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11/04/2024 | FRANCE | N°23/00408

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre sociale, 11 avril 2024, 23/00408


ARRET N° .



N° RG 23/00408 - N° Portalis DBV6-V-B7H-BIORI







AFFAIRE :



M. [B] [E]



C/



S.A. AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE - ASF la Société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE ' ASF -, Société Anonyme au capital de 29 343 640,56 €, dont le siège social est [Adresse 1], prise en son établissement [Adresse 4], immatriculée au registre de commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro 572 139 996, agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration en exercice domicilié

en cette qualité audit siège.









VC/MS





Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécuti...

ARRET N° .

N° RG 23/00408 - N° Portalis DBV6-V-B7H-BIORI

AFFAIRE :

M. [B] [E]

C/

S.A. AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE - ASF la Société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE ' ASF -, Société Anonyme au capital de 29 343 640,56 €, dont le siège social est [Adresse 1], prise en son établissement [Adresse 4], immatriculée au registre de commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro 572 139 996, agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration en exercice domicilié en cette qualité audit siège.

VC/MS

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Grosse délivrée à Me Philippe CHABAUD, Me Franck DELEAGE, le 11-04-2024.

COUR D'APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE ECONOMIQUE ET SOCIALE

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ARRÊT DU 11 AVRIL 2024

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Le onze Avril deux mille vingt quatre la Chambre économique et sociale de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :

ENTRE :

Monsieur [B] [E], demeurant [Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Franck DELEAGE de la SELARL FRANCK DELEAGE, avocat au barreau de BRIVE

APPELANT d'une décision rendue le 22 MAI 2023 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BRIVE

ET :

S.A. AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE - ASF la Société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE ' ASF -, Société Anonyme au capital de 29 343 640,56 €, dont le siège social est [Adresse 1], prise en son établissement [Adresse 4], immatriculée au registre de commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro 572 139 996, agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration en exercice domicilié en cette qualité audit siège., demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Philippe CHABAUD de la SELARL SELARL CHAGNAUD CHABAUD & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LIMOGES

INTIMEE

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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 26 Février 2024. L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 janvier 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de

Procédure Civile, Madame Valérie CHAUMOND, Conseiller, magistrat rapporteur, assistée de Mme Sophie MAILLANT, Greffier, a tenu seule l'audience au cours de laquelle elle a été entendu en son rapport oral.

Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure.

Après quoi, Madame Valérie CHAUMOND, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 11 Avril 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

Au cours de ce délibéré, Madame Valérie CHAUMOND, Conseiller, a rendu compte à la Cour, composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Madame Johanne PERRIER, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, et d'elle même. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.

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LA COUR

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FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES :

M. [B] [E] a été engagé à compter du 25 juin 2001 par la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE (ASF) en qualité de receveur, Échelle 6, indice 197, Pas 0 de la convention collective des sociétés d'économie mixte d'autoroutes du 01 juin 1979, par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein à compter du 19 juin 2001.

Au dernier état de la relation contractuelle, M. [E] occupait le poste de technicien péage, statut employé C.

La relation contractuelle est notamment régie par la convention collective nationale de branche des sociétés concessionnaires ou exploitantes d'autoroutes ou d'ouvrages routiers du 27 juin 2006.

M. [E] a été placé, du 09 mars 2020 au 10 mai 2020, en arrêt pour un accident du travail survenu le 09 mars 2020 et reconnu par la CPAM du [Localité 5].

Puis il a à nouveau été placé en arrêt du 17 septembre 2020 au 05 novembre 2020 des suites du même accident, et encore à compter du 01 février 2021 jusqu'au 31 août 2022.

La CPAM avait en effet notifié à M. [E] sa consolidation des suites de l'accident du travail à la date du 23 août 2021 par une décision que ce dernier a contestée.

Une expertise a en conséquence été ordonnée, à la suite de laquelle la CPAM a repris le versement des indemnités journalières avec effet rétroactif au 24 août 2021.

M. [E] a ensuite été placé en arrêt de travail simple pour maladie du 01 au 30 septembre 2022.

M. [E] a alors signalé à son employeur que l'intégralité des indemnités journalières de la sécurité sociale ne lui avait pas été versée dans le cadre de la subrogation, puis a saisi le conseil de prud'hommes de Brive-la-Gaillarde en référé.

Par ordonnance du 12 avril 2022, le dit conseil a considéré que la demande se heurtait à une contestation sérieuse et renvoyé M. [E] à mieux se pourvoir.

Ce dernier a, en conséquence, saisi le conseil de prud'hommes par requête reçue le 13 juin 2022.

Le conseil de prud'hommes de Brive-la-Gaillarde a, par jugement du 22 mai 2023 :

- dit que la société ASF a maintenu tous les éléments de salaires et accessoires dans le cadre de l'arrêt de travail de M. [B] [E] ;

- débouté M. [B] [E] de l'ensemble de ses demandes ;

- laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Par déclaration en date du 26 mai 2023, M. [B] [E] a interjeté appel de la décision rendue par le conseil de prud'hommes de Brive-la-Gaillarde.

Aux termes de ses conclusions n° 2 signifiées par voie électronique le 16 janvier 2024, M. [B] [E] demande à la cour de :

- réformer le jugement du conseil de prud'hommes de Brive-la-Gaillarde en date du 22 mai 2023 en ce qu'il a dit que la société ASF avait maintenu tous les éléments de salaire et d'accessoires dans le cadre de son arrêt de travail et l'a débouté de l'ensemble de ses demandes ;

- constater que les sommes versées par la CPAM du [Localité 5] (IJSS) aux ASF pour lui dans le cadre de la subrogation sur la période du 01 février 2021 au 30 septembre 2022 ressortent à la somme nette de 55 881,81 euros net ;

- dire et juger que la société ASF devait lui reverser intégralement cette somme ;

- dire et juger qu'en sus des IJSS nettes, les ASF étaient tenues de lui payer, sur la même période, la somme de 21 472,21 euros nette décomposée comme suit :

' l'intéressement et la participation versés en avril 2021 pour 5 709,05 euros net,

' l'indemnité inflation pour 100 euros net versée en décembre 2021,

' la prime de 13ème mois versée en décembre 2021, due contractuellement au prorata à hauteur de 1 289,48 euros brut soit 998,34 euros net,

' l'intéressement et la participation versés en avril 2022 pour 5 360,13 euros net,

' le complément de la prime de 13ème mois de 2021 versé en mars 2022 : 852 euros brut soit 659,64 euros net,

' la prime de 13ème mois versée en juin 2022, due contractuellement au prorata à hauteur de 1 011,11 euros brut soit 782,83 euros net,

' les primes de péage individuel d'avril 2021 à septembre 2022 : 882,45 euros brut soit 683,21 euros net,

' les primes de péage collectivité d'avril 2021 à septembre 2022 : 991 euros brut soit 767,25 euros net,

' les paniers par jours postés (soumis à charges) d'avril 2021 à septembre 2022 : 120,73 euros brut soit 93,47 euros net,

' les paniers non soumis à charges : 903,60 euros net,

' les indemnités compensatoires de trajet d'avril 2021 à septembre 2022 : 252,69 euros brut soit 195,64 euros net,

' les indemnités compensatrices P3 d'avril 2021 à septembre 2022 : 1 959,65 euros brut soit 1 517,21 euros net,

' heures dispo à 20 % ASF, heures fériées 50 % récup et majoration dimanche jour 50 % : 3 489,74 euros brut soit 2 701,84 euros net ;

- constater que les ASF lui ont payé, du 01 février 2021 au 30 septembre 2022 la somme nette totale de 57 481,97 euros ;

- dire et juger que le reliquat en sa faveur ressort donc à la somme de 19 872,05 euros ;

- condamner en conséquence la société ASF à lui payer la somme de 19 872,05 euros ;

- condamner la société ASF au paiement de la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- dire et juger que toutes les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la demande en justice et ordonner la capitalisation des intérêts échus ;

- ordonner à la société ASF la remise d'un bulletin de salaire conforme au jugement à intervenir et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

- condamner la société ASF à lui régler la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société ASF aux entiers dépens en ce compris les éventuels frais d'exécution.

Il soutient que :

- le montant des IJSS versées par la CPAM avec les sommes dues au salarié indépendamment de son arrêt de travail ne correspond pas au montant que lui a versé l'employeur subrogé dans les droits de la CPAM ;

- il ne peut y avoir, par application du principe de subrogation, de diminution du montant reversé au salarié par l'entreprise au titre des indemnités journalières nettes réglées par la CPAM à l'employeur puisque le salarié ne peut percevoir moins que ce qu'il percevrait directement de la CPAM si l'employeur n'était pas subrogé dans ses droits ;

- le salarié en accident du travail doit recevoir, en sus des IJSS nettes, toutes les sommes qui découlent du contrat de travail et des accords d'entreprise, et qui sont mentionnées sur les bulletins de paie ;

- il ressort de la jurisprudence que, en application de l'article R. 436-1 du code de la sécurité sociale que le salaire qui sert de base au calcul de l'indemnité journalière s'entend au sens de l'article L. 242-1 du même code, soit des rémunérations versées en contrepartie ou à l'occasion du travail et afférentes à la période à considérer, mais aussi des primes de mobilité et d'installation qui constituent des rémunérations versées à l'occasion du travail et qui doivent être intégrées dans le salaire de référence servant de base au calcul des indemnités journalières dans le cadre d'un arrêt de travail consécutif à un accident du travail;

- il s'agit donc de vérifier si l'employeur a reversé l'intégralité des IJSS perçues et s'il a également payé les autres sommes qui découlent de l'application d'accords collectifs, de la convention collective ou de la loi ;

- lorsque le montant des indemnités versées est plus élevé que l'obligation de maintien de salaire à laquelle est tenu l'employeur, ce dernier doit reverser au salarié l'excédent qu'il a perçu ainsi que les primes et autres avantages portés sur son bulletin de salaire ;

- la société ASF a contrevenu à l'exécution loyale du contrat de travail et a persisté en dépit ses demandes réitérées et de celles de son conseil avant même que le conseil de prud'hommes soit saisi.

Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 02 octobre 2023, la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE (ASF) demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Brive-la-Gaillarde le 22 mai 2023 en ce qu'il a :

' dit que la société ASF a maintenu tous les éléments de salaires et accessoires dans le cadre de l'arrêt de travail de M. [B] [E],

' débouté M. [B] [E] de l'ensemble de ses demandes ;

En conséquence :

- débouter M. [B] [E] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner M. [B] [E] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [B] [E] aux entiers dépens d'appel en accordant à Maître Philippe CHABAUD, avocat, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle soutient que :

- après avoir été en arrêt après un accident de travail survenu le 07 mars 2020, M. [E] a été ensuite arrêté à compter du 01 septembre 2022 dans le cadre d'un congé maladie ;

- en sa qualité d'employeur subrogé, elle était tenue de maintenir le salaire brut de son salarié conformément aux dispositions de l'alinéa 3 de l'article 28 - Accident du travail - Maladie professionnelle de la convention interentreprise du 01 juin 1979, plus favorable que celles de l'article 58 de la convention nationale de branche du 27 juin 2006 ;

- dans ce cadre, le salaire brut maintenu au bénéfice de M. [E] est celui qui lui aurait été versé s'il avait travaillé pendant les périodes d'arrêt de travail ;

- aux termes de l'article L. 1226-1 du code du travail, le salarié dont le contrat de travail est suspendu par la survenue d'un accident du travail ou une maladie professionnelle, est indemnisé pendant toute la durée de la suspension selon trois modalités distinctes qui ne s'ajoutent pas mais se complètent afin de garantir au salarié un maintien total ou partiel de sa rémunération ;

- au cas d'espèce, les dispositions de l'accord interentreprise de 1979 prévoient un maintien intégral de la rémunération, sous déduction des IJSS perçues en cas d'arrêt de travail pour accident du travail ;

- par le mécanisme de la subrogation, la CPAM verse directement les indemnités journalières à l'employeur, lequel les complète du salaire à maintenir au salarié ;

- elle a scrupuleusement maintenu le salaire de M. [E], conformément aux dispositions conventionnelles les plus favorables et maintenu l'ensemble des primes et avantages dont il bénéficiait ;

- les primes d'intéressement et de participation constituent un dispositif d'épargne salariale n'ayant pas la nature de salaire ou d'accessoire de celui-ci ;

- elle a reçu au total de la CPAM la somme de 55 881,41 euros nets au titre des 577 jours d'IJSS majorées et des 27 jours d'IJSS normales (pour maladie) qui a été intégralement reversée à M. [E] à hauteur de 54 763,07 euros nets, y compris par le biais de 03 remboursements complémentaires d'un total de 5 250,11 euros nets ;

- conformément aux dispositions du 3ème alinéa de l'article 28 de la convention interentreprise de 1979, il a donc été versé à M. [E] une indemnité équivalant à son salaire brut maintenu reconstitué d'un montant de 53 712,52 euros bruts soit, après déduction de la CG/CRIS, 50 113,78 euros nets, outre 2 118,08 euros nets de paniers non soumis et 5 250,11 euros nets au titre de 03 régularisations, soit la somme totale de 57 481,97 euros nets pour la période du 01 février 2021 au 30 septembre 2022 ;

- le salarié qui invoque un manquement de l'employeur à ses obligations doit prouver l'existence de la faute commise dans l'exécution du contrat de travail et qu'il allègue, et de son préjudice qui en résulte, faute de quoi sa demande doit être rejetée.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

- Sur la demande en rappel d'indemnités journalières de la sécurité sociale :

Aux termes de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, l'assurance maladie assure le versement d'indemnités journalières à l'assuré qui se trouve dans l'incapacité physique constatée par le médecin de continuer ou de reprendre le travail.

Par ailleurs, l'article L. 1226-1 du code du travail dispose que tout salarié ayant une année d'ancienneté dans l'entreprise bénéficie, sous certaines conditions, en cas d'absence au travail justifiée par l'incapacité résultant de maladie ou d'accident constaté par certificat médical et contre-visite s'il y a lieu, d'une indemnité complémentaire à l'allocation journalière prévue à l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale.

Il ressort de la lettre même de ce texte que ces deux dispositifs d'indemnisation - indemnités journalières et indemnité complémentaire - ne se cumulent pas mais se complètent. En outre, le régime de l'indemnité complémentaire applicable est celui prévu soit par le code du travail, soit par la convention collective s'il est plus favorable au salarié : là encore, ils ne peuvent se cumuler.

La société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE applique deux conventions : la convention collective des sociétés d'économie mixte d'autoroutes du 01 juin 1979 et la convention collective nationale des sociétés concessionnaires ou exploitantes d'autoroutes ou d'ouvrages routiers du 27 juin 2006.

Pour ce qui concerne le régime indemnitaire applicable en cas d'accident du travail, la convention collective du 01 juin 1979 prévoit, au troisième alinéa de son article 28, que : 'L'agent victime d'un tel accident ou d'une maladie est, de droit, placé en congé de maladie pendant la durée de l'incapacité temporaire. Il reçoit de la société une indemnité égale à la différence entre le montant de son traitement (salaire et éléments accessoires) et les sommes qu'il aura perçues au titre du régime général de la sécurité sociale'.

Dans le même cas, la convention collective du 27 juin 2006 dispose en son article 58 :

'c) Dispositions particulières aux accidents du travail et maladies professionnelles

En cas d'incapacité de travail temporaire générée par un accident du travail ou une maladie professionnelle reconnus en tant que tels par la sécurité sociale, les dispositions exposées ci-dessous se substituent à celles énoncées au b ci-dessus :

- les salariés bénéficient d'une indemnisation égale :

- à 100 % du salaire net de base pendant 90 jours ;

- à 85 % du salaire net de base du 91e au 180e jour.

- cette indemnisation commence à courir à compter du premier jour d'absence consécutif à un accident de travail ou une maladie professionnelle et ce, sans condition d'ancienneté.

d) Périodes successives d'incapacité de travail

Pour le calcul des indemnités dues au titre d'une période de paie, il est tenu compte des indemnités déjà perçues par le salarié au cours des 12 derniers mois antérieurs, de telle sorte que, si des périodes successives d'incapacité de travail ont été indemnisées au cours des 12 derniers mois, la durée totale d'indemnisation ne dépassera pas celle applicable en vertu des paragraphes b ou c.

En outre, en cas d'incapacité de travail de longue durée, le salarié ne pourra être à nouveau indemnisé, en application des dispositions ci-dessus, qu'après une reprise effective du travail'.

Il apparaît dès lors que la convention collective des sociétés d'économie mixte d'autoroutes du 01 juin 1979, qui ne prévoit aucune dégressivité ni aucune limite dans le temps de l'indemnité complémentaire à la charge de l'employeur, est plus favorable au salarié.

C'est donc à bon droit que la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE a retenu les dispositions de cette convention collective dans la présente espèce.

Aux termes des dispositions de l'article R. 323-11 du code de la sécurité sociale, 'La caisse primaire de l'assurance maladie n'est pas fondée à suspendre le service de l'indemnité journalière lorsque l'employeur maintient à l'assuré, en cas de maladie, tout ou partie de son salaire ou des avantages en nature, soit en vertu d'un contrat individuel ou collectif de travail, soit en vertu des usages, soit de sa propre initiative.

Toutefois, lorsque le salaire est maintenu en totalité, l'employeur est subrogé de plein droit à l'assuré, quelles que soient les clauses du contrat, dans les droits de celui-ci aux indemnités journalières qui lui sont dues.

Lorsque, en vertu d'un contrat individuel ou collectif de travail, le salaire est maintenu en totalité ou en partie sous déduction des indemnités journalières, l'employeur qui paie tout ou partie du salaire pendant la période de maladie sans opérer cette déduction est subrogé de plein droit à l'assuré dans ses droits aux indemnités journalières pour la période considérée, à condition que le salaire maintenu au cours de cette période soit au moins égal au montant des indemnités dues pour la même période.

Dans les autres cas, l'employeur est seulement fondé à poursuivre auprès de l'assuré le recouvrement de la somme correspondant aux indemnités journalières, dans la limite du salaire maintenu pendant la même période.

L'employeur et l'assuré qui se sont mis d'accord pour le maintien d'avantages en nature en cas de maladie, peuvent en informer la caisse et demander le versement par elle à l'employeur de la partie de l'indemnité journalière correspondant à la valeur des avantages maintenus'.

La subrogation est ainsi le mécanisme qui permet à l'employeur de percevoir de la sécurité sociale les indemnités journalières (IJSS) de l'employé, en contrepartie de quoi il s'engage à compléter les revenus de ce dernier avec un complément de salaire, qui sera versé au salarié le temps de son arrêt de travail.

Aux termes des dispositions des alinéas 1 et 2 de l'article L. 433-1 du code de la sécurité sociale, 'La journée de travail au cours de laquelle l'accident s'est produit, quel que soit le mode de paiement du salaire, est intégralement à la charge de l'employeur.

Une indemnité journalière est payée à la victime par la caisse primaire, à partir du premier jour qui suit l'arrêt du travail consécutif à l'accident sans distinction entre les jours ouvrables et les dimanches et jours fériés, pendant toute la période d'incapacité de travail qui précède soit la guérison complète, soit la consolidation de la blessure ou le décès ainsi que dans le cas de rechute ou d'aggravation prévu à l'article L. 443-2".

Le salaire servant de base au calcul des indemnités journalières est le salaire brut perçu le mois précédant le début de l'arrêt maladie.

Au cas d'espèce, il ressort des pièces versées aux débats que M. [B] [E] a été en arrêt du 01 février 2021 au 31 août 2022 au titre d'un accident de travail puis du 01 au 30 septembre 2022 au titre d'une maladie.

Pour le mois de janvier 2021, le salaire brut de M. [E] était de 3 917,42 euros.

Ce salaire brut comprenait, outre le salaire de base, et conformément au bulletin de salaire produit :

' l'indemnité compensatrice trajet,

' l'indemnité compensatrice P3,

' les heures de disponibilité 20 %,

' les heures fériées 50 % récupérées,

' les heures de péages 125 %,

' la majoration des heures de nuit 35 %,

' la majoration dimanche jour 50 %,

' la majoration dimanche nuit 90 %,

' la prime de péage individuelle,

' la prime de péage collectivité,

' le panier part soumise jour posté et nuit posté,

' l'avantage en nature smartphone,

' la prime d'éloignement B4,

' la prime 13ème mois,

' les absences et indemnités congé fractionné,

' les absences et indemnités activité partielle,

' les abattements et indemnités congés payés,

' la garantie du net IJSS,

' les maintiens d'accessoire accident du travail.

Sur ce salaire brut, la caisse de sécurité sociale a, après rectification, calculé l'indemnité journalière majorée due à la somme de 101,73 euros bruts et a versé à ce titre la somme totale de 54 763,07 euros nets au titre de l'accident du travail et celle de 1 118,34 euros nets au titre de la maladie après déduction des jours de carence selon les justificatifs produits.

C'est donc la somme totale de 55 881,41 euros nets que la caisse de sécurité sociale a versée entre le 01 février 2021 et le 30 septembre 2022, après déduction de la CSG (6,20 %) et de la CRDS (0,50 %).

Toutefois, les bordereaux de détail des prestations servies à M. [E] par la caisse de sécurité sociale faisant en effet apparaître les déductions opérées au titre de la CSG et de la CRDS, c'est donc à tort que la société ASF a à nouveau procédé à cette retenue.

C'est donc bien la somme totale de 55 881,41 euros nets qui est due à M. [B] [E] par la société ASF au titre des indemnités journalières par le jeu de la subrogation.

Or, dans ses écritures, la société ASF indique (page 19) : 'En foi de quoi, la Caisse a versé, sur la base de 577 jours d'IJSS majorées et de 27 jours d'IJSS normales, à la société la somme de 55 881,41 euros nets. [...]

Au contraire de ce que M. [E] voudrait faire croire, il a bien été reversé à ce dernier la totalité des sommes versées par la Caisse à hauteur de 54 763,07 euros nets au titre de la période courant du 01 février 2021 au 30 septembre 2022, y compris par le biais de trois remboursements complémentaires d'un total de 5 250,11 euros nets [...]'.

Il est donc constant que la société ASF n'a pas reversé la totalité des indemnités journalières qu'elle a reçues de la Caisse par le jeu de la subrogation : elle a retenu par-devers elle la somme de 55 881,41 - 54 763,07 = 1 118,34 euros nets.   

     

- Sur le maintien des autres éléments de salaire :

Au salaire brut s'ajoutait d'autres éléments de paie :

' le panier nuit posté et jour non soumis,

' la participation,

' l'intéressement,

' la prime inflation.

Il y a lieu de constater la convergence de vue des parties sur les sommes dues par l'employeur au titre de ces différents postes, soit :

' paniers non soumis à charges, d'avril 2021 à septembre 2022 : 1 903,60 euros nets,

' prime de participation et d'intéressement versée en avril 2021 : 5 709,05 euros nets,

' prime de participation et d'intéressement versée en avril 2022 : 5 360,13 euros nets,

' prime inflation : 100 euros nets,

soit une somme totale de 13 072,78 euros nets.

Au total, pour la période comprise entre le 001 avril 2021 et le 30 septembre 2022, la société ASF était donc redevable envers M. [B] [E] de la somme totale de 55 881,41 + 13 072,78 = 68 954,19 euros nets.

Sur cette période, l'employeur a versé la somme totale de 57 481,97 euros nets.

Il y a donc lieu d'infirmer la décision critiquée de ce chef et, statuant à nouveau, de condamner la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE à payer à M. [B] [E] la somme de 68 954,19 - 57 481,97 = 11 472,22 euros nets.

En conséquence, il y a lieu d'ordonner à la société ASF de remettre à M. [B] [E] un bulletin de salaire conforme à la présente décision.

Afin de garantir l'exécution de cette décision, il convient de dire que la remise du bulletin de salaire rectificatif s'effectuera sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du quinzième jour suivant sa signification.

- Sur la demande en dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :

Aux termes de l'article L. 1222-1 du code du travail, 'Le contrat de travail est exécuté de bonne foi'.

M. [B] [E] sollicite de ce chef l'allocation de la somme de 3 000 euros au motif qu'il a été privé, par l'employeur, d'une partie substantielle de son revenu alors qu'il était en arrêt de travail en raison, pour l'essentiel de la période, d'un événement qualifié d'accident du travail.

La demande étant recevable et fondée, la décision attaquée sera infirmée de ce chef.

Eu égard à la réalité du préjudice allégué au regard de la rémunération habituelle du salarié et de la longueur de la période considérée, statuant à nouveau, il convient de condamner la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE à payer à M. [E] la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice.

En application des dispositions des articles 1231-6 et 1343-2 du code civil, les sommes d'argent au paiement des desquelles la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE est condamnée porteront intérêts au taux légal à compter du 13 juin 2022, date du dépôt de la requête devant le conseil de prud'hommes et les dits intérêts, dus au moins pour une année, porteront eux-mêmes intérêts.

- Sur les demandes accessoires :

La société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE n'obtient pas gain de cause en appel, ce qui justifie de mettre à sa charge les dépens de cette instance en application de l'article 696 du code de procédure civile.

M. [B] [E] a été contraint de défendre ses justes droits en cause d'appel et il est équitable, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de faire droit à sa demande en condamnant la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE à lui verser une indemnité de 2 500 euros.

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PAR CES MOTIFS

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La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, rendu par mise à disposition et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

REÇOIT l'appel de M. [B] [E] ;

INFIRME le jugement rendu le 22 mai 2023 par le conseil de prud'hommes de Brive-la-Gaillarde en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

CONDAMNE la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE à payer à M. [B] [E] la somme de 11 472,22 euros (onze mille quatre cent soixante douze euros et vingt deux centimes) nets au titre des sommes dues au titre de son maintien de salaire au cours de son arrêt de travail ;

ORDONNE à la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE de remettre à M. [B] [E] un bulletin de salaire conforme à la présente décision sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de la présente décision ;

Dit qu'il appartiendra à la partie la plus diligente de faire signifier le présent arrêt en vue de son exécution ;

CONDAMNE la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE à payer à M. [B] [E] la somme de 2.500 (deux mille cinq cents) euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice ;

DIT les sommes d'argent au paiement des desquelles la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE est condamnée porteront intérêts au taux légal à compter du 13 juin 2022, date du dépôt de la requête devant le conseil de prud'hommes ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts ;

Y ajoutant :

CONDAMNE la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE aux entiers dépens d'appel ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE à payer à la M. [B] [E] la somme de 2 500 (deux mille cinq cents) euros au titre des frais irrépétibles.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/00408
Date de la décision : 11/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-11;23.00408 ?
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