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11/07/2024 | FRANCE | N°23/00583

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre civile, 11 juillet 2024, 23/00583


ARRET N°243



N° RG 23/00583 - N° Portalis DBV6-V-B7H-BIPJ4



AFFAIRE :



M. [O] [U], Mme [X] [U] épouse [O] [U]

C/

SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS-SMABTP







CB/LM







Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction



















Grosse délivrée au

x avocats





COUR D'APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE CIVILE

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ARRET DU 11 JUILLET 2024

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Le ONZE JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE la chambre civile a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mi...

ARRET N°243

N° RG 23/00583 - N° Portalis DBV6-V-B7H-BIPJ4

AFFAIRE :

M. [O] [U], Mme [X] [U] épouse [O] [U]

C/

SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS-SMABTP

CB/LM

Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction

Grosse délivrée aux avocats

COUR D'APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE CIVILE

---==oOo==---

ARRET DU 11 JUILLET 2024

---===oOo===---

Le ONZE JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE la chambre civile a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :

ENTRE :

Monsieur [O] [U]

né le 01 Janvier 1950 à [Localité 3] (MAROC), demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Hubert-antoine DASSE de la SELARL RAYNAL-DASSE, avocat au barreau de LIMOGES substituée par Me Pauline CASTILLE, avocat au barreau de LIMOGES

Madame [X] [U] épouse [O] [U]

née le 30 Décembre 1963 à [Localité 3] (MAROC), demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Hubert-antoine DASSE de la SELARL RAYNAL-DASSE, avocat au barreau de LIMOGES substituée par Me Pauline CASTILLE, avocat au barreau de LIMOGES

APPELANTS d'une décision rendue le 27 AVRIL 2023 par le TRIBUNAL JUDICIAIRE HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE LIMOGES

ET :

SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TR AVAUX PUBLICS-SMABTP, entreprise régie par le Code des Assurances, dont le siège social est à [Adresse 5] mais ayant établissement à [Adresse 4], immatriculée au registre de commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 775 684 764, agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration en exercice domicilié de droit au siège social., demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Philippe CHABAUD de la SELARL CHAGNAUD CHABAUD & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LIMOGES

INTIMEE

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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 16 Mai 2024. L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 avril 2024.

La Cour étant composée de Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre, de Monsieur Gérard SOURY et de Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseillers, assistés de Madame Line MALLEVERGNE, Greffier. A cette audience, Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre, a été entendu en son rapport, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.

Puis Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 11 Juillet 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

LA COUR

EXPOSE DU LITIGE

Faits et procédure

Suivant contrat en date du 6 novembre 2004, Monsieur [O] [U] et son épouse Madame [X] [M] ont confié à la SAS BATIDUR IMMO PLUS assurée auprès de la SMABTP au titre de la garantie Dommages-Ouvrage, la construction d'une maison individuelle sise [Adresse 1] sur la Commune de [Localité 2], sachant :

- que les travaux qui ont débuté au cours de l'année 2005, ont fait l'objet d'une réception sans réserve intervenue le 20 juillet 2006

- que par courrier du 27 mai 2014, les époux [U] ont effectué une déclaration de sinistre auprès de la SMABTP afin de dénoncer l'existence de deux types de désordres, à savoir des fissures affectant le carrelage, et des fissures affectant le mur extérieur côté garage.

C'est dans ce contexte qu'au résultat d'une expertise diligentée par la SMABTP ayant débouché sur un rapport daté du 4 août 2014 :

- il a été constaté la présence de microfissures pluridirectionnelles au niveau du révêtement carrelé dans plusieurs pièces, ainsi que la présence de fissures horizontales au-dessus des portes de garage sur le pignon Nord

- les époux [U] se sont vu notifier par courrier du 7 août 2014 établi par la SMABTP un refus de garantie au motif que les désordres relevés n'étaient pas constitutifs de désordres de nature décennale, et proposer le règlement d'une indemnité d'un montant de 660 € TTC

- les époux [U] ont effectué une seconde déclaration de sinistre datée du 18 février 2016 et reçue le 19 février 2016 ayant débouché sur l'organisation d'une nouvelle expertise au résultat de laquelle

* la SMABTP leur a adressé

° un courrier daté du 31 mars 2016 les informant de l'application de sa garantie Dommages-Ouvrage pour le seul désordre constitutif de fissures en façade, mais de l'exclusion de ladite garantie pour le désordre constittutif de fissures du carrelage au sol comme n'étant pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination, et à engager la responsabilité des constructeurs au titre de l'article 1792 du Code Civil

° une offre d'indemnisation à hauteur de la somme de 4164,04 € TTC pour la réparation du désordre consistant dans la fissuration du mur pignon côté garage, et ce par un courrier daté du 29 avril 2016 les invitant à donner leur accord sur ladite offre en lui retournant l'acceptation d'indemnité jointe et dûment signée

* ils ont obtenu du juge des référés du Tribunal de Grande Instance de LIMOGES une mesure d'expertise confiée à Monsieur [L] [Y] par ordonnance du 5 octobre 2016 avec mission d'investiguer sur les fissurations du carrelage.

C'est dans ces circonstances :

- qu'au vu du rapport d'expertise judiciaire déposé le 6 octobre 2017, et après assignation délivrée contre la Société BATIDUR IMMO PLUS et la SMABTP, les époux [U] se sont vu allouer par jugement du 7 mars 2019 rendu par le Tribunal de Grande Instance de LIMOGES et ayant déclaré la Société BATIDUR IMMO PLUS responsable des désordres affectant le carrelage, la somme de 13 530 € TTC en réparation de leur préjudice matériel, la somme de 2500 € en réparation de leur préjudice de jouissance, outre la somme de 5 893.60 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, et ce

* avec condamnation solidaire de la Société BATIDUR IMMO PLUS et de la SMABTP au paiement desdites sommes

* avec exécution provisoire

- que suite à l'intervention de ce jugement du 7 mars 2019, les époux [U] ont recherché la garantie de la SMABTP pour la réparation du désordre consistant dans la fissuration du mur pignon côté garage, et ce en l'assignant à comparaître devant le Tribunal Judiciaire de LIMOGES

* par acte d'huissier du 12 mai 2020, sachant que cette action a débouché sur un jugement du 27 mai 2021 ayant déclaré les époux [U] irrecevables en leur demande pour cause de non-respect des dispositions de l'article 750-1 du Code de Procédure Civile

* par acte d'huissier du 5 janvier 2022 délivré

° après mise en oeuvre par les intéressés d'une mesure de médiation à laquelle la SMABTP n'a pas donné suite

* à l'effet de voir condamner la SMABTP à leur verser la somme de 4164,04 € avec intérêt au taux légal à compter du 29 avril 2016, outre une indemnité de 2500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, sachant que cette action a débouché sur un jugement du 27 avril 2023 ayant

° déclaré irrecevable pour cause de prescription biennale, la demande des époux [U] aux fins de paiement de la somme de 4164,04 € par la SMABTP, assureur Dommages-Ouvrage

° déclaré forclose sur le fondement de la garantie décennale, la demande des époux [U] aux fins de paiement de la somme de 4164,04 € par la SMABTP, assureur Dommages-Ouvrage

° dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile

° condamné solidairement les époux [U] aux entiers dépens.

Selon déclaration reçue au greffe de cette Cour le 25 juillet 2023, Monsieur [O] [U] et son épouse Madame [X] [M] ont interjeté appel de ce jugement.

La procédure devant la Cour a été clôturée par ordonnance du 10 avril 2024.

Prétentions des parties

Dans le dernier état de leurs conclusions en date du 25 octobre 2023, Monsieur [O] [U] et son épouse Madame [X] [M] (ci-après dénommés les époux [U]) demandent en substance à la Cour :

- de les déclarer recevables et bien fondés en leur appel

- d'infirmer le jugement rendu le 27 avril 2023 par le Tribunal Judiciaire de LIMOGES en ce qu'il a déclaré leur demande en paiement de la somme de 4164,04 € dirigée à l'encontre de la la SMABTP, assureur Dommages-Ouvrage, d'une part irrecevable pour cause de prescription biennale, d'autre part forclose , et satuant à nouveau de condamner la Société SMABTP à leur verser la somme de 4164,04 € avec intérêt au taux légal à compte du 29 avril 2016

- de condamner la Société SMABTP à leur verser la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'à suppprter les entiers dépens.

En l'état de ses dernières conclusions déposées le 18 janvier 2024, la SMABTP demande en substance à la Cour :

- de débouter les époux [U] de leur appel

- de confirmer intégralement le jugement déféré

- de débouter les époux [U] de l'intégralité de leurs demandes

- de condamner solidairement les époux [U] à lui verser une indemnité de 2500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens d'appel.

MOTIFS DE LA DECISION :

Le litige soumis à la Cour concerne notamment la recevabilité de l'action exercée par les époux [U] à l'encontre de la SMABTP.

1) Sur la recevabilité de l'action exercée par les époux [U] à l'encontre de la SMABTP :

La question de la recevabilité de l'action exercée par les époux [U] à l'encontre de la SMABTP sera appréciée au regard de la nature de ladite action, sachant qu'en l'espèce l'action des époux [U] est constitutive :

- non pas d'une action directe dirigée contre la SMABTP en sa qualité d'assureur de responsabilité de la Société BATIDUR IMMO PLUS, constructeur de leur maison d'habitation,

- mais d'une action en garantie exercée par les époux [U] en leur qualité de bénéficiaires d'une police d'assurance Dommages-Ouvrage souscrite par la Société BATIDUR IMMO PLUS auprès de la SMABTP.

Il s'ensuit que l'action en garantie exercée par le maître de l'ouvrage contre l'assureur Dommages-Ouvrage :

- n'est pas soumise à la prescription décennale prévue par l'article 1792-4-1 du Code Civil

- est soumise à la prescription biennale fixée par l'article L 114-1 du Code des Assurances, énonçant que toutes les actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'évènement qui y donne naissance, et faisant que l'assuré peut agir contre l'assureur Dommages-Ouvrage après l'expiration de la période de garantie de dix ans à compter de la réception, à la condition que les désordres soient survenus dans les dix ans qui ont suivi la réception des travaux, soit pendant le délai de validité de la garantie Dommages-Ouvrage.

De l'examen du dossier, il ressort :

- que les désordes dénoncés par les époux [U] à la SMABTP au moyen des deux déclarations de sinistre par eux établies les 27 mai 2014 et 18 février 2016, sont survenus dans les dix ans qui ont suivi la réception des travaux intervenue le 20 juillet 2006

- que les époux [U] ont attendu le 12 mai 2020 pour assigner la SMABTP devant le Tribunal Judiciaire de LIMOGES en paiement de la somme de 4164,04 €, et ce aux fins de réparation du désordre consistant dans la fissuration du mur pignon côté garage, alors qu'ils se sont vu adresser par la SMABTP et au moyen d'un courrier daté du 29 avril 2016, une offre d'indemnisation à hauteur de cette même somme de 4164,04 € à laquelle n'a suscité de leur part aucune acceptation, ni la moindre réponse.

De l'ensemble de ces observations, il s'évince que l'action en paiement ainsi engagée par les époux [U] à l'encontre de la SMABTP l'a été après l'expiration du délai de prescription biennale à laquelle elle était soumise, la Cour retenant :

- que ce délai a eu pour point de départ la date du 29 avril 2016 correspondant à l'offre d'indemnisation à eux faite par la SMABTP assureur Dommages-Ouvrage, et valant reconnaissance par cette dernière de sa garantie au titre du désordre consistant dans la fissuration du mur pignon côté garage,

- que la prescription biennale de l'article L 114-1 du Code des Assurances était acquise à la date du 12 mai 2020, en dépit de l'effet interruptif de prescription attaché à ladite reconnaissance de garantie exprimée le 29 avril 2016, et ayant eu pour conséquence de faire courir un nouveau délai biennal de prescription ayant largement pris fin lors de la délivrance de l'assignation en paiement du 12 mai 2020.

En conséquence, il convient de déclarer irrecevable pour cause de prescription biennale, l'action en paiement exercée par les époux [U] à l'encontre de la SMABTP au moyen de l'assignation par eux délivrée suivant acte d'huissier daté du 12 mai 2020, et de confirmer de ce chef le jugement querellé.

2) Sur l'article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens :

Pour avoir succombé en leur recours, les époux [U] seront condamnés à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel, ce qui exclut par ailleurs qu'ils puissent bénéficier des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

L'équité commande par ailleurs de ne pas faire application desdites dispositions en faveur de la SMABTP, en première instance comme en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour d' appel statuant publiquement, par décision Contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Déclare recevable l'appel interjeté par les époux [U] ;

Confirme le jugement rendu le 27 avril 2023 par le Tribunal Judiciaire de LIMOGES en ce qu'il a :

- déclaré irrecevable pour cause de prescription biennale, l'action exercée par les époux [U] à l'encontre de la SMABTP assureur Dommages-Ouvrage, aux fins de paiement de la somme de 4 164,04 €, à titre de réparation du désordre consistant dans la fissuration du mur pignon côté garage

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Réforme ledit jugement en ce qu'il a déclaré forclose sur le fondement de la garantie décennale, la demande des époux [U] aux fins de paiement de la somme de 4 164,04 € par la SMABTP, assureur Dommages-Ouvrage ;

Statuant à nouveau de ce chef,

Dit que l'action en garantie exercée par le maître de l'ouvrage contre l'assureur Dommages-Ouvrage n'est pas soumise à la prescription décennale prévue par l'article 1792-4-1 du Code Civil ;

Y ajoutant,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne les époux [U] à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

Line MALLEVERGNE. Corinne BALIAN.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/00583
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;23.00583 ?
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