AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR R. G : 04 / 00524 CABINET SERGE A... C / X...
APPEL D'UNE DÉCISION DU : Conseil de Prud'hommes de LYON du 28 Novembre 2003 RG : 02/05255
COUR D'APPEL DE LYON CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 2005
APPELANT : CABINET SERGE A...... 69001 LYON représenté par Maître Gisèle DURRIEU, avocat au barreau de BOURG EN BRESSE
INTIMÉE :
Mademoiselle Malika X... comparant en personne
PARTIES CONVOQUÉES LE : 3 février 2005 DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 14 septembre 2005
Présidée par Madame Aude LEFEBVRE et composée de Monsieur Dominique DEFRASNE, tous deux Conseillers magistrats rapporteurs, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistés pendant les débats de Madame Myriam TOLBA, Adjoint administratif faisant fonction de greffier et dûment assermentée
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Monsieur Didier JOLY, Président Monsieur Dominique DEFRASNE, Conseiller Madame Aude LEFEBVRE, Conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE Prononcé publiquement le 14 décembre 2005 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Signé par Monsieur Didier JOLY, Président et par Madame Yolène Z..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Statuant sur l'appel interjeté par Serge A..., le 16 décembre 2003, d'un jugement du Conseil des Prud'hommes de LYON (Section Activités diverses) du 28 novembre 2003 qui a :
1o) dit le licenciement de Malika X... sans cause réelle et sérieuse,
2o) condamné Serge A... à payer à Malika X... les sommes de :
- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 15 500 euros
- article 700 du Nouveau code de procédure civile 400 euros
3o) débouté Malika X... du surplus de ses demandes,
4o) débouté Serge A... de sa demande de dommages et intérêts pour exécution fautive de contrat de travail ;
Vu les conclusions versées au soutien de ses observations orales par Serge A... qui demande à la Cour de : 1o) dire que le licenciement de Malika X... repose sur une cause réelle et sérieuse, 2o) dire que Malika X... n'a pas été sanctionnée deux fois pour les mêmes faits, Très subsidiairement, 3o) dire que Malika X... ne justifie pas du préjudice qu'elle a subi, 4o) condamner Malika X... à régler à Serge A... les sommes de :
- remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire 5 000 euros
- article 700 du Nouveau code de procédure civile 1 000 euros
Vu les conclusions versées au soutien de ses observations orales par Malika X... qui demande à la Cour de condamner Serge A... à lui payer les sommes suivantes :
- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 26 921, 50 euros
- article 700 du Nouveau code de procédure civile 2 500 euros
- honoraires d'avocat 2 147, 80 euros
Attendu que Malika X... a été engagée, à l'origine selon contrat à durée déterminée du 9 janvier 1989 pour une durée d'un an, en qualité de secrétaire, sténo-dactylo, par Serge A... qui exerce les activités de bureau d'études, ingénieur conseil et architecte ; que la relation salariale s'est poursuivie et qu'en dernier temps Malika X... a perçu un salaire de 7 848, 60F plus primes ;
Qu'au cours de l'année 2001, les parties ont échangé des courriers concernant le solde des congés payés de Malika X... ; que le ton s'est rapidement envenimé de part et d'autre ;
Que du 1er mars 2001 au 31 mai 2001 Malika X... a été en arrêt de travail pour maladie ;
Que par lettre recommandée du 11 mai 2001, Serge A... a formulé un certain nombre de reproches à sa salariée portant sur la déclaration tardive des activités à la compagnie d'assurances et sur la non mise à jour des fiches de règlement de factures ;
Que Malika X... a été arrêtée pour maladie du 11 juin 2001 au 18 juin 2001 et à nouveau du 23 juin au 8 juillet 2001 ;
Que par courrier recommandé du 23 juin 2001, Serge A... a adressé à Malika X... une mise en garde demandant à sa salariée de respecter le règlement intérieur de l'établissement ; qu'il lui a reproché de ne pas suivre les consignes et de ne pas achever le travail, de ne pas respecter le secret professionnel, d'avoir oublié d'acheter une cartouche d'imprimante, d'avoir adressé tardivement la déclaration d'activités à l'assureur et de ne pas avoir rapporté un camescope emprunté le 23 décembre 2000 ; que les termes de cette mise en garde ont été contestés par la salariée par lettre du 7 juillet 2001 ;
Que par lettre recommandée du 9 juillet 2001, Malika X... a été convoquée le 18 juillet suivant à un entretien préalable à son licenciement et mise à pied à titre conservatoire ;
Que par lettre recommandée du 20 juillet 2001, Serge A... a licencié Malika X... pour cause réelle et sérieuse ; que dans ce courrier de cinq pages, il lui a reproché d'être en retard dans la frappe du rapport d'expertise du dossier HCL qui a été déposé au mois de juin 2001 au lieu du 30 mai précédent, d'avoir refusé tout arbitrage sur les congés, de ne pas remplir ses fiches d'activité, de répondre à des sondages pendant le temps de travail, d'être arrivée avec des retards de 10 ou 15 mn quatre jours au mois de juin, d'avoir été arrogante avec un client le 22 juin 2001 après-midi, de ne pas suivre correctement la facturation, entraînant par là un préjudice financier, d'établir avec retard, tous les ans, le dossier d'activité pour l'assureur, de ne pas avoir respecté le secret professionnel, d'avoir emprunté un camescope sans le restituer à l'issue des congés de fin d'année 2000, d'être en arrêt maladie systématiquement après chaque refus opposé à une demande de congés et d'être agressive à l'égard de son employeur, agissements qui lui ont fait perdre toute confiance en elle et en ses travaux ;
Que dans cette lettre l'employeur a dispensé la salariée d'effectuer son préavis de deux mois qui sera rémunéré tout comme la période de mise à pied conservatoire ;
Que Malika X... a contesté par lettre recommandée du 21 septembre 2001 ce licenciement et a saisi le Conseil des Prud'hommes qui a rendu la décision déférée ;
Sur licenciement pour cause réelle et sérieuse :
Attendu qu'il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige et de former sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, conformément aux dispositions de l'article L 122-14-3 du code du travail ; que le licenciement pour une cause inhérente à la personne du salarié doit être fondé sur des éléments objectifs ; que la perte de confiance ne constitue pas en soi un motif de licenciement ; qu'il en est différemment des faits reprochés à la salariée ;
Qu'il résulte par ailleurs des dispositions de l'article L 122-44 du code du travail qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, la maladie du salarié concerné n'entraînant ni l'interruption ni la suspension de ce délai ; que l'existence de nouveaux griefs autorise cependant l'employeur à tenir compte de griefs antérieurs, qu'ils aient ou non été déjà sanctionnés ; qu'il en va de même lorsque le comportement du salarié s'est poursuivi dans ce délai ;
Qu'en l'espèce il convient tout d'abord de rappeler que la salariée n'a pas repris le travail entre la sanction que constitue la mise en garde et la convocation à l'entretien préalable et sa mise à pied ; que la poursuite d'un comportement fautif ne peut lui être reprochée si ce n'est le ton polémique et les courriers échangés ; que s'agissant de cet échange de courriers, les termes n'en sont pas discutés sauf le fait d'accuser l'employeur de harcèlement moral ; que ce ne peut être une cause réelle et sérieuse de licenciement, la Cour ne disposant pas de pièce suffisante de part et d'autre pour déterminer si ces accusations sont portées à la légère ou non ;
Que s'agissant des griefs qui n'ont pas fait l'objet d'une précédente sanction, il y a lieu d'observer :
- que l'employeur n'établit pas que le retard dans le dépôt du rapport d'expertise HCL soit imputable à la seule salariée qui était en arrêt de travail depuis trois mois ;
- que le non-remplissage des fiches d'activités journalières remonterait à plusieurs années et a été toléré par l'employeur qui ne peut donc invoquer ce fait à l'appui du licenciement,
- que les retards des 18, 20, 21 et 22 juin ne sont pas contestés par la salariée qui précise qu'en contrepartie elle prolongeait sa journée et faisait preuve d'une grande disponibilité ; que ce grief est insuffisant dès lors que l'employeur n'établit pas que cela lui a causé un préjudice,
- que l'attestation d'André B... ne permet pas de retenir une attitude arrogante et anti-commerciale le 22 juin 2001, enfin que Serge A... n'établit pas le défaut d'archivage invoqué et le défaut du suivi de facturations ;
Qu'ainsi en l'absence de faits nouveaux constituants des manquements à ses obligations par la salariée, il n'y a pas lieu d'examiner les faits déjà sanctionnés ou découverts depuis plus de deux mois, comme l'absence de commande d'une cartouche au mois d'avril 2001 ou la non-restitution d'un camescope, griefs au demeurant contestés par la salariée ;
Que le jugement qui a dit le licenciement de Malika X... sans cause réelle et sérieuse sera en conséquence confirmé ;
Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Attendu que Malika X... qui était employée dans une entreprise occupant habituellement moins de onze salariés peut prétendre, en application de l'article L 122-14-5 du code du travail, à une indemnité calculée en fonction du préjudice subi ;
Que la salariée justifie avoir été indemnisée par les ASSEDIC jusqu'au 28 février 2003 ; qu'elle avait treize ans d'ancienneté dans son emploi ;
Que le Conseil de Prud'hommes a exactement apprécié le préjudice consécutif à la rupture du contrat de travail au vu des éléments communiqués par la salariée ;
Sur la demande de remboursement des honoraires exposés en première instance :
Attendu que les honoraires payés à un avocat pour la représentation à une instance ne sont pas inclus dans les dépens mais peuvent être pris en compte au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant : Déboute Malika X... de sa demande de remboursement des honoraires d'avocat,
Condamne Serge A... à payer à Malika X... la somme de mille euros (1 000 euros) au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,
Le condamne aux dépens d'appel.