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19/10/2007 | FRANCE | N°07/00532

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0173, 19 octobre 2007, 07/00532


AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 07 / 00532

Z...

C /
SA DAFY MOTO

APPEL D'UNE DECISION DU :
Conseil de Prud'hommes de SAINT-ETIENNE
du 20 Décembre 2006
RG : F 06 / 00220

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 19 OCTOBRE 2007

APPELANT :

Monsieur Emmanuel Z...
...
...

représenté par Me Hélène CROCHET, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMEE :

SA DAFY MOTO
13-15 rue denis Papin
63170 AUBIERE

représentée par Me AUDINET, avocat au barreau

de CUSSET-VICHY

PARTIES CONVOQUEES LE : 10 Avril 2007

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 13 Septembre 2007

Présidée par Madame Marie-Claude REVOL, magistrat r...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 07 / 00532

Z...

C /
SA DAFY MOTO

APPEL D'UNE DECISION DU :
Conseil de Prud'hommes de SAINT-ETIENNE
du 20 Décembre 2006
RG : F 06 / 00220

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 19 OCTOBRE 2007

APPELANT :

Monsieur Emmanuel Z...
...
...

représenté par Me Hélène CROCHET, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMEE :

SA DAFY MOTO
13-15 rue denis Papin
63170 AUBIERE

représentée par Me AUDINET, avocat au barreau de CUSSET-VICHY

PARTIES CONVOQUEES LE : 10 Avril 2007

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 13 Septembre 2007

Présidée par Madame Marie-Claude REVOL, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Madame Malika CHINOUNE, Greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Monsieur Bruno LIOTARD, Président
Madame Hélène HOMS Conseiller
Madame Marie-Claude REVOL, Conseiller

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 19 Octobre 2007 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Monsieur Bruno LIOTARD, Président, et par Madame Malika CHINOUNE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

EXPOSE DU LITIGE :

Emmanuel Z... a été embauché par la S.A.R.L. TECHNIGEST puis a été embauché en qualité de responsable de magasin par la S.A. DAFY MOTO selon contrat à durée indéterminé à effet au 1 janvier 1998 ;

Il s'agit d'un transfert de contrat de travail et les parties admettent à l'audience que l'ancienneté est reprise à compter du 9 décembre 1996 ;

Un avenant au contrat de travail a fixé à dater du 1 juillet 2000 la rémunération comme suit :

-un fixe de 120. 000 F brut annuel,
-une commission de 2,50 % sur la part du chiffre d'affaire annuel excédant 2 400 000 F H.T., versée mensuellement et plafonnée à la somme de 375 000 F par an ;

Le 7 octobre 2005, l'employeur a adressé un courrier à Emmanuel Z... pour lui souligner que le chiffre d'affaire souhaité n'était pas obtenu ;

Par lettre datée du 21 mars 2006, la S.A. DAFY MOTO a adressé un avertissement à Emmanuel Z... lui reprochant, d'une part, un chiffre d'affaire insuffisant, et, d'autre part, un manque de courtoisie envers Bruno X... lors d'une conversation téléphonique ;

Par lettre datée du 24 mars 2006, la S.A. DAFY MOTO a convoqué Emmanuel Z... à l'entretien préalable en vue de son licenciement pour le 4 avril 2006 et lui a signifié sa mise à pied conservatoire jusqu'à la date de l'entretien ;

La S.A. DAFY MOTO a licencié Emmanuel Z... pour faute grave par courrier du 7 avril 2006 et a confirmé la mise à pied conservatoire ; les fautes visées dans la lettre de licenciement consistaient dans une insuffisance grave dans le management de l'équipe, dans le non respect de la politique de l'entreprise, dans une dégradation de l'image de la société ;

Le 15 juin 2006, la S.A. DAFY MOTO a levé la clause de non concurrence insérée au contrat de travail ;

Emmanuel Z... a saisi le conseil des prud'hommes de SAINT ETIENNE ;

Le 20 décembre 2006, le conseil des prud'hommes a jugé que la procédure de mise à pied conservatoire avait été respectée et que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse ; il a condamné la S.A DAFY MOTO à verser à Emmanuel Z... la somme de 6. 917,61 euros au titre de l'indemnité de préavis et celle de 691,76 euros pour les congés payés afférents, la somme de 4. 419,59 euros au titre de l'indemnité de licenciement, la somme de 1. 306,66 euros au titre des rappels de salaires et celle de 130,67 euros pour les congés payés afférents, la somme de 1. 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Le jugement a été notifié le 27 décembre 2006 à Emmanuel Z... qui a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 19 janvier 2007 ; il limite son appel à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au préjudice moral et à la remise du certificat de travail et de l'attestation ASSEDIC ;

Par conclusions reçues au greffe le 9 juillet 2007, maintenues et soutenues oralement à l'audience, Emmanuel Z... :
-expose que la mise à pied, du fait de sa durée limitée, n'était pas conservatoire mais disciplinaire,
-observe que les mêmes faits ne pouvant donner lieu à deux sanctions distinctes, le licenciement qui se fondait sur motifs identiques à ceux de la mise à pied se trouvait obligatoirement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
-subsidiairement, conteste toutes fautes et souligne que l'insuffisance de résultat ne saurait être lui être imputée personnellement,
-réclame les sommes suivantes :
* indemnité de préavis de 7. 109,01 euros et 710,90 euros de congés payés afférents,
* indemnité de licenciement de 4. 541,87 euros,
* dommages et intérêts de 35. 545,05 euros tenant compte de la levée tardive de la clause de non concurrence,
* subsidiairement, si la mise à pied est jugée conservatoire, la somme de 1. 342,81 euros, outre134,28 euros de congés payés afférents,
* 159,80 euros de frais de constat d'huissier,
* 3 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
-sollicite le rétablissement des droits acquis au titre du droit individuel à la formation, la remise du certificat de travail et de l'attestation ASSEDIC rectifiés, et, ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

Par conclusions reçues au greffe le 6 août 2007, maintenues et soutenues oralement à l'audience, la S.A. DAFY MOTO, appelant incident :
-soutient que la mise à pied corrélée à une procédure de licenciement et dépourvue de motif d'ordre disciplinaire était conservatoire,
-entend voir juger que le licenciement était fondé sur une faute grave, arguant du comportement de Emmanuel Z... vis à vis des autres salariés et du non respect de la politique du siège social,
-demande le rejet des prétentions de Emmanuel Z...,
-subsidiairement, conteste les calculs, chiffrant l'éventuelle indemnité de préavis à la somme de 6. 780,46 euros et l'éventuelle indemnité de licenciement à la somme de 4. 068,27 euros,
-réclame la somme de 2. 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

A l'audience, les parties étaient invitées à s'expliquer sur la question de savoir si Emmanuel Z... qui avait limité son appel et n'avait pas critiqué le montant de l'indemnité de préavis alloué par le conseil des prud'hommes pouvait réclamer en cause d'appel un montant plus élevé ; les deux parties se sont accordées pour indiquer que l'élévation du montant de la demande ne posait pas de difficultés procédurales ;

MOTIFS DE LA DECISION :

La lettre d'avertissement daté du 21 mars 2006 et la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement contenant la mise à pied datée du 24 mars 2006 sont toutes deux signées par Stéphane Y... et ont toutes deux été remises en main propre à Emmanuel Z... le 28 mars 2006 ; la lettre de convocation débute ainsi : " suite à votre entretien avec Stéphane Y... au magasin de SAINT ETIENNE le 22 mars 2006 et aux divers faits qui vous sont reprochés nous vous informons que nous sommes contraints d'envisager à votre égard une mesure de licenciement pour faute grave " et se termine ainsi : " nous vous signifions donc votre mise à pied à titre conservatoire jusqu'à l'entrevue du mardi 4 avril 2006 à 10 h 30 " ; ainsi, le même jour, Emmanuel Z... s'est vu notifié un avertissement, une mise à pied et une convocation à un entretien préalable au licenciement pour faute grave ;

La qualification par l'employeur de la mise à pied n'est pas déterminante ; une mise à pied est nécessairement disciplinaire dès lors que sa durée est fixée et qu'elle emporte la suspension de la rémunération ; en l'espèce, l'employeur a bien fixé une durée déterminée à la mise à pied en spécifiant qu'elle était effective jusqu'au 4 avril 2006 à 10 heures 30 ; l'employeur a suspendu le salaire durant la période de mise à pied ; il s'ensuit que la mise à pied revêt nécessairement un caractère disciplinaire, peu important que dans la lettre de licenciement, l'employeur ait indiqué qu'il confirmait la mise à pied conservatoire sans en impartir de durée ;

Le courrier de convocation à l'entretien montre que la mise à pied et le licenciement se fondent sur les mêmes motifs ; en outre, la référence dans ce courrier aux divers faits reprochés au salarié lors de l'entrevue du 22 mars 2006 avec Stéphane Y... est également révélatrice d'une coïncidence de tous les faits reprochés à Emmanuel Z... même ceux imputés dans l'avertissement remis le même jour ; Emmanuel Z... ayant du cesser son activité le 28 mars 2006, il ne pouvait pas être accusé d'avoir commis une nouvelle faute après cette date ;

L'impossibilité d'infliger deux sanctions distinctes pour des faits strictement identiques conduit à déclarer le licenciement de Emmanuel Z... dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Emmanuel Z... peut donc prétendre à l'indemnité compensatrice de préavis, à l'indemnité de licenciement et à des dommages et intérêts ;

Ces indemnités se calculent sur le salaire brut annuel auquel il convient, en application de l'article R 122-2 du code du travail, d'ajouter la prime d'intéressement ; le salaire et les primes annuels se montent à 28. 436,10 euros et le revenu mensuel moyen à 2. 369,67 euros ;

Emmanuel Z... est soumis à la convention collective du commerce des articles de sport et équipement de loisirs qui réglemente l'indemnité de préavis et l'indemnité de licenciement ; il demande expressément la mise en oeuvre des dispositions issues de la convention collective et non la mise en oeuvre des dispositions légales ;

L'indemnité de préavis de 3 mois se monte à la somme de 7. 109,01 euros, outre 710,90 euros de congés payés afférents ;

Aux termes de l'article 10 de la convention collective, l'indemnité de licenciement due à Emmanuel Z... qui justifie d'une ancienneté supérieure à 5 ans est égale à un cinquième du salaire mensuel moyen par année de présence sans pouvoir être supérieure à huit fois ce salaire ; l'ancienneté de Emmanuel Z... débute à compter du 9 décembre 1996 ; le contrat de travail a été rompu le 7 avril 2006 ; Emmanuel Z... a donc 9 années de présence dans l'entreprise ; l'indemnité de licenciement s'établit à la somme de 4. 265,40 euros se calculant comme suit : le salaire mensuel moyen de 2. 369,67 euros divisé par 5 et multiplié par 9 ;

Emmanuel Z..., né en 1969, a retrouvé du travail fixe le 5 février 2007 ; il justifie de nombreuses recherches d'emploi ; début juin 2006, il a perdu la chance de trouver un emploi car la clause de non concurrence n'avait pas été levée ; l'E.U.R.L. MILLENIUM MOTO lui a adressé un courrier le 2 juin 2006 ainsi libellé " suite à notre entretien de ce mois étant donné l'avancée de la saison moto et votre non disponibilité (clause de non concurrence non levée) nous sommes au regret de pouvoir maintenir notre offre au sein de notre société " ; ces éléments conduisent à chiffrer les dommages et intérêts à la somme de 20. 000 euros ;

Il est enjoint à la S.A. DAFY MOTO de rétablir les droits acquis par Emmanuel Z... au titre du droit individuel à la formation et de lui remettre le certificat de travail et l'attestation ASSEDIC rectifiés au vu des dispositions du présent arrêt, et, ce, dans le délai d'un mois suivant la signification de la décision ; les éléments de la cause ne laissant pas présager d'une résistance à la remise des dits documents, une astreinte n'est pas nécessaire ;

En application des dispositions de l'article L. 122-14-4 du Code du Travail, la S.A. DAFY MOTO est condamnée d'office à rembourser aux organismes concernés les allocations chômage versés à Emmanuel Z... dans la limite de 6 mois d'allocations ;

Emmanuel Z... qui ne démontre pas qu'il a été indispensable de requérir un huissier lors de la remise des clés du magasin doit conserver à sa charge le coût du constat ;

L'équité commande de condamner la S.A. DAFY MOTO à verser à Emmanuel Z... la somme de 2. 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;

La S.A. DAFY MOTO qui succombe supporte les dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme le jugement entrepris,

Juge que le licenciement de Emmanuel Z... est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la S.A. DAFY MOTO à verser à Emmanuel Z... :
-la somme de 7. 109,01 euros au titre de l'indemnité de préavis, outre celle de 710,90 euros pour les congés payés afférents,
-la somme de 4. 265,40 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
-la somme de 20. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Enjoint à la S.A. DAFY MOTO de rétablir les droits acquis par Emmanuel Z... au titre du droit individuel à la formation et de lui remettre le certificat de travail et l'attestation ASSEDIC conformes aux dispositions sus énoncées ;

Rejette la demande d'astreinte ;

Condamne d'office la S.A. DAFY MOTO à rembourser aux organismes concernés les allocations chômage versés à Emmanuel Z... depuis le licenciement dans la limite de 6 mois d'allocations ;

Déboute Emmanuel Z... de sa demande en remboursement de la somme de 159,80 euros représentant le coût du constat d'huissier ;

Condamne la S.A. DAFY MOTO à verser à Emmanuel Z... la somme de 2. 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne la S.A. DAFY MOTO aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

M. CHINOUNEB. LIOTARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0173
Numéro d'arrêt : 07/00532
Date de la décision : 19/10/2007

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Défaut - Applications diverses - Sanctions successives des mêmes faits - // JDF

Deux sanctions différentes ne peuvent être infligées à un salarié pour un même fait fautif. En l'espèce, le courrier de convocation à l'entretien préalable au licenciement montre que la mise à pied et le licenciement du salarié se fondent sur les mêmes motifs. Et la référence dans ce courrier aux divers faits reprochés au salarié lors d'une entrevue avec l'employeur est également révélatrice d'une coïncidence de tous les faits reprochés. L'impossibilité d'infliger deux sanctions distinctes pour des faits strictement identiques conduit à déclarer le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse. Le salarié peut donc prétendre à l'indemnité compensatrice de préavis, à l'indemnité de licenciement et à des dommages-intérêts.


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Saint-Etienne, 20 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2007-10-19;07.00532 ?
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