ARRET N°
N° RG 23/00821 - N° Portalis DBV6-V-B7H-BIQHB
AFFAIRE :
Mme [M] [P]
C/
Compagnie d'assurance SA SMA COURTAGE
MCS/EH
Demande en réparation des dommages causés par des véhicules terrestres à moteur
Grosse délivrée aux avocats
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU 04 SEPTEMBRE 2024
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Le QUATRE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE la Chambre civile de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE
Madame [M] [P]
née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 4],
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Anne-laure GODET, avocat au barreau de TOULOUSE
APPELANTE d'une décision rendue le 19 OCTOBRE 2023 par le PRESIDENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BRIVE
ET
Compagnie d'assurance SA SMA COURTAGE,
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Virgile RENAUDIE de la SELARL RENAUDIE LESCURE BADEFORT, avocat au barreau de BRIVE
INTIMÉE
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Suivant avis de fixation à bref délai du Président de chambre, l'affaire a été fixée à l'audience du 27 Mars 2024 en application des articles 905 et suivants du Code de Procédure Civile.
Conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, magistrat rapporteur, assistée de Madame Laetitia LUZIO SIMOES, greffier, a tenu seule l'audience au cours de laquelle elle a été entendue en son rapport. Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Après quoi, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 29 Mai 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi. A cette date, le délibéré a été prorogé au 12 Juin 2024, puis au 26 Juin 2024 et au 04 Septermbre 2024.
Au cours de ce délibéré, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, a rendu compte à la Cour, composée de Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre,de Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller et de Monsieur Gérard SOURY, Conseiller. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
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LA COUR
EXPOSE DU LITIGE:
Le 12 janvier 2015, alors qu'elle venait de quitter son travail au volant de son véhicule, Mme [M] [P] a été percutée par un camion venant en sens inverse, et a subi d'importants préjudices. La compagnie d'assurances SMA COURTAGE lui a versé des provisions à valoir sur1'indemnisation de son préjudice à hauteur de 94 000 euros.
Le Docteur [Y] [R], commis par la compagnie d'assurance SMA COURTAGE, a déposé son rapport le 22 décembre 2021 fixant la date de consolidation de Mme [P] au 17 décembre 2019.
Le 17 mai 2022, la compagnie d'assurance SMA a formulé une offre définitive à hauteur de 113.967,45 euros.
Par actes du 20 juillet 2023, Mme [P] a fait assigner la SMA COURTAGE et la Caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze devant le Juge des référés du Tribunal Judiciaire de Brive la Gaillarde, au visa de la Loi Badinter du 5 juillet 1985 et de 1'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile, aux fins de voir principalement, condamner la compagnie d'assurance SMA COURTAGE à lui verser une somme provisionnelle de 100.000 euros.
En réponse, la SA SMA COURTAGE a conclu à la limitation de la provision réclamée par Mme [P] à 20 000 euros portant la somme provisionnelle totale à 114 000 euros.
La CPAM de la Corrèze assignée le 20 juillet 2023 à personne habilitée n'était pas représentée. La CPAM de la Charente Maritime indiquant agir pour la CPAM de la Corrèze a adressé le 26 juillet 2023 un courrier à la juridiction de première instance pour indiquer qu'elle n'entendait pas intervenir à l'instance.
Par ordonnance réputée contradictoire du 19 octobre 2023, le Juge des référés du tribunal judiciaire de Brive-la-Gaillarde a :
-déclaré satisfactoire l'offre de la SMA COURTAGE de versement complémentaire d'une provision de 20.000 euros à Mme [P] au titre de l'accident qu'elle a subi le 12 janvier 2015 ;
-condamné, au besoin, la SMA COURTAGE à payer cette provision de 20.000 euros à Mme [P] ;
-débouté Mme [P] de ses autres demandes provisionnelles;
-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
-dit que chacune des parties supporte la charge de ses dépens ;
-débouté les parties de leurs demandes formées en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
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Par déclaration du 6 novembre 2023 effectuée dans des conditions de forme et de délai non contestées, Mme [P] a relevé appel général de cette ordonnance.
L'affaire a été orientée à bref délai.
Par dernières conclusions signifiées et déposées le 16 février 2024, Mme [M] [P] demande à la cour d'infirmer l'ordonnance déférée, et statuant à nouveau, de condamner la compagnie SMA COURTAGE à lui verser :
-une somme provisionnelle de 100 000 euros ;
-une somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
-les entiers dépens de l'instance en cours et de première instance.
Par conclusions signifiées et déposées le 19 décembre 2023, la SA SMA COURTAGE demande à la cour de :
-confirmer purement et simplement l'ordonnance de référé du 19 octobre 2023 ;
-débouter Mme [P] de sa demande au titre de l'article 700 code de procédure civile et des dépens ;
-la condamner à lui payer la somme de 1800 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile et les entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la SELARL RENAUDIE LESCURE BADEFORT.
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La Cour pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise, ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS DE LA DECISION :
Selon l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier.
Cette provision a pour seule limite le caractère incontestable de la créance.
En l'espèce, il sera fait le constat que le droit à indemnisation de Mme [M] [P] n'est pas contesté par l'assureur et que la victime de son côté, ne remet pas en cause les conclusions de l'expert amiable, le docteur [Y] [R].
Par ailleurs, il est constant que l'accident de Mme [M] [P] est pris en charge au titre de la législation des accidents du travail.
Sur la base du rapport d'expertise amiable, l'assureur a formulé une offre d'indemnisation définitive s'élevant à la somme de 113 967,45 € (sa lettre du 17 mai 2022) selon le détail suivant :
-dépenses de santé actuelles : réservé
-pertes de gains professionnels : réservé
-assistance de tierce personne : 22 776 €
-frais divers : réservé
-assistance tierce personne : 41 778,45€
-pertes de gains professionnels futurs : réservé
-incidence professionnelle : réservé
-déficit fonctionnel temporaire : 21413€
-souffrances endurées(5/7) : 25000€
-préjudice esthétique temporaire : 2000€
-déficit fonctionnel permanent (35%) : réservé
-préjudice d'agrément : réservé
-préjudice esthétique permanent (2,5/7) : 2000€.
Le montant des provisions versées par la SA SMA COURTAGE s'élèvent au total à la somme de 94 000 €.
Dans ces conditions, au regard des offres formulées (113967,45 €) et des provisions versées (94000 €), le premier juge a fixé à la somme de 20000 € la provision complémentaire à la charge de l'assureur ; cependant, il a à tort écarté la demande d'indemnité provisionnelle de Mme [M] [P] au titre du déficit fonctionnel permanent.
Dans sa lettre du 17 mai 2022, l'assureur a écrit en effet, s'agissant d'un accident du travail, que la CPAM était susceptible de verser à Mme [M] [P] une rente accident du travail déductible de ce poste de préjudice et que si aucune rente ne lui était attribuée, ce poste serait indemnisé à hauteur de 57'750 € (valeur du 1650€).
Mme [M] [P] fait justement observer que le poste 'déficit fonctionnel permanent ' n'a pas à être réservé, dès lors que la Cour de cassation réunie en assemblée plénière le 20 janvier 2023 a précisé que la rente accident du travail n'indemnise pas le déficit fonctionnel permanent et qu'elle ne doit pas être imputée sur ce poste.
Dans ces conditions, il est justifié de lui allouer au titre de ce poste de préjudice, à titre provisionnel, une indemnité supplémentaire de 57 750 €.
En définitive, le montant total de la provision allouée à Mme [M] [P] sera donc fixé à la somme de 77 750 € (20000 € +57750 €).
Mme [M] [P] sera déboutée du surplus de sa demande d'indemnité provisonnelle, dès lors que les autres postes réservés par l'assureur ne sont pas chiffrés et supposent la production de justificatifs par Mme [M] [P].
*Sur les demandes accessoires :
La SA SMA COURTAGE supportera les dépens de première instance et d'appel, ce qui exclut par ailleurs qu' elle puisse bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;
Il serait en outre inéquitable de laisser Mme [M] [P] supporter l'intégralité des frais qu'elle a dû exposer pour faire assurer la défense de ses intérêts dans le cadre de la procédure.
Une indemnité de 2500 € lui sera accordée en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour d'appel statuant publiquement, par décision contradictoire rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
INFIRME l'ordonnance de référé déférée,
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
CONDAMNE la SA SMA COURTAGE à payer à Mme [M] [P], une indemnité provisionnelle de 77 750 € à valoir sur l'indemnisation du préjudice résultant de l'accident de la circulation survenu le 12 janvier 2015,
Y ajoutant,
CONDAMNE la SA SMA COURTAGE à verser à Mme [M] [P] une somme de 2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre de l'instance,
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,
DIT que les dépens de première instance et d'appel seront supportés par la SA SMA COURTAGE.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Emel HASSAN. Corinne BALIAN.