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09/06/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946367

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0011, 09 juin 2005, JURITEXT000006946367


COUR D'APPEL DE LYON

SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 09 JUIN 2005

Décision déférée : Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON du 18 septembre 2003 - (R.G. : 1997/09209) No R.G. : 03/05851

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en réparation des dommages causés par une nuisance de l'environnement APPELANTE : SA ENTENIAL Siège social : 16 rue Volney 75002 PARIS représentée par la

SCP BAUFUME-SOURBE, Avoués assistée par Maître ELALOUF, Avocat, (PARIS) INTIMES : SARL RAJISTAN Siège social : 1 rue du Docteur X... 69005 LYON représentée par

la SCP DUTRIEVOZ, Avoués assistée par Maître PIQUET-GAUTHIER, Avocat, (TOQUE 680) SYNDICA...

COUR D'APPEL DE LYON

SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 09 JUIN 2005

Décision déférée : Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON du 18 septembre 2003 - (R.G. : 1997/09209) No R.G. : 03/05851

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en réparation des dommages causés par une nuisance de l'environnement APPELANTE : SA ENTENIAL Siège social : 16 rue Volney 75002 PARIS représentée par la

SCP BAUFUME-SOURBE, Avoués assistée par Maître ELALOUF, Avocat, (PARIS) INTIMES : SARL RAJISTAN Siège social : 1 rue du Docteur X... 69005 LYON représentée par la SCP DUTRIEVOZ, Avoués assistée par Maître PIQUET-GAUTHIER, Avocat, (TOQUE 680) SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 1 RUE DU DOCTEUR X... - 69005 LYON, représenté par son syndic la Régie COTTE Siège social : C/REGIE COTTE 122 rue Sully 69006 LYON représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA, Avoués assisté par Maître VALENTI, Avocat, (TOQUE 674) Madame Catherine Y... Z... :

87 rue Villiers de l'Isle Adam 75020 PARIS Non comparante Monsieur Robert A... Z... : 46 rue Vaillant Couturier 69310 PIERRE-BENITE Non comparant Instruction clôturée le 25 Mars 2005 Audience de plaidoiries du 12 Avril 2005 LA SIXIEME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, composée lors des débats et du délibéré de :

. Monsieur LECOMTE, Président

. Madame DUMAS, Conseiller

. Madame de la LANCE, Conseiller assistés lors des débats tenus en audience publique par Madame B..., Greffier, a rendu l'ARRET réputé contradictoire suivant prononcé à l'audience publique du 09 JUIN 2005, par Monsieur LECOMTE, Président, qui a signé la minute avec Madame B..., Greffier

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

La Société ENTENIAL, qui vient aux droits de la Banque LA HENIN, est propriétaire d'un local commercial dans un immeuble ancien situé 1 rue du Docteur X... à Lyon 5ème, local qu'elle loue à la SARL LE RAJISTAN selon un bail signé le 24 juin 1997, et destiné à l'activité de restaurant et plats à emporter. La Société LE RAJISTAN a exploité dans les lieux un restaurant pakistanais.

En raison de nuisances, dues à des odeurs et des fumées, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble a engagé une action en juillet 1997 devant le tribunal de grande instance de Lyon à l'encontre du bailleur et du gérant de la société locataire de ce local, Monsieur C.... En août 1997, la Banque LA HENIN a appelé en cause la Société LE RAJISTAN. Le juge de la mise en état a ordonné une expertise et un rapport a été déposé le 31 mai 1999. Par deux arrêts du 16 janvier 2002, la Cour d'appel de Lyon a réformé une ordonnance du juge de la mise en état du 16 mai 2000 en ce qu'elle avait ordonné l'exécution des travaux préconisés par l'expert sous astreinte, la confirmant quant à l'allocation d'une provision de 120 000 F, et a infirmé une ordonnance rendue par le même juge le 19 décembre 2000 liquidant l'astreinte précédemment ordonnée, prononçant une nouvelle astreinte et allouant une nouvelle provision. Certains copropriétaires, dont Monsieur Robert A... et Madame Catherine Y..., sont intervenus volontairement à la procédure pour obtenir des dommages et intérêts en raison des nuisances subies.

Par jugement du 18 septembre 2003, le tribunal a fait interdiction à la société ENTENIAL, ou à toutes personnes physiques ou morales venant dans ses droits, d'exercer une activité de restauration ou de commerce de bouche, nécessitant l'usage d'un conduit de cheminée, dans le local situé au rez-de-chaussée de l'immeuble, a prononcé la résiliation du bail liant la Société ENTENIAL à la Société LE RAJISTAN et ordonné l'expulsion sans délai de ce locataire et de tous occupants de son chef, a dit que la décision et les travaux relatifs à l'obturation du conduit de cheminée, partie commune de l'immeuble, incombent au syndicat des copropriétaires, a condamné la Société ENTENIAL à payer la somme de 1 500 ç à Monsieur A... et 1 400 ç à Madame Y... à titre de dommages et intérêts en réparation des désagréments subis, a débouté le syndicat des copropriétaires et les

autres copropriétaires de leurs demandes de dommages et intérêts, a condamné la Société ENTENIAL à payer à la Société LE RAJISTAN la somme de 61 335,41 ç en réparation de l'ensemble du préjudice à elle causé par la perte de son fonds de commerce, des dépenses liées à sa création, et la somme de 89 670 ç au titre de la perte de bénéfice lié à l'exploitation du fonds de commerce, a débouté la Société ENTENIAL de ses appels en garantie dirigés contre le syndicat des copropriétaires, la société LE RAJISTAN et la Compagnie AXA Assurances, a déclaré la Société ENTENIAL irrecevable en son appel en garantie contre la Société SLECA, a ordonné l'exécution provisoire et a condamné la Société ENTENIAL à payer, par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, les sommes de 800 ç à Monsieur A..., de 800 ç à Madame Y..., de 1 500 ç au syndicat des copropriétaires, de 2 500 ç à la Société LE RAJISTAN et de 500 ç à la Compagnie AXA Assurances.

La Société ENTENIAL a interjeté appel de ce jugement. Un désistement partiel est intervenu à l'encontre de certains copropriétaires et de la Compagnie AXA GLOBAL RISKS, devenue AXA FRANCE IARD.

Par ordonnance de référé du 10 décembre 2003, le Premier Président de la Cour d'appel de Lyon a suspendu l'exécution provisoire du jugement sous réserve du versement des sommes de 61 335,41 ç et de 89 670 ç sur le compte CARPA. * * *

La Société ENTENIAL soutient que la Société LE RAJISTAN a effectué elle-même, sans l'autorisation du bailleur, des travaux sur la gaine d'évacuation de la cuisine, qu'elle a fait appel à la Société IKKEN pour effectuer le ramonage et à la Société SLECA pour la pose d'un caisson de ventilation avec un extracteur et un variateur, que le tubage du conduit a, en revanche, été réalisé par Monsieur C... sans autorisation et sans respecter les règles de l'art, qu'il n'y avait pas eu de problème de fonctionnement de ce conduit auparavant,

qu'en application de l'article 1732 du Code civil, le locataire répond des dégradations qui arrivent pendant sa jouissance, qu'à la signature du bail la Société LE RAJISTAN connaissait parfaitement les lieux loués et la situation de la gaine d'évacuation dans la cuisine, seule utilisable, et que la Société ENTENIAL ne saurait être responsable des agissements fautifs du gérant de la Société LE RAJISTAN.

A titre subsidiaire, elle fait valoir que la Société LE RAJISTAN ne démontre pas avoir été contrainte de fermer son établissement, que le procès-verbal d'enquête du service d'hygiène et de santé du 16 août 1999 n'impose qu'un nettoyage du conduit de ventilation, et que cette société ne peut solliciter une réparation pour la perte de son fonds de commerce.

A titre infiniment subsidiaire, elle soutient que les indemnisations sollicitées ne sont pas justifiées, que le prononcé de la résiliation du bail est la conséquence des désordres subis par les occupants du fait des travaux exécutés ayant dégradé le conduit de cheminée, travaux dont la Société LE RAJISTAN est responsable, qu'en outre cette société ne justifie pas avoir réglé la somme de 170 000 F pour l'acquisition du fonds de commerce, que les factures de l'expert comptable et de l'assureur, pendant la période d'activité, sont à écarter, que ne peuvent être également pris en compte les frais d'aménagement, les frais concernant une salle louée en dehors du bail, les charges pendant la période d'activité, l'acquisition de matériels restant la propriété du locataire, les frais liés à la constitution de la société, et qu'il n'est pas justifié d'une quelconque perte de bénéfice de l'exploitation.

La Société ENTENIAL sollicite le remboursement par la Société LE RAJISTAN des sommes versées en exécution des décisions du juge de la mise en état qui ont été réformées.

Elle demande, à titre subsidiaire, si elle est condamnée à verser une somme à la Société LE RAJISTAN, la garantie du syndicat des copropriétaires responsable du défaut d'entretien du conduit de cheminée, qui constitue une partie commune, de la prise en charge des travaux et des désordres survenus.

Elle demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail et l'expulsion de la Société LE RAJISTAN, de l'infirmer pour le surplus, de constater que cette société est débitrice envers elle de la somme de 37 959,80 ç correspondant aux sommes trop versées, le syndicat des copropriétaires étant tenu de garantir le remboursement de cette somme, de rejeter toutes les demandes de la Société LE RAJISTAN, de dire que seuls cette société et le syndicat des copropriétaires seront tenus d'indemniser Monsieur A... et Madame Y..., à titre subsidiaire de dire que le syndicat des copropriétaires sera tenu de garantir la Société ENTENIAL de toutes condamnations au regard du défaut d'entretien du conduit de cheminée, partie commune, et de condamner le syndicat des copropriétaires et la Société LE RAJISTAN à lui verser chacun la somme de 7 500 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. * * *

Le syndicat des copropriétaires fait valoir que l'activité de la Société LE RAJISTAN nécessitait un conduit pour évacuer les fumées et les gaz brûlés du coin cuisson de la cuisine, qu'il est établi que le conduit de cheminée qui dessert la cuisine des lieux loués ne peut plus être utilisé, que l'entreprise de ramonage sollicitée, suite à la demande su service d'hygiène, a refusé d'intervenir en raison de l'état du conduit, que l'exploitation d'un restaurant est donc impossible et doit être interdite, qu'en application du règlement de copropriété, les conduits de cheminée ne sont pas des parties communes, et qu'indépendamment de cette question, la Société

ENTENIAL, qui avait été informée par le syndic et l'assemblée des copropriétaires de la vétusté des conduits de fumée, a commis des fautes en n'avertissant pas son locataire.

Le syndicat et les copropriétaires dans la cause sollicitent une augmentation sensible des indemnités accordées tant en raison des nuisances occasionnées que des frais avancés dans cette procédure.

Le syndicat des copropriétaires, les héritiers de Monsieur A... et Madame Y... demandent à la Cour de confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a dit que le conduit de cheminée était une partie commune, et que les travaux relatifs à l'obturation du conduit incomberaient au syndicat des copropriétaires et sur le quantum des indemnités, de dire que le conduit de cheminée est une partie privative, de condamner la Société ENTENIAL à procéder à ses frais à l'obturation du conduit, sous astreinte de 76 ç par jour de retard à compter de la décision, de condamner la Société ENTENIAL à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 7 623 ç à titre de dommages et intérêts et celle de 3 000 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, à chacun des deux copropriétaires dans la cause une somme de 1 524,50 ç à titre de dommages et intérêts et celle de 1 000 ç sur le fondement du même article 700. * * *

La Société LE RAJISTAN soutient que le bail consenti comprenait, comme seule prescription formelle, l'interdiction d'utiliser la cheminée desservant la salle donnant sur le quai, qu'il a démoli cette cheminée, que la Société ENTENIAL ne lui a notifié aucune autre réserve et ne l'a pas informée du contentieux existant avec le syndicat des copropriétaires, que la fermeture du restaurant est due au fait que les lieux loués ne sont pas conformes à la destination du bail, soit l'activité de restaurant, que la Société ENTENIAL, connaissant cette situation avant la signature du bail et ayant refusé de réaliser les travaux prescrits par l'expert, se trouve

seule responsable de la fermeture définitive du restaurant et doit l'indemniser de la perte du fonds de commerce, comprenant le prix d'achat, les travaux effectués, les frais engagés et les matériels acquis pour l'exploitation, et de la privation de toute possibilité de réaliser un bénéfice.

La Société LE RAJISTAN demande à la Cour de débouter la Société ENTENIAL, de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné cette société à réparer l'ensemble de ses préjudices et sur l'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, de la condamner à lui payer la somme de 61 335,41 ç avec intérêts au taux légal majoré de 5 points à compter du jugement, la somme de 113 460 ç au titre de la perte de valeur d'exploitation, pour la période du 16 août 1999 au 16 octobre 2004, avec intérêts au taux légal majoré de 5 points à compter du jugement pour la somme de 89 670 ç et à compter de l'arrêt pour le surplus, de la condamner à payer la somme mensuelle de 1 830 ç à compter du 16 octobre 2004 jusqu'au jour de l'arrêt, puis jusqu'à paiement effectif des condamnations à titre d'astreinte, et de la condamner à lui payer la somme de 7 500 ç au titre des frais irrépétibles.

MOTIFS DE LA DECISION

- Sur la résiliation du bail liant la Société ENTENIAL et la Société LE RAJISTAN :

Attendu qu'il est établi, tant par les constats d'huissier des 20 mars et 17 avril 1997 que par le rapport d'expertise du 31 mai 1999,

que les nuisances subies par un certain nombre de copropriétaires de l'immeuble, soit l'infiltration de fumées et d'odeurs dans les appartements supérieurs, avaient pour origine l'activité du restaurant Le Rajistan et l'utilisation du conduit de cheminée desservant la cuisine de ce restaurant, que l'utilisation de ce conduit était dangereux en raison de sa vétusté et que sa section, de 209 cm , était insuffisante pour assurer l'évacuation des fumées et des gaz brûlés du coin cuisine du restaurant qui nécessite une section d'au moins 700 cm ;

Attendu que la résiliation du bail, sollicitée par le syndicat des copropriétaires et prononcée par les premiers juges au motif que le syndicat est fondé à se substituer au propriétaire d'un lot de la copropriété, dépourvu de l'installation indispensable à l'évacuation des fumées, pour obtenir la résiliation du bail consenti pour l'exercice de l'activité de restauration, n'est pas contestée par la Société LE RAJISTAN ;

Attendu que la Cour adopte expressément les motifs du jugement ayant prononcé la résiliation du bail, le conduit existant, dont l'utilisation est la cause des nuisances constatées, n'étant, en tout état de cause, pas adapté à l'activité de restauration et les travaux effectués par le locataire n'ayant fait qu'aggraver les désordres ; que la résiliation ne peut donc être prononcée aux torts de la Société LE RAJISTAN, le bailleur n'ayant pas mis son locataire en mesure de pouvoir exploiter son restaurant sans provoquer les nuisances reprochées ;

Que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail et l'expulsion du locataire ;

- Sur les responsabilités :

Attendu que le syndicat de copropriétaires conteste la nature de

partie commune du conduit de cheminée en cause, retenue par le premier juge ; que, cependant, si le règlement de copropriété n'inclut expressément dans les parties communes que, notamment, les souches et les têtes de cheminée, et impose aux copropriétaires le ramonage des conduits de cheminée, il énonce que les parties privatives sont celles qui sont réservées à l'usage exclusif de chaque copropriétaire ; que le conduit litigieux, qui communique, comme l'indique l'expert, avec d'autres conduits, constitue, dans le silence du règlement, une partie commune ; que le jugement sera également confirmé sur ce point ;

Attendu que l'interdiction d'utiliser le conduit litigieux et d'exercer dans les lieux une activité de restauration nécessitant l'usage d'un conduit de cheminée doit également être confirmée ; que les travaux préconisés par l'expert, permettant une telle activité, nécessitent la démolition de ce conduit non réparable et l'installation d'un autre plus important, empiétant sur les appartements, pour un coût très élevé ; que ces travaux ne sont plus sollicités ;

Qu'il appartient au syndicat des copropriétaires de décider de l'obturation du conduit de cheminée et de prendre en charge le coût des travaux correspondants ;

Attendu qu'avant même la signature d'un bail entre la Société ENTENIAL et la Société LE RAJISTAN, qui a commencé son exploitation en juillet 1996, le problème lié à la vétusté des conduits de cheminée était connu ; que l'assemblée générale du 27 mars 1995 a rappelé que l'immeuble avait de plus de 300 ans et que les conduits de cheminée présentaient des fissures et a refusé à la Banque LA HENIN d'effectuer des travaux de tubage dans le conduit sur quai, tout en lui indiquant que le conduit de la cuisine actuelle côté rue pouvait être utilisé comme le faisaient ses prédécesseurs ;

Attendu que la société ENTENIAL, qui vient aux droits de la Banque LA HENIN, ne peut prétendre ne pas avoir eu connaissance de l'état des conduits qui n'en permettait qu'un usage très restreint ; que si elle a interdit à son locataire l'usage du conduit sur quai , elle ne l'a pas informé de la vétusté du conduit sur rue ; que si les travaux entrepris par la Société LE RAJISTAN sur ce conduit sur rue , consistant en l'installation d'un tubage partielle et d'un extracteur de fumée, ont entraîné, comme le conclut l'expert, une aggravation de l'état du conduit, l'origine des nuisances subies par les occupants des appartements supérieurs et de l'impossibilité d'utiliser ce conduit pour une activité de restaurant se trouve être l'état extrêmement vétuste du conduit de fumée et l'insuffisance de sa section ; qu'il appartenait à la Société ENTENIAL de vérifier si la destination des lieux loués prévue au bail était compatible avec l'état du conduit litigieux ;

Attendu, en conséquence, que la responsabilité tant des nuisances subies par les copropriétaires occupant les lieux que de la résiliation du bail souscrit par la Société LE RAJISTAN incombe à la Société ENTENIAL ;

Attendu que la Société ENTENIAL ne peut reprocher un défaut d'entretien du conduit de fumée en cause au syndicat des copropriétaires, n'ayant jamais vérifié l'état de ce conduit que devait utiliser son locataire ni sollicité l'exécution de travaux et alors que les conclusions de l'expert démontrent qu'une simple remise en l'état antérieur du conduit n'aurait pas plus permis l'exploitation d'un restaurant dans les lieux loués ; que son appel en garantie dirigé contre le syndicat des copropriétaires n'est donc pas fondé ;

Attendu que, de même, la Société ENTENIAL ne peut, pour s'exonérer de sa responsabilité, reprocher à son locataire les travaux qu'il a

effectués, alors qu'il ne l'a pas informé de l'état du conduit et que les travaux reprochés n'ont pas provoqué mais seulement aggravé le mauvais état du conduit ; que son appel en garantie dirigé contre la Société LE RAJISTAN n'est également pas fondé ;

- Sur l'indemnisation des préjudices :

Attendu que, par des motifs que la Cour adopte, les premiers juges ont exactement apprécié le préjudice subi par Monsieur Robert A... et Madame Catherine Y... et évalué le montant des dommages et intérêts devant leur être accordé ; que le jugement sera confirmé sur ce point ;

Attendu que le syndicat des copropriétaires fonde sa demande en dommages et intérêts sur le fait que son syndic a dû assurer un suivi particulier du litige et de la procédure engagée ; que cette demande, ayant le même fondement que celle formulée au titre des frais irrépétibles doit être rejetée ;

Attendu que la Société ENTENIAL n'a pas délivré à la Société LE RAJISTAN un local lui permettant l'exploitation d'un restaurant selon les termes du bail ; que la Société LE RAJISTAN qui avait débuté son exploitation en juillet 1996 a dû l'arrêter définitivement en août 1999 ; qu'en effet, suite à l'intervention, le 16 août 1999, du service d'hygiène et de santé de la ville de Lyon, la Société LE RAJISTAN devait, avant toute réouverture , faire effectuer par une entreprise qualifiée le nettoyage du conduit ; que l'entreprise consultée a refusé d'intervenir en raison de l'état du conduit ; que, contrairement aux affirmations de la Société ENTENIAL, son locataire a donc bien été contraint de cesser son exploitation ;

Attendu que la Société ENTENIAL est donc tenue d'indemniser la Société LE RAJISTAN des préjudices subis en raison de la perte du fonds de commerce et du bénéfice qui aurait pu être réalisé ;

Attendu que le préjudice lié à la perte du fonds de commerce comprend le prix d'achat du fonds et l'ensemble des investissements effectués et ne pouvant être récupérés ; que le coût des matériels restant la propriété du locataire ne peut être pris en compte ; que sur cette base, la Société LE RAJISTAN justifie de son préjudice à hauteur de 52 155,41 ç ;

Attendu, en ce qui concerne la perte de chance de réaliser un bénéfice, la société ne produit que les résultats déficitaires de l'année 1998 ; qu'au regard des éléments du dossier, l'évaluation mensuelle du préjudice subi faite par les premiers juges est excessive ; que la perte de chance sera estimée à la somme mensuelle de 1220 ç à compter du mois de septembre 1999, soit, définitivement, à la somme de 84 180 ç à ce jour ;

Que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt, l'exécution provisoire ordonnée par le jugement déféré ayant été arrêtée par ordonnance du 10 décembre 2003 ;

Attendu que la Société ENTENIAL demande que soit ordonnée la restitution des sommes qu'elle a versées en vertu des ordonnances du juge de la mise en état des 16 mai 2000 et 19 décembre 2000 ; que, cependant, les arrêts de la Cour d'appel de Lyon du 16 janvier 2002, ayant infirmé ces ordonnances, constituent les titres ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution de celles-ci ; qu'il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement entrepris, sauf en celles de ses dispositions ayant condamné la Société ENTENIAL à payer les sommes de 61 335,41 ç et de 89 670 ç à la Société LE RAJISTAN,

Et statuant à nouveau sur ces chefs,

Condamne la Société ENTENIAL à payer à la Société LE RAJISTAN la somme de 52 155,41 ç pour le préjudice lié à la perte du fonds de commerce et la somme de 84 180 ç pour le préjudice lié à la perte de chance de réaliser un bénéfice,

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Dit n'y avoir lieu de statuer sur la demande de la Société ENTENIAL en restitution des sommes versées en exécution d'ordonnances du juge de la mise en état réformées par la Cour d'appel,

Condamne la Société ENTENIAL à payer, en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la somme de 1 000 ç aux héritiers de Monsieur Robert A..., celle de 1 000 ç à Madame Catherine Y..., celle de 3 000 ç au syndicat des copropriétaires et celle de 4 000 ç à la Société LE RAJISTAN, en sus des sommes déjà allouées par les premiers juges,

Condamne la Société ENTENIAL aux entiers dépens, comprenant les frais d'expertise, de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de la SCP DUTRIEVOZ et de la SCP BRONDEL-TUDELA, Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0011
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946367
Date de la décision : 09/06/2005

Analyses

COPROPRIETE - Parties communes - Détermination

Un règlement de copropriété énonçant que les parties privatives sont celles qui sont réservées à l'usage exclusif de chaque copropriétaire, il en résulte, sauf si le règlement en décide autrement, que tout ce qui n'est pas réservé à l'usage exclusif d'un copropriétaire constitue une partie commune


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2005-06-09;juritext000006946367 ?
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