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31/01/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006948192

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale, 31 janvier 2006, JURITEXT000006948192


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE R.G : 04/03522 X... C/ SA AXA FRANCE VIE VENANT AUX DROITS DE LA SOCIETE AXA ASSURANCES APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 29 Avril 2004 RG : 99/03691 COUR D'APPEL DE LYON CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 31 JANVIER 2006 APPELANT : Monsieur Jacques X... 104 Allée du Parc du Château 01600 TREVOUX comparant en personne, assisté de Me Michel BONNEFOY, avocat au barreau de LYON INTIMEE : SA AXA FRANCE VIE VENANT AUX DROITS DE LA SOCIETE AXA ASSURANCES 26 Rue Drouot 75009 PARIS représentée par Me Philippe ARDUIN, avocat au barreau de LYON PART

IES CONVOQUEES LE : 08 avril 2005 DEBATS EN AUDIENCE ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLEGIALE R.G : 04/03522 X... C/ SA AXA FRANCE VIE VENANT AUX DROITS DE LA SOCIETE AXA ASSURANCES APPEL D'UNE DECISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 29 Avril 2004 RG : 99/03691 COUR D'APPEL DE LYON CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 31 JANVIER 2006 APPELANT : Monsieur Jacques X... 104 Allée du Parc du Château 01600 TREVOUX comparant en personne, assisté de Me Michel BONNEFOY, avocat au barreau de LYON INTIMEE : SA AXA FRANCE VIE VENANT AUX DROITS DE LA SOCIETE AXA ASSURANCES 26 Rue Drouot 75009 PARIS représentée par Me Philippe ARDUIN, avocat au barreau de LYON PARTIES CONVOQUEES LE : 08 avril 2005 DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 08 Novembre 2005 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : M. Didier JOLY, Président M. Dominique DEFRASNE, Conseiller Madame Aude LEFEBVRE, Conseiller Assistés pendant les débats de Madame Yolène BRISSY, Greffier. ARRET : CONTRADICTOIRE Prononcé publiquement le 31 Janvier 2006, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ; Signé par M. Didier JOLY, Président, et par Madame Yolène BRISSY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA COUR,

Statuant sur les appels interjetés : 1o) le 7 mai 2004 par Jacques X..., 2o) le 25 mai 2004 par la S.A. AXA FRANCE VIE, venant aux droits de la société AXA Assurances, d'un jugement rendu le 29 avril 2004 par le Conseil de Prud'hommes de LYON (section encadrement) qui a : - accueilli Jacques X... en sa demande pour les cotisations retraites, - ordonné à AXA de verser à la Caisse de retraite concernée le montant des cotisations nécessaires à la reconstitution de 2 063 points, et ce sous astreinte de 1 000 euros par mois de

retard, quinze jours après la signification du jugement, pour une période de trois mois, le Conseil se réservant le droit de liquider éventuellement ladite astreinte, - débouté Jacques X... de ses autres prétentions, - débouté AXA de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - condamné AXA aux dépens ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 8 novembre 2005 par Jacques X... qui demande à la Cour de : A/ 1o) dire et juger que la Compagnie U.A.P.-AXA ne pouvait réduire de 30% la base de calcul des cotisations de retraite complémentaire pour les années antérieures à 1996 dans la mesure où Jacques X... ne remplissait pas les conditions des articles 51 de l'annexe III du code général des impôts et 5 de l'annexe IV du même code puisqu'il n'avait pas la qualité d'inspecteur exigée par ces textes, 2o) en conséquence, confirmer la décision entreprise sur ce point et en réparation du préjudice subi par Jacques X..., condamner la société défenderesse, sous astreinte de 1 000 ç par mois de retard à compter de la signification de la décision à intervenir, à verser à la caisse de retraite compétente la capital nécessaire pour acquérir les points perdus par sa faute ; B/ 1o) dire et juger que les violations répétées et importantes des dispositions du contrat de travail de Jacques X..., autorisent ce dernier à voir prononcer la résiliation de son contrat de travail aux torts de son employeur ainsi que l'indemnisation de la perte de revenus subie de 1999 à 2005, 2o) en conséquence, réformer la décision entreprise et, prononçant la résiliation du contrat de travail de Jacques X... aux torts de son employeur, condamner la compagnie AXA à lui payer les sommes suivantes : - dommages-intérêts pour perte de revenus

110 000, 00 ç - indemnité de préavis

12 346, 00 ç - congés payés sur préavis

1 234, 60 ç - indemnité conventionnelle de licenciement

46 923, 81 ç - dommages-intérêts pour rupture abusive et harcèlement moral

180 000, 00 ç outre intérêts de droit à compter de la demande, C/ 1o) si la Cour estimait ne pas devoir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la compagnie AXA, dire et juger le licenciement pour faute grave de Jacques X... abusif dans la mesure où les griefs articulés à son encontre ne sauraient constituer une faute grave, d'autant qu'il s'agit de faits antérieurs de deux ans dont AXA avait connaissance, 2o) en conséquence, allouer à ce dernier les indemnités de rupture, D/ En toute hypothèse, 1o) que la Cour estime fondée la demande de résiliation judiciaire ou abusif le licenciement, allouer à Jacques X... la somme de 8 231 ç au titre du salaire correspondant à la mise à pied abusive du 1er juin au 31 juillet 2005, 2o) condamner la société défenderesse à lui payer la somme de 5 000 ç en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales par la S.A. AXA FRANCE VIE, venant aux droits de la société AXA Assurances qui demande à la Cour de : - réformer le jugement du 29 avril 2004 dans ses dispositions ordonnant sous astreinte à la Sté AXA FRANCE de verser à la Caisse de retraite concernée le montant des cotisations nécessaires à la reconstitution de 2.063 points, - déclarer non fondé l'appel de Jacques X... et débouter celui-ci de toutes ses prétentions, - condamner Jacques X... à payer à la S.A. AXA FRANCE VIE, venant aux droits de la société AXA Assurances la somme de 4 000 ç par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Attendu que Jacques X... a été engagé par l'U.A.P. en qualité de

conseiller en prévoyance stagiaire suivant contrat de travail du 29 mars 1982 à effet du 15 mars 1982 ; que par avenant du 4 mars 1983, il a été titularisé et nommé conseiller en prévoyance 1er échelon ;

Qu'ensuite la progression de carrière de Jacques X... a été la suivante : - conseiller en prévoyance 2ème échelon par contrat du 27 juin 1986, - conseiller en prévoyance 3ème échelon par contrat du 19 juillet 1988, - attaché d'inspection à l'essai par contrat du 12 juillet 1989, - attaché d'inspection titulaire par contrat du 6 septembre 1991, - adjoint d'inspection par contrat du 29 janvier 1996,

Que la relation de travail était alors soumise à la convention collective nationale des échelons intermédiaires des services extérieurs de production des sociétés d'assurances du 13 novembre 1967 ;

Que Jacques X... a encore bénéficié de la promotion suivante : - inspecteur conseil stagiaire le 1er mars 1998 suivant contrat du 16 février 1998, régi par la convention collective nationale de l'inspection d'assurances du 27 juillet 1992 ;

Que par lettre du 26 janvier 1998, l'U.A.P. lui a notifié que son contrat de travail serait transféré au sein de l'entreprise AXA Assurances et que ses employeurs seraient conjointement AXA Assurances IARD et AXA Assurances Vie ;

Que le 8 janvier 1999, un protocole d'accord relatif à la réforme du réseau des salariés vie a été conclu entre les sociétés AXA Assurances IARD et AXA Assurances Vie d'une part, certaines organisations syndicales d'autre part ; qu'il avait pour objet de redéfinir les conditions de rémunération de plusieurs catégories de salariés ; que Jacques X... a été informé de ce qu'il lui serait prochainement proposé d'opter pour le bénéfice de cet accord en signant un nouveau contrat de travail ; que Jacques X... a fait

partie des "non optants" ; qu'il a donc poursuivi son activité en conservant ses modalités de rémunération, appliquées sur de nouvelles bases compte tenu de la disparition des produits U.A.P. ;

Que par lettre du 19 avril 1999, la société AXA Assurances, rappelant à Jacques X... qu'il avait refusé le 10 février 1999 de prendre des objectifs personnels de production pour l'année 1999 et de définir un plan d'action commerciale pour les atteindre, lui a rappelé les dispositions de son contrat de travail d'inspecteur conseil du réseau agences générales qui prévoyait que la hiérarchie et le salarié conviendraient au début de chaque exercice d'un objectif personnel de production et des moyens à mettre en oeuvre pour le satisfaire ; qu'elle a invité le salarié à lui adresser par retour son récapitulatif d'activité de mars 1999 conformément aux termes de son contrat de travail ; qu'enfin, dans ce courrier, l'employeur a relevé que Jacques X... n'avait pas assisté à une réunion fixée le 23 mars 1999, contrairement à ses engagements ;

Que par lettre du 3 mai 1999, Jacques X... a objecté que les termes du courrier du 19 avril n'étaient pas le reflet de la réalité et qu'il n'avait pas eu le 10 février l'attitude qui lui était imputée, s'étant borné à refuser de signer un nouveau contrat de travail ; qu'il a ajouté qu'il avait oublié la réunion du 23 mars 1999 ;

Que par lettre du 2 juillet 1999, faisant suite à un entretien du 16 juin, la société AXA Assurances a pris note de ce que Jacques X... ne souhaitait pas prendre des objectifs personnels de production pour l'année 1999 comme le stipulait son contrat de travail ; qu'elle a appelé l'attention de Jacques X... sur le fait qu'elle n'était toujours pas en possession des récapitulatifs d'activité de mars, avril, mai et juin 1999, en dépit de son rappel du 2 juin 1999 ;

Qu'à nouveau, par lettre du 27 juillet 1999, l'employeur a demandé à

Jacques X... de lui adresser par retour du courrier ses rapports d'activité ; que par lettre du 31 juillet, le salarié a répondu qu'il n'avait jamais établi de rapports d'activité, qu'il ne lui en avait pas été demandé auparavant et que ses résultats étaient "conformes à ses conditions de travail" ;

Que le 27 septembre 1999, Jacques X... a saisi le Conseil de Prud'hommes d'une demande d'indemnisation du préjudice résultant du défaut de cotisations au régime de retraite ; qu'en cours de procédure, il a formé une demande additionnelle en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur ;

Que par lettre recommandée du 20 décembre 1999, la société AXA Assurances a notifié à Jacques X... qu'en raison de la dénonciation par M. Y..., agent général, de la convention de collaboration, il n'avait plus qualité pour intervenir auprès des clients d'AXA Assurances rattachés à l'agence de Trévoux ; qu'elle a, en conséquence, invité le salarié à cesser toute activité commerciale auprès de ceux-ci et à leur indiquer, en tant que de besoin, qu'ils devaient s'adresser à ladite agence ;

Que par lettre recommandée du 6 janvier 2000, l'employeur a confirmé à Jacques X... son affectation à l'agence de Nantua-La Cluses ainsi que les obligations de production minimale prévues à son contrat de travail ;

Que par lettre du 21 juillet 2000, il lui a fait observer que sa production était fin juin 2000 en dessous du niveau contractuel minimal de production annuelle ; qu'il a rappelé au salarié d'avoir d'une part à lui adresser ses rapports d'activité du premier semestre, d'autre part à renvoyer sur l'agence de Trévoux les clients rattachés à celle-ci ;

Qu'une nouvelle correspondance a été adressée à Jacques X... le 20 novembre 2000 pour relever l'absence d'amélioration des résultats de

ce dernier depuis le mois de juillet et lui rappeler l'obligation de transmette des rapports d'activité ;

Que par lettre recommandée du 1er juin 2005, la société AXA Assurances a convoqué Jacques X... le 20 juin en vue d'un entretien préalable à son licenciement et lui a notifié sa mise à pied à titre conservatoire ; que le Conseil de discipline prévu par l'article 66 de la convention collective nationale applicable s'est réuni le 21 juillet 2005 ; que les représentants du salarié ont émis un avis défavorable à la poursuite de la procédure de licenciement et les représentants de la société un avis contraire ;

Que la société AXA Assurances a notifié à Jacques X... son licenciement pour faute grave par lettre recommandée du 29 juillet 2005 ainsi motivée :

Les griefs qui vous sont reprochés sont les suivants : - vous avez commis des agissements déloyaux, se caractérisant par plusieurs interventions abusives auprès d'un client, dont vous n'avez plus la gestion des contrats et par lequel vous n'avez pas été mandaté, en l'incitant notamment à réaliser des placements à la concurrence, - vous avez tenu par écrit des propos diffamants et menaçants, consistant à dénigrer un représentant de la Direction, qui était en outre à l'époque des faits votre supérieur hiérarchique, en portant atteinte à sa probité professionnelle, et ce, au détriment des intérêts de la Société, dans le seul but de servir vos propres intérêts.

Attendu que lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée ; que c'est

seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur ; poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée ; que c'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur ; Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail :

Attendu qu'aux termes de l'article L 121-1 du code du travail, le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun des contrats synallagmatiques pour tout ce sur quoi il n'est pas dérogé par des dispositions légales particulières ; que l'action en résiliation d'un contrat de travail est donc recevable, conformément à l'article 1184 du code civil, dès lors qu'elle est fondée sur l'inexécution par l'une des parties de ses obligations ;

Qu'en l'espèce, la commercialisation des anciens produits U.A.P. a cessé progressivement entre janvier et septembre 1999 ; que Jacques X... et la minorité des salariés qui n'avaient pas opté pour l'application du protocole d'accord du 8 janvier 1999 avaient la faculté de poursuivre leur activité en commercialisant les nouveaux produits AXA tout en conservant leurs modalités de rémunération antérieures ; que, certes, le rapport d'expertise déposé par M. Z... démontre que celles-ci n'étaient pas adaptées à la gamme des produits AXA, conçus dans une perspective toute différente ; qu'ainsi, les produits de la gamme U.A.P. étaient assortis d'une prime commerciale pondérée avec une prime périodique affectée du coefficient 10 pour seize produits (santé et prévoyance) et une prime unique de coefficient 1 pour les neuf autres (épargne/placement) ; que ce système de coefficient avait un impact important sur la rémunération des salariés puisqu'en 1997 et 1998, les produits d'assurance affectés du coefficient 10 représentaient 70% du chiffre d'affaires de Jacques X... ; que ce système n'était pas applicable

aux produits AXA ; qu'il n'est pas contesté que la détermination des produits et leur évolution éventuelle relèvent du choix du chef d'entreprise ; que la société AXA Assurances pouvait donc substituer une gamme à une autre ; qu'en outre, elle n'était pas tenue de pérenniser les coefficients de pondération mis en place par l'U.A.P. et dépourvus de tout caractère contractuel ; qu'au demeurant, la S.A. AXA FRANCE VIE soutient que les commerciaux encore en fonction et ayant accepté le nouveau mode de rémunération n'ont pas subi de baisse de revenus ; que l'attitude négative adopté par Jacques X... ne permet aucune comparaison entre ses revenus passés et ceux postérieurs à 1999 puisqu'il a refusé de promouvoir les produits AXA ; que la baisse de revenus alléguée résulte au premier chef de l'activité professionnelle insuffisante de l'appelant et ne constitue donc pas un préjudice susceptible d'être réparé par l'allocation de dommages-intérêts ; que la société AXA Assurances n'a pas davantage modifié le contrat de travail de Jacques X... en le rattachant à l'agence de Nantua et non plus à celle de Trévoux ; qu'en effet, l'article 3.1 du contrat de travail d'inspecteur conseil grande branche du réseau agences générales, signé par le salarié le 5 mars 1998, contenait la disposition suivante :

A votre nomination, votre hiérarchie choisit l'Agence Générale avec laquelle vous collaborerez ;

Ce choix est susceptible d'être modifié : de même, vous pouvez être affecté à une autre Inspection, selon les modalités prévues par la Convention Collective ;

Que cette clause n'a pas été mise en oeuvre de manière vexatoire, l'agent général AXA à Trévoux, Daniel Y..., ayant de sa propre initiative dénoncé la convention de collaboration qui le liait à Jacques X... ; que le harcèlement allégué par celui-ci n'est étayé

par aucun élément ; qu'au contraire, la société AXA Assurances a fait preuve d'une réelle retenue en conservant dans ses effectifs un salarié qui, en dépit de plusieurs injonctions écrites, refusait obstinément de s'engager sur des objectifs de production et de remettre des rapports d'activité ;

Qu'en conséquence, le jugement qui a débouté Jacques X... de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail doit être confirmé ; Sur les motifs du licenciement :

Attendu qu'il résulte des dispositions combinées des articles L 122-6, L 122-14-2 (alinéa 1) et L 122-14-3 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis ;

Qu'après le rejet de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, Jacques X... a reproché à son supérieur hiérarchique Francis WAELTERLE, directeur des ventes, au cours d'un entretien du 27 août 2004, dans des courriels et enfin dans une lettre recommandée du 20 décembre 2004, d'avoir fait souscrire le 10 juillet 2003 à Jean A... (83 ans), client relevant de l'agence générale de Trévoux, un contrat "figures libres" pour un montant de 600 004 ç, en remploi du prix de rachat de bons appartenant à son frère défunt ; que selon Jacques X..., qui se disait sollicité régulièrement par Jean A..., le transfert de propriété hors succession ainsi réalisé avait mis Jean A... et sa famille en difficulté face à l'administration fiscale ; que l'appelant concluait son courrier en indiquant qu'à

défaut de réponse sous huitaine, il communiquerait cette affaire "à qui de droit" ; qu'effectivement, le 7 janvier 2005, il a communiqué au directeur général d'AXA, Michel B..., copie de sa lettre à Francis WAELTERLE ; qu'il est à noter que celui-ci avait aussitôt saisi le service des affaires juridiques et que, inexplicablement, Jacques X... a refusé de rencontrer l'inspecteur "déontologie" mandaté par la société AXA Assurances pour vérifier ses dires ; qu'il n'a communiqué aucun élément de nature à corroborer ses accusations ; qu'il ressort d'autre part des différents courriers de Jean A... que celui-ci n'avait pas chargé Jacques X... d'une quelconque mission destinée à élucider les conditions de souscription du contrat "figures libres" ; que, par ailleurs, Jean A... a remis à la société AXA Assurances, après la notification du licenciement, copie d'une lettre du 9 juillet 1999 par laquelle CARDIF-Société Vie avait pris acte de sa souscription au contrat Cardif Multi-Plus ; que ce client a affirmé que c'était Jacques X... qui lui avait fait signer ce contrat, sur lequel il avait perçu 1, 25% de commission ; que la lettre communiquée à la société AXA Assurances donne du crédit au courrier du 9 mars 2005 dans lequel Jean A... informait celle-ci de ce que Jacques X... l'avait incité à plusieurs reprises à faire un placement en Suisse ; qu'il est donc établi que le salarié d'une part a porté une dénonciation calomnieuse contre son supérieur hiérarchique, d'autre part a orienté ou tenté d'orienter un client vers une société concurrente ;

Attendu que le délai de prescription de deux mois prévu par l'article L 122-44 du code du travail pour l'engagement de la procédure disciplinaire ne court qu'à compter du jour où l'employeur a une connaissance des faits suffisante pour lui permettre d'apprécier s'ils ont un caractère fautif ;

Qu'en l'espèce, Jacques X... ayant refusé de rencontrer

l'inspecteur "déontologie", ce dernier a demandé au salarié le 28 avril 2005 de communiquer ses explications par écrit ; que l'intéressé ayant répondu le 3 mai en s'appuyant sur des pièces non jointes à son courrier, la société a dû l'inviter, par lettre du 9 mai, à transmettre celles-ci ; que c'est seulement à la réception de la lettre adressée le 13 mai 2005 par Jacques X... à son employeur, à laquelle n'était joint qu'un courrier de Jean A... daté du 27 novembre 2003, que la société intimée a eu la certitude que Jacques X... n'était pas en mesure d'étayer par des éléments tangibles les accusations qu'il portait contre Francis WAELTERLE depuis plusieurs mois ; que la prescription n'était donc pas acquise le 3 juin, date de réception par le salarié de sa convocation en vue d'un entretien préalable à son éventuel licenciement ;

Attendu que les faits établis à la charge de Jacques X... dénotent de la part de ce salarié une action qui se situait délibérément en dehors de l'organisation hiérarchique de la société AXA Assurances et qui était contraire aux intérêts de celle-ci, qu'il s'agisse :

- de l'incitation de Jean A... à effectuer un placement en dehors du réseau auquel appartenait Jacques X...,

- de l'intervention de Jacques X... le 2 février 2005 pour transmettre à la société la demande de sortie anticipée du contrat "libre épargne" d'Aliette KINTZIG, alors que son employeur lui avait rappelé à plusieurs reprises qu'il n'avait plus qualité pour intervenir auprès des clients d'AXA Assurances rattachés à l'agence de Trévoux,

- de la dénonciation portée contre son supérieur Francis WAELTERLE, sans mandat du client concerné et sans aucun élément concret ;

Que ces faits, qui s'étalent sur une période de plusieurs mois, révèlent de la part de Jacques X... des manquements volontaires aux obligations résultant de son contrat de travail ainsi qu'un refus

du lien de subordination inhérent à ce contrat ; que leur importance était incompatible avec le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée limitée du préavis ; qu'en conséquence, la société AXA Assurances était fondée à licencier Jacques X... pour faute grave ; Sur les cotisations de retraite complémentaire :

Attendu d'abord qu'aux termes de l'article L 143-14 du code du travail, l'action en paiement du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2277 du code civil ; que la prescription quinquennale instituée par l'article L 143-14 s'applique à toute action engagée à raison de sommes afférentes aux salaires dus au titre du contrat de travail ; que les contributions patronales aux régimes de retraite complémentaire obligatoires à cotisations fixes, tels ceux gérés par l'AGIRC et l'ARRCO ont la nature de complément de rémunération ; que Jacques X... ne saurait sérieusement soutenir que la faute qu'il impute à l'U.A.P. n'a été découverte qu'à l'occasion de la présente procédure, alors qu'il lui suffisait d'examiner attentivement ses bulletins de paie pour connaître l'assiette des cotisations ; que la demande, qui ne tend pas à réparer un préjudice, mais à obtenir la régularisation de cotisations omises, est donc atteinte par la prescription pour ce qui concerne la période antérieure au 28 septembre 1994 ;

Attendu ensuite que l'annexe no1 au contrat de travail d'attaché d'inspection titulaire signé par Jacques X... le 18 septembre 1991 précise que la rémunération minimale annuelle garantie, supérieure à celle prévue par les dispositions de la convention collective de travail des échelons intermédiaires des services extérieurs de production des sociétés d'assurances, comprend une majoration de 30% pour couverture des frais professionnels ; que selon l'article 5 du règlement de retraite professionnel du personnel des sociétés d'assurances du 30 juin 1978, le traitement servant de base à la

détermination des cotisations était jusqu'au 1er janvier 1996 le salaire réel total constitué de l'ensemble des éléments de rémunération servant au calcul de la taxe sur les salaires, une fois opérés les abattements éventuels pour frais professionnels, selon les règles applicables en matière fiscale ; qu'il résulte d'ailleurs de l'article 51 de l'annexe III du code général des impôts qu'en ce qui concerne les salariés appartenant aux catégories de professions qui bénéficient de la déduction supplémentaire pour frais professionnels prévue par l'article 5 de l'annexe IV du même code, le montant de ladite déduction supplémentaire peut, pour la détermination de la base de la taxe sur les salaires, être défalquée du montant brut des paiements ; que l'article 5 de l'annexe IV ne vise pas seulement les salariés qui ont la qualité d'inspecteurs d'assurances des branches vie, capitalisation et épargne au sens de la convention collective nationale de l'inspection d'assurances du 27 juillet 1992, mais l'ensemble des démarcheurs salariés des compagnies d'assurances ; que la mission de Jacques X... consistait précisément à rechercher et à recueillir des souscriptions de contrats d'assurance ; que le salarié n'a communiqué en cause d'appel aucun élément démontrant qu'il ne bénéficiait pas de 1990 à 1995 de la déduction supplémentaire de 30% pour frais professionnels prévue par le texte susvisé ; qu'en conséquence, son employeur était fondé à déduire ce forfait de l'assiette de calcul des cotisations ; que le jugement entrepris sera donc infirmé et Jacques X... débouté de sa demande ; Sur les frais irrépétibles :

Attendu qu'il ne serait pas équitable de laisser la S.A. AXA FRANCE VIE supporter la totalité des frais qu'elle a dû exposer en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'une somme de 2 000 ç lui sera allouée sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

Reçoit les appels réguliers en la forme,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a : 1o) accueilli Jacques X... en sa demande pour les cotisations retraites, 2o) ordonné à AXA de verser à la Caisse de retraite concernée le montant des cotisations nécessaires à la reconstitution de 2 063 points, et ce sous astreinte de 1 000 euros par mois de retard, quinze jours après la signification du jugement, pour une période de trois mois, le Conseil se réservant le droit de liquider éventuellement ladite astreinte ;

Le confirme dans ses autres dispositions,

En conséquence, déboute Jacques X... de l'intégralité de ses demandes de première instance,

Y ajoutant :

Déboute Jacques X... de ses demandes nouvelles en cause d'appel,

Le condamne à payer à la S.A. AXA FRANCE VIE la somme de deux mille euros (2 000 ç) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamne Jacques X... aux dépens de première instance et d'appel, à l'exclusion des frais d'expertise,

Dit que les frais d'expertise seront partagés par moitié entre la S.A. AXA FRANCE VIE, venant aux droits de la société AXA Assurances et les quatre salariés concernés (soit un huitième des frais d'expertise à la charge de Jacques X...).

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

Y. BRISSY

D. JOLY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006948192
Date de la décision : 31/01/2006
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Mr JOLY, président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2006-01-31;juritext000006948192 ?
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