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11/04/2024 | FRANCE | N°23/00218

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre sociale, 11 avril 2024, 23/00218


ARRET N° .



N° RG 23/00218 - N° Portalis DBV6-V-B7H-BINUZ







AFFAIRE :



M. [J] [B]



C/



M. [T] [S]









VC/MS





Cautionnement - Demande en paiement formée contre la caution seule













Grosse délivrée à Me Elsa LOUSTAUD, le 11-04-2024.









COUR D'APPEL DE LIMOGES



CHAMBRE ECONOMIQUE ET SOCIALE



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ARRÊT DU 11 AVRI

L 2024



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Le onze Avril deux mille vingt quatre la Chambre économique et sociale de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :



ENTRE :



Monsieur [J] [B], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me ...

ARRET N° .

N° RG 23/00218 - N° Portalis DBV6-V-B7H-BINUZ

AFFAIRE :

M. [J] [B]

C/

M. [T] [S]

VC/MS

Cautionnement - Demande en paiement formée contre la caution seule

Grosse délivrée à Me Elsa LOUSTAUD, le 11-04-2024.

COUR D'APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE ECONOMIQUE ET SOCIALE

---==oOo==---

ARRÊT DU 11 AVRIL 2024

---==oOo==---

Le onze Avril deux mille vingt quatre la Chambre économique et sociale de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :

ENTRE :

Monsieur [J] [B], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Elsa LOUSTAUD, avocat au barreau de LIMOGES

APPELANT d'une décision rendue le 20 FEVRIER 2023 par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE LIMOGES

ET :

Monsieur [T] [S], demeurant [Adresse 2]

défaillant, régulièrement assigné

INTIME

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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 26 Février 2024. L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 janvier 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, Madame Valérie CHAUMOND, Conseiller, magistrat rapporteur, assisté de Mme Sophie MAILLANT, Greffier, a tenu seule l'audience au cours de laquelle elle a été entendu en son rapport oral.

Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure.

Après quoi, Madame Valérie CHAUMOND, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 11 Avril 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

Au cours de ce délibéré, Madame Valérie CHAUMOND, Conseiller, a rendu compte à la Cour, composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Madame Johanne PERRIER, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, et d'elle même. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.

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LA COUR

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FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES :

Le 16 septembre 2008, M. [J] [B] a créé l'EURL PASCAL (enseigne le MÉTROPOLITAIN) pour exercer une activité de pizzeria, dont le siège social était situé [Adresse 3].

L'effectif salarial de la société était uniquement composé de M. [T] [S], affecté au poste de chauffeur livreur depuis 2013.

Le 21 mars 2017, la société BFC, moyennant un prêt consenti par la Banque Populaire à hauteur de 107 500 euros, a procédé au rachat du fonds de commerce pizzeria dont la société PASCAL était propriétaire, afin de poursuivre l'activité de pizzeria et de restauration rapide.

Monsieur [J] [B] et Mme [W] [R] étaient cautions solidaires de cet emprunt chacun pour la somme de 13 437,50 euros.

L'effectif de la société BFC était composé de M. [J] [B], qui assurait la confection des pizzas, et de M. [T] [S] qui les livrait.

L'activité étant florissante, M. [B] a entrepris de développer un nouveau concept de franchise au niveau national et de vendre désormais des pizzas dans des kiosques et non plus dans un fonds de commerce.

Il a alors été convenu d'une cession de l'intégralité des actions de M. [B] et de Mme [R] à M. [S].

La transmission de la société s'est toutefois effectuée par étapes et il a été décidé, dans un premier temps, de désigner M. [S] en qualité de président de la société selon procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 29 juin 2018, étant précisé qu'il était alors le seul des trois associés à y travailler encore.

Par acte du même jour, deux conventions de cession des actions de la société BFC ont été régularisées : l'une des conditions nécessaires à la régularisation de l'acte de cession était d'obtenir de la Banque Populaire la mainlevée du cautionnement donné par M. [B] et Mme [R] pour le prêt consenti à la société BFC.

Les dites conventions, rédigées par un avocat, comportaient des annexes dont, notamment, une attestation de l'expert-comptable concernant les comptes de l'exercice 2017 et le bilan détaillé dudit exercice, signées par les parties avec la mention 'pris connaissance et compris des 12 pages'.

L'article 4 de la convention prévoyait toutefois que, à défaut de réalisation d'une des conditions suspensives, celle-ci deviendrait caduque : or, la mainlevée des cautionnements n'a pas été obtenue.

La société BFC ayant rencontré des difficultés économiques au cours de l'année 2018, M. [S] a décidé seul de régulariser une déclaration de cessation des paiements et de saisir le tribunal de commerce.

Par jugement du 27 mars 2019, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte au profit de la société BFC.

C'est dans ce contexte que, le 14 mai 2019, M. [S], M. [B] et Mme [R] ont régularisé un nouvel acte de cession des titres de la société BFC par l'intermédiaire et en présence de Maître CHASTAGNIER, avocat en droit des affaires et rédacteur de l'acte.

M. [S] n'ayant aucun apport personnel et ayant essuyé un refus de prêt des banques, il a été décidé de lui céder les actions de la société BFC à l'euro symbolique en contrepartie de la reprise des échéances de l'emprunt en cours et de la reprise à son compte des engagements de caution en cas de faillite de la société.

Par jugement du 25 septembre 2019, la procédure de redressement judiciaire a été convertie en liquidation judiciaire.

La Banque Populaire a constaté la déchéance du terme du prêt consenti et a actionné les cautions en paiement.

Par jugement du 12 avril 2021, confirmé en toutes ses dispositions par arrêt du 26 septembre 2022, le tribunal de commerce de Limoges a condamné M. [B] au paiement de la somme de 13 437,50 euros au titre de son engagement de caution, outre intérêts au taux conventionnel de 1,90 % à compter du 30 septembre 2019.

M. [B], échouant à recouvrer aimablement cette somme auprès de M. [T] [S] en exécution de l'acte de cession régularisé le 14 mai 2019, il a alors régularisé une injonction de payer à son encontre, à laquelle ce dernier a fait opposition.

Le tribunal de commerce de Limoges a, par jugement du 20 février 2023 :

- reçu M. [T] [S] en son opposition et l'a déclaré bien fondé ;

En conséquence,

- rejeté l'intégralité des demandes de M. [J] [B] ;

- reçu M. [T] [S] dans son action reconventionnelle ;

Ainsi,

- annulé le contrat de cession d'actions intervenu le 14 mai 2019 entre M. [T] [S] d'une part et Mme [X] [R] et M. [J] [B] d'autre part ;

- condamné M. [J] [B] à payer à M. [T] [S] :

' la somme de 4 675,32 euros à titre de perte de salaire,

' la somme de 450 euros à titre de coût du crédit,

' la somme de 1 000 euros à titre de préjudice moral ;

- condamné M. [J] [B] à une indemnité de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, y compris ceux liés à l'injonction de payer.

Par déclaration en date du 10 mars 2023, M. [J] [B] a interjeté appel de la décision rendue par le tribunal de commerce de Limoges.

Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 13 avril 2023, M. [J] [B] demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu en première instance en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

- juger que le contrat de cession d'actions conclu entre M. [T] [S] et lui-même est valable et n'est entaché d'aucun vice du consentement ;

- juger que M. [T] [S] est engagé contractuellement à son égard au titre de l'article 9 du contrat de cession conclu le 14 mai 2019 ;

Et par conséquent :

- déclarer recevable l'injonction de payer qu'il a formulée à l'encontre de M. [T] [S] ;

- condamner M. [T] [S] au paiement de la somme de 13 437,50 euros au titre de son engagement contractuel relatif à l'actionnement de la caution ;

- débouter M. [T] [S] de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles ;

- condamner M. [T] [S] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Il soutient que :

- l'acte de cession du 14 mai 2019 étant valable, M. [S] est devenu propriétaire de l'intégralité des parts de la société BFC ;

- conformément aux termes de l'article 9 de cet acte, il s'est engagé à rembourser toutes les sommes que les cédants pourraient être amenés à verser au titre de leur engagement de caution et ne peut prétendre ne pas avoir été informé des conséquences de son engagement ;

- M. [S] ne pouvait ignorer les difficultés rencontrées par la société puisqu'il a régularisé une déclaration de cessation des paiements avant la signature de l'acte de cession des actions ;

- le cabinet comptable avait également réalisé un prévisionnel d'activité sur 03 ans afin de permettre à M. [S] de se projeter dans sa future activité ;

- les vices du consentement allégués ne sont pas établis ;

- il n'est pas non plus établi que, quand bien même il aurait ignoré la situation financière de la société, M. [S] aurait renoncé à en acquérir les actions ;

- M. [S] ne saurait solliciter l'allocation de dommages et intérêts fondés sur la perte de salaire dans la mesure où aucun préjudice n'a été subi et qu'il connaissait parfaitement la situation de la société.

M. [T] [S] n'a pas constitué avocat et n'a pas conclu.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

- Sur la validité du contrat de cession d'actions :

Aux termes de l'article 1101 du code civil, 'Le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations'.

L'article 1102 du même code poursuit : 'Chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi.

La liberté contractuelle ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l'ordre public'.

Puis l'article 1103 : 'Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits'.

Et enfin l'article 1104 : 'Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Cette disposition est d'ordre public'.

Au cas d'espèce, par convention en date du 14 mai 2019, M. [J] [B] et Mme [W] [R] ont cédé à M. [T] [S], respectivement 120 et 15 actions de la société BFC.

Cette cession d'actions au prix total de deux euros, était cependant assortie d'une autre contrepartie due par M. [T] [S] aux cédants, ainsi formulée à l'article 9 de la convention de cession : 'Les cédants déclarent avoir consenti un engagement de caution en garantie du remboursement par la SAS BFC d'un prêt auprès de la [Adresse 4].

Le cessionnaire s'engage, toutefois, à rembourser toutes sommes que les cédants pourraient être amenés à verser au titre de leur engagement de caution et en conséquence à relever les cédants indemnes de toutes sommes qu'ils pourraient être amenés à verser à ce titre.

Les cédants déclarent avoir été pleinement informés par le rédacteur des présentes de la portée de cet engagement et notamment qu'ils restent tenus envers la banque créancière de leur obligation de caution du fait qu'ils conservent leur risque de paiement de la banque sus-visée'.

Si M. [S] a pu soutenir, en première instance, que cette clause manquerait de clarté, il ne le soutient pas en cause d'appel ; en outre, les termes en paraissent au contraire parfaitement clair, et ce même si le montant de la caution n'est pas explicitement mentionné.

Or, il n'est pas contesté que, par jugement du 25 septembre 2019, la procédure de redressement judiciaire dont la société BFC a fait l'objet par jugement du 27 mars 2019 a été convertie en liquidation judiciaire.

La Banque Populaire a, dès lors, constaté la déchéance du prêt qu'elle avait consenti à la société BFC et actionné les cautions solidaires en paiement de la somme de 13 437,50 euros, somme au paiement de laquelle ces dernières ont été condamnées par jugement du tribunal de commerce de Limoges confirmé par arrêt de cette cour d'appel en date du 26 septembre 2022.

En conséquence de la clause contractuelle figurant à l'article 9 de la convention de cession du 14 mai 2019, M. [T] [S] est donc tenu à l'exécution de son obligation résultant du second alinéa de cette clause.

Si ce dernier a pu soutenir en première instance, au visa de l'article 1130 du code civil, que son consentement a été vicié, il est constant que la charge de la preuve lui en incombe. À raison de sa carence en cause d'appel, M. [S] échoue à rapporter la preuve de cette circonstance.

Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé dans toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il a annulé le contrat de cession d'actions en date du 14 mai 2019.

- Sur les conséquences financières :

Eu égard à la validité de la convention de cession d'actions du 14 mai 2019, notamment prise en son article 9, M. [T] [S] est tenu de relever indemnes M. [J] [B] et Mme [W] [R] de la condamnation prononcée à leur encontre par la cour d'appel de Limoges par arrêt du 26 septembre 2022, en leur qualité de caution d'un prêt contracté auprès de la [Adresse 4].

La décision entreprise sera donc également infirmée de ce chef et M. [T] [S] condamné à verser à M. [J] [B] la somme de 13 437,50 euros.

- Sur les demandes accessoires :

M. [T] [S] n'obtient pas gain de cause en appel, ce qui justifie de mettre à sa charge les dépens de cette instance en application de l'article 696 du code de procédure civile.

M. [J] [B] a été contraint de défendre ses justes droits en cause d'appel et il est équitable, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de faire droit à sa demande en condamnant M. [T] [S] à lui verser une indemnité de 1 500 euros.

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PAR CES MOTIFS

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La Cour statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut, en dernier ressort, rendu par mise à disposition et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

REÇOIT l'appel de M. [J] [B] ;

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Limoges le 20 février 2023 en ce qu'il a annulé le contrat de cession d'actions en date du 14 mai 2019 ;

Statuant à nouveau :

DIT que M. [T] [S] est tenu à l'exécution de son obligation résultant de la clause contractuelle figurant à l'article 9 de la convention de cession du 14 mai 2019 ;

CONDAMNE M. [T] [S] à payer à M. [J] [B] sa somme de 13 437,50 euros (treize mille quatre cent trente sept euros et cinquante centimes) ;

Y ajoutant :

CONDAMNE M. [T] [S] aux entiers dépens d'appel ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [T] [S] à payer à M. [J] [B] la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre des frais irrépétibles.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/00218
Date de la décision : 11/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-11;23.00218 ?
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