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16/10/2007 | FRANCE | N°06/03323

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0177, 16 octobre 2007, 06/03323


R.G : 06/03323

décision du Tribunal de Grande Instance de LYONAu fond du12 avril 2006

RG No2005/657
ch no 1

LE CHEF DES SERVICES FISCAUX DE RHONE ALPES BOURGOGNE

C/
X...
COUR D'APPEL DE LYON
PREMIERE CHAMBRE CIVILE B
ARRET DU 16 Octobre 2007
APPELANT :
Monsieur LE CHEF DES SERVICES FISCAUX DERHONE ALPES BOURGOGNE41, Cours de la Liberté69422 LYON CEDEX 03

représenté par la SCP LIGIER DE MAUROY- LIGIER,avoués à la Cour

INTIME :

Monsieur Jean-Pierre X......69580 SATHONAY VILLAGE

représenté par la SCP AGUIRAUD-NOU

VELLET,avoués à la Cour

assisté de Me TRILLAT,avocat au barreau de Lyon

L'instruction a été clôturée le 23 Avril 2007

L'a...

R.G : 06/03323

décision du Tribunal de Grande Instance de LYONAu fond du12 avril 2006

RG No2005/657
ch no 1

LE CHEF DES SERVICES FISCAUX DE RHONE ALPES BOURGOGNE

C/
X...
COUR D'APPEL DE LYON
PREMIERE CHAMBRE CIVILE B
ARRET DU 16 Octobre 2007
APPELANT :
Monsieur LE CHEF DES SERVICES FISCAUX DERHONE ALPES BOURGOGNE41, Cours de la Liberté69422 LYON CEDEX 03

représenté par la SCP LIGIER DE MAUROY- LIGIER,avoués à la Cour

INTIME :

Monsieur Jean-Pierre X......69580 SATHONAY VILLAGE

représenté par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET,avoués à la Cour

assisté de Me TRILLAT,avocat au barreau de Lyon

L'instruction a été clôturée le 23 Avril 2007

L'audience de plaidoiries a eu lieu le 17 Septembre 2007
L'affaire a été mise en délibéré au 16 Octobre 2007

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :

Président : Monsieur BAIZETConseiller : Monsieur ROUXConseiller : Madame MORINGreffier : Madame WICKER pendant les débats uniquement

A l'audience Mme MORIN a fait son rapport conformément à l'article 785 du NCPC.
ARRET : contradictoire

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile ;

signé par Monsieur BAIZET, président et par Madame WICKER greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE

Le 8 novembre 1989, Thérèse X... et ses trois enfants ont constitué la SCI SCFC dont le capital social était composé de 1200 parts, la mère détenant 1197 parts et chacun des enfants, une part. Le 20 février 1990, Thérèse X... a fait donation à ses trois enfants de la nue- propriété de ses 1197 parts.

La SCI SCFC a opté pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés.
Les décisions prises par son assemblée générale ordinaire de mettre en réserve les bénéfices réalisés au cours des exercices 1995, 1996,1998 et 2000 ont été considérées par 1' administration fiscale comme des donations indirectes consenties par Thérèse X... à ses enfants. C'est ainsi que Monsieur Jean-Pierre X... a fait l'objet d'un rappel de droit d'enregistrement pour un montant total de 16.252 euros, intérêts de retard compris.
Après le rejet de sa réclamation par une décision du chef des services fiscaux de la direction de contrôle fiscal Rhône-Alpes Bourgogne, notifiée le 23 septembre 2004, il a saisi le tribunal de grande instance de Lyon, qui, dans son jugement rendu le 12 avril 2006, a déclaré non-fondée la décision de rejet de sa réclamation et prononcé la décharge des droits d'enregistrement et des intérêts de retard mis à sa charge. Le premier juge a considéré que ni la preuve de l'intention libérale de Thérèse X..., ni celle de son dessaisissement irrévocable n'étaient rapportées et que par conséquent la mise en réserve du résultat social ne pouvait être qualifiée de donation indirecte.
L'administration des impôts a relevé appel. Dans ses conclusions récapitulatives, reçues par le greffe le 2/1/2007, elle formule les observations suivantes:
- Thérèse X..., en sa qualité d'usufruitière a droit aux bénéfices sociaux à compter de la délibération de l'Assemblée générale décidant de la distribution des bénéfices. Si ceux-ci sont mis en réserve, elle renonce à leur perception, puisque les bénéfices devenant du capital reviendront aux nus-propriétaires. La décision de mise en réserve des bénéfices provoque ainsi une transmission de bien par Thérèse X... à ses 3 enfants.
- il y a dessaisissement immédiat et irrévocable de Thérèse X..., puisque même en cas de distribution ultérieure des réserves, elle n'aurait plus que le droit d'exercice d'un quasi-usufruit sur les sommes perçues avec obligation de les restituer au terme de l'usufruit.

Jean-Pierre X..., dans ses conclusions reçues par le greffe le 1er décembre 2006, sollicite la confirmation du jugement pour les motifs suivants :

- Thérèse X... ne peut prétendre qu'aux dividendes dont la distribution a été décidée par l'assemblée générale et n'a aucun droit sur les bénéfices qui ne sont pas mis en distribution.
- l'assemblée générale de la société décide librement d'affecter les bénéfices des différents exercices à des comptes de réserves, conformément à l'intérêt social de la société.
- la mise en réserve des bénéfices n'a nullement pour effet d'entraîner le dessaisissement immédiat et irrévocable de l'usufruitier au profit du nu-propriétaire. Si les sommes portées en réserve constituent, en principe, des capitaux destinés à revenir aux nus-propriétaires, il est toujours possible à l'assemblée générale de décider du versement d'un dividende pris sur les réserves. Ce prélèvement perd par la volonté de l'assemblée son caractère de capital et revient de plein droit à l'usufruitier (analyse qui est celle de 1'administration fiscale dans son instruction du 14 décembre 2001 relative à l'avoir fiscal).
- Thérèse X... ne s'est pas appauvrie au profit de son fils, puisque les bénéfices réalisés par la SCI ont été affectés à un poste de réserves; son patrimoine ne s'est pas non plus appauvri, puisque l'augmentation des réserves a entraîné une augmentation de la valeur des parts de la société et donc un enrichissement de l'usufruitière en raison de l'accroissement de la valeur de son usufruit sur les parts sociales.
- la simple existence d'un lien de parenté ne suffit pas à caractériser l'intention libérale; le fait de disposer d'une seul voix en assemblée générale ordinaire et de signer le procès-verbal d'assemblée ne constitue pas une manifestation de l'acceptation du donataire.
DISCUSSION
La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l'accepte.
Pour l'administration fiscale, la politique constante d'inscription en réserves des bénéfices de la SCI SCFC a entraîné un dessaisissement irrévocable de Thérèse X..., usufruitière, au profit de ses enfants.
Les parts sociales sont par nature productives de revenus, mais le résultat de l'exercice ne devient un fruit qu'à dater de la décision de distribution. L'usufruitier a droit aux dividendes qui sont les bénéfices distribués, et n'a aucun droit sur les bénéfices qui sont mis en réserve. C'est pourquoi, le législateur lui accorde le droit de vote pour l'affectation des résultats (article 1844 du code civil).
En principe, lorsque l'usufruitier vote une résolution décidant une mise en réserve des bénéfices, il ne renonce pas à un droit de créance, puisque ce droit n'aurait existé que si la distribution des bénéfices avait été décidée. Cependant, lorsque, comme en l'espèce, l'écran que constitue l'assemblée générale de la société décidant l'affectation des résultats s'avère fictif, Thérèse X... étant usufruitière de la quasi-totalité des parts sociales, il est possible d'affirmer que c'est bien elle qui est à l'origine de la politique de non-distribution des dividendes. Aucun projet d'investissement n'étant allégué, cette non-distribution n'est justifiée par aucun autre intérêt de la société que la valorisation de son capital. C'est pourquoi, l'administration fiscale a pu légitimement considérer que la mise en réserve systématique des bénéfices caractérisait une renonciation de l'usufruitière à appréhender les bénéfices, qui auraient dû lui revenir, pour accroître le capital dans l'intérêt exclusif de ses enfants nus-propriétaires.
Encore faut-il pour retenir une donation indirecte que ce dessaisissement du donateur soit irrévocable. Or, l'assemblée générale ordinaire a toujours la faculté de décider ultérieurement le versement d'un dividende prélevé sur les réserves. Les réserves ainsi distribuées reviennent à l'usufruitier, soit que l'on considère que la décision de la société a pour effet de faire perdre aux réserves leur caractère de capital, soit que l'on considère qu'il s'agit d'un quasi-usufruit, l'usufruitier retrouvant alors le droit d'exercer son droit de jouissance sur les sommes ainsi distribuées, même s'il a la charge de les restituer en fin d'usufruit. Il n'est donc pas possible de dire que Thérèse X..., en sa qualité d'usufruitière, perdait d'une manière irrévocable ses droits sur les bénéfices mis en réserve. Il s'ensuit que pour ce motif au moins la décision du premier juge mérite d' être confirmée.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,

Confirme le jugement critiqué,

Laisse les dépens d'appel à la charge de l'Etat, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP AGUIRAUD NOUVELET , société d'avoués.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0177
Numéro d'arrêt : 06/03323
Date de la décision : 16/10/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Lyon, 12 avril 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2007-10-16;06.03323 ?
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