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09/06/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946363

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0011, 09 juin 2005, JURITEXT000006946363


COUR D'APPEL DE LYON

SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 09 JUIN 2005

Décision déférée : Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON du 02 février 2004 - (R.G. : 2001/3035) No R.G. : 04/01255

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en réparation des dommages causés par des véhicules terrestres à moteur APPELANTS : SA AGF COURTAGE, venant aux droits de la COMPAGNIE PFA Siège social : 86 rue Richelieu 75113 PARIS CEDEX 02 représentée par Maître LIGIER DE MAUROY, Avoué assistée par la SCP COMOLET - MANDIN etamp; ASSOCIES, Avocats, (PARIS) Monsieur Mauri

ce X... Y... : 3 Quai de Villevert 69250 ALBIGNY SUR SAONE représenté par Maître LI...

COUR D'APPEL DE LYON

SIXIÈME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU 09 JUIN 2005

Décision déférée : Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON du 02 février 2004 - (R.G. : 2001/3035) No R.G. : 04/01255

Nature du recours : APPEL Affaire : Demande en réparation des dommages causés par des véhicules terrestres à moteur APPELANTS : SA AGF COURTAGE, venant aux droits de la COMPAGNIE PFA Siège social : 86 rue Richelieu 75113 PARIS CEDEX 02 représentée par Maître LIGIER DE MAUROY, Avoué assistée par la SCP COMOLET - MANDIN etamp; ASSOCIES, Avocats, (PARIS) Monsieur Maurice X... Y... : 3 Quai de Villevert 69250 ALBIGNY SUR SAONE représenté par Maître LIGIER DE MAUROY, Avoué assisté par la SCP COMOLET - MANDIN etamp; ASSOCIES, Avocats, (PARIS) INTIMES : Madame Georgette Z... Y... : Chemin de la Tourette 69290 CRAPONNE représentée par Maître DE FOURCROY, Avoué assistée par Maître VINCENT, Avocat, (TOQUE 638) Monsieur Philippe Z... Y... :

Chemin de la Tourette 69290 CRAPONNE

représenté par Maître DE FOURCROY, Avoué assisté par Maître VINCENT, Avocat, (TOQUE 638)

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DE LYON Siège social :

12 rue d'Aubigny 69003 LYON représentée par Maître MOREL, Avoué assistée par Maître DE LABORIE, Avocat, (TOQUE 566) CENTRE HOSPITALIER LE VINATIER Siège social : 95 Boulevard Pinel 69500 BRON représenté par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, Avoués assisté par Maître DEYGAS, Avocat, (TOQUE 757) Instruction clôturée le 25 Janvier 2005 Audience de plaidoiries du 07 Avril 2005 LA SIXIEME CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE LYON, composée lors des débats et du délibéré de :

. Monsieur LECOMTE, Président

. Madame DUMAS, Conseiller

. Madame de la LANCE, Conseiller assistés lors des débats tenus en audience publique par Madame A..., Greffier, a rendu l'ARRET contradictoire suivant prononcé à l'audience publique du 09 JUIN 2005, par Monsieur LECOMTE, Président, qui a signé la minute avec Madame A..., Greffier

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Propriétaire d'un voilier, Monsieur Maurice X... a convié des amis, les époux Z... et les époux B..., à une croisière courant août 1998 au large des côtes corses.

Le 11 août 1998, Madame Z... a été grièvement blessée par l'écoute de la grand'voile ou le hale bas de bôme lors d'un empannage non contrôlé, Monsieur X... se trouvant à la barre.

Par exploit des 5 et 9 janvier 2001, les époux Z... ont fait assigner Monsieur X..., la CPCAM DE LYON et le Centre Hospitalier Le Vinatier aux fins de voir déclarer Monsieur X... entièrement

responsable sur le fondement des articles 1384 alinéa 1er et 1382 du Code civil et se voir allouer diverses sommes à titre provisionnel.

Le 26 novembre 2001, les époux Z... ont appelé en cause la Compagnie d'Assurances PFA, assureur de Monsieur X....

Suivant jugement rendu le 2 février 2004, le tribunal de grande instance de Lyon a essentiellement déclaré Monsieur X... responsable des conséquences dommageables de l'accident sur le fondement des dispositions de l'article 1384 alinéa 1er a ordonné une expertise médicale de Madame Z..., a condamné Monsieur X... et la Compagnie AGF IART - qui vient aux droits de la Compagnie PFA - à verser à Madame Z... une provision de 18 000 ç et à Monsieur Z... une provision de 6 278,55 ç.

Appelants de cette décision, la Compagnie AGF et Monsieur X... demandent à la Cour, avec l'infirmation du jugement entrepris, de dire que la responsabilité de Monsieur X... ne peut être appréciée qu'en application des articles 1382 et 1383 du Code civil, de dire que ce dernier n'a commis aucune faute en relation directe de causalité avec l'accident et de le mettre hors de cause.

Les époux Z... concluent principalement à la confirmation du jugement entrepris.

Le Centre Hospitalier Le Vinatier poursuit la condamnation de Monsieur X... et de la Compagnie AGF IART à lui payer la somme provisionnelle de 126 482 ç au titre des salaires et charges versés à Madame Z....

La CPCAM DE LYON conclut à la confirmation du jugement déféré.

SUR CE

Attendu que les appelants font valoir que lorsque l'équipage est

composé de coéquipiers non professionnels qui participent aux manoeuvres à bord et prennent part aux décisions essentielles, il y a lieu à application de la notion de la garde collective, et que, dès lors, la victime co-gardienne ne peut se fonder sur l'article 1384 alinéa 1er mais et doit prouver la faute d'un coéquipier en vertu de l'article 1382 du Code civil ;

Qu'ils précisent que, s'agissant d'une croisière non d'une compétition sportive, le skipper n'a pas un véritable pouvoir de direction sur les membres de l'équipage et qu'en l'espèce les personnes embarquées pratiquaient la voile depuis longtemps et participaient à la manoeuvre du navire, la garde de celui-ci étant nécessairement confiée à l'ensemble de l'équipage ;

Mais attendu qu'une telle argumentation ne saurait être retenue ;

Attendu en premier lieu que le propriétaire du navire est présumé gardien responsable et qu'il lui appartient de s'exonérer de la présomption de responsabilité qui, à ce titre, pèse sur lui en démontrant qu'un membre de l'équipage a assuré la direction et le commandement du voilier ;

Attendu en second lieu qu'il pèse également sur le skipper une présomption de responsabilité, ce dernier ayant, selon les usages constants en mer, l'entière direction et le commandement du bateau et de son équipage ;

Attendu que Monsieur X... cumulait tout à la fois les qualités de propriétaire, de skipper et de barreur ;

Qu'il est en conséquence malvenu de tenter de fuir sa responsabilité en invoquant une notion de "garde collective" aux contours parfaitement imprécis excluant l'application de l'article 1384 alinéa 1er ;

Attendu que sera en conséquence rejetée l'argumentation proposée par les appelants ;

Attendu, en outre et dans ses rapports avec Monsieur Z..., qu'il convient de relever que Monsieur X... a commis deux fautes d'imprudence caractérisées en :

- naviguant non au grand large mais en frôlant le vent arrière ce qui a provoqué un empannage non contrôlé ainsi que tout marin doit en avoir conscience ;

- laissant Madame Z..., dans ces conditions virtuellement dangereuses de navigation, à proximité de la bôme et de l'écoute de grand'voile, alors que les circonstances imposaient qu'elle restât sur le point ; Attendu qu'il y a lieu d'ajouter que, contrairement à ce que prétendent les appelants, un empannage non contrôlé résulte nécessairement d'une imprudence du barreur - ou du skipper - du moins en croisière et par mer belle, ce qui était le cas en l'espèce ;

Qu'il s'évince de ces motifs que la thèse avancée de l'acceptation des risques par la victime est dépourvue de toute pertinence ;

Attendu que la responsabilité de Monsieur X... est engagée à l'égard de Madame Z... sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1er, à l'égard de Monsieur Z... sur celui des articles 1382 et 1383 du Code civil ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que doit être purement et simplement écartée la demande formée à titre subsidiaire par les appelants tendant à un partage de responsabilité ; que c'est à juste titre que le premier juge a déclaré Monsieur X... entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accident ;

Attendu, sur la limitation de la responsabilité prévue par la loi du 3 janvier 1967 modifiée, que le premier juge a estimé que Monsieur X... était fondé à invoquer une limitation de l'indemnisation,

aucune faute inexcusable personnelle de nature à emporter déchéance de ce droit ne pouvant lui être reprochée ;

Mais attendu que Monsieur X... a commis des fautes caractérisées en relation directe avec l'accident ainsi qu'il est ci-dessus exposé ;

Attendu que c'est dès lors à bon droit que le Centre Hospitalier Le Vinatier, employeur de Madame Z..., estime que ce manquement à l'obligation de sécurité, constitutif d'une faute téméraire, fait obstacle à tout plafonnement des réparations dues en vertu de l'article 58 de la loi du 3 janvier 1967 ;

Attendu que, de ce chef, sera réformé le jugement déféré qui a fixé des limites à l'indemnisation des préjudices ;

Attendu enfin que par application de l'article 41 de la loi no 86-33 du Code de la Fonction Publique Hospitalière le Centre Hospitalier Le Vinatier est subrogé dans les droits de Madame Z..., fonctionnaire audit Centre, jusqu'à concurrence du montant des charges supportées du fait de l'accident ; qu'en conséquence Monsieur X... et la Compagnie AGF IART seront condamnés à payer au Centre Hospitalier la somme provisionnelle de 126 482 ç au titre des salaires et charges versées à Madame Z... depuis l'accident ;

Attendu qu'il y a lieu de liquider les préjudices et, pour ce faire, de renvoyer la cause et les parties dans le tribunal de grande instance de Lyon ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Déboute Monsieur X... et la Compagnie AGF IART de leur appel,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a retenu des limitations d'indemnisation au profit de Monsieur X...,

Le réforme de ce chef et statuant à nouveau,

Dit que Monsieur X... ne peut bénéficier des dispositions de la loi no 65-7 du 3 janvier 1967 modifiée et du décret no 86-1371 du 23 décembre 1986,

Y ajoutant,

Dit que Monsieur X... a également commis une faute au sens des articles 1382 et 1383 du Code civil,

Condamne Monsieur X... et son assureur, la Compagnie AGF IART, à payer au Centre Hospitalier Le Vinatier la somme de 126 482 ç au titre des salaires et charges versés à Madame Z... depuis l'accident du 11 août 1998,

Renvoie les parties devant le tribunal de grande instance de Lyon pour la liquidation des préjudices,

Condamne Monsieur X... et la Compagnie AGF IART à payer aux époux Z... la somme de 2 000 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne Monsieur X... et la Compagnie AGF IART aux dépens d'appel lesquels seront distraits au profit des avoués de la cause à l'exception de Maître LIGIER DE MAUROY, Avoué, conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0011
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946363
Date de la décision : 09/06/2005

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE

La notion de garde collective, exclusive du bénéfice de la responsabilité fondée sur l'article 1384 alinea 1 du Code civil, pour la victime co-gardienne, ne saurait être invoquée par la personne qui cumule les qualités de propriétaire, instaurant une présomption de garde et de skippeur barreur, instaurant une présomption de responsabilité, ce dernier ayant, selon les usages constants en mer, l'entière direction et le commandement du bateau et de son équipage. Il est, en conséquence, malvenu de tenter de fuir sa responsabilité en invoquant une notion de garde collective aux contours parfaitement imprécis. Au vu des éléments du dossier et considérant que des imprudences ont été commises par le barreur skippeur, la thèse avancée de l'acceptation des risques par la victime est, de même, dépourvue de pertinence.


Références :

article 1384 alinea 1er du Code civil

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2005-06-09;juritext000006946363 ?
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