X... ne démontrent pas que les recommandations ainsi diffusées et seules peuvent être prises en considération celles antérieures à la cessation de leur activité ont revêtu un caractère contraignant en faisant l'objet de sanctions.

Ainsi ils n'établissent ni même ne prétendent que le refus d'assister à la formation relative au passage à l'euro, fortement encouragé par la société, a pu être sanctionné.

Le contrôle portant sur les marchandises mises à disposition de Monsieur et Madame X... pour les vendre et sur le respect des prix imposés est inhérent au contrat de mandat dès lors que le mandant reste propriétaire des marchandises mises à la disposition des gérants pour être vendue.

Monsieur et Madame X... ne disconviennent pas que le contrôle effectué le 4 décembre 2001 tendait au remboursement des marchandises périmées sur leur présentation.

Ils ne peuvent prétendre qu'ils ne disposaient pas de la liberté de fixer les jours et heures d'ouverture alors que sont produits aux débats les formulaires par lesquels ils informaient la société de la période à laquelle ils prendraient leurs congés.

Contrairement à ce qu'ils prétendent, les termes de ces formulaires n'expriment pas un souhait soumis à autorisation préalable et d'ailleurs les époux X... ne justifient d'aucune réponse qu'elle soit positive ou négative de la société.

Seul le document intitulé" prévisions de congés annuels 2002" en date du 10 septembre 2001 par lequel la société demande aux époux de choisir une période de congé parmi 3 périodes et leur rappelle que les congés se prennent en une fois sur une base de 5 semaines va dans le sens des allégations de Monsieur et Madame X....

Toutefois ce procédé reste unique et il n'est pas prétendu que des sanctions pouvaient accompagner des demandes différentes.

De la même manière les messages par lesquels la société leur demandait de préciser s'ils étaient ouverts les jours fériés expriment une demande d'information et non une injonction d'ouvrir ces jours là.

Quant au message du 19 novembre 2000 dans lequel sont est rappelées " les règles du jeu pour Noël et le jour de l'an car certains n'ont pas bien compris le message" et qui invite à l'ouverture des magasins toute la journée la veille des réveillons" s'il semble comminatoire il précise cependant : " ces conseils pour vous éviter des déconvenues commerciales".

Les époux X... ne prouvent ni ne prétendent que l'absence d'ouverture ces jours là a pu être sanctionné autrement que par des déconvenues commerciales.

De plus le message du 7 janvier 2001 par lequel la société demande à connaître " les modifications apportées aux jours d'ouverture et de fermeture des 25 janvier et 1er janvier car certains magasins qui s'étaient annoncés ouverts étaient fermés" démontre que les gérants ont pu changer d'avis au dernier moment sur le point d'ouvrir ou fermer le magasin les 25 décembre et 1er janvier.

Ce message n'annonce aucune sanction pour ceux qui n'ont pas ouvert les jours en question et ne formule aucun reproche.

L'insertion d'une clause de non-concurrence dans le contrat est conforme à l'article 20 de l'accord collectif.

La possibilité pour le mandant de rompre le contrat en cas de manquement du mandataire à ses obligations contractuelles ne transforme pas le mandat en un contrat de travail.

En revanche les éléments constitutifs du contrat de gérant non salarié spécifiés par l'article L. 782-1 du code du travail sont réunis en l'espèce :

- Monsieur et Madame X... exploitaient une succursale de magasin de détail et d'alimentation,

- ils étaient, selon l'article 9 du contrat, rémunérés pour un commissionnement proportionnel aux ventes fixé dans l'avenant au contrat à 6% du chiffre d'affaires réparti entre eux selon le pourcentage dont ils étaient convenus,

- l'article 2 du contrat laisse les époux X... libres d'organiser leur gestion sous réserve de se conformer à la réglementation et aux usages locaux ; ils ne recevaient aucune directive de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE quant à l'organisation de leur travail et pouvaient procéder comme ils l'entendaient pour parvenir à un chiffre d'affaires optimal sur lequel leur rémunération était calculée,

- Monsieur et Madame X... disposaient, selon le même article, de la possibilité de se substituer des remplaçants et d'embaucher du personnel.

En conséquence, en l'absence de démonstration d'un lien de subordination, les premiers juges ont exactement analysé la nature des relations contractuelles entre les parties et ont à juste titre rejeté la demande de requalification du contrat de co-gérance en contrat de travail.

A titre subsidiaire les époux X... demandent la requalification en contrat de travail au regard de l'article L. 781-1 alinéa 2 du Code du Travail.

Ce texte toutefois prévoit le statut des gérants de succursales autres que les succursales de maisons d'alimentation de détail ou de coopératives de consommation.

En l'espèce les époux X... qui étaient gérants d'une succursale d'une maison d'alimentation ne peuvent prétendre au statut prévu par l'article L. 781-1, du code du travail lequel au demeurant est un statut mixte comme celui prévu par l'article L 782-1 du Code du Travail.

Sur la rupture des relations contractuelles :

Les époux X... demandent le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, d'une indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse aux motifs que dès lors qu'ils étaient liés à la société DCF par un contrat de travail et que la procédure de licenciement n'a pas été mise en oeuvre, la rupture du contrat de travail doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En l'absence de contrat de travail cette demande ne peut prospérer.

Surabondamment l'existence d'un contrat de travail ne permet pas d'imputer la rupture du contrat initiée par les salariés à l'employeur avec les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse sans qu'aucun motif ne soit invoqué à l'appui de la demande.

Le jugement entrepris sera dès lors intégralement confirmé.

La cour estime devoir faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes de SAINT-ETIENNE le 21 septembre 2006 ;

Condamne solidairement Monsieur et Madame X... à payer la somme globale de

1 000€ (mille euros) à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Condamne Monsieur et Madame X... aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0173
Numéro d'arrêt : 06/06346
Date de la décision : 26/10/2007

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Définition - Lien de subordination - Défaut - Applications diverses

STATUTS PROFESSIONNELS PARTICULIERS - Gérant - Gérant non salarié - Succursale de maison d'alimentation de détail - /JDF

Selon l'article L782-1 du Code du travail, sont des gérants non salariés les personnes qui exploitent notamment des succursales de magasins d'alimentation moyennant le paiement de commissions proportionnelles au montant des ventes, lorsque le contrat ne fixe pas les conditions de leur travail et leur laisse toute liberté d'embaucher du personnel ou de substituer des remplaçants à leur frais et sous leur entière responsabilité. En revanche, la relation de travail salariée se caractérise par l'état de subordination, l'existence d'une rémunération et d'une prestation de travail. Le lien de subordination est défini par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôles l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. La qualification d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donné à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercé l'activité des travailleurs. En l'espèce, le contrat liant les parties a été qualifié de co-gérance. Pour pouvoir prétendre à la requalification de ce contrat en contrat de travail, il incombe aux appelants de démontrer que les conditions dans lesquelles était exécuté le contrat étaient exorbitantes de celles prévues par les textes et les plaçaient dans un lien de subordination juridique vis-à-vis de la société. Seulement, ils n'établissent pas que le refus d'assister à la formation relative au passage à l'euro, fortement encouragée par la société, a pu être sanctionné. De même, ils ne peuvent prétendre qu'ils ne disposaient pas de la liberté de fixer les jours et heures d'ouverture, alors que sont produits aux débats les formulaires par lesquels ils informaient la société de la période à laquelle ils prendraient leurs congés. Ces formulaires n'exprimant pas de souhait soumis à autorisation, ni l'attente d'une réponse. De la même manière, les messages par lesquels la société leur demandait de préciser s'ils étaient ouverts les jours fériés expriment une demande d'information et non une injonction d'ouvrir ces jours-là. En conséquence, en l'absence de démonstration d'un lien de subordination, les premiers juges ont exactement analysé la nature des relations contractuelles entre les parties et ont à juste titre rejeté la demande de requalification du contrat de co-gérance en contrat de travail.


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Saint-Etienne, 21 septembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2007-10-26;06.06346 ?
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