ARRET N° .
N° RG 22/00833 - N° Portalis DBV6-V-B7G-BIMP3
AFFAIRE :
Société UNION POURLE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECU RITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES D AUVERGN
C/
M. [S] [B]
PLP/MS
Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution
Grosse délivrée à M. [R] [U], Me Antoine PORTAL, le 29 juin 2023.
COUR D'APPEL DE LIMOGES
Chambre sociale
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ARRET DU 29 JUIN 2023
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Le VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS la chambre économique et sociale a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe:
ENTRE :
Société UNION POURLE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES D AUVERGN, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Antoine PORTAL de la SARL TRUNO & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND substituée par Me Anaïs LADOUL, avocat au barreau de CUSSET/VICHY
APPELANTE d'une décision rendue le 18 juin 2021 par le Conseil des prud'hommes de Clermont-Ferrand.
Par ordonnance de renvoi et de dessaisissement rendue le 18 octobre 2022 en application de l'article 47 du code de procédure civile, la cour d'appel de Riom a ordonné le dépaysement de la présente affaire et son renvoi devant la cour d'appel de Limoges.
ET :
Monsieur [S] [B] né en à , demeurant [Adresse 1]
représenté par M. [R] [U] (Délégué syndical ouvrier)
INTIME
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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 15 Mai 2023. L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 avril 2023.
La Cour étant composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Monsieur Jean-Pierre COLOMER et de Madame Géraldine VOISIN, Conseillers, assistés de Mme Sophie MAILLANT, Greffier. A cette audience, Monsieur Pierre-Louis PUGNET, a été entendu en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 29 Juin 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
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LA COUR
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EXPOSE DU LITIGE :
M. [B] a été engagé par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) du Puy de Dôme à compter du 18 septembre 1984 dans le cadre de plusieurs contrats à durée indéterminée en qualité d'auxiliaire temporaire, niveau 2, coefficient 110.
Il a par la suite obtenu plusieurs promotions et a changé d'affectation, travaillant à l'URSSAF du Cantal en tant que technicien gestionnaire de comptes à partir du 1er janvier 2002.
Parallèlement, M. [B] a été élu délégué du personnel puis désigné délégué syndical le 1er janvier 2003.
A compter du 24 septembre 2007, M. [B] a été embauché dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.
Les relations entre l'URSSAF et ses salariés sont soumises à la convention collective nationale des employés de la sécurité sociale. L'article 23 de ladite convention précise que « les agents techniques perçoivent dans les conditions fixées par le règlement intérieur type, une indemnité de guichet équivalent à 4 % de leur coefficient de qualification sans points d'expérience, ni points de compétence ».
Le règlement intérieur type précise : « une indemnité spéciale de guichet est attribuée en application de l'article 23 de la convention collective, aux agents dont la fonction nécessite un contact permanent avec le public et qui occupent un emploi ayant pour objet le règlement complet d'un dossier de prestations soit : décompteurs, liquidateurs AVTS, liquidateurs d'une législation de sécurité sociale, liquidateurs de pensions et rentes AT, employés à la constitution des dossiers AF, liquidateurs maladie, maternité, décès et incapacité temporaire AT, contrôleurs des liquidations de décomptes. Cette indemnité est également due aux vérificateurs techniques et contrôleurs de comptes employeurs en contact avec le public ».
M. [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand le 21 décembre 2015 aux fins d'obtenir la reconnaissance d'une discrimination en raison de son activité syndicale à son égard ainsi que la condamnation de l'URSSAF d'Auvergne au versement de diverses sommes, notamment le rappel de salaire relatif à la prime de guichet ainsi que des indemnités outre intérêts.
Par jugement mixte du 20 mars 2017, le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand a :
- dit et jugé recevables et en partie bien fondées les réclamations présentées par M. [B] ;
- condamné l'URSSAF d'Auvergne, prise en la personne de son représentant légal, à porter et payer à M. [B] les sommes de :
* 2 447,62 € au titre de la prime de guichet ;
* 244,76 € au titre des congés payés afférents ;
- dit que M. [B] étant toujours en fonction au sein de l'URSSAF d'Auvergne, celle-ci est condamnée à calculer le montant de cette indemnité due de janvier 2016 à la date du rendu du jugement et à le verser à M. [B] ;
- dit et jugé que les sommes sus-visées porteront intérêts au taux légal, avec capitalisation à compter de la demande pour les sommes à caractère de salaire et à compter de la présente décision pour les sommes à caractère d'indemnité ;
- pour le surplus des demandes et en application des articles L. 1454-2 et suivants et R. 1454-29 et suivants du code du travail, se déclare en partage de voix sur la question de la discrimination syndicale et renvoie l'affaire sur ce sujet à une audience tenue sous la présidence du juge départiteur qui sera fixée le 7 juillet 2017 à 9 heures.
L'URSSAF d'Auvergne a régulièrement interjeté appel de cette décision le 13 avril 2017, son recours portant sur l'ensemble des chefs de jugement.
Par un courrier en date du 23 janvier 2018, M. [B] a sollicité auprès du président de la cour d'appel de Riom le renvoi de l'affaire devant la cour d'appel de Limoges en application de l'article 47 du code de procédure civile.
Par un arrêt en date du 18 décembre 2018, la cour d'appel de Riom a renvoyé l'examen de l'affaire opposant l'URSSAF d'Auvergne à M. [B] devant la cour d'appel de Limoges.
Une ordonnance d'irrecevabilité de conclusions du 3 avril 2018 a été rendue à l'égard de M. [B], celles-ci ayant été déposées hors du délai de deux mois imparti par l'article 909 du code de procédure civile.
Par un arrêt rendu le 9 novembre 2020, la chambre économique et sociale de la Cour d'appel
de Limoges a déclaré irrecevables les conclusions et pièces de M. [B] et réformé intégralement le jugement du conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand du 20 mars 2017.
Par la suite, M. [B] a sollicité la réinscription de l'affaire devant le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand, afin qu'il soit statué sur sa demande indemnitaire pour discrimination syndicale.
Par jugement de départage du 18 juin 2021, le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand a :
- dit que le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand, en sa formation de départage, est bien compétent pour connaître du présent litige en application des dispositions de l'article 47 du code de procédure civile ;
- condamné l'URSSAF d'AUVERGNE à payer à M. [B] la somme de 6 000 € de dommages-intérêts au titre de son préjudice moral pour discrimination syndicale ;
- condamné l'URSSAF d'AUVERGNE à payer à M. [B] la somme de 1 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
L'URSSAF d'AUVERGNE a interjeté appel de la décision suivant déclaration d'appel du 25 mai 2021.
Par ordonnance de renvoi et de dessaisissement rendue le 18 octobre 2022 en application de l'article 47 du code de procédure civile, la cour d'appel de Riom a ordonné le dépaysement de la présente affaire et son renvoi devant la cour d'appel de Limoges.
L'affaire a été enrôlée sous le numéro RG 22/00833.
Aux termes de ses écritures du 30 mars 2023, l'URSSAF d'Auvergne demande à la Cour :
- d'infirmer le jugement dont appel ;
Statuant à nouveau, de :
- débouter M. [B] de sa demande de reconnaissance d'une discrimination syndicale, de celle indemnitaire pour discrimination syndicale, à laquelle il a, a priori, renoncé, de celle pour préjudice moral, et de celle au titre d'un préjudice financier ;
En toute hypothèse, de :
- débouter M. [B] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions et de son appel incident ;
- condamner M. [B] au paiement d'une somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.
Elle soutient que :
- M. [B] n'a fait l'objet d'aucune discrimination syndicale, celui-ci ayant au contraire dénaturé les documents qu'il verse aux débats afin de présenter une version trompeuse de la relation de travail. Elle fait valoir que la mention de ses activités syndicales dans ses évaluations afin de préciser le temps de travail ne peut être retenue comme étant une surveillance et par conséquent une discrimination syndicale. Elle rappelle que le juge ne peut analyser les éléments présentés séparément mais doit les analyser dans leur globalité, ce qu'il n'a pas fait en l'espèce ;
- aucun retard d'avancement n'a eu lieu et ne peut en tout état de cause être démontré au travers des pièces versées au débats ;
- les demandes indemnitaires formées au titre d'un prétendu préjudice moral et d'un préjudice financier doivent nécessairement être rejetées, les quantum devant en tout état de cause être réduits.
Aux termes de ses écritures reçue au greffe le 6 mars 2023, M. [B] demande à cour de :
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il limite les conséquences de la discrimination syndicale constatée au préjudice moral estimé uniquement au regard de deux faits discriminants ;
Statuant à nouveau, de :
- juger que M. [B] rapporte des éléments probants laissant supposer une discrimination en lien avec ses mandats syndicaux depuis son entrée au service de l'URSSAF du Puy-de-Dôme ; que cette discrimination s'est poursuivie et perdure dans l'URSSAF D'AUVERGNE ; qu'elle cause un important préjudice financier et moral à la victime, notamment pour la perte d'une chance découlant de l'opposition affirmée de l'employeur à toute progression de carrière ;
Par suite, de :
- condamner l'URSSAF D'AUVERGNE à lui payer et porter :
* 172 215,52 € de dommages-intérêts pour préjudice financier ;
* 20 000 € de dommages-intérêts pour préjudice moral ;
* 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouter l'URSSAF D'AUVERGNE de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- lui laisser les entiers dépens.
Il soutient que :
- in limine litis, sur la modification du quantum de la demande, la limitation initiale n'a été faite que dans le soucis d'une démarche amiable, le fondant donc à modifier les sommes sollicitées afin d'obtenir réparation de l'entier préjudice résultant de la discrimination ;
- il a été victime de discrimination à compter du mois de mai 2005, postérieurement à son arrivée à l'URSSAF du Cantal. Sur ce point, il rappelle qu'en application de l'article L. 1134-1 du code du travail, le salarié présente des éléments laissant supposer l'existence d'une discrimination et qu'il appartient à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs. En cas d'insuffisance des preuves rapportées par l'employeur, la présomption pèse en faveur du salarié, ce qui aurait dû être le cas en l'espèce. Ainsi, M. [B] fait état d'une surveillance à son insu, de mentions interdites - relatives à ses activités syndicales - sur ses fiches d'évaluation professionnelle, du refus injustifié d'une promotion professionnelle lui revenant de plein droit et de retards d'avancement.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 avril 2023.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.
MOTIFS DE LA DECISION
Selon l'article L. 1132-1 du code du travail :
« Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français ».
La discrimination syndicale est également prohibée en application de l'article L.2141-5
du code du travail dont le premier alinéa est ainsi rédigé ' Il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.'
S'agissant de la charge de la preuve de faits discriminatoires, aux termes de l'article L 1134-1 du code du travail, il appartient à la personne qui s'estime victime d'une discrimination, de soumettre au juge les éléments de fait laissant supposer son existence, et il incombe ensuite à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
1- Sur la surveillance de M. [B] à son insu
Pour étayer ses affirmations M. [B] produit un état annoté de ses heures de délégation syndicales afférentes aux mois de mai et juin 2015, émanant du service de la gestion du personnel. Ce document aurait été découvert par l'un de ses collègues, en juin 2015, sur le miroir d'une photocopieuse où le responsable du service FOODS l'aurait oublié.
Il est indéniable qu'il ne s'agit pas d'un simple relevé d'horaires extrait du portail SIRH WORFLOO des absences, comme l'allègue l'employeur, dès lors que les mentions imprimées, émanant d'un logiciel comportant le listing des absences de M. [B], accompagnées des dates et horaires de début et de fin, sont parfois complétées par des mentions manuscrites relatives à ses horaires d'activités syndicales, d'arrivée, et comportent un décompte, ensemble d'éléments non portés à la connaissance de M. [B] alors qu'un salarié ne peut pas être contrôlé à son insu.
L'employeur n'est d'ailleurs pas en mesure de démontrer l'existence d'autres documents de cette nature concernant un autre salarié.
Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a considéré que ce document n'était pas simplement un relevé d'horaires mais un contrôle de l'activité du salarié effectué à son insu et qui n'existait pas pour les autres salariés. Il sera ajouté que ce contrôle s'exerçait en raison de ses activités syndicales comme le démontrent les mentions manuscrites. La discrimination de cette nature est donc avérée.
2- Sur les mentions apparaissant sur les fiches d'évaluation
M. [B] excipe de certaines mentions figurant sur ses évaluations professionnelles annuelles qui révéleraient la discrimination dont il a été victime. Les mention suivantes sont incriminées :
Sur l'évaluation professionnelle de 2015, « le temps de travail dans le service (dû à ses heures de mandat) est peu représentatif. De ce fait l'évaluation de la tenue de l'emploi est difficilement évaluable », Sur celle de 2016 : « du fait de ses divers mandats [S] participe peu à l'activité du service. Cette situation génère une perte de technicité », sur le compte rendu de l'entretien individuel de 2017 il est noté « [S] n'a pas suivi l'activité du service et les différentes
évolutions de l'ADSM en raison de ses mandats ».
Ces mentions établissent un lien de causalité entre l'évaluation négative ou dite impossible de son activité professionnelle et l'exercice par M. [B] de ses mandats syndicaux, ce qui est constitutif, ipso facto, d'une discrimination en raison de ses activités syndicales.
S'il n'est pas contesté l'ampleur de ses mandats qui représentaient 95 % de son temps de travail, cette situation était légale et c'est exclusivement en fonction du temps restant consacré à son activité professionnelle que devait se faire son évaluation, sans référence aucune à l'exercice de ses mandats.
Le jugement déféré mérite d'être confirmé en ce qu'il a retenu qu'il existait, compte tenu de ces mentions d'évaluation, une discrimination en raison des activités syndicales de M. [B].
3- Sur l'absence de promotion professionnelle
M. [B] reproche à son employeur d'avoir empêché son accession qu'il qualifie 'de plein droit' au grade d'inspecteur de recouvrement puis de l'avoir dissuadé à tout jamais d'y prétendre.
Il s'agissait d'un poste à pourvoir à [Localité 3], en 2008, où il fut candidat à la 43ème promotion de recrutement à ce grade, M. [B] soulignant qu'il ne s'agissait pas d'un concours. Il affirme avoir franchi toutes les épreuves de recrutement imposées par le Centre régional de formation, mais reproche au directeur d'avoir opposé son veto alors qu'il était le seul candidat. Il explique ce rejet par la rancoeur que lui vouait l'ancien directeur, M. [J], laquelle aurait été transmise à son successeur, M. [N], en même temps que son dossier syndical. Cette profonde animosité proviendrait de l'échec qu'il aurait fait subir à son employeur, par voie judiciaire, alors que ce dernier tentait d'instaurer unilatéralement un ordre de départs en congés qui était illégal.
La candidature qu'il va renouveler en 2009, sera rejetée par la même commission d'habilitation qui ne l'autorisera pas, à passer les tests, contrairement à l'année précédente, au motif que d'autres postulants correspondaient mieux aux qualités recherchées.
Il convient en premier lieu d'éviter toute confusion entre le recrutement de contrôleurs en 2007 et celui d'inspecteurs en 2008 et 2009.
Il sera rappelé que le seul fait du recrutement d'un autre salarié au poste auquel le salarié s'est porté candidat, ne peut suffire à laisser supposer l'existence d'une discrimination.
Le processus de recrutement d'inspecteur de recouvrement se déroule de la façon suivante :
- Aide à l'orientation professionnelle phase collective obligatoire et phase individuelle
facultative,
- Préparation facultative aux épreuves de recrutement écrites et orales déclinant trois
modules,
- Pré-sélection des dossiers des candidatures par la commission d'habilitation inter-régionale de formation composée de directeurs d'URSSAF dont les recruteurs, le RRH et le responsable du contrôle,
- Épreuve écrite organisée par un organisme indépendant de formation des organismes de la sécurité sociale (tests psychotechniques, épreuve rédactionnelle sous forme de questions ouvertes, QCM portant sur des thématiques d'actualités sociales, économiques ou institutionnelles),
- À partir des résultats de tests psychotechniques un jury national détermine le seuil
d'admissibilité des candidats autorisés à passer les épreuves orales de recrutement,
- Épreuve orale, entretiens collectifs organisés par un organisme indépendant de
formation des organismes de sécurité sociale et entretien individuel organisé par la
direction,
- Formation diplomate de 18 mois avec un organisme de formation des organismes de
sécurité sociale,
- Être agréé et assermenté.
Or les résultats définitifs des évaluations révèlent que M. [S] [B] a obtenu 80 points alors que la candidature de Mme [I] [P], qui fut retenue, a obtenu le score supérieur de 88 points.
Contrairement aux affirmations de M. [B] les entretiens collectifs organisés par un organisme indépendant de formation des organismes de sécurité sociale et l'entretien individuel organisé par la direction, sont de véritables épreuves. La réussite aux épreuves précédentes le rendait seulement admissible à cette épreuve orale, sans garantie d'admission.
Ces seuls éléments, qui sont objectifs, suffisent à démontrer que M. [K] n'a pas été victime de discrimination en raison de ses activités syndicales dans le cadre de ce recrutement. Peu importe le fait que Mme [P] se fut, dans un premier temps, portée candidate pour un emploi d'inspecteur à [Localité 4] avant qu'il ne fusse finalement pas créé. Il sera d'ailleurs relevé que la 'lettre collective n°2007-127" décrivant cette procédure de recrutement précisait que le recensement des postes était évolutif et susceptible de modifications (ajout ou retrait de postes) jusqu'à l'entrée en formation.
Il sera au surplus constaté que le directeur de M. [B] a donné son accord pour qu'il fasse acte de candidature alors qu'il pouvait s'y opposer, s'agissant d'une candidature interne laquelle nécessitait impérativement cet accord conformément à la procédure de recrutement versée au débat.
Pour ces motifs, substitués à ceux du conseil de prud'hommes qui faisait une confusion entre les résultats au recrutement des contrôleurs du recouvrement avec ceux relatifs au recrutement des inspecteurs du recouvrement, le jugement déféré sera confirmé.
S'agissant du renouvellement de sa candidature en 2009, elle s'est heurtée, au stade de la pré-sélection des dossiers, au refus de la commission d'habilitation qui n'a pas autorisé M. [B] à poursuivre la procédure en passant les tests, au motif qu'il existait d'autres postulants qui correspondaient mieux aux qualités recherchées.
Le seul motif de discrimination allégué par M. [B] est le fait d'avoir été sélectionné par cette commission l'année précédente, ce qui ne lui conférait toutefois pas un droit acquis à obtenir une décision favorable l'année suivante, compte tenu des nouvelles candidatures. Il était d'ailleurs expressément indiqué aux candidats, dans la 'lettre collective' précitée, que 'le candidat ayant accédé aux épreuves orales lors d'une précédente sélection n'est pas dispensé des épreuves écrites à l'occasion du renouvellement de sa candidature.'.
M. [B] ne bénéficiait pas d'une dérogation à la procédure officielle applicable à tous les candidats. Il ne démontre pas que le rejet de sa candidature par la commission d'habilitation résultait d'une discrimination à son encontre.
4- Sur les retards d'avancement allégués
M. [S] [B] reproche à l'URSSAF d'AUVERGNE de n'avoir pas respecté les dispositions de l'article L. 2141-5-1 du code du travail, ainsi que celles de l'accord sur l'exercice du droit syndical relatives au principe d'évolution salariale des salariés mandatés, obligeant l'union de recouvrement à comparer, chaque année, l'évolution de la rémunération annuelle du salarié mandaté et la moyenne de l'évolution de l'ensemble des personnels une fois l'ensemble des opérations collectives d'attribution terminée, la direction devant remettre à cette occasion à l'intéressé les éléments chiffrés de la comparaison, et ce quelle que soit l'évolution salariale constatée.
M. [B] affirme que ces textes n'ont pas reçu application pour les années 2009, 2010 et 2011 et qu'il lui a fallu attendre septembre 2015 pour voir la direction de L'URSSAF d'AUVERGNE lui attribuer 8 points de rattrapage pour les années 2012, 2013, 2014 et 2015, soit 2 points par année.
Il sera en premier lieu constaté que l'article L. 2141-5-1 du code du travail auquel se réfère M. [B] et qu'il produit, est l'article 6 qui été créé par la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 de sorte qu'il est mal venu à reprocher son absence d'application pour les années antérieures.
L'URSSAF d'AUVERNE et M. [B] produisent le protocole d'accord national sur l'exercice du droit syndical modifié par l'avenant du 30 septembre 2014, agréé le 19 décembre 2014, dont il n'est pas contesté qu'il était applicable, s'agissant des dispositions invoquées, lors des années concernées. L'article 14-1 sur le principe d'évolution salariale et son annexe, précisent qu'afin d'assurer l'effectivité du principe de non-discrimination, les salariés mandatés, dont le temps d'activité professionnelle est inférieur au tiers d'un temps plein, ce qui était le cas de M.[B], bénéficient d'une garantie d'évolution minimale de leur rémunération qui ne doit pas être inférieure à la moyenne des évolution de l'ensemble des autres membres du personnel de même emploi, ou, à défaut, de même niveau de qualification de l'organisme. La mise en oeuvre de la garantie d'évolution salariale peut prendre la forme de l'attribution de points de compétence, d'évolution salariale ou de contribution professionnelle, et/ou d'un montant de prime de résultat ou de part variable.
En application de ces dispositions il est versé au débat un document du 9 décembre 2015, relatif à l'évolution salariale des salariés mandatés, faisant apparaître qu'en appliquant le calcul de garantie d'évolution salariale M. [K] a bénéficié de 1,45 points arrondis à 2 points à payer à effet du 1er janvier 2013. Un autre document, de la même date, mais se référant à l'année 2013, mentionne qu'il a bénéficié de 1,59 points arrondis à 2 points à payer avec effet du 1er janvier 2014, et selon un autre document se référant à l'année 2014, il a bénéficié de 1,18 points arrondis à 2 points à payer à effet du 1er janvier 2015.
S'il est exact que le 9 décembre 2015 l'URSSAF d'AUVERGNE a procédé à une régularisation des points dûs à M. [B], ce seul élément ne permet pas d'en déduire l'existence d'une discrimination dont il aurait été victime, s'agissant d'une réglementation particulièrement complexe qui peut faire l'objet d'une erreur d'application de la part de l'employeur en toute bonne foi. A partir de 2016 c'est chaque année que M. [B] a bénéficié de 2 points de garantie salariale tous les ans.
L'URSSAF D'AUVERGNE verse au débat le parcours professionnel de M. [B] depuis 2005 qui démontre qu'il n'a pas été freiné dans sa progression de carrière, comme l'atteste le tableau comparatif des agents de l'URSSAF situés dans la même position que M. [S] [B]. En prenant comme référence l'effectif de l'URSSAF d'AUVERGNE, 6 salariés disposant d'un point de départ de l'ancienneté en 1984 il apparaît que M. [S] [B] est le gestionnaire référent disposant de la rémunération la plus élevée, y compris vis à vis de Mme 'B' qui était également affectée sur le site d'[Localité 3]. Par ailleurs il fait partie des 46 % des agents de sa catégorie qui ne sont pas cadres, ces derniers, pour le devenir, ayant dû satisfaire aux conditions liées à ces niveaux, ce qui n'est pas le cas de M. [B].
M. [B] s'estime victime d'une discrimination pour n'avoir pu accéder, en 2012, au 'parcours niveau3/niveau 4" alors qu'il disposait, selon lui, de la maîtrise des compétences requises depuis 2004.
Toutefois pour prétendre à ce niveau 4 le gestionnaire devait maîtriser :
- les compétences communes au métier de gestionnaire
la contribution à l'accroissement des compétences des gestionnaires niveau 3 par des actions de formations, monitorat, assistance,
la participation à des actions transversales internes à l'organisme (groupes de travail)
la collaboration à la démarche de maîtrise des risques (activité de contrôle, de supervision...)
-ainsi que celles qui sont associées aux activités qu'il exerce dans le cadre de son emploi
Si sa candidature n'a pas été retenue c'est parce qu'il ne remplissait pas les conditions en termes de déploiement des compétences. M. [B] ne partage pas cet avis en invoquant son ancienneté laquelle n'était cependant qu'un critère pour être admis à présenter sa candidature non pour justifier de la maîtrise des compétences exigées. Par ailleurs d'autres candidatures n'ont pas été retenues (3 sur 36). Aucune intention de nuire n'est démontrée, contrairement à ce qu'allègue M. [B].
L'URSSAF d'AUVERGNE produit également des tableaux récapitulatifs qui montrent que sur les thèmes de formation, de promotion et de rémunération, M. [S] [B] est traité de la même manière que les agents qui ont la même ancienneté et le même niveau de qualification que lui, de la même manière que ceux qui sont membres d'une instance représentative du personnel ou d'une autre organisation syndicale ayant les mêmes mandats, de la même manière que les agents issus de la même activité au sein de ses services, soit des collègues de premier rang. Depuis 2005, il a bénéficié de plusieurs mesures favorables :
- 7 points de compétences en avril 2009 ;
- 7 points de compétences en mars 2011 ;
- 1 promotion au niveau 4 en juillet 2013 : 17 points.
En 2018, M. [B] ne pouvait pas être identifié comme un salarié ne bénéficiant
pas depuis plus de 5 ans de points de compétence, ayant bénéficié d'une promotion en 2013.
5- Sur l'absence d'intégration dans la cellule régionale mixte composée de salariés du RSI et de l'URSSAF
M. [B] considère qu'il a été victime d'une discrimination en ce que sa candidature pour faire partie de cette équipe n'a pas été retenue alors qu'il était le seul candidat.
M. [B] avait effectivement fait acte de candidature et a été reçu à ce titre par M. [F], le responsable adjoint du pôle production, qui a relevé dans les points abordés lors de cet entretien que M. [B] était volontaire mais uniquement dans les conditions énoncées par message 'lotus' du 10/10/11, pour obtenir un parcours professionnel 3 à 4 dès 2011 et qu'il avait parfaitement conscience qu'une formation de remise à niveau était nécessaire.
La candidature retenue a été celle d'une salariée plus expérimentée, affectée en partie à la gestion des comptes et c'est à juste titre que les premiers juges ont relevé qu'aucun élément ne permettait d'affirmer que la modification du poste par le raccourcissement de la durée du stage, avait pour objectif d'éliminer la candidature de M [B]. La discrimination alléguée à ce titre n'est pas démontrée.
6- Sur l'indemnisation du préjudice de M. [B]
En définitive il apparaît que M. [B] a été victime d'une discrimination en raison de ses activités syndicales exclusivement en ce qui concerne certaines mentions apparaissant sur ses évaluations ainsi qu'en raison de la surveillance de ses horaires faite à son insu.
En revanche il n'a pas fait l'objet d'aucune discrimination en raison de ses activité syndicales en ce qui concerne son avancement de carrière, sa promotion professionnelle, son absence d'intégration dans la cellule régionale mixte composée de salariée du RSI et d'employés URSSAF AUVERGNE et tous autres griefs qu'il invoque.
Son préjudice est strictement d'ordre moral et compte tenu de ses caractéristiques, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a réparé par l'allocation d'une indemnité de 6 000 €.
L'URSSAF AUVERGNE, qui n'obtient pas gain de cause sera condamnée aux dépens d'appel et l'équité commande de la condamner à verser à M. [S] [B] une indemnité de 1 000 € au titre de ses frais irrépétibles.
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PAR CES MOTIFS
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La Cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
CONFIRME le jugement déféré, rendu le 18 juin 2021 par le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand, en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
CONDAMNE l'URSSAF d'AUVERGNE aux dépens de la procédure d'appel ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE l'URSSAF d'AUVERGNE à verser à M. [S] [B] une indemnité de 1 000 €;
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.