ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2007
Décision déférée : Décision du Tribunal d'Instance de SAINT- ETIENNE du 09 mai 2006- (R. G. : 2004 / 254)
No R. G. : 06 / 03660
Nature du recours : APPEL Affaire : Autres demandes relatives au prêt Opposition à injonction de payer
APPELANT :
Monsieur Ahmed X... Demeurant : ......
représenté par Maître GUILLAUME, Avoué assisté par Maître SMIAI, Avocat, (SAINT- ETIENNE)
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2006 / 22641 du 07 / 06 / 2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)
INTIMEES :
SOCIETE ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV, venant aux droits de la Société GERLING NAMUR ASSURANCES Siège social : Keizerzgracht 271- 287 1016 ED AMSTERDAM- PAYS BAS-
avec établissement principal en FRANCE : 44 Avenue Georges Pompidou 92300 LEVALLOIS PERRET
représentée par Maître DE FOURCROY, Avoué assistée par Maître BOCCALINI, Avocat, (VAL DE MARNE)
SOCIETE BANQUE ACCORD SA Siège social : BP 149 59964 CROIX CEDEX
représentée par Maître DE FOURCROY, Avoué assistée par Maître BOCCALINI, Avocat, (VAL DE MARNE)
COMPAGNIE GENERALI VIE, venant aux droits de la SA GENERALI ASSURANCES VIE Siège social : 11 Boulevard Haussmann 75311 PARIS CEDEX 09
représentée par la SCP JUNILLON- WICKY, Avoués assistée par Maître RISPAL- CHATELLE, Avocat, (PARIS)
MUTUELLES DU MANS ASSURANCES Siège social : 10 Boulevard Oyon 72030 LE MANS CEDEX 09
représentée par la SCP JUNILLON- WICKY, Avoués assistée par Maître RISPAL- CHATELLE, Avocat, (PARIS)
Instruction clôturée le 15 Juin 2007
Audience de plaidoiries du 28 Juin 2007
LA SIXIEME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON,
composée lors des débats et du délibéré de :
. Monsieur LECOMTE, Président
. Madame DUMAS, Conseiller, qui a fait le rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries,
. Madame de la LANCE, Conseiller
assistés lors des débats tenus en audience publique par Madame CARRON, Greffier
a rendu le 20 SEPTEMBRE 2007, l'ARRET contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour d'Appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile, signé par Madame DUMAS, Conseiller, en remplacement du Président légitimement empêché, et par Madame CARRON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Le 18 avril 1997, Monsieur Ahmed X... a souscrit auprès de la BANQUE ACCORD une offre préalable d'ouverture de crédit utilisable par fractions et assortie d'une carte de crédit pour un découvert autorisé de 2 000 F, avec un taux effectif global de 15 %, et a adhéré au contrat d'assurance souscrit par la BANQUE ACCORD auprès des MUTUELLES DU MANS ASSURANCES pour les risques « décès, incapacité totale de travail, chômage ».
Le 18 mai 2002, Monsieur X... a signé une nouvelle offre préalable d'ouverture de crédit se substituant à la précédente portant le montant du découvert autorisé à 3 100 €, avec un taux effectif global de 14, 40 %, et a adhéré au contrat d'assurance souscrit par la BANQUE ACCORD auprès de GENERALI FRANCE ASSURANCE VIE pour les risques « décès, perte totale d'autonomie, incapacité totale de travail et chômage ».
Suite à un accident du travail subi par Monsieur X... le 26 novembre 1998, les échéances du prêt ont été prises en charge par les MUTUELLES DU MANS ASSURANCES pendant 26 mois, selon les clauses du contrat, du mois de décembre 1998 au mois de janvier 2001 au titre de l'incapacité totale de travail. Monsieur X..., se trouvant dans l'incapacité de travailler, a été ensuite placé en invalidité 2ème catégorie par la CPAM à compter du 28 janvier 2003. La BANQUE ACCORD lui a refusé toute prise en charge au titre de cette invalidité. Les échéances du prêt sont restées impayées à compter de mars 2003.
A la requête de la Société GERLING NAMUR ASSURANCES, subrogée dans les droits de la BANQUE ACCORD, le tribunal d'instance de Saint- Chamond a rendu, le 8 octobre 2004, une ordonnance enjoignant à Monsieur X... de payer la somme de 7 024, 97 € avec intérêts au taux contractuel à compter du 15 juin 2004 sur la somme de 6 554, 25 €.
Suite à une cession des contrats, la Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV est venue aux droits de la Société GERLING NAMUR ASSURANCES à compter du 18 janvier 2005.
Monsieur X... a formé opposition à cette ordonnance le 29 octobre 2004 puis, par actes des 14 février et 3 juin 2005, a fait assigner devant le tribunal les MUTUELLES DU MANS ASSURANCES et la Compagnie GENERALI FRANCE ASSURANCE VIE pour obtenir la prise en charge du prêt par les assurances suite à son invalidité.
Par jugement du 9 mai 2006, le tribunal, retenant que les MUTUELLES DU MANS ASSURANCES n'étaient plus contractuellement liées avec Monsieur X..., qu'aucune garantie n'était due par la compagnie GENERALI au titre de l'incapacité totale de travail ou de l'invalidité et que la BANQUE ACCORD ne pouvait avoir acquis la qualité d'assureur apparent, a condamné Monsieur X... à payer à la Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV la somme de 7 024, 97 € outre intérêts au taux de 7 % sur la somme de 6 554, 25 € à compter du 15 juin 2004, a accordé à Monsieur X... des délais sur deux ans pour régler sa dette, l'a débouté de ses appels en garantie et a ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Monsieur X... a interjeté appel de ce jugement et soutient que son invalidité, correspondant à un état d'incapacité totale de travail, étant imputable à l'accident du 26 janvier 1998, événement postérieur au contrat conclu auprès des MUTUELLES DU MANS ASSURANCES, celles- ci doivent garantir cette invalidité, que le risque « invalidité » étant mentionné sur ses relevés bancaires, il bénéficie bien d'une garantie auprès de la Compagnie GENERALI et de la BANQUE ACCORD, cette dernière s'étant comportée en assureur apparent, que ses appels en garantie étaient donc bien fondés, qu'il peut également opposer aux subrogés les mêmes moyens de défense dont il disposait contre son créancier originaire, la BANQUE ACCORD, que sa dette s'éteint donc par compensation avec l'indemnité due au titre de la garantie, qu'à titre subsidiaire, le comportement fautif de la BANQUE ACCORD, qui l'a induit en erreur sur l'étendue des garanties, justifie sa condamnation au lui payer les sommes restant dues et qu'il justifie avoir régler 200 € par mois à la Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV dès le mois de juin 2006.
Monsieur X... demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, de condamner solidairement la BANQUE ACCORD, les MUTUELLES DU MANS ASSURANCES et la Compagnie GENERALI FRANCE à le relever et garantir de toutes les condamnations qui seraient mises à sa charge au profit de la Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV, à lui restituer les sommes qu'il a réglées dans le cadre de l'exécution provisoire et à lui payer, en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la somme de 1 000 € pour la procédure de première instance et celle de 2 000 € pour la procédure d'appel, ou de débouter la Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV, en sa qualité de subrogée dans les droits de la BANQUE ACCORD, de l'ensemble de ses demandes et de la condamner solidairement avec la BANQUE ACCORD à lui payer les mêmes indemnités que ci- dessus au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, à titre subsidiaire de condamner la BANQUE ACCORD, en qualité d'assureur apparent, à le garantir de toutes les condamnations mises à sa charge et à lui payer les indemnités précitées, à titre infiniment subsidiaire de retenir la faute de la BANQUE ACCORD et la condamner à l'indemniser de ses préjudices équivalents aux sommes mises à sa charge au profit de la Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV et à lui payer toujours les mêmes indemnités au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV et la BANQUE ACCORD font valoir que, suite à la cession des portefeuilles d'assurance- crédit, la Société ATRADIUS venant aux droits de la Société GERLING NAMUR ASSURANCES, elle- même subrogée en tant qu'assureur dans les droits de son assurée, la BANQUE ACCORD, a bien intérêt à agir, que ces deux dernières sociétés doivent donc être mises hors de cause, que la BANQUE ACCORD ne peut avoir la qualité d'assureur apparent, cette notion étant sans valeur juridique et les stipulations du contrat étant claires, que la créance au titre du crédit n'est pas contestée par Monsieur X..., que la demande en responsabilité civile à l'encontre de la BANQUE ACCORD est nouvelle en appel et donc irrecevable, que la BANQUE ACCORD a rempli son devoir de conseil en communiquant la notice de l'assurance et que l'octroi de délais de paiement n'est pas justifié.
La Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV et la BANQUE ACCORD demandent à la Cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter Monsieur X... de sa demande nouvelle à l'encontre de la BANQUE ACCORD, à titre subsidiaire, si la garantie est due par les MUTUELLES DU MANS ASSURANCES, de dire que les indemnités d'assurance devront être versées directement à la Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV, en tout état de cause de condamner Monsieur X... à payer à la Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La Société GENERALI VIE, venant aux droits de la Société GENERALI FRANCE ASSURANCE VIE suite à une fusion absorption du 20 décembre 2006, et les MUTUELLES DU MANS ASSURANCES font valoir que, suite à la seconde offre préalable de crédit, les MUTUELLES DU MANS ASSURANCES n'étaient plus assureurs de la BANQUE ACCORD ni donc de Monsieur X..., que les dispositions contractuelles du contrat d'assurance ne prévoyant en aucun cas la garantie invalidité, Monsieur X... ne peut prétendre à aucune prise en charge, et qu'en tout état de cause, Monsieur X... ne répond pas à la définition contractuelle de la perte totale d'autonomie et a déjà été pris en charge au titre de l'incapacité totale de travail pendant 26 mois, limite de durée prévue au contrat.
La Société GENERALI VIE et les MUTUELLES DU MANS ASSURANCES demandent à la Cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions notamment en ce qu'il a mis hors de cause les MUTUELLES DU MANS ASSURANCES, de débouter Monsieur X... de l'intégralité de ses demandes et de le condamner à payer à la Société GENERALI VIE la somme de 1 500 € à titre de dommages et intérêts pour procédure manifestement abusive et celle de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
- Sur la créance de la Société ATRADIUS, les demandes en garantie de Monsieur X... dirigées contre les MUTUELLES DU MANS ASSURANCES et la Société GENERALI VIE et son recours contre la BANQUE ACCORD en tant qu'assureur apparent :
Attendu que les parties ne font que reprendre sur ces points devant la Cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance ;
Attendu qu'en l'absence d'éléments nouveaux soumis aux débats devant elle, la Cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties, tant en ce qui concerne la fixation du montant de la créance de la Société ATRADIUS et le fait que les MUTUELLES DU MANS ASSURANCES n'étaient plus liées contractuellement à la BANQUE ACCORD et à Monsieur X... lors de la mise en invalidité de ce dernier, qu'en ce qui concerne l'absence de garantie souscrite pour le risque invalidité auprès de la Société GENERALI VIE et en ce qui concerne le fait que la BANQUE ACCORD n'a pas pris la qualité d'assureur apparent ;
Qu'en effet, d'une part, le contrat d'assurance de Monsieur X... auprès des MUTUELLES DU MANS ASSURANCES a pris fin au plus tard avec la souscription du second contrat le 18 mai 2002, la GENERALI FRANCE ASSURANCE VIE devenant alors son assureur ; que Monsieur X... est donc mal fondé à réclamé sa garantie aux MUTUELLES DU MANS ASSURANCES pour son invalidité retenue en janvier 2003 ; qu'en outre, il apparaît au vu du contrat de prêt du 18 avril 1997, que l'assurance souscrite couvrait les risques « décès, incapacité totale de travail, chômage » et non le risque « invalidité » ;
Que, d'autre part, par l'offre de prêt du 18 mai 2002, Monsieur X... a adhéré au contrat d'assurance couvrant les risques « décès, perte totale d'autonomie, incapacité totale de travail et chômage » ; que le risque « invalidité » n'est également pas inclus ; que, comme l'a retenu le premier juge, Monsieur X... a déjà été pris en charge au titre de son incapacité totale de travail consécutive à son accident dans la limite contractuelle de 26 mois et le placement en invalidité 2ème catégorie par la CPAM ne relève pas de la perte totale d'autonomie ; que la Société GENERALI VIE ne doit donc pas sa garantie à Monsieur X... ;
Qu'enfin, la qualité d'assureur apparent ne peut être retenue à l'égard de la BANQUE ACCORD ; que les offres préalables d'ouverture de crédit signées par Monsieur X... indiquent clairement auprès de quelle compagnie d'assurance le contrat est souscrit ; que la BANQUE ACCORD, désignée comme prêteur et souscripteur de l'assurance, n'a que la qualité d'intermédiaire entre l'emprunteur et l'assureur ;
Attendu qu'il convient en conséquence de confirmer la décision déférée en ses dispositions ayant fixé la créance de la Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV, ayant accordé des délais de paiement à Monsieur X... et ayant débouté ce dernier de ses appels en garantie ;
- Sur le comportement fautif de la BANQUE ACCORD :
Attendu que Monsieur X..., devant la Cour d'appel, sollicite la condamnation de la BANQUE ACCORD à l'indemniser du préjudice subi du fait de ses manquements à son devoir d'information et de conseil ; que Monsieur X... ayant déjà sollicité devant le premier juge la condamnation de la BANQUE ACCORD à prendre en charge toutes les sommes auxquelles lui- même serait condamné, cette demande de condamnation, sur un fondement juridique différent, ne serait être retenue comme nouvelle en appel au sens des articles 564 et 565 du nouveau Code de procédure civile ; que cette demande est donc recevable ;
Attendu qu'il résulte des nombreux relevés de compte produits par Monsieur X... pour les années 1999 à 2003, que la BANQUE ACCORD indiquait sur ces relevés un prélèvement mensuel au titre de l'assurance « maladie, décès, invalidité et chômage » ; que cette information maintes fois répétée pendant des années s'est révélée fausse et a nécessairement induit en erreur Monsieur X... sur l'étendue des garanties dont il bénéficiait ; que la BANQUE ACCORD a ainsi manqué à son devoir d'information et de conseil auprès de l'emprunteur ; que, cependant, les mentions des contrats signés étant claires et connues de Monsieur X... lors de la signature, le préjudice de celui- ci résultant du comportement fautif du prêteur ne doit être analysé que comme une perte de chance, sa croyance erronée en l'existence d'une garantie « invalidité » l'ayant privé d'une éventuelle recherche d'une assurance complémentaire ;
Qu'un tel préjudice sera indemnisé par l'allocation d'une somme de 1 500 € mise à la charge de la BANQUE ACCORD ;
Attendu que la Société GENERALI VIE ne justifie pas en quoi Monsieur X... aurait fait dégénérer en abus son droit d'agir ; que sa demande en dommages et intérêts ne peut dès lors être accueillie ;
Attendu qu'il paraît équitable de laisser à la charge de chacune des parties l'ensemble des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement déféré en ses dispositions ayant fixé le montant de la créance de la Société ATRADIUS CREDIT INSURANCE NV, ayant accordé des délais de paiement à Monsieur Ahmed X... et ayant débouté ce dernier de ses appels en garantie à l'égard tant des MUTUELLES DU MANS ASSURANCES que de la Société GENERALI VIE et de la BANQUE ACCORD,
Condamne la BANQUE ACCORD à payer à Monsieur X... la somme de 1 500 € à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice subi par celui- ci du fait du manquement de la BANQUE ACCORD à son devoir d'information et de conseil,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Condamne Monsieur X... aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de Maître DE FOURCROY et de la SCP JUNILLON et WICKY, Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.