AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE R.G : 05/04824 CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE EST C/ X... APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de BELLEY du 29 Juin 2005 RG : F 04/00141 COUR D'APPEL DE LYON CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 21 SEPTEMBRE 2006 APPELANTE : CAISSE REGIONALE DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE EST 1, rue Pierre de Truchis de Lays 69541 CHAMPAGNE AU MONT D'OR Comparants : Mme Elisabeth RECORBET Y... des Ressources Humaines et Monsieur Z... de l'Inspection Générale Assistée de Me Frédéric RENAUD, Avocat au barreau de LYON, INTIME :
Monsieur Antoine X... 16 Lotissement du Parc 38390 A... BALME LES GROTTES Comparant en personne, Assisté de Me François DUMOULIN, Avocat au barreau de LYON
DEBATS EN CHAMBRE DU CONSEIL DU : 22 Juin 2006 COMPOSITION DE A... COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Régis VOUAUX-MASSEL, Président Monsieur Daniel GERVESIE, Conseiller Madame Nelly VILDE, Conseiller Assistés pendant les débats de Madame Myriam B..., Adjoint administratif faisant fonction de greffier. ARRET : CONTRADICTOIRE Le 21 Septembre 2006 mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code
de Procédure Civile ; Signé par Monsieur Régis VOUAUX-MASSEL, Président, et par J.Mignot, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. EXPOSE DU LITIGE Monsieur X... est entré au service de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est le 10 mai 1983. Monsieur X... était en dernier lieu affecté sur le poste d'attaché commercial à l'agence de SERRIERE DE BRIORD, à laquelle est rattachée une micro-antenne située dans la commune de LHUIS. Après convocation à un entretien préalable, Monsieur X... se voyait notifier son licenciement pour faute grave suivant lettre recommandée en date du 23 juillet 2004, laquelle énonçait les griefs suivants : "Réclamation d'un client utilisant fréquemment l'automate de LHUIS pour effectuer des versements d'espèces et constatant régulièrement des erreurs sur les montants crédités sur son compte (16 février pour 150 ç, 1er mars pour 150 ç, 15 mars pour 100 ç, 30 mars pour 100 ç et 13 avril pour 200 ç) et ce depuis le mois de février 2004, alors que vous avez été affecté à ce secteur depuis janvier 2004. Recherche et constatation par l'inspection générale avec notre service trésorerie d'anomalies ayant pu se produire à la permanence de LHUIS nous permettant d'identifier 4 clients concernés par les mêmes motifs et pendant les mêmes périodes, alors que vous étiez seul à tenir la permanence de LHUIS à ces dates là et d'observer que les enveloppes correspondantes avaient fait l'objet d'une ouverture qui aurait permis l'extraction d'un ou de deux billets. Constatation statistique nous indiquant un taux d'erreurs sur la permanence de LHUIS à 5,8% très supérieur à la moyenne de l'entreprise qui se situe à 0,5% ; de plus, les erreurs de LHUIS se produisent toujours les semaines où vous tenez la permanence, seul et toujours dans un sens défavorable pour le client alors qu'au niveau global de la caisse régionale les différences en plus et en moins s'équilibrent. Dès lors, compte tenu de l'existence
des malversations visant à détourner des fonds de nos clients, ce qui dégrade fortement la qualité de notre service, nuit à notre image et nous conduit alors, à titre tout à fait exceptionnel, à rembourser immédiatement les sommes correspondantes aux clients qui avaient fait l'objet d'une réclamation, nous vous licencions pour faute grave, privative d'indemnité de préavis et de licenciement." Le 29 septembre 2004, Monsieur X... qui contestait toute implication dans un quelconque détournement d'espèces, saisissait le Conseil de Prud'hommes de BELLEY aux fins d'obtenir réparation du préjudice que lui cause son licenciement. Suivant jugement en date du 29 juin 2005, le Conseil de Prud'hommes disait que le licenciement de Monsieur X... est intervenu sans cause réelle et sérieuse et condamnait le Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est à lui verser les sommes de 55.000 ç à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif, 30.570,96 ç à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 2.911,52 ç au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 291,15 ç au titre des congés payés y afférents et 1.500 ç sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Le jugement ordonnait l'exécution provisoire totale. A... Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est interjetait régulièrement appel de cette décision. Dans des écritures auxquelles la Cour se réfère expressément, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est soutient que les écarts constatés entre les sommes déposées en espèces par un commerçant au guichet automatique de banque et les sommes ensuite décomptées ne peuvent provenir, dès lors que, selon elle, tant le client que la société spécialisée dans le transport et le comptage des billets doivent être mis hors de cause, que du seul agent qui opérait le comptage des enveloppes trouvées dans le coffre-fort du guichet automatique et à leur conditionnement avant remise, en principe toujours scellées, à la
société de transport et de comptage des billets. Elle relève un taux d'erreurs plus important sur cette antenne que le taux moyen d'erreur pour l'ensemble des agences de la banque. Elle fait valoir qu'alors même que deux agents effectuaient à tour de rôle un service sur l'antenne de LHUIS, il y avait cinq fois plus d'anomalies (écarts constatés), lorsque c'était Monsieur X... qui assurait la permanence. A... Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est en conclut que le comportement de Monsieur X... constituait bien une faute grave qui justifiait son licenciement immédiat. A... banque sollicite en conséquence l'infirmation du jugement de sorte que Monsieur X... soit débouté de tous ses chefs de demande et soit condamné à lui rembourser les sommes qu'elle a versées dans le cadre de l'exécution provisoire, ainsi qu'à lui payer une indemnité de 1.500 ç sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Monsieur X... qui conteste toute implication dans un quelconque détournement de fonds au préjudice de clients, fait valoir qu'aucun élément de preuve ne permet de lui imputer les faits que son employeur lui reproche dans la lettre de licenciement. C... conteste en tout cas l'indépendance et l'objectivité de l'inspection générale de la caisse de Crédit agricole, organe interne à la banque, qui a mené des investigations uniquement à charge. Monsieur X... a également fait observer que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est a retiré des débats des pièces qui dans la logique du raisonnement qu'elle tient, aurait conduit à une mise en cause de l'autre agent, assurant comme lui des permanences à l'antenne de LHUIS. Monsieur X... a conclu en conséquence à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, sauf à voir la Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est condamnée à lui verser une indemnité de 2.000 ç en sus du montant alloué en première instance sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
MOTIFS DE A... DECISION C... appartient à l'employeur qui invoque une faute grave à l'appui du licenciement qu'il prononce à l'encontre de son salarié, de rapporter la matérialité des faits et leur imputabilité au salarié concerné. Dès lors qu'elle nourrissait des soupçons envers l'un des deux agents assurant à tour de rôle la permanence d'une micro-antenne équipée d'un guichet automatique de banque, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est ne pouvait, pour asseoir sa conviction, se borner, aux termes d'une simple enquête interne, à relever la fréquence des écarts entre les sommes déclarées déposées par un commerçant au guichet automatique et les sommes comptées par la société spécialisée dans le transport de fonds et à procéder, en les comparant à la moyenne des erreurs constatées sur l'ensemble de l'entreprise, à de simples déductions statistiques, tout en relevant une co'ncidence entre certaines des anomalies constatées et les semaines de permanences de l'un de ses agents. En la présence d'accusations aussi graves que celles de détournement de fonds de la clientèle, constitutif d'un délit pénal, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est se devait d'apporter des preuves irréfutables de la culpabilité de son salarié, au besoin en provoquant, par un dépôt de plainte, une enquête judiciaire, qui, au vu éléments de preuve recueillis, aurait permis aux termes d'une procédure régulière de retenir ou non la culpabilité de Monsieur X... A... volonté affichée par l'employeur de préserver une image de marque ne peut justifier qu'il ait été passé outre à des investigations sérieuses, alors que la gravité de l'accusation qui sous-tend le licenciement de Monsieur X... les rendaient manifestement nécessaires. C'est à juste titre dans ces conditions que le Conseil de Prud'hommes, estimant qu'un doute subsistait manifestement, a dit que le licenciement de Monsieur X... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse au sens de l'article L
122-14-3 du Code du travail. Le Conseil de Prud'hommes a fait une juste appréciation du préjudice subi par Monsieur X... C... convient en conséquence de confirmer le montant des dommages-intérêts alloués à Monsieur X... pour licenciement abusif, ainsi que les indemnités de rupture auxquelles il a droit en vertu de la convention collective applicable. C... convient en outre, en application de l'article L 122-14-4 du Code du travail, de condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est à rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées au salarié entre le jour du licenciement et le jour du jugement dans la limite de quatre mois d'indemnités. C... est équitable d'allouer à Monsieur X..., en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, une indemnité au titre des frais, non compris dans les dépens, qu'il a dû exposer pour assurer sa défense en première instance et en cause d'appel.itre des frais, non compris dans les dépens, qu'il a dû exposer pour assurer sa défense en première instance et en cause d'appel. A... Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est qui succombe à l'instance, sera déboutée de la demande d'indemnité qu'elle a présentée sur le même fondement et tenue aux dépens. DECISION PAR CES MOTIFS A... Cour, Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 29 juin 2005 par le Conseil de Prud'hommes de BELLEY ; Y ajoutant, Condamne la Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est à verser à Monsieur X... la somme de 2.000 ç sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile (en ce comprise la somme allouée sur le même fondement par le jugement du Conseil de Prud'hommes) ; Condamne en outre, en application de l'article L 122-14-4 du Code du travail, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est à rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées au salarié entre le jour du licenciement et le jour du jugement dans la limite de quatre mois
d'indemnités ; Déboute Monsieur X... de ses demandes plus amples ou contraires et la Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est de la demande d'indemnité qu'elle a formée en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; Condamne la Caisse Régionale de Crédit Agricole Centre Est aux dépens de première instance et d'appel. Le Greffier Le Président