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26/10/2006 | FRANCE | N°05/04000

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre civile 1, 26 octobre 2006, 05/04000


R.G : 05/04000

décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

au fond du 28 avril 2005

ch no 10

RG No2002/8958

SA ETS TARRERIAS-BONJEAN

SA EXPLOITATION TARRERIAS-BONJEAN

C/

SA DECATHLON

SARL FRENDO

COUR D'APPEL DE LYON

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 26 OCTOBRE 2006

APPELANTES :

SA ETS TARRERIAS-BONJEAN

Le Moulin Neuf

63250 CELLES-SUR-DUROLLE

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY

avoués à la Cour

assistée de la SCP JURI-DEFI

avocat au barreau de

CLERMONT-FERRAND

SA EXPLOITATION TARRERIAS-BONJEAN

Chabenty

63250 CELLES-SUR-DUROLLE

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY

avoués à la Cour

assistée de la SCP JURI-DE...

R.G : 05/04000

décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

au fond du 28 avril 2005

ch no 10

RG No2002/8958

SA ETS TARRERIAS-BONJEAN

SA EXPLOITATION TARRERIAS-BONJEAN

C/

SA DECATHLON

SARL FRENDO

COUR D'APPEL DE LYON

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 26 OCTOBRE 2006

APPELANTES :

SA ETS TARRERIAS-BONJEAN

Le Moulin Neuf

63250 CELLES-SUR-DUROLLE

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY

avoués à la Cour

assistée de la SCP JURI-DEFI

avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

SA EXPLOITATION TARRERIAS-BONJEAN

Chabenty

63250 CELLES-SUR-DUROLLE

représentée par la SCP JUNILLON-WICKY

avoués à la Cour

assistée de la SCP JURI-DEFI

avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMEES :

SA DECATHLON

...

59665 VILLENEUVE-D'ASCQ

représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET

avoués à la Cour

assistée de Me X...

avocat au barreau de LYON

SARL FRENDO

Zone Industrielle du Haut Carel

633 avenue Saint Romain

06500 MENTON

représentée par la SCP DUTRIEVOZ

avoués à la Cour

assistée de Me Y...

avocat au barreau de LYON

L'instruction a été clôturée le 12 Juin 2006

L'audience de plaidoiries a eu lieu le 20 Septembre 2006

L'affaire a été mise en délibéré au 26 Octobre 2006

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :

Président : Monsieur VOUAUX-MASSEL,

Conseiller : Monsieur ROUX,

Conseiller : Madame BIOT

Greffier : Madame JANKOV pendant les débats uniquement.

A l'audience Monsieur VOUAUX-MASSEL a fait le rapport conformément à l'article 785 du NCPC.

ARRET : contradictoire

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile,

signé par Monsieur VOUAUX-MASSEL, président et par Madame JANKOV, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

La S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN est titulaire :

- d'un modèle français, déposé à l'INPI le 8 novembre 1996, enregistré sous le numéro 966367 et publié le 4 avril 1997 sous le numéro 459 474 et décrivant un modèle de couteau camping "remarquable notamment par le logement des couverts, cuillère et fourchette, dans des glissières ménagées de chaque côté du manche ; le couteau est à lame fermante, à ouvre-boîte et tire-bouchon fermants"

- d'un brevet français, déposé le 19 mars 1997, enregistré sous le numéro 97 03800, et délivré le 21 janvier 2000 sous le numéro 2 760 9555, portant sur un ustensile de poche multipièces.

La S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN a consenti à la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN une licence exclusive d'exploitation du modèle et du brevet, suivant contrat du 6 juin 2002, enregistré à l'INPI le 7 juin 2002.

La S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN est par ailleurs titulaire de la marque "BIVOUAC" déposée, dans la classe 8, pour désigner les armes blanches et couteaux de camping, le 5 février 1997, et enregistrée sous le numéro 97663174.

Reprochant aux sociétés DECATHLON et FRENDO de commercialiser un couteau contrefaisant le brevet, le modèle et la marque ci-dessus décrits, les sociétés TARRERIAS-BONJEAN ont obtenu, le 10 juin 2002, du Président du Tribunal de Grande Instance de LYON l'autorisation de procéder à une saisie-contrefaçon au sein du magasin DECATHLON de LYON- La Part Dieu et le 12 juin 2002, l'autorisation du président du Tribunal de Grande Instance de NICE, de procéder à une saisie-contrefaçon dans les locaux de la S.A.R.L. FRENDO.

Sur la base des deux procès-verbaux de saisie-contrefaçon réalisés le 20 juin 2002, la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN ont fait assigner la S.A. DECATHLON er la S.A.R.L. FRENDO devant le Tribunal de Grande Instance de LYON par acte d'huissier du 28 juin 2002, aux fins de faire juger que la S.A. DECATHLON et la S.A.R.L. FRENDO ont commis des actes de contrefaçon de marque, de modèle et de brevet, ainsi que des actes de concurrence déloyale et de parasitisme, et d'obtenir réparation du préjudice que leur ont causé ces actes de contrefaçon et de concurrence déloyale.

Suivant jugement en date du 28 avril 2005, le Tribunal de Grande Instance de LYON a:

- annulé le modèle français, déposé à l'INPI le 8 novembre 1996, et enregistré sous le numéro 96 6367 et publié le 4 avril 1997 sous le numéro 459474 ;

- dit que cette décision sera inscrite au Registre National des Dépôts et Modèles, sur l'initiative de la partie la plus diligente ;

- rejeté la demande de nullité de la marque "BIVOUAC" no97663174 ;

- dit que la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON ont commis des actes de contrefaçon de la marque française BIVOUAC no 97663174 ;

- dit que la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON ont commis des actes de contrefaçon des revendications 1 à 9 du brevet no 97 03800 ;

- interdit à la S.A.R.L. FRENDO et à la S.A. DECATHLON de commercialiser par quelque moyen que ce soit des objets contrefaisant la marque BIVOUAC no97 663174 et le brevet no97 03800 ;

- assortit cette interdiction d'une astreinte de 70 € par infraction constatée ;

- dit n'y avoir lieu à s réserver la liquidation de cette astreinte ;

- condamné in solidum la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON à payer à la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et à la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN la somme de 15.000 € à titre de dommages-intérêts ;

- autorisé la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN à faire publier ce jugement dans trois journaux ou périodiques de leurs choix et aux frais in solidum de la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON à raison de 3.000 € par insertion ;

- dit que la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON ont commis des actes de concurrence déloyale distincts ;

- rejeté la demande de dommages-intérêts ;

- condamné la S.A.R.L. FRENDO à relever et garantir la S.A. DECATHLON des condamnations prononcées par cette décision ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- condamné in solidum la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON à payer à la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et à la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par acte du 9 juin 2005, les sociétés TARRERIAS-BONJEAN ont relevé appel de cette décision.

Les appelantes sollicitent la réformation partielle du jugement en ce qu'il a annulé le modèle déposé à l'INPI le 8 novembre 1996, en ce qu'il ne lui a alloué qu'une somme de 15.000 € en réparation du préjudice résultant des contrefaçons de marque et de brevet et enfin en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages-intérêts au titre des actes de concurrences déloyales, néanmoins reconnus comme tels par le Tribunal. Elles demandent que la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON soient condamnées solidairement à lui verser des dommages-intérêts à hauteur de 100.000 € du fait des actes de contrefaçon de modèle, de 100.000 € du fait des actes de contrefaçon de marque, de 200.000 € du fait des actes de contrefaçon de brevet, et enfin de 200.000 € du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire, distincts des actes de contrefaçon. Les appelantes demandent que le nombre d'insertion soit porté à cinq et leur coût à 3.800 € par insertion. Elles sollicitent enfin une somme de 20.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Les appelantes exposent, concernant le modèle déposé à l'INPI, qu'il convient pour apprécier sa validité, de faire application des textes en vigueur au jour du dépôt (8 novembre 1996) et dès lors, en l'espèce, de la législation antérieure à l'entrée en vigueur le 30 juillet 2001 de l'ordonnance du 25 juillet 2001, réformant le droit français des dessins et modèles. Elles estiment que, contrairement à ce qu'a jugé le premier juge, l'impression visuelle qui se dégage du modèle de couteau déposé est bien celle d'une physionomie propre et nouvelle : celle d'un couteau arrondi, combinant une matière plastique arrondie en harmonie avec le métal des couverts.

Les appelantes exposent par contre que c'est à bon droit que le premier juge a estimé que la marque BIVOUAC n'était pas purement descriptive, comme le soutiennent les intimés, dès lors que le terme bivouac n'a jamais désigné un couteau, mais que cette marque suggère seulement que le couteau peut être utilisé à l'occasion d'un bivouac ; que la marque BIVOUAC a bien un caractère distinctif. Elles estiment qu'en commercialisant le produit dont l'emballage portait la mention "couteau Bivouac", termes accolés sans mot de liaison, la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON ont bien utilisé le vocable Bivouac de manière arbitraire, comme une marque et que la confusion ainsi obtenue avec les couteaux de marque Bivouac qu'elles commercialisaient auparavant été recherchée.

Concernant le brevet, les appelantes indiquent que c'est à bon droit que le jugement rappelle que l'assignation a bien précisé quelles revendications du brevet étaient contrefaites, désignait le brevet et l'objet contrefaisant et qu'ainsi la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON étaient en situation de se défendre sur le grief de contrefaçon puisque ces dernières savaient quelles revendications leur étaient opposées. Elles exposent qu'en l'espèce les couteaux saisis reproduisent les revendications 1 à 9 du brevet français no97 03800 et que le premier a pu à juste raison constater que le couteau FRENDO était identique à l'original.

Concernant les actes de concurrence déloyale, les sociétés TARRERIAS-BONJEAN rappellent qu'elles étaient fournisseurs de la S.A. DECATHLON qui a brusquement interrompu ses relations commerciale pour faire fabriquer et commander auprès le la S.A.R.L. FRENDO un produit identique (créant la confusion dans l'esprit de l'acheteur moyen) ; que le couteau contrefaisant a été acheté en Chine par la S.A.R.L. FRENDO au prix de 1,58 US$ pièce et revendu à la S.A. DECATHLON entre 5 € et 5,88 €, laquelle société le commercialisait dans ses magasins au prix de 14,99 € (alors qu'elle achetait précédemment le couteau contrefait 6,08€ pièce, et le revendait 20,02 €). Les appelantes estiment que la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON ont détourné leur marché et leur clientèle, et ont profité de leur travail sans aucune recherche particulière, sans frais d'étude, sans mise au point et sans consentir d'investissement promotionnel ; que ces société ont porté atteinte à leur image ; qu'ils ont, en distribuant et commercialisant de telles copies serviles, à vil prix, commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire, leur occasionnant un préjudice distinct de celui résultant des seuls contrefaçons.

La S.A. DECATHLON conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a annulé le modèle français no 96.6367, dès lors que ses caractéristiques de son apparence sont exclusivement imposées par la fonction technique du produit.

La S.A. DECATHLON demande l'infirmation du jugement pour le surplus. Elle estime en effet que la marque est passible d'annulation et qu'il ne peut dès lors y avoir contrefaçon de celle-ci, dès lors que le mot "bivouac" désigne directement la destination du produit, qui est celle d'être un couteau de camping ; que le signe utilisé n'est donc pas distinctif pour ce type de produit ; qu'au surplus la S.A. DECATHLON et la S.A.R.L. FRENDO ne l'ont utilisé eux-même que comme un nom commun, pour décrire la destination du produit, et non à titre de marque.

La S.A. DECATHLON soutient que ni la brevetée, ni la licenciée n'énoncent les caractéristiques techniques décrites et protégées par les 9 revendications mises en litiges et qui auraient été reproduites et qu'en conséquence l'action des sociétés appelantes relatives à la contrefaçon de brevet est irrecevable.

La S.A. DECATHLON estime par ailleurs n'avoir commis aucun acte de concurrence déloyale.

La S.A. DECATHLON conclut en conséquence au débouté des sociétés TARRERIAS-BONJEAN de toutes leurs prétentions. Elle demande toutefois qu'en cas de condamnation, la S.A.R.L. FRENDO soit tenue, en vertu des dispositions du contrat qui les lie, de la relever et garantir. La S.A. DECATHLON sollicite enfin la condamnation des sociétés TARRERIAS-BONJEAN, et subsidiaire de la S.A.R.L. FRENDO, à lui payer une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

A titre principal, la S.A.R.L. FRENDO demande acte de ce qu'elle s'en rapporte aux écritures de la S.A. DECATHLON sur les droits revendiqués par la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN au titre du modèle, de la marque et du brevet, et de ce qu'elle déclare les faire siennes. Elle soutient qu'il n'y a eu aucun acte de concurrence déloyale. Elle expose qu'elle a immédiatement stoppé la commercialisation du produit litigieux argué de contrefaçon et s'est engagé à ne plus le commercialisé. Elle demande en conséquence et à titre subsidiaire qu'en toute hypothèse la demande d'interdiction sous astreinte et la demande de publication soient rejetées et que les préjudices des sociétés TARRERIAS-BONJEAN soient limités à la somme de 9.120 € maximum. Enfin la S.A.R.L. FRENDO déclare s'en rapporter à justice sur la demande de garantie que la S.A. DECATHLON forme à son encontre.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la validité du modèle no966367

Aux termes de l'article L 511-3, alinéa 1er du Code de la propriété intellectuelle, les dispositions du présent livre sont applicables à tout dessin nouveau, à toute forme plastique nouvelle, à tout objet industriel qui se différencie de ses similaires, soit par une configuration distincte et reconnaissable lui conférant un caractère de nouveauté, soit par un ou plusieurs effets extérieurs lui donnant une physionomie propre et nouvelle.

Il est constant en l'espèce que le modèle de couteau no459 474 a été déposé à l'INPI le 8 novembre 1996 sous le numéro 966367. La déclaration de dépôt comporte une reproduction photographique accompagnée d'une description ("Couteau remarquable notamment par le logement des couverts, cuillère et fourchette, dans les glissières ménagées de chaque côté du manche ; le couteau est à lame fermante, à ouvre-boîte et tire-bouchon fermants").

La S.A. DECATHLON estime que les caractéristiques de son apparence sont exclusivement imposés par la fonction technique du produit.

Toutefois c'est à juste raison que la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN considèrent que le modèle présente un certain nombre d'éléments caractéristiques qui lui confèrent une physionomie propre et nouvelle, à savoir : 1) un corps allongé dont les deux extrémités, de forme arrondie, sont symétriques par rapport au plan médian du corps, répondant à un souci d'esthétisme et de design et ne relevant pas d'une exigence technique - 2) la présence d'une fente sur la partie principale dont longueur et la largeur permettent de mieux laisser visible la partie métallique des couverts, ce qui crée une harmonie esthétique d'ensemble entre le plastique développé sur la partie centrale et le métal des couverts ; le choix des formes et dimensions permet d'obtenir une combinaison visuelle plastique/métal en rehaussant le corps de l'objet d'une bande métallique au plan médian. Ce choix répond au souci de créer un modèle esthétique et ne répond pas à des exigences techniques.

Aussi l'impression visuelle qui se dégage est celle d'une physionomie propre et nouvelle, dont les éléments constitutifs et l'aspect final sont distincts du résultat fonctionnel poursuivi et donc de l'invention brevetée.

Il convient en conséquence de réformer le jugement du Tribunal de Grande Instance de LYON qui a annulé ce modèle et de dire que la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN ont le droit exclusif d'exploiter ce modèle déposé à l'INPI le 8 novembre 1996.

Sur la contrefaçon du modèle

Il résulte des produits saisis et versés aux débats, que le couteau importé par la S.A.R.L. FRENDO et commercialisé par la S.A. DECATHLON reproduit les caractéristiques essentielles du modèle déposé à l'INPI par les sociétés TARRERIAS-BONJEAN et engendre la même impression d'ensemble.

Les sociétés. FRENDO et. DECATHLON ont donc commis des actes de contrefaçon de modèle et le jugement sera en conséquence réformé de ce chef.

Sur la validité de la marque "BIVOUAC" no97-663174

C'est pas des motifs exacts - adoptés par la Cour - que le premier juge a considéré que la marque "BIVOUAC" n'était pas descriptive, dès lors que ce terme ne désigne pas un couteau, mais suggère seulement que le couteau concerné peut être utilisé à l'occasion d'un bivouac et que la marque "BIVOUAC" a donc bien un caractère distinctif.

C'est à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de nullité de la marque déposée à l'INPI le 5 février 1997 formée par la S.A. DECATHLON, de sorte que la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN a le droit exclusif de l'utiliser.

Sur la contrefaçon de la marque "BIVOUAC"

Il résulte des pièces produites que la S.A. DECATHLON a commercialisé un couteau distribué par la S.A.R.L. FRENDO en mentionnant sur l'emballage "couteau Bivouac" tandis que la S.A.R.L. FRENDO à vendu à la S.A. DECATHLON des "couteaux Bivouac" comme cela ressort des factures et correspondances échangées entre les deux sociétés.

C'est à juste raison que le premier juge a fait observer que les deux termes ont été accolés sans mots de liaison, ce qui exclut que le second soit employé dans un sens commun et qu'au contraire le vocable Bivouac a bien été utilisé pour désigner un couteau de manière arbitraire, comme une marque, de sorte qu'il ne fait pas de doute que la confusion ainsi obtenue était recherchée.

La S.A. DECATHLON et la S.A.R.L. FRENDO ont donc commis des actes de contrefaçon de marque et le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la contrefaçon du brevet no 97-03800

C'est à bon droit que le premier juge a estimé tout d'abord recevable la demande de la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN, dès lors que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés DECATHLON et S.A.R.L. FRENDO, l'assignation qui leur a été délivrée précisaient quelles revendications du brevet étaient contrefaites, désignait le brevet et l'objet contrefaisant, de sorte que sachant quelles revendications leur étaient opposées, elles étaient en situation de se défendre sur le grief de contrefaçon.

Le premier juge par des motifs exacts - adoptés par la Cour, a relevé de quelle manière les revendications 1 à 9 du brevet étaient effectvement reproduites par le couteau litigieux, étant précisé qu'au demeurant, la S.A. DECATHLON et la S.A.R.L. FRENDO ne contestent pas la contrefaçon.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON ont commis des actes de contrefaçon des revendications 1 à 9 du brevet no97-0380.

Il convient en conséquence de confirmer la décision du Tribunal de Grande Instance qui a interdit, sous astreinte, aux sociétés S.A. DECATHLON et S.A.R.L. FRENDO de commercialiser par quelque moyen que ce soit les objets contrefaisant la marque BIVOUAC no97 663174 ou le brevet no97 03000, tout en étendant désormais cette interdiction de commercialisation aux objets contrefaisant le modèle no96 6367.

Il convient en outre de confirmer la mesure de publication de la décision, sans qu'il y ait lieu à une accroissement du nombre de journaux ou périodiques fixé par le premier juge, ni à une augmentation du coût de l'insertion.

L'ensemble des contrefaçons dont la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN et la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN ont été victime de par les agissements des deux sociétés concernés, leur ont causé un préjudice global que la Cour, au vu des éléments d'appréciation dont elle dispose, est en mesure de fixer à la somme de 100.000 €. Le jugement sera en conséquence réformé de ce chef et les sociétés TARRERIAS-BONJEAN déboutées des demandes plus amples qu'elles ont formées à ce titre.

Sur la concurrence déloyale

Les sociétés TARRERIAS-BONJEAN estiment être victimes d'actes de concurrence déloyale de la part de la S.A.R.L. FRENDO et de la part de la S.A. DECATHLON, laquelle a interrompu brutalement les relations commerciales qu'elle entretenait avec les dites sociétés et celles-ci réclament en conséquence réparation de leur préjudice, résultant, selon elles, du caractère servile de la copie et du prix de vente du modèle contrefaisant, lesquels auraient engendré un détournement de clientèle et une désorganisation de leur politique commerciale. La S.A. DECATHLON s'inscrit en faux concernant l'allusion faite au prix, en faisant observer qu'elle a toujours vendu le couteau litigieux au public au prix de 14,99 €, quelle que soit son origine (TARRERIAS-BONJEAN ou FRENDO).

Mais en tout état de cause, il convient de relever que les éléments invoqués au soutien de l'action en concurrence déloyale ne sont nullement distincts de ceux qui servaient de fondement à l'action en contrefaçon.

Le seul élément retenu pas les premiers juges serait constitué par la reproduction de l'emballage, qui en plus de la marque et des revendications du brevet, accroîtrait la confusion recherchée chez le client et, partant, pourrait être considéré comme un élément constitutif distinct de concurrence déloyale.

Toutefois cet unique élément, envisagé comme une source de confusion supplémentaire possible, n'est nullement caractérisé en l'espèce. En effet, si l'on fait abstraction du conditionnement sous blister avec perforation sur le haut pour permettre sa mise en rayon par suspension, lequel est lié au mode de présentation des produits dans les magasins de la S.A. DECATHLON et donc commun à de multiples produits commercialisés par cette société, rien dans les autre caractéristiques de l'emballage ne vient entretenir ou "accroître" la confusion, puisque le couteau est présenté déployé pour le produit contrefaisant et fermé pour le produit contrefait et que le graphisme du carton sur lequel il est fixé est différent.

Dans ces conditions, il convient de réformer le jugement en constatant que la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN ne font pas état d'actes de concurrence distincts des actes de contrefaçon et doivent être déboutés de la demande de dommages-intérêts qu'elles ont formées de ce chef.

Sur l'appel en garantie de la S.A. DECATHLON à l'égard de la S.A.R.L. FRENDO

Il convient de confirmer sur ce point le jugement qui, s'appuyant sur l'article 6 des conditions générales d'achat liant les parties relatif aux poursuites résultant d'une contrefaçon, a condamné la S.A.R.L. FRENDO à relever et garantir la S.A. DECATHLON des condamnations prononcée à l'encontre de cette dernière au bénéfice des sociétés TARRERIAS-BONJEAN.

Il est équitable d'allouer à la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et à la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN, en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, une indemnité au titre des frais, non compris dans les dépens, qu'elles ont dû exposer pour assurer leur défense en première instance et en cause d'appel.

La S.A. DECATHLON qui succombe à l'instance, sera déboutée de la demande d'indemnité qu'elle a présentée sur le même fondement à l'encontre des sociétés TARRERIAS-BONJEAN et sera tenue in solidum avec la S.A.R.L. FRENDO aux dépens. Il n'est pas inéquitable non plus, au regard des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, de débouter la S.A. DECATHLON de la demande d'indemnité qu'elle a formée à titre personnel, et non dans le cadre de l'appel en garantie, à l'encontre de la S.A.R.L. FRENDO.

DECISION

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 28 avril 2005 par le Tribunal de Grande Instance de LYON, excepté en ce qu'il annulé le modèle français déposé à l'INPI le 8 novembre 1996 et dit que cette décision serait inscrite au Registre National des Dépôts et Modèles, en ce qu'il a limité à 15.000 € les dommages-intérêts alloués au titre des contrefaçons et enfin en ce qu'il a dit que la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON avaient commis des actes de concurrence déloyale ;

Le réformant de ces derniers chefs et y ajoutant,

Rejette la demande de nullité du modèle français, déposé à l'INPI le 8 novembre 1996, et enregistré sous le numéro 96.6367 et publié le 4 avril 1997 sous le numéro 459474 ;

Dit que la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON ont commis des actes de contrefaçon du modèle français no 96.6367 ;

Interdit à la S.A.R.L. FRENDO et à la S.A. DECATHLON, sous astreinte de 70 € par infraction de retard, de commercialiser par quelque moyen que ce soit des objets contrefaisant le modèle français no 96.6367 ;

Condamne in solidum la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON à payer à la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et à la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN une somme de 100.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par la contrefaçon du modèle français no 96.6367, de la marque "BIVOUAC" no 97.663174 et des revendications 1 à 9 du brevet no 97 03800 ;

Condamne in solidum la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON à verser à la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN et à la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN la somme de 7.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile (en ce compris la somme allouée sur le même fondement par le jugement du Tribunal de Grande Instance) ;

Déboute la S.A. Etablissements TARRERIAS-BONJEAN et la S.A. d'Exploitation TARRERIAS-BONJEAN de leurs demandes plus amples ou contraires et notamment de leur demande de dommages-intérêts pour concurrence déloyale ;

Déboute la S.A. DECATHLON de la demande d'indemnité formée, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, à l'encontre de la S.A.R.L. FRENDO, en sus de la garantie que lui doit la S.A.R.L. FRENDO pour les condamnations prononcées à son encontre au profit des sociétés TARRERIAS-BONJEAN ;

Condamne in solidum la S.A.R.L. FRENDO et la S.A. DECATHLON aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les procès-verbaux de saisie-contrefaçon et seront distrait au profit de Maître Z..., avoué près la Cour d'appel de LYON.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 05/04000
Date de la décision : 26/10/2006
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Lyon, 28 avril 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2006-10-26;05.04000 ?
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