ARRET N° .
RG N° : N° RG 24/00007 - N° Portalis DBV6-V-B7I-BIQXG
AFFAIRE :
Mutuelle MAAF ASSURANCES Société d'assurance mutuelles prise en la personne de sonrep
résentant légal
C/
M. [B] [V], Etablissement Public POLE EMPLOI AQUITAINE pris en la personne de son représentant légal
PLP/MS
Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution
Grosse délivrée à Me Christophe DURAND-MARQUET, Me Anne DEBERNARD-DAURIAC, le 25-07-2024
COUR D'APPEL DE LIMOGES
Chambre sociale
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ARRET DU 25 JUILLET 2024
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Le VINGT CINQ JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE la CHAMBRE économique et sociale a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
Mutuelle MAAF ASSURANCES Société d'assurance mutuelles prise en la personne de sonreprésentant légal, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL SELARL LX LIMOGES, avocat au barreau de LIMOGES substituée par Me Cécile CURT, avocat au barreau de LYON
APPELANTE d'une décision rendue le 05 MAI 2020 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIORT
ET :
Monsieur [B] [V]
né le 13 Septembre 1962 à [Localité 4], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Christophe DURAND-MARQUET, avocat au barreau de LIMOGES substitué par Me Olivier BLUCHE, avocat au barreau de PARIS
Etablissement Public POLE EMPLOI AQUITAINE pris en la personne de son représentant légal, demeurant [Adresse 3]
défaillante, régulièrement assignée le 09-01-2024.
INTIMES
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Sur renvoi de cassation : jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIORT en date du 05 MAI 2020 - arrêt de la cour d'appel de POITIERS en date du 02 juin 2022 - arrêt de la cour de Cassation en date du 06 décembre 2023
Suivant avis de fixation du Président de chambre, l'affaire a été fixée à l'audience du 18 Juin 2024.
La Cour étant composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Madame Géraldine VOISIN, Conseiller et de Madame Johanne PERRIER, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, assistés de Mme Sophie MAILLANT, Greffier.
A cette audience, Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre a été entendu en son rapport oral, les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 29 août 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
La mise à disposition de cette décision a été avancée au 25 juillet 2024, les avocats des parties en ayant été régulièrement informés.
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LA COUR
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FAITS ET PROCÉDURE :
La SA Maaf Assurances a engagé M. [B] [V] par contrat de travail à durée indéterminée en qualité de chargé de mission, statut cadre, à compter du 3 janvier 2007.
Le 1er juin 2018, M. [V] a été nommé à la direction juridique de COVEA, en qualité de responsable du domaine assurances - manager de domaine, après une annonce de cette nomination faite le 9 avril 2018.
Le 29 juin 2018, lors d'une réunion de présentation de la direction juridique de COVEA, M. [V] a tenu un propos litigieux.
Le 27 août 2018, M. [V] a signé une convention tripartite de transfert de contrat et un contrat de travail à durée indéterminée avec la société d'assurances mutuelle Maaf Assurances afin de formaliser sa nomination à la direction de COVEA, à effet au 1er juin 2018 .
Le même jour, il a été convoqué à un entretien préalable à licenciement fixé le 7 septembre 2018.
Le 28 septembre 2018, un conseil paritaire s'est tenu lors duquel M. [V] a été entendu.
Le 5 octobre 2018, la mutuelle Maaf Assurances lui a notifié par écrit son licenciement pour faute simple en lui reprochant d'une part des propos sexistes, offensants et blessants tenus lors de la réunion du 29 juin 2018 au cours de laquelle il avait déclaré devant cinquante collaborateurs ' la loi c'est comme les filles, mieux on la connaît mieux on peut la violer' et d'autre part son comportement laxiste dans l'exécution de ses fonctions, tout en le dispensant de l'exécution de son préavis qui a été rémunéré.
Les 9 et 23 octobre 2018, M. [V] a contesté son licenciement auprès de son employeur, sans succès.
Le 30 novembre 2018, M. [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Niort de demandes en contestation de son licenciement.
Par jugement du 5 mai 2020, le conseil de prud'hommes de Niort a fixé le salaire mensuel du salarié à 8 317,09 euros bruts, a rejeté la demande de nullité du licenciement, a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que les propos du salarié ne résultaient que d'une maladresse, et que l'insuffisance professionnelle n'était alléguée que sur une période de deux mois parmi douze années d'emploi.
Le conseil de prud'hommes a dit qu'il existait des circonstances déloyales et vexatoires dans la rupture du contrat caractérisées par la concomitance entre la signature de la convention de transfert et la convocation à l'entretien préalable. Il a ainsi condamné la mutuelle Maaf Assurances à payer à M. [V] diverses sommes au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour perte de chance de bénéficier d'une retraite majorée, pour préjudice moral, et pour exécution déloyale du contrat. Il a en revanche rejeté les demandes du salarié relatives au travail dissimulé, aux intérêts et leur capitalisation, à la publication et affichage du jugement.
Le 2 juin 2022, la cour d'appel de Poitiers a confirmé le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du licenciement, et la demande liée au travail dissimulée. En revanche, elle a considéré que le licenciement était une sanction proportionnée au trouble causé à l'entreprise.
La cour d'appel de Poitiers considéré que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif qu'il avait été annoncé verbalement, avant sa notification écrite, retenant le fait que dans un mail du 1er octobre 2018, M. [U], un employé du service de la paie et gestion administrative COVEA avait fait référence à une récupération pouvant être faite sur le solde de tout compte de M. [V], ce qui rendait la décision de licenciement certaine pour le département des ressources humaines.
Toutefois, la cour d'appel de Poitiers a infirmé le jugement du conseil de prud'hommes et a statué à nouveau sur le paiement de diverses sommes par la mutuelle Maaf Assurance. Elle a condamné la société au paiement d'une somme moindre au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, et au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et licenciement intervenu dans des circonstances vexatoires, mais cette fois assortie d'intérêts au taux légal, et avec capitalisation des intérêts.
Elle a débouté en revanche M. [V] de ses demandes de dommages et intérêts pour perte de chance de bénéficier d'une retraite majorée et pour préjudice moral.
Par arrêt rendu le 6 décembre 2023, au visa de l'article L.1232-6 du code du travail, la Cour de cassation a cassé et annulé le jugement de la cour d'appel de Poitiers, seulement en ce qu'il a condamné la mutuelle Maaf assurances au paiement d'une indemnité (55 000 €) pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de dommages et intérêts (30 000 €) pour exécution déloyale du contrat de travail et licenciement intervenu dans des circonstances vexatoires, dit que les dommages-intérêts alloués étaient assortis d'intérêts au taux légal et en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts et condamné la mutuelle Maaf assurances au paiement d'une somme à titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
La Cour de Cassation a motivé son arrêt par le fait que les propos retenus par la cour d'appel pour considérer le licenciement sans cause réelle et sérieuse n'émanaient pas du titulaire du pouvoir de licencier, ce dont il résultait que l'employeur n'avait pas manifesté la volonté de mettre fin au contrat de travail.
Le 2 janvier 2024, la MAAF ASSURANCES a saisi la cour d'appel de Limoges.
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MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières écritures du 11 juin 2024, la société mutuelle MAAF ASSURANCES demande à la cour de :
Infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de NIORT en ce qu'il a fixé le salaire de référence de M. [V] à 8 317,09 € ;
Infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de NIORT en ce qu'il a déclaré le licenciement de M. [V] sans cause réelle et sérieuse ;
Infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de NIORT en ce qu'il a condamné la société MAAF ASSURANCES à verser à M. [V] 93.072 € nets au titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de NIORT en ce qu'il a condamné la société MAAF ASSURANCES à verser à Monsieur [V] 106.368 € nets de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
Infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de NIORT en ce qu'il a condamné la société MAAF ASSURANCES à verser à M. [V] 53.184 € de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et licenciement brutal et vexatoire ;
Infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de NIORT en ce qu'il a condamné la société MAAF ASSURANCES à rembourser les indemnités versées par Pôle emploi au titre de l'article L.1235-4 du Code du travail à hauteur de 6 mois de salaires ;
Infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes en ce qu'il a condamné la société MAAF ASSURANCES au versement de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de NIORT en ce qu'il a rejeté la demande relative aux intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts.
En conséquence :
Fixer le salaire de référence de M. [V] à 7.615,43 € bruts ;
Débouter M. [V] de l'intégralité de ses demandes ;
Condamner M. [V] au paiement d'une somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure civile ;
Condamner M. [V] aux entiers dépens.
Elle soutient que le licenciement pour faute de M. [V] est justifié car il a tenu des propos sexistes et fait une exécution fautive de son contrat de travail, et proportionné, car il a pu bénéficier de son préavis et d'une indemnité de licenciement
Elle souligne que la tenue délibérée par M. [V] des propos suivants « La loi, c'est comme les jeunes filles, mieux on la connaît, mieux on peut la violer », qui étaient sexistes et dégradants constituaient une faute, justifiant une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement pour faute grave. Elle ajoute que ces propos ne sont pas contestés par M. [V], qui en tant que membre de la direction aurait dû avoir un comportement exemplaire, et que ces propos ont fortement choqué, gêné, déçu et offensé les collaborateurs présents, envers lesquels M. [V] ne s'est jamais excusé. Ces propos ont porté atteinte à la sérénité du climat de travail, à la confiance des collaborateurs quant à l'intégrité de M. [V], et à l'image de l'entreprise.
A cet égard, elle souligne que le salarié lui a fait courir un risque car en tant qu'employeur, elle est tenue par une obligation de sécurité de résultat de prévenir les agissements sexistes dans l'entreprise et que son règlement intérieur de groupe indique que tout salarié ayant procédé à des agissements sexistes est passible d'une sanction disciplinaire. C'est ainsi qu'elle devait prendre les mesures nécessaires et adaptées afin que M. [V] ne renouvelle pas son comportement.
Elle souligne que le fait que les propos aient été une citation n'amoindrirait pas leur portée sexiste. De même, l'absence d'intention malveillante, ou la tentative d'humour de M. [V] n'auraient pas pour effet d'exclure l'application de la qualification d'agissement sexiste telle qu'inscrite à l'article L1142-2-1 du code du travail, l'intention n'était pas un critère constitutif de tels agissements.
Par ailleurs, elle soutient qu'il a eu un comportement délibérément laxiste, en ne fournissant pas certains travaux demandés pour le 30 août 2018, ce qui constituait une négligence fautive et un manque d'intérêt.
Elle soutient que l'ancienneté du salarié ou le caractère isolé des faits n'est pas de nature à retirer le caractère de gravité des faits fautifs, et que le salarié n'apporte aucun fait au soutien de sa prétention selon laquelle son licenciement était un licenciement économique déguisé.
Elle soutient que le licenciement n'a pas été verbal car :
la somme qui lui a été versée n'était pas son indemnité de licenciement, mais une somme dûe au titre de son transfert;
l'échange d'emails visé par le salarié était exclusivement interne, et ne permettait pas de manifester la volonté de l'employeur de rompre le contrat avec M. [V]. En effet, il n'émanait pas d'une personne ayant l'autorité décisionnelle de licencier, donc pas de l'employeur, mais s'était effectué entre deux acteurs impliqués dans la mise en oeuvre de la procédure de licenciement. Elle soutient ne pas avoir fait d'annonce publique ou avoir informé le salarié de sa volonté de mettre fin au contrat avant de lui avoir notifié son licenciement.
s'agissant de l'appel de Mme [N], cette dernière s'est bornée à informer le salarié de l'envoi de la décision de l'employeur.Elle affirme que cet appel a eu lieu après l'envoi de la lettre de licenciement, et que le salarié a tenté d'en tirer profit par manoeuvre.
Elle affirme avoir respecté la procédure de licenciement prévue à l'article 90 de la convention collective nationale des sociétés d'assurances.
Elle considère, s'agissant des demandes indemnitaires du salarié, qu'elles sont d'une part infondées du fait de la licéité de son licenciement, mais également dans leur quantum car le salaire mensuel retenu est erroné, et car M. [V] ne démontre pas l'ampleur du préjudice prétendu qui justifierait le versement de 10,5 mois de salaires brut.
Par ailleurs, les dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat et pour licenciement brutal et vexatoire demandés par M. [V] ne sont pas fondés sur un préjudice distinct de celui allégué au titre de la perte d'emploi causée par un licenciement sans cause réelle et sérieuse. En outre il ne démontre pas d'exécution déloyale du contrat,l'employeur n'ayant pas orchestré la signature concomitante de la convention tripartite et la remise de la convocation à entretien préalable afin de priver le salarié de l'exercice de la clause de retour dans sa société d'origine, qui n'avait pas lieu de s'appliquer au regard des faits reprochés, et M. [V] ne démontre pas de circonstances vexatoires dans la procédure de licenciement.
Aux termes de ses dernières écritures du 5 juin 2024, M. [V] demande à la cour de :
Infirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes de M. [V] relatives aux intérêts au taux légal et à la capitalisation des intérêts ;
Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [V] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société MAAF Assurances à verser de ce chef à M. [V] 93.072 € nets à titre d'indemnité (dommages-intérêts) pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société MAAF Assurances à verser à M. [V] 53.184 euros nets à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail;
Statuant à nouveau, et y ajoutant :
Condamner la société MAAF Assurances à verser à M. [V] 53.184 € nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire ;
Condamner la société MAAF Assurances à verser à M. [V] les intérêts au taux légal sur les condamnations prononcées à compter de la date de saisine du Conseil de Prud'hommes ;
Ordonner la capitalisation des intérêts ;
Condamner la société MAAF Assurances à verser à M. [V] 10.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner la société MAAF Assurances aux dépens.
A cette fin, il soutient avoir subi un licenciement verbal, en ce que le service paie a nécessairement envoyé l'email du 1er octobre 2018 sur instruction de la direction de la société, l'employeur ayant donc nécessairement informé d'autres salariés de la rupture du contrat du contrat de travail de M. [V] antérieurement à la notification du licenciement, peu important que ce licenciement verbal n'ait pas été officiel.
Il soutient que Mme [N] lui a téléphoné le 5 octobre 2018 pour lui signifier oralement son licenciement, alors qu'il n'a reçu la lettre que le lendemain. Il souligne qu'il n'a pu connaître de son licenciement dès le 5 octobre 2018 que par ce biais, et que par ailleurs, la juriste de l'entreprise a relayé la lettre de licenciement par email le même jour au service paie, relayant ainsi la décision de l'employeur avant qu'elle ne lui soit communiquée.
Il soutient que les griefs allégués dans la lettre de licenciement sont dépourvus de caractère réel et sérieux.
Sur le grief des propos tenus lors de la réunion du 28 juin 2018, il est dépourvu de caractère sérieux car il ne s'agissait nullement de l'expression par lui de convictions personnelles ou d'une intention malveillante ou sexiste, mais uniquement de la reprise d'une citation d'un ancien professeur de droit pour illustrer ' fort maladroitement - le sujet initié par son supérieur hiérarchique lors de la réunion : l'utilisation « souple » de la règle de droit. Il soutient ainsi qu'il n'avait pas d'intention d'exprimer des propos sexistes à l'encontre de ses collègues féminines, et cette maladresse isolée n'est pas un grief sérieux de licenciement.
Sur le grief accessoire de laxisme, il manque également de caractère sérieux, car l'employeur allègue en réalité d'une insuffisance professionnelle, alors que sa compétence professionnelle était avérée et attestée par sa promotion au sein du groupe. Il affirme que bien qu'il fut en congés du 6 juillet au 2 août, il a rendu les travaux sur lesquels l'employeur le critique le 20 août 2018. Par ailleurs, même dans le cas où une insuffisance professionnelle aurait pu être constatée, non seulement l'employeur ne pourrait le sanctionner sur le terrain disciplinaire, mais en outre, cette insuffisance n'aurait pu être jugée comme lui étant imputable, faute de conseil et d'accompagnement de la prise de ses fonctions.
Il soutient qu'en réalité, son licenciement a été décidé pour un motif économique déguisé et est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il avance que l'employeur avait une volonté de réduction des effectifs, dont il a été victime. Il souligne ainsi que son poste n'a pas été remplacé depuis son licenciement.
Il souligne que la société Maaf Assurances n'a par ailleurs pas respecté la procédure conventionnelle applicable, et que le licenciement est donc irrégulier. Il avance que l'employeur n'a soumis au conseil paritaire qu'une documentation parcellaire, a inclu son supérieur hiérarchique en tant que membre du conseil paritaire, et a transmis une version non signée du procès verbal à M. [V] sans les corrections et ajouts des autres membres du conseil paritaire.
M. [V] soutient par ailleurs avoir perçu une rémunération mensuelle moyenne de 8 864 euros brut, et être fondé à obtenir au titre:
d'indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse une indemnité de 10.5 mois de salaire, un montant total de 93 072 euros nets, étant précisé que le salarié est aujourd'hui âgé de 61 ans et ne peux obtenir une retraite à taux plein, et n'a pu obtenir qu'un nouvel emploi pendant un peu plus d'un an depuis son licenciement;
de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, un montant de 53 184 euros net;
de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire, un montant de 53 184 euros net en raison de la brutalité du licenciement au vu de ses 12 années de carrière.
Sur l'exécution déloyale du contrat, il souligne que l'employeur a orchestré la signature concomitante de la convention tripartite de transfert et la remise de sa convocation à entretien préalable afin le priver de l'exercice effectif de la clause contractuelle de retour dans sa société d'origine, comme le prouve la chronologie : signature de son contrat, convocation à entretien préalable, mise à l'écart et son licenciement final.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1. Sur la rupture du contrat de travail
1.1 Sur le licenciement verbal
Selon M. [V] l'appel téléphonique qu'il a reçu de Mme [N] pour lui signifier verbalement la rupture de son contrat de travail, la veille de la réception de sa lettre de licenciement, s'analyse en un licenciement verbal, comme cela résulte également de l'annonce de son licenciement révélée par des messages, antérieurement à l'expédition de le lettre de licenciement.
Selon l'article L. 1232-6 du code du travail la rupture du contrat de travail, en l'absence de lettre de licenciement, ne peut résulter que d'un acte de l'employeur par lequel il manifeste au salarié sa volonté de mettre fin au contrat de travail.
Les actes, rendus strictement nécessaires par la mise en 'uvre de la procédure de licenciement, émaneraient-ils de l'employeur, ne sont pas assimilables à un licenciement verbal, sauf à démontrer la recherche spécifique d'une large diffusion.
En l'occurrence, il n'est aucunement établi que Mme [J] [N], lors d'un entretien téléphonique, a informé M. [V] de la mesure de licenciement qui était prise à son encontre, cette dernière ayant particulièrement insisté sur le fait qu'elle s'était limitée, par correction, à l'informer de l'envoi, selon les formes requises, de la décision qui avait été prise. La production par M. [V], d'une nouvelle pièce établie plus de cinq ans après les faits, constituée d'une attestation émanant de son épouse disant se souvenir avoir entendu Mme [N] utiliser le terme 'licenciement'lors de cet échange, n'est pas de nature à emporter la conviction de la cour, compte tenu du lien de conjugalité l'unissant à M. [V], de la tardiveté de ce témoignage et des circonstances décrites qui eussent nécessité, de la part de M. [V], l'utilisation d'un haut-parleur avant même de connaître l'objet de l'appel téléphonique.
D'autre part, les propos tenus par un employé du service des paies et de la gestion administrative dans un courriel du 1er octobre 2018, relatif à une possible répétition de l'indu, éventuellement sur le STC (solde de tout compte), n'émanait pas du titulaire du pouvoir de licencier et ne manifestait pas sa volonté de mettre fin au contrat de travail.
L'existence d'un licenciement verbal de M. [V] n'est donc pas démontrée.
1.2 Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement de M. [V]
Tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse (article L1232-1 du code du travail).
C'est à l'employeur, qui invoque l'existence d'une faute d'en rapporter la preuve.
C'est au regard des motifs énoncés dans la lettre de licenciement du 6 octobre 2021 que s'apprécie son bien fondé.
1.2.1 Sur le grief relatif aux propos sexistes
En l'occurrence la société Maaf Assurances reproche à M. [B] [V] d'avoir, le 29 juin 2018, lors d'une réunion de présentation de la nouvelle équipe, tenu des propos offensants, et blessants pour les équipes, contraires aux valeurs de la direction juridique, en déclarant ' La loi, c'est comme les jeunes filles, mieux on la connaît, mieux on peut la violer.' Le second motif de licenciement est relatif à son laxisme pour n'avoir pas répondu aux attentes de la Direction, faute d'avoir fourni les plans d'action demandés alors que cela relevait de ses fonctions de cadre supérieur et qu'il lui appartenait d'être une force de proposition.
M. [V] ne conteste par la réalité des termes incriminés, sauf à préciser qu'il lui semble que c'est le terme 'femmes' au lieu de 'filles' qu'il a utilisé.
De manière objective la réalité du caractère sexiste de cette expression est indiscutable comme il est indéniable qu'elle revêt un caractère offensant et blessant pour les nombreuses femmes présentes dans l'assemblée. Il est profondément regrettable que de tels propos aient été tenus par M. [V], cadre de haut niveau nouvellement promu et il est parfaitement compréhensible que plusieurs femmes présentes aient considéré qu'il s'agissait de propos extrêmement déplacés et dégradants, voire méprisants, pour elles, considérant, à juste titre, qu'il était anormal d'avoir à supporter ce type de commentaires dans un cadre professionnel.
Cependant le caractère sérieux d'un motif de licenciement ne doit pas être apprécié exclusivement de manière abstraite, indépendamment des circonstances de réalisation des faits qui en sont le support, et de la personnalité du salarié. S'agissant de paroles prononcées il appartient à l'employeur de prendre également en considération l'intention du salarié, sauf à méconnaître le sens profond de la sanction qui n'a de valeur et de légalité que si elle est proportionnée à la gravité des faits commis et adaptée à la personnalité de l'auteur.
Le ton allégué de la plaisanterie ne saurait laisser penser à l'auteur de propos sexistes qu'il pourrait ainsi être exonéré de toute sanction, alors qu'il révèle, au mieux une méconnaissance du respect dû à autrui et à sa dignité, au pire une volonté d'utiliser un biais pour leur porter atteinte.
En l'espèce M. [V] n'invoque pas avoir utilisé le ton de la plaisanterie, qui joue un rôle majeur dans la diffusion des préjugés sexistes, mais affirme que c'est par une extrême maladresse qu'il a tenu les propos incriminés, ce qu'il regrette. Il sera relevé que l'intervention de M. [V] n'a pas eu lieu dans un cadre préparé à l'avance, mais dans une prise de parole en réagissant à une autre intervention.
Il doit être, au préalable, constaté que le jour même où M. [V] a prononcé les mots qui lui sont reprochés, il a envoyé un courriel à son supérieur hiérarchique, M. [W] [E], pour l'informer qu'il s'agissait de propos qu'il avait rapporté de la leçon inaugurale de droit civil du professeur [P] [L], qu'il avait senti que cela l'avait crispé ce dont il était désolé, qu'il s'agissait, 'bien évidemment', d'une figure de style mais qu'il mesurait qu'elle avait pu être mal interprétée à distance et qu'il serait plus précautionneux à l'avenir.
Il est utile de relever que M. [V] fournit une explication plausible sur l'origine des propos tenus qui auraient constitué la reprise d'une citation d'un professeur de droit, le regrette, exprime sa conscience du risque d'une mauvaise interprétation, et s'engage à se montrer désormais vigilant à cet égard. En substance M. [V] reconnaît son erreur, la regrette, et prend l'engagement formel de ne plus la renouveler. Il n'évoque aucunement l'humour comme justificatif de sa citation.
Malgré ce courriel la direction n'a pas jugé utile de permettre à M. [V] de s'excuser personnellement auprès des personnes qui auraient exprimé leur incompréhension ou l'atteinte ressentie à leur dignité et à leur féminité.
Si la notoriété professionnelle d'une personnalité qui utilise une formule n'en fait pas disparaître le caractère manifestement sexiste, et ne dédouane pas de son entière responsabilité le tiers qui se l'approprie en la répétant, les grandes qualités professionnelles de son auteur peuvent malheureusement être de nature à en gommer leur incongruité et leur caractère offensant dans le cadre d'une intervention spontanée.
La réalité de la maladresse invoquée par M. [V] doit être examinée à l'aune de sa personnalité. A cet égard sa carrière professionnelle, de douze années, ne révèle aucune sanction ni aucun incident et des nombreuses personnes l'ayant côtoyé professionnellement affirment qu'il s'est toujours montré respectueux envers ses collègues féminines et qu'un tel incident ne lui ressemble aucunement. L'intégralité des témoignages produits par l'employeur se rapporte aux effets déplorables suscités par les propos en cause mais aucun ne vient évoquer un comportement sexiste, inadapté voire irrespectueux que M. [V] aurait eu dans d'autres circonstances, lors de réunions ou dans le cadre du travail quotidien. Au contraire, M. [V] produit trois messages de soutien qui lui ont été adressés par trois de ses subordonnées féminines au sein de la Direction juridique, à la suite à son licenciement disciplinaire. S'il s'agit, comme le prétend la société Maaf assurances, au demeurant sans le démontrer, de personnes figurant parmi celles ayant réagi « de manière virulente » aux propos de M. [V], cela démontre qu'elles avaient relativisé l'incident compte tenu de sa personnalité et avaient conscience du caractère excessif de la sanction que constituait son licenciement.
S'il est à l'honneur de la société Maaf assurances que le règlement intérieur des sociétés dont elle fait partie rappelle, conformément aux obligations légales, l'interdiction des agissements sexistes et que l'accord du groupe Covéa relatif à l'égalité professionnelle femmes/hommes prévoit des formations relatives au management et à la prévention des stéréotypes de genre et des comportements sexistes, il n'est pas démontré que M. [V] en a bénéficié. En outre cela ne la dispensait pas de prendre du recul par rapport à la réalité objective des propos sexistes tenus par M. [V], pour déterminer une sanction en fonction de la personnalité de ce dernier, du ton employé et de son intention. Le « Kit pour agir contre le sexisme » dont se prévaut l'employeur précise d'ailleurs que les agissements sexistes doivent être appréciés à l'aune de « la gravité du ou des agissements » ou encore de « la fréquence de la conduite ». La lutte, nécessaire et même indispensable, contre les agissements sexistes doit se faire dans la sérénité, et la recherche d'une exemplarité de la sanction ne doit pas sacrifier l'examen concret du manquement constaté et la prise en considération des éléments de personnalité de son auteur.
Compte tenu de l'absence de toute sanction disciplinaire au cours des douze années de la carrière de M. [V], de l'absence de tout incident ou observations révélant un comportement sexiste ou inadapté envers d'autres salariées ou salariés, des messages de soutien qu'il a reçus de subordonnées femmes et plus généralement de personnes l'ayant côtoyé professionnellement, du contexte dans lequel les propos ont été tenus lesquels ne relevaient pas d'un discours préparé, de l'intention de M. [V] qui n'était pas de blesser l'auditoire mais d'utiliser une citation d'un éminent professeur de droit, du regret qu'il a exprimé le soir même auprès de sa hiérarchie, de son engagement à se montrer désormais vigilant pour ne pas renouveler un tel comportement, il apparaît que M. [V] est crédible lorsqu'il affirme que c'est par maladresse qu'il a tenu les propos sexistes en cause, qu'il était dépourvu de toute intention malveillante ou sexiste, et que, si son employeur était bien fondé à le sanctionner pour les avoir tenus, son licenciement constitue une sanction qui n'est pas proportionnée à la gravité des faits ni à sa personnalité et qu'elle ne peut donc pas constituer une cause sérieuse de son licenciement.
1.2.1 Sur le grief relatif au laxisme
Un second motif, qualifié, d'accessoire, est explicité de la manière suivante dans la lettre de licenciement notifiée à M. [V] :
« Enfin et accessoirement, vous n'avez pas répondu aux attentes de votre Direction dans le sens où vous n'avez pas fourni les plans d'actions demandés alors qu'il relève de votre fonction de cadre supérieur de construire ces éléments et surtout d'être force de proposition. Ce qui démontre un comportement laxiste»
Il s'agit manifestement d'un grief fondé sur une insuffisance professionnelle, peu important que cette qualification en soit absente.
Il résulte des pièces produites que M. [V] a pris ses nouvelles fonctions le 1er juin 2018, mais a continué de travailler pour MAAF Assurances SA, son précédent employeur, jusqu'au 12 juin 2018, cumulant ainsi deux emplois pour le groupe.
M. [V] affirme qu'à son arrivée à la Direction juridique, il s'est immédiatement impliqué sur de nombreuses problématiques dont notamment :
- La coordination et la supervision du projet Mambo relatif aux relations et transferts d'activité entre APGIS (entreprise affiliée à Covéa), SMI et COVEA, sujet considéré comme « stratégique » par les dirigeants. Dans le cadre de l'exécution de cette tâche, avec son équipe ils se sont s'adaptés au calendrier estival comme l 'attestent les félicitations qu'il a reçues de la Direction Technique Santé et Prévoyance : « Merci [B] et merci [R] pour cette réactivité et adaptation à nos demandes » ;
- Le projet Flore relatif à la compatibilité de la coassurance actuelle de MAAF Santé avec APGIS avec le développement d'offres collectives April au vu des éléments contractuels liant Covéa à AGIS, ce qui a valu à M. [V] l'appréciation suivante émanant du Directeur des réseaux commerciaux MAAF Assurances qui lui écrivait le 14 septembre 2018 : «Merci [B]. C'est très clair et'rassurant. Bonne journée » ;
- La préparation d'un support sur l'excellence de service à la direction juridique ;
- Des travaux divers de supervision : notamment préparation d'une fiche « Assurances des
professionnels » ;
S'agissant des travaux d'été, il est établi que M. [V] était en congés du 6 juillet au 2 août 2018 et qu'il a reçu une demande de « travaux d'été » qui lui a été faite par M. [E] par SMS le 18 juillet 2018: « Bonjour. L'été étant propice aux réflexions, je vais vous transmettre un mail décrivant des 'travaux d'été' que j'attends de votre part pour que nous avancions dans la transformation de notre DJ. Je compte sur vous, mais n'oubliez pas en parallèle de profiter des vacances pour revenir en pleine forme». Bien qu'étant en congés, M. [V] a accusé réception de cette demande dans les termes suivants dès le 19 juillet 2018 « J'ai bien pris note de ton courriel. Nous ferons au mieux en tenant compte des vacances de chacun ».
Malgré cet agenda très serré et alors que M. [E] était lui-même absent du 20 juillet au 20 août 2018, M. [V] a rendu ses travaux d'été le 20 août 2018, lesquels comportaient de nombreuses propositions et éléments stratégiques : Quantification des activités juridiques au sein de la Direction juridique, analyse du rôle support de la fonction juridique chez Covéa, mise en exergue du risque lié à la volonté de suivre un objectif centré sur la baisse des coûts avec des suppressions de postes, proposition d'actualiser la vision de la Direction juridique, proposition d'un tableau d'évaluation des risques et de
ses indicateurs, processus pour « élaborer une vision partagée en moins d'une journée»...
Il faut relever qu'au mois d'août 2018, M. [V], qui venait de prendre son poste, n'était qu'en période d'adaptation au moment de la rédaction de ces travaux. Il souligne qu'en outre, le poste de Responsable de domaine n'avait pas été occupé pendant plusieurs mois, il n'avait pas été formé par son prédécesseur et n'a pas pu bénéficier de l'accompagnement de M. [E] qui était lui-même en congés, de même que la plupart des membres de l'équipe.
Ainsi, aucun laxisme ni aucune insuffisance professionnelle ne peuvent sérieusement être invoqués à l'encontre de M. [V], dont le professionnalisme n'avait jamais été mis en cause au cours de ses douze années de carrière et lui avait valu d'être promu à la Direction juridique de Covéa à peine deux mois avant le déclenchement d'une procédure de licenciement.
Le grief de laxisme invoqué par la société Maaf assurances n'est pas fondé sur des faits réels.
En définitive c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que le licenciement de M. [V] était dépourvu de cause réelle et sérieuse, sans qu'il soit besoin de rechercher, si son licenciement a été prononcé pour de faux motifs et qu'il reposait en réalité sur un motif économique déguisé, comme l'allègue M. [V].
2. Sur l'indemnisation du licenciement
2.1 Sur le salaire de référence
Le conseil de prud'hommes de Niort a fixé le salaire mensuel de M. [V] à 8.317,09 €, ce que la société Maaf assurances conteste en sollicitant qu'il soit fixé à 7.615,43 € brut alors que M. [V] demande sa fixation à hauteur de 8.864 € brut en raison de la nécessaire prise en considération de l'existence d'une prime d'objectif à hauteur de 12.686 € qui lui a été versée au mois de mars 2018.
Le droit à l'indemnité naît le jour où le licenciement est notifié et l'ancienneté est appréciée à la même date. Cette indemnité est censée « réparer le préjudice causé par la rupture unilatérale du contrat ».
Le salaire servant de base au calcul de l'indemnité légale de licenciement est le salaire brut et non le salaire net après déduction des cotisations de sécurité sociale ( article L. 1234-9 du code du travail). Le salaire à prendre en considération est le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant le licenciement ou, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié, le tiers des trois derniers mois (article R. 1234-4 du même code).
Le salaire de référence comprend tous les éléments ayant le caractère de salaire versés au salarié au cours de la période de référence. Doivent être prises en compte les gratifications ayant un caractère obligatoire ou résultant d'un usage constant. En l'occurrence la prime de 12.586 € versées en mars 2018 par son précédent employeur (la société MAAF ASSURANCES SA), était une prime conditionnée à la réalisation d'objectifs et dont il n'est pas démontré qu'elle aurait été versée chaque année.
La somme de 7.615,43 € proposée par l'employeur se fonde sur la rémunération mensuelle fixée dans le contrat de travail alors que celle de 8.317,09 € sur laquelle s'est fondé le conseil de prud'hommes prend pas considération les primes de vacances mensuelle, de treizième mois mensuelle et l'avantage en nature lesquels constituent, selon les bulletins de salaire, les éléments ayant le caractère de salaire, ce qui justifie de confirmer le jugement entrepris de ce chef.
2.2 Sur l'indemnité de licenciement
Selon l'article L.1235-3 du Code du travail en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre un montant minimum et maximum variant en fonction de l'effectif de l'entreprise et de l'ancienneté du salarié.
Pour une entreprise de plus de 11 salariés, et pour un salarié comptant 11 ans d'ancienneté révolues comme en l'occurrence, l'indemnité minimale est de 3 mois de salaire et l'indemnité maximale de 10,5 mois de salaire.
M. [V] demande à la présente juridiction de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société MAAF Assurances à lui verser de ce chef la somme de 93.072 € nets à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise (plus de dix salariés), des circonstances de la rupture, du montant de sa rémunération versée, de l'âge de M. [V], de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, une somme de 55 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a alloué à M. [V] une indemnité de ce chef d'un montant de 93 072 €.
2.3 Sur l'indemnité sollicitée au titre d'un licenciement brutal et vexatoire
M. [V] demande à la présente juridiction de condamner la société MAAF Assurances à lui verser de ce chef la somme de 53.184 € net à titre de dommages-intérêts.
Il n'est pas démontré un non-respect par l'employeur de la procédure conventionnelle instaurant des garanties de fond au bénéfice de M. [V], étant précisé qu'aucune disposition n'empêchait M. [E], qui avait été entendu par le conseil paritaire, en sa qualité de supérieur hiérarchique, d'être membre des représentants de l'employeur, et que la rédaction du procès-verbal a été établi conformément aux dispositions conventionnelles.
En revanche il est établi qu'après la tenue du conseil paritaire, et alors même qu'il n'avait fait l'objet d'aucune mise à pied conservatoire ou de dispense d'activité, M. [V] a été mis à l'écart de certaines réunions importantes, sans autre motif que l'existence d'une procédure disciplinaire qui, au demeurant, était en cours depuis un mois, de sorte que ces décisions de l'employeur, ont revêtu un caractère brutal et vexatoire qui justifie de condamner ce dernier à verser à M. [V] une indemnité d'un montant de 10 000 € sur ce fondement.
3 Sur l'exécution déloyale du contrat de travail :
M. [V] expose que, de manière parfaitement déloyale, la société Maaf assurances a orchestré la signature concomitante d'une convention tripartite de transfert et la remise d'une convocation à entretien préalable afin de le priver, alors qu'il était en période probatoire, de l'exercice effectif de la clause contractuelle de retour dans sa société d'origine.
Il sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société MAAF Assurances à lui verser la somme de 53.184 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.
Tant l'employeur que le salarié sont tenus d'exécuter le contrat de travail de bonne foi (article L. 1222-1 du code du travail).
Mais tout manquement d'une partie, employeur ou salarié, à ses obligations n'est pas, en soi, constitutif d'une déloyauté laquelle exige une intention malveillante voire un manquement à l'esprit de collaboration exigé des contractants.
En l'occurrence M. [V] a signé une convention tripartite dans le cadre de sa mobilité au sein de l'UES COVEA le 27 août 2018 afin de régulariser sa situation, déjà effective depuis le 1er juin 2018, date à partir de laquelle il se trouvait en période probatoire. La signature de ce contrat était logique et cohérente compte tenu de sa nouvelle situation professionnelle. Elle n'a pas fait perdre à M. [V] un droit de retour dans sa société d'origine en cas de licenciement et sa concomitance avec sa convocation à un entretien préalable à son éventuel licenciement ne révèle aucunement une intention de lui nuire ou de lui causer un préjudice de la part de son employeur mais un simple et malheureux concours de circonstances indépendant de la volonté de l'employeur.
M. [V] sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts présentée à ce titre et le jugement déféré réformé de ce chef.
4 Sur les demandes accessoires
La société MaaF Assurances, qui succombe pour l'essentiel sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel et l'équité commande de la condamner à verser à M. [B] [V] une indemnité de 5 000€ au titre de ses frais irrépétibles alors que la société Maaf Assurances sera déboutée de sa demande en paiement présentée de ce chef.
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PAR CES MOTIFS
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La Cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, dans les limites de la cassation partielle intervenue, en dernier ressort, rendu par mise à disposition au greffe et après en avoir délibéré conformément à la loi;
CONFIRME le jugement déféré rendu le 5 mai 2020 par le conseil de prud'hommes de Niort en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [B] [V] était dépourvu de cause réelle et sérieuse, que les dommages et intérêts alloués à M. [V] étaient assortis d'intérêts au taux légal à compter de la décision, a ordonné la capitalisation des intérêts année par année en application de l'article 1343-2 du code civil et condamné la société Maaf Assurances aux dépens et au paiement d'une indemnité de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
L'INFIRME en ce qu'il a condamné la société Maaf Assurances à payer à M. [B] [V] les sommes de :
- 93 072 € au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 106 368 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
- 53 184 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
Statuant à nouveau sur ces chefs ;
CONDAMNE la société Maaf Assurances à verser à M. [B] [V] la somme de 55 000 € au titre de l'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
CONDAMNE la société Maaf Assurances à verser à M. [B] [V] la somme de 10 000 € au titre d'un licenciement intervenu dans des circonstance vexatoires ;
DEBOUTE M. [B] [V] de sa demande en paiement d'une indemnité au titre d'une exécution déloyale du contrat de travail par la société Maaf Assurances ;
CONDAMNE la société Maaf Assurances aux dépens d'appel ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Maaf Assurances à verser à M. [B] [V] une indemnité de 5 000 € ;
DEBOUTE la société Maaf Assurances de sa demande en paiement d'une indemnité ;
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.