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26/10/2007 | FRANCE | N°06/06167

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0173, 26 octobre 2007, 06/06167


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE

R.G : 06/06167

X...

C/

SOCIETE FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT

ETIENNE - Z...

A...

APPEL D'UNE DECISION DU :

Conseil de Prud'hommes de MONTBRISON

du 19 Septembre 2006

RG : F 06/00043

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 26 OCTOBRE 2007

APPELANT :

Monsieur Baskim X...

...

42140 CHAZELLES SUR LYON

représenté par Maître Odile LE MOULEC, avocat au barreau de MONTBRISON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle num

éro 2006/026388 du 29/03/2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIMES :

SOCIETE FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT

ZA du Puits Grüner

42230 ROC...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE

R.G : 06/06167

X...

C/

SOCIETE FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT

ETIENNE - Z...

A...

APPEL D'UNE DECISION DU :

Conseil de Prud'hommes de MONTBRISON

du 19 Septembre 2006

RG : F 06/00043

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 26 OCTOBRE 2007

APPELANT :

Monsieur Baskim X...

...

42140 CHAZELLES SUR LYON

représenté par Maître Odile LE MOULEC, avocat au barreau de MONTBRISON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2006/026388 du 29/03/2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIMES :

SOCIETE FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT

ZA du Puits Grüner

42230 ROCHE LA MOLIERE

représentée par Maître COCHET, avocat au barreau de SAINT ETIENNE

Maître Eric ETIENNE - Z..., ès qualités d'administrateur judiciaire de la SOCIETE FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT

20, avenue Gambetta

42300 ROANNE

représenté par Maître COCHET, avocat au barreau de SAINT ETIENNE

Maître Fabrice A..., ès qualités de représentant des créanciers de la SOCIETE FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT

10 Rue Mi-Carême

42026 SAINT ETIENNE CEDEX 1

représenté par Maître COCHET, avocat au barreau de SAINT ETIENNE

PARTIES CONVOQUEES LE : 27 Février 2007

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 28 Septembre 2007

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Bruno LIOTARD, Président

Madame Hélène HOMS, Conseiller

Madame Marie- Claude REVOL, Conseiller

Assistés pendant les débats de Madame Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 26 Octobre 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Monsieur Bruno LIOTARD, Magistrat, et par Madame B... Annick, adjoint administratif assermenté faisant fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS ET PROCÉDURE :

Monsieur X... a été embauché par la SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT en qualité de conducteur routier-poids-lourd suivant contrat à durée indéterminée à compter du 17 mai 2004.

Il a été licencié pour faute grave par lettre recommandée avec avis de réception en date du 21 janvier 2005 ainsi libellée :

" Le vendredi 17 décembre 2004, vous étiez en tournée dans le département du Var. Après vos ramasses, vous n'aviez pas les heures suffisantes pour remonter sur le dépôt de Roche-la-Molière. Nous vous avons demandé de bien vouloir respecter la réglementation professionnelle en vigueur et d'effectuer votre coupure sur place. Vous deviez reprendre la route le samedi matin après votre repos journalier.

Vous n'avez pas écouté la consigne et avez pris la route afin de rentrer chez vous. Vous avez roulé jusqu'à 22 heures.

Cette attitude s'apparente à un refus délibéré de respecter la réglementation professionnelle, ce que nous ne pouvons pas tolérer dans notre entreprise. Ces faits sont constitutifs d'une faute professionnelle."

Saisi par Monsieur X..., le conseil de prud'hommes de MONTBRISON a, par jugement en date du 19 septembre 2006 :

- requalifié le licenciement en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

- condamné la SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT à payer 1.186,06 € à titre d'indemnité de préavis, 118,60 € de congés payés afférents et 243,12 € au titre des primes d'assiduité,

- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à 1.186,06 €,

- débouté Monsieur X... du surplus de ses demandes,

- et condamné la SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT aux dépens.

Appelant de cette décision, Monsieur X... demande à la Cour de :

- dire que son licenciement est abusif,

- fixer la moyenne des trois derniers mois de salaire à 1.186,06 €,

- et condamner la SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT à lui payer les sommes suivantes :

. indemnité de préavis 1.186,60 €,

. congés payés afférents 118,60 €,

. dommages et intérêts pour rupture abusive 6.500,00 €,

. heures supplémentaires 3.486,98 €,

. repos compensateur 3.041,66 €,

. rappel de prime d'assiduité 243,92 €

. frais de défense 1.500,00 €.

A cet effet, il soutient :

- qu'il devait effectuer un horaire moyen de 151,67 heures par mois à raison de 8 heures par jour du lundi au vendredi mais qu'il réalisait de nombreuses heures supplémentaires ce qui le contraignait à dépasser quasi-systématiquement son temps de route ainsi que l'établit le rapport de lecture des disques de chronotachygraphie qu'il produit,

- que l'employeur tolérait cette pratique et ne justifie pas lui avoir donné pour instruction d'effectuer sa coupure sur place dans le Var,

- qu'à aucun moment, il n'a fait l'objet d'un quelconque avertissement au sujet de ses heures supplémentaires,

- qu'aucune faute grave ne peut lui être reprochée,

- que la SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT connaissait son rythme de travail grâce à la lecture des disques,

- que l'employeur qui lui a décerné un simple avertissement assorti d'une mise à pied de cinq jours pour usage excessif de son portable de service a fait preuve d'incohérence en déclenchant une procédure de licenciement pour un dépassement d'horaire alors qu'il s'agit là d'une faute beaucoup moins grave,

- que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- que par ailleurs, la SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT doit être condamnée à lui payer les heures supplémentaires dont l'existence est établie par le rapport précité, ainsi que la prime d'assiduité qui lui est due pour les mois d'août à octobre 2004.

La SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT et Maître Etienne Z..., son administrateur judiciaire, prient la Cour de :

- réformer le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a alloué à Monsieur X... une prime d'assiduité,

- confirmer le jugement pour le surplus.

Tous deux font valoir :

- que Monsieur X... n'ignorait pas que les dépassements des temps de conduite étaient prohibés puisqu'il avait déjà été avisé le 22 septembre 2004 des sanctions auxquelles il s'exposait en cas de non respect de la réglementation en vigueur,

- qu'il ne peut pas prétendre que ses manquements étaient tolérés,

- que le 22 décembre 2004, il a roulé sans interruption jusqu'à 22 heures depuis le département du Var jusque dans la Loire,

- que cette désobéissance s'est accompagnée d'une utilisation à des fins personnelles du téléphone de fonction,

- que dans ces conditions, le licenciement pour faute de Monsieur X... était justifié,

- que les demandes de Monsieur X... au titre des heures supplémentaires sont exagérées,

- qu'elles ne tiennent pas compte des mauvaises manipulations du chronotachygraphe aux dates des 16, 26 et 30 juillet 2004,

- et qu'aucune prime d'assiduité n'est due, Monsieur X... ayant été absent au cours de la période considérée.

DISCUSSION :

1. sur les heures de travail :

Le "rapport de lecture de disques de chronotachygraphe" établi par la SARL Productivité par la Gestion des Heures, régulièrement produit, détaille le nombre d'heures de travail effectué par Monsieur X... et le nombre d'heures qui ont été payées par l'employeur comme suit :

Période / Heures

heures effectuées

heures payées

juin 2004

245,20

205,67

juillet 2004

285,45

199,67

août 2004

256,48

200

septembre 2004

264,97

200

octobre 2004

230,20

200

novembre 2004

88,78

176,73

décembre 2004

23,90

176,81

/ total

1394,98

1158,88

Deux observations découlent de cette présentation :

- il est à noter en premier lieu que les heures effectuées ont été le plus souvent payées avec un retard de plusieurs mois, laps de temps vraisemblablement nécessaire à la remise des disques par le salarié à l'employeur et à leur lecture par ce dernier,

- il apparaît, en second lieu, que Monsieur X... n'a pas été payé de toutes les heures de travail qu'il a pu effectuer.

Les calculs d'heures supplémentaires proposés par Monsieur X... n'étant contestés que pour ce qui concerne trois jours du mois de juillet 2004 et les corrections nécessaires ayant été opérées par l'appelant au vu du rapport de lecture précité, il convient de condamner la SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT à payer, par réformation de la décision des premiers juges, 3.486,98 € au titre des heures supplémentaires et 3.041,66 € au titre du repos compensateur.

2. sur la prime d'assiduité :

Il n'est pas contesté que Monsieur X... soit éligible à la prime d'assiduité qui est destinée à récompenser la présence régulière du salarié.

Rien n'explique que Monsieur X... n'ait pas perçu cette prime pour la période d'août à octobre 2004 alors que ses bulletins de paye ne font apparaître aucune absence pour quelque cause que ce soit.

Les premiers juges ont estimé à bon droit que l'employeur devait être condamné de ce chef au paiement d'une somme de 243,92 €. Cet élément de décision doit être confirmé.

3. sur le licenciement :

La faute grave énoncée par l'article L. 122-6 du code du travail résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

Par courrier en date du 22 septembre 2004, la SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT a informé Monsieur X... de ce qu'elle avait constaté "depuis ces dernières semaines un manquement à (ses) obligations par rapport à (ses) disques chronotachygraphes, à savoir, la lecture des disques, le retour régulier des enveloppes correctement remplies contenant les disques" et de ce que ces anomalies seraient désormais sanctionnées.

Le motif de licenciement, tiré lui aussi d'un manquement de Monsieur X... au respect des règles afférentes aux horaires de conduite et de repos, témoigne d'une récidive de la part du salarié en la matière.

La SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT ne démontre toutefois pas avoir donné pour instruction le 17 décembre 2004 à Monsieur X... de prendre son temps de repos dans le Var

Il doit être souligné en outre que comme le démontre le tableau ci-dessus, Monsieur X... effectuait chaque mois un nombre d'heures supplémentaires très important ce qui le conduisait nécessairement à ne pas respecter les temps de repos et de conduite réglementaires.

Un avertissement ayant été décerné au salarié dès le mois de septembre 2004 pour les dépassements de temps de conduite des mois précédents, le licenciement prononcé au mois de janvier 2004 pour un nouveau dépassement commis au mois de décembre 2004 doit être considéré, eu égard au fait que la tolérance dont se prévaut l'appelant n'est nullement démontrée, comme une sanction justifiée.

Il importe peu qu'en répression de l'usage excessif de son portable de service, faute qui a paru plus vénielle à Monsieur X... que les dépassements de temps de conduite visés dans la lettre du 22 septembre 2004, la SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT ait cru bon de lui décerner un avertissement assorti d'une mise à pied alors que l'avertissement précédent en était dépourvu.

La SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT a conservé Monsieur X... dans l'entreprise pendant un délai excédant celui qui était nécessaire pour se convaincre des fautes que le salarié avait pu commettre. Cette tolérance l'empêchait d'invoquer la faute grave.

La faute du salarié visée dans la lettre de licenciement étant établie, la sanction doit être considérée comme fondée sur une cause réelle et sérieuse. Sur ce point, la décision dont appel doit être confirmée.

4. les frais de défense :

Il n'est pas inéquitable de laisser à Monsieur X... la charge de tous ses frais de défense. Sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile doit être rejetée.*

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Réformant sur les heures supplémentaires,

Condamne la SA FERRAPIE TRANSPORT AFFRETEMENT à payer à Monsieur X... 3.486,98 € au titre des heures supplémentaires et 3.041,66 € au titre du repos compensateur,

Confirme le jugement déféré pour le surplus,

Ajoutant,

Déboute Monsieur X... de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0173
Numéro d'arrêt : 06/06167
Date de la décision : 26/10/2007

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Licenciement disciplinaire - Faute du salarié - Faute grave - /JDF

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Applications diverses - / JDF

La faute grave énoncée par l'article L122-6 du Code du travail résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis. En l'espèce, la société avait informé le salarié par courrier de ce qu'elle avait constaté un manquement à ses obligations par rapport a ses disques chronotachygraphes (lecture des disques, retour régulier des enveloppes correctement remplies contenant les disques) et de ce que ces anomalies seraient désormais sanctionnées. Le motif du licenciement, tiré lui aussi d'un manquement du salarié au respect des règles afférentes aux horaires de conduite et de repos, témoigne d'une récidive de la part du salarié en la matière. Seulement, le salarié effectuait chaque mois un nombre d'heures supplémentaires très important, ce qui le conduisait nécessairement à ne pas respecter les temps de repos et de conduite réglementaires. Le licenciement pour dépassement du temps de conduite doit être considéré comme une sanction justifiée puisqu'il a été précédé d'un avertissement pour le même motif. La société a conservé le salarié dans l'entreprise pendant un délai excédant celui qui était nécessaire pour se convaincre des fautes que le salarié avait pu commettre. Cette tolérance l'empêchait d'invoquer la faute grave. La faute du salarié visée dans la lettre de licenciement étant établie, la sanction doit être considérée comme fondée sur une cause réelle et sérieuse.


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Montbrison, 19 septembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2007-10-26;06.06167 ?
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