ARRET N° .
N° RG 19/00361 - N° Portalis DBV6-V-B7D-BH6K6
AFFAIRE :
SA AIG EUROPE SA la Société AIG EUROPE SA, prise en son établissement néerlandais (sis [Adresse 8] - Pays-Bas) dont le siège social est au Luxembourg sis [Adresse 1], venant aux droits de la Société AIG EUROPE LIMITED suite à une fusion-absorption en date du 1er décembre 2018, représentée par son Président en exercice domicilié de droit audit siège.
C/
M. [U][Z][Y][V] [S] pris en sa qualité de mandataire liquidateur de la Société ALRACK BV, M. [H] [V] [O] pris en sa qualité de liquidateur de la Société SCHEUTEN SOLAR SYSTEMS BV, S.A.[U]L. SARL VELLEINE, SAS SOLAIRE DEPOT représentée par son président domicilié en cette qualité au siège de la société., Société ALRACK BV société de droit Néerlandais prise en la personne de son dirigeant légal domicilié de droit audit siège, Société ALLIANZ BENELUX N.V prise en sa succursale néerlandaise
, Société SCHEUTEN SOLAR SYSTEMS BV Société de droit Néerlandais prise en la personne de son dirigeant légal domicilié de droit audit siège
PLP/MS
Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction
Grosse délivrée à Me Anne DEBERNARD-DAURIAC , Me Christophe DURAND-MARQUET, Me Philippe CHABAUD, Me Xavier TOURAILLE, avocats, le 15 juin 2023.
COUR D'APPEL DE LIMOGES
Chambre sociale
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ARRET DU 15 JUIN 2023
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Le QUINZE JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS la chambre économique et sociale a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe:
ENTRE :
SA AIG EUROPE SA la Société AIG EUROPE SA, prise en son établissement néerlandais (sis [Adresse 8] - Pays-Bas) dont le siège social est au Luxembourg sis [Adresse 1], venant aux droits de la Société AIG EUROPE LIMITED suite à une fusion-absorption en date du 1er décembre 2018, représentée par son Président en exercice domicilié de droit audit siège.
, demeurant [Adresse 8] - PAYS BAS
représentée par Me Philippe CHABAUD, avocat au barreau de LIMOGES
APPELANTE d'une décision rendue le 17 AVRIL 2019 par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE GUERET
ET :
Monsieur [U][Z][Y][V] [S] pris en sa qualité de mandataire liquidateur de la Société ALRACK BV, demeurant Cabinet HOLLA ADVOCATEN - [Adresse 4] (PAYS BAS)
défaillant, régulièrement assigné
Monsieur [H] [V] [O] pris en sa qualité de liquidateur de la Société SCHEUTEN SOLAR SYSTEMS BV, demeurant Cabinet BOELS ZANDERS [Adresse 5] (PAYS BAS)
défaillant, régulièrement assigné
S.A.[U]L. SARL VELLEINE, demeurant [Adresse 7]
représentée par Me Xavier TOURAILLE, avocat au barreau de CREUSE
SAS SOLAIRE DEPOT représentée par son président domicilié en cette qualité au siège de la société., demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Christophe DURAND-MARQUET, avocat au barreau de LIMOGES, Me Baptiste DELRUE, avocat au barreau de PARIS
Société ALRACK BV société de droit Néerlandais prise en la personne de son dirigeant légal domicilié de droit audit siège, demeurant [Adresse 3] (PAYS BAS)
défaillante, régulièrement assignée
Société ALLIANZ BENELUX N.V prise en sa succursale néerlandaise
, demeurant [Adresse 6] PAYS-BAS
représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de LIMOGES, Me Valérie JUDELS de la SELARL AMSTEL & SEINE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
Société SCHEUTEN SOLAR SYSTEMS BV Société de droit Néerlandais prise en la personne de son dirigeant légal domicilié de droit audit siège, demeurant [Adresse 10] (PAYS BAS)
défaillante, régulièrement assignée,
INTIMES
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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 06 décembre 2022, puis renvoyée au 21 Mars 2023. L'ordonnance de clôture a été rendue le 09 novembre 2022.
La Cour étant composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, et de Madame Johanne PERRIER, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, assistés de Mme Sophie MAILLANT, Greffier. A cette audience, Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a été entendu en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 11 mai 2023par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
La mise à disposition de la décision a été prorogée au 25 mai 2023, puis au 15 juin 2023, et les avocats des parties en ont été régulièrement informés.
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LA COUR
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EXPOSE DU LITIGE :
La société VELLEINE est locataire d'un bâtiment agricole 'charpente métallique' couvert en fibro-ciment au [Adresse 7] sur la commune de [Localité 9] (23).
En 2010 elle s'est équipée d'un système photovoltaïque en toiture, de la marque SCHEUTEN SOLAR, fourni par la société SOLAIRE DEPOT pour un montant de 92 261,59 € et posé par la société ABM RENOV' pour un montant facturé de 8 706,88 €.
Le 30 mars 2012, la société SCHEUTEN SOLAR a été placée en liquidation judiciaire sous l'égide du droit néerlandais, Maître [O], étant désigné en qualité de mandataire liquidateur. La société était assurée auprès de la compagnie AIG EUROPE SA, anciennement AIG EUROPE LIMITED, le contrat d'assurance ayant été résilié le 1er octobre 2012.
Le 25 août 2012, la surchauffe d'un boîtier de connexion de la marque ALRACK équipant les panneaux solaires a stoppé le fonctionnement de l'installation.
Par exploit d'huissier en date du 10 juillet 2013, la société VELLEINE a saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Guéret aux fins de voir ordonner une expertise judiciaire.
Par exploit d'huissier du 30 juillet 2013, la société SOLAIRE DEPOT a fait assigner plusieurs sociétés aux fins que l'ordonnance prononcée leur soit commune : la société SCHEUTEN SOLAR SYSTEMS BV, son liquidateur, le cabinet BOELS ZANDERS, son assureur, la compagnie AIG EUROPE NEDERLAND, ainsi que la société ALRACK BV, fabriquant des boîtiers, son assureur la compagnie ALLIANZ NEDERLAND CORPORATE NV et la SCP BRO-PONROY, mandataire liquidateur de la société ABM RENOV', poseur des panneaux.
Il a été fait droit à la demande de la société VELLEINE par une ordonnance de référé du 23 septembre 2013, M. [L] étant désigné en qualité d'expert avec pour mission de décrire le dysfonctionnement, envisager les travaux pour y remédier et évaluer les préjudices et, notamment de « préciser l'origine et la cause du sinistre survenu le 25 août 2012 ».
L'expert a déposé son rapport le 2 mars 2016, indiquant notamment que l'incendie a été initié à partir de contraintes électrotechniques anormales qui ont affecté le boîtier de connections ALRACK SOLEXUS monté en sous face du panneau repère n° 9 de la stabulation VELLEINE, la cause étant un processus de fretting corrosion imputable à la conception de cet ensemble.
Sur la base de ce rapport, par exploit d'huissier du 9 août 2016, la société VELLEINE a fait assigner la société SOLAIRE DEPOT devant le tribunal de commerce de Guéret aux fins d'obtenir sa condamnation au paiement de diverses sommes au titre des travaux de remise en état, de la perte de production électrique, ainsi qu'à titre indemnitaire.
Par acte extra judiciaire du 29 novembre 2016, la société SOLAIRE DEPOT a fait assigner ses fournisseurs et autres intervenants en intervention forcée afin d'obtenir la jonction des instances et la condamnation des compagnies ALLIANZ et AIG à la garantir de l'intégralité des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.
Un jugement de jonction a été rendu le 15 mars 2017 à la demande conjointe des parties.
Par jugement du 17 avril 2019, le tribunal de commerce de Guéret a :
'- pris acte de la non-comparution des sociétés SCHEUTEN SOLAR SYSTEMES BV, ALRACK BV et de leurs liquidateurs respectifs ;
- pris acte de l'absence de mise en cause de la société ABM RENOV et de son liquidateur ;
- mis hors de cause la société GENERALI FRANCE ASSURANCES SA, lui a alloué 800 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la société SOLAIRE DEPOT aux dépens circonstanciés ;
- retenu la responsabilité de la société SOLAIRE DEPOT dans le litige l'opposant à la société VELLEINE et l'a condamnée à verser à la société VEILLEINE les sommes de :
* 41 005 € au titre des travaux de remise en état ;
* 44 590,70 € au titre de la perte de production électrique ;
*10 000 € au titre du préjudice financier ;
* 2 000 € au titre du préjudice de privation de jouissance ;
- condamné la même en 2 000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens qui comprendront le coût de l'expertise ;
Dans les rapports entre la société SOLAIRE DEPOT et la compagnie AIG EUROPE LIMITED, assureur de SCHEUTEN SOLAR SYSTEMES BV :
- s'est déclaré compétent pour statuer sur la demande de couverture ;
- retenu la responsabilité de la société SCHEUTEN SOLAR SYSTEMES BV, dans le sinistre à hauteur de 40% ;
- condamné la compagnie à garantir et relever indemne la société SOLAIRE DEPOT dans la limite de ce pourcentage, pour toutes condamnations prises contre elle y compris les demandes indemnitaires d'article 700 et de dépens ;
Dans les rapports entre la société SOLAIRE DEPOT et la compagnie ALLIANZ BENELUX N.V., assureur d'ALRACK BV :
- s'est déclaré compétent pour statuer sur la demande de couverture ;
- retenu la responsabilité de la société ALRACK BV, dans le sinistre à hauteur de 60% ;
- condamné la compagnie à garantir et relever indemne la société SOLAIRE DEPOT dans la limite de ce pourcentage, pour toutes condamnations prises contre elle y compris les demandes indemnitaires d'article 700 et de dépens ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement nonobstant appel et sans constitution de caution.'
La société AIG EUROPE SA a interjeté appel de la décision le 30 avril 2019. Son recours porte sur l'ensemble des chefs de jugement, sauf en ce qu'il a mis hors de cause la société GENERALI FRANCE ASSURANCES SA, lui a alloué 800 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné la société SOLAIRE DEPOT aux dépens circonstanciés.
Par un arrêt du 23 février 2022, la cour d'appel de Limoges a invité la compagnie AIG EUROPE à régulariser la procédure d'appel à l'égard de la compagnie SOLAIRE DEPOT par la désignation et l'appel en cause d'un mandataire chargé de la représenter.
Aux termes de ses écritures du 24 octobre 2022, la société AIG EUROPE SA demande à la cour :
Sur les nouvelles demandes de la société VELLEINE à hauteur d'appel, de :
'- rejeter la fin de non recevoir de la société VELLEINE dirigée contre son appel, seul le conseiller de la mise en état étant compétent pour statuer sur cette question ;
- juger irrecevable la société VELLEINE en sa nouvelle demande de condamnation aux frais de première instance et d'appel à son encontre, dans la proportion de 40% s'agissant d'une prétention nouvelle ;
- en tout état de cause, l'en débouter ;
A titre liminaire, de :
- de lui donner acte de son intervention volontaire, en lieu et place de la compagnie AIG EUROPE LIMITEDÂ ;
- infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :
A titre principal, sur la responsabilité de la société SCHEUTEN SOLAR, de :
- juger que le tribunal de commerce de Guéret a retenu la responsabilité contractuelle de la société SCHEUTEN sur le fondement de dispositions du code civil français exclusivement ;
- juger que les mandataires liquidateurs de la société SOLAIRE DEPOT ne produisent pas les éléments contractuels avec la société SCHEUTEN SOLAR BV et qu'il est dès lors impossible de connaître les termes du contrat conclu entre ces deux sociétés ;
- juger que le contrat conclu entre les sociétés SOLAIRE DEPOT et la société SCHEUTEN SOLAR est un contrat international ;
- juger que ce contrat est soumis au droit néerlandais ;
- juger que la responsabilité contractuelle de la société SCHEUTEN ne saurait être recherchée sur le fondement de textes de droit français ;
En conséquence :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la compagnie AIG EUROPE LIMITED, dans les droits de laquelle vient désormais la compagnie AIG EUROPE SA, prise en son établissement néerlandais, et en sa qualité d'assureur responsabilité civile de la société SCHEUTEN, au profit de SOLAIRE DEPOT, et ce exclusivement sur le fondement de dispositions de droit français inapplicables en l'espèce ;
- débouter le mandataire liquidateur de la société SOLAIRE DEPOT et plus généralement toutes les parties, de ses demandes dirigées contre la compagnie AIG EUROPE SA, venant dans les droits de la compagnie AIG EUROPE LIMITED ;
- mettre purement et simplement hors de cause la compagnie AIG EUROPE SAÂ ;
A titre subsidiaire, sur le caractère inapplicable de la police AIG EUROPE :
- juger que la compagnie AIG EUROPE SA produit bien la police dans sa version néerlandaise, et non pas seulement une 'copie traduite' ;
- juger qu'elle établit l'étendue et les limites de sa police n°70.08.2229, même si cette dernière n'est pas signée par la société SCHEUTEN ;
- juger que le liquidateur judiciaire de la société SCHEUTEN s'est lui-même prévalu des clauses de cette police n°70.08.2229 et l'a produite aux débats dans le cadre d'une instance distincte ;
- juger en tout état de cause, que la société SOLAIRE DEPOT représentée par son liquidateur judiciaire, n'a pas la qualité d'assurée, et n'a donc précisément pas qualité pour se prévaloir d'un supposé manque de preuve de l'étendue des garanties AIG EUROPE ;
- juger que plusieurs autres juridictions, et notamment la cour d'appel de Riom, ont tranché le même débat en faisant application des termes de la police AIG n°70.08.2229 ;
- juger que la société SCHEUTEN SOLAR HOLDING BV a souscrit une police de droit néerlandais auprès de la compagnie AIG EUROPE (NETHERLAND) NV, dans les droits de laquelle vient désormais la compagnie AIG EUROPE SA, prise en son établissement néerlandais ;
- juger que la loi applicable à la police AIG EUROPE n°70.08.2229 est la loi néerlandaise ;
- juger que les conditions et exclusions de la police AIG EUROPE n°70.08.2229 sont opposables à la société VELLEINE ainsi qu'aux mandataires liquidateurs de la société SOLAIRE DEPOT ;
- juger que la police AIG EUROPE n°70.08.2229 exclut les dommages aux biens livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité (article 4.4.1 et 1.7.2.3) et que par conséquent le coût des panneaux photovoltaïques est exclu de la garantie de la police AIG EUROPE ;
- juger que les frais de montage et d'installation des panneaux ne sont pas couverts par la police AIG EUROPE n°70.08.2229 en application de la limite temporelle de garantie stipulée au § 5 de l'article C.9 ;
- juger que la police AIG EUROPE n°70.08.2229 exclut les pertes de production électrique au titre de l'article G.24 de ses conditions particulières ;
- juger que le préjudice financier n'est pas couvert par la police AIG, étant en lien direct selon la société VELLEINE avec les pertes de production électrique ;
En conséquence :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée au profit de la société SOLAIRE DEPOT ;
- débouter les mandataires liquidateurs de la société SOLAIRE DEPOT de son appel en garantie dirigé contre la société AIG EUROPE ;
- rejeter toutes demandes dirigées contre elle ;
- la mettre purement et simplement hors de cause;
A titre plus subsidiaire, sur l'application du plafond de garantie pour la couverture des frais de montage et d'installation des panneaux photovoltaïques (C9) et les préjudices financiers (C15), de :
- juger que la police AIG EUROPE n°70.08.2229 limite le montant de la garantie responsabilité produit élargie couvrant les frais de montage et d'installation et les frais de rappel, à la somme de 5 000 000 €, pour l'ensemble des réclamations 'relatives au sinistre sériel SCHEUTEN' ;
- juger que la police AIG EUROPE n°70.08.2229 limite le montant de la garantie des 'préjudices financiers' à la somme de 1 000 000 €, pour l'ensemble des réclamations 'relatives au sinistre sériel SCHEUTEN' ;
- juger que le 'sinistre SCHEUTEN' constitue un sinistre sériel dont le montant global sera notablement supérieur aux plafonds de garantie stipulés au contrat ;
- juger qu'en l'état, le montant global du 'sinistre sériel SCHEUTEN' n'est pas établi ;
- juger qu'au regard de la loi néerlandaise, AIG EUROPE se trouve contrainte de suspendre le paiement des indemnités pouvant être réclamées par des tiers, au titre des frais de montage et d'installation des panneaux, et des préjudices financiers, jusqu'à ce que la part proportionnelle de chaque tiers lésé ait pu être établie ;
En conséquence :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la compagnie AIG EUROPE LIMITED au profit de la société SOLAIRE DEPOT ;
- autoriser la société AIG EUROPE, prise en sa succursale néerlandaise, à suspendre le paiement de l'indemnité au titre des préjudices allégués, jusqu'à ce que la part proportionnelle de chaque victime du sinistre sériel soit établie ;
A titre plus subsidiaire encore, sur l'application des franchises contractuelles, de :
- juger qu'elle est en droit d'opposer sa franchise de 100 000 € au titre des dommages matériels et sa franchise de 100 000 € au titre des préjudices financiers ;
- juger que les réclamations formulées contre AIG EUROPE sont inférieures à ces montants ;
En conséquence :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la compagnie AIG EUROPE LIMITED au profit de la société SOLAIRE DEPOT ;
- rejeter toutes demandes de condamnation formulées à son encontre de par l'application des franchises ;
A titre infiniment subsidiaire, sur le recours contre la société ALLIANZ BENELUX NV, en qualité d'assureur de la société ALRACK BV, sur le rejet des demandes au titre du préjudice financier et l'application des franchises de la police AIG, de :
- juger que les désordres invoqués engagent la responsabilité de la société ALRACK BV, qui a fabriqué et conçu les boîtiers 'SOLEXUS' mis en cause ;
- juger acquises les garanties de son assureur, la compagnie ALLIANZ BENELUX NVÂ ;
- juger que les postes de préjudice allégués par la société VELLEINE relatifs à un prétendu 'préjudice financier' et à un supposé 'préjudice de jouissance' ne sont pas justifiés tant dans leur principe que dans leurs montants ;
En conséquence :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée au profit de la société SOLAIRE DEPOT ;
- condamner la société ALLIANZ BENELUX NV, ès qualités, à la relever et garantir intégralement de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au profit des sociétés VELLEINE et/ou SOLAIRE DEPOT et/ou du liquidateur judiciaire de cette dernière ;
- rejeter toutes demandes au titre des supposés 'préjudice financier' et 'préjudice de jouissance' ;
- rejeter toutes demandes dirigées contre elle dans la mesure où elles sont inférieures aux deux franchises de la police AIG ;
En tout état de cause, de :
- condamner tout succombant à lui payer la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel dont distraction au profit de Maître CHABAUD.
A titre principal, la société AIG EUROPE SA conteste que la responsabilité de la société SCHEUTEN SOLAR dont elle est l'assureur puisse être retenue sans justification spécifique sur le fondement des dispositions du code civil français, la société SOLAIRE DEPOT s'étant abstenue de fournir le contrat la liant à la société dont elle tente d'engager la responsabilité, seul élément en mesure de déterminer l'étendue des obligations contractuelles et le droit applicable, le règlement CE 593/2008 applicable par défaut précisant que le contrat de vente de biens est régi par la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle.
A titre subsidiaire, elle indique que l'étendue de sa garantie, à savoir les limites et exclusions de garantie prévue par la police (de droit néerlandais) souscrite par la société SCHEUTEN et donc celle-ci avait parfaitement connaissance puisqu'elle a tenté de s'en prévaloir, sont nécessairement opposables à la société SOLAIRE DEPOT. En outre, elle précise que la loi applicable au contrat d'assurance, même dans le cadre d'une action directe d'un tiers non partie au contrat, demeure la loi de la police d'assurance, et donc en l'espèce la loi néerlandaise. Ainsi, elle soutient qu'au regard des exclusions de garanties présentes dans la police AIG EUROPE n°70.08.2229, le produit livré est exclu, tout comme la perte d'exploitation, le remboursement des frais de montage et d'installation étant limité dans le temps (2 ans à compter de la livraison), et qu'elle ne peut donc être appelée à ce titre. Concernant les demandes formées au titre d'un supposé préjudice financier ou d'une perte de jouissance, la société AIG EUROPE SA considère que rien ne justifie la demande de la société VELLEINE.
A titre plus subsidiaire, elle expose qu'il faut nécessairement tenir compte du plafond de garantie stipulé par la police d'assurance, la garantie devant nécessairement être limitée à la somme de 5 000 000 €, plafond applicable à l'ensemble des sinistres et qui devra être réparti suivant les conditions fixées par le droit néerlandais. Elle rappelle cependant que le montant global du 'sinistre sériel SCHEUTEN' n'est pas établi, le droit néerlandais impliquant que si une réparation du dommage devait intervenir, l'indemnité versée par la compagnie d'assurance doit être répartie entre toutes les personnes lésées proportionnellement au dommages subis, situation impliquant la suspension des paiements. A titre infiniment subsidiaire sur ce point, AIG EUROPE SA fait valoir qu'en l'absence d'une suspension des paiements, elle serait fondée à voir appliquer les franchises contractuelles.
En tout état de cause, elle fait valoir qu'une condamnation prononcée à son encontre devrait impliquer que la société ALLIANZ BENELUX NV, ès-qualités, la relève et garantisse de celle-ci en ce qu'elle est l'assureur de la société ayant conçu et fabriqué les boîtiers défectueux, rappelant que les allégations de la société ALRACK BV sur les éventuelles implications de SCHEUTEN SOLAR dans la conception du boîtier ne sont étayées par aucune preuve tangible.
Aux termes de ses écritures du 8 janvier 2020, la société SOLAIRE DEPOT demande à la cour :
'A titre principal, de :
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société SOLAIRE DEPOT dans le cadre du présent sinistre ;
Statuant à nouveau, de :
- dire au vu du rapport d'expertise que le préjudice subi par la société VELLEINE résulte exclusivement de la défectuosité des panneaux photovoltaïques de marque SCHEUTEN SOLAR, équipés des boîtiers de jonction ALRACK ;
- débouter par conséquent, la société VELLEINE, ainsi que toutes autres parties, de l'ensemble des demandes formulées à son encontre en toutes fins qu'elles comportent ;
A titre subsidiaire et dans l'hypothèse où la cour entrerait en voie de condamnation à son encontre, de :
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré recevable et bien-fondé l'appel en garantie diligenté à sa requête à l'encontre des sociétés SCHEUTEN SOLAR, ALRACK et leurs assureurs ALLIANZ BENELUX et AIG EUROPE SA ;
- le confirmer en ce qu'il a condamné les sociétés SCHEUTEN SOLAR et ALRACK, ainsi que leurs assureurs ALLIANZ BENELUX et AIG EUROPE SA à la garantir et à la relever indemne de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;
En toute hypothèse, de :
- condamner in solidum la société VELLEINE ou toutes parties succombant à lui verser la somme de 20 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au paiement des frais d'expertise et aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître DURAND-MARQUET en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.'
La société SOLAIRE DEPOT fait valoir que sa responsabilité ne peut être recherchée dans la survenance du sinistre, l'expertise ayant établi que seul le dysfonctionnement d'un boîtier de jonction ALRACK en était à l'origine.
A titre subsidiaire, elle soutient que les sociétés SCHEUTEN SOLAR et ALRACK, ainsi que leurs assureurs ALLIANZ BENELUX et AIG EUROPE NEDERLAND doivent la garantir et la relever indemne de toutes condamnations prononcées à son encontre, SOLAIRE DEPOT ne faisant qu'exercer une action récursoire suite à la mise en cause de la société VELLEINE alors qu'elle n'est qu'un simple intermédiaire. Elle précise que la société SCHEUTEN a fourni un produit défectueux, contenant un composant défectueux fourni par la société ALRACK, les panneaux étant inaptes à l'utilisation et de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes, le vendeur étant en tout état de cause contractuellement tenu à garantir la chose qu'il vend, la relation contractuelle étant matérialisée par la commande passée. Elle précise sur ce point que la loi applicable ne peut être la loi néerlandaise, la police d'assurance présentée par AIG EUROPE SA ne lui étant pas opposable mais étant en tout état de cause en mesure de garantir le sinistre, hors du plafond de garantie dont elle tente de se prévaloir, la suspension des paiements ne pouvant qu'être écartée. Concernant la garantie de la compagnie ALLIANZ, la société SOLAIRE DEPOT expose que l'argumentaire relatif à la prétendu absence de responsabilité de la société ALRACK dans la défaillance des boitiers est en tout points infondé.
Postérieurement à ses écritures, la société SOLAIRE DEPOT, a été placée en liquidation judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 27 février 2020, procédure clôturée pour insuffisance d'actif par un jugement du tribunal de commerce de Paris du 26 janvier 2021. Le mandataire liquidateur, Maître [P], n'ayant pas constitué ès qualités, s'est vu signifier les dernières conclusions de la compagnie AIG EUROPE SA par acte d'huissier en date du 25 janvier 2022.
Aux termes de ses écritures du 28 septembre 2022, la société VELLEINE demande à la cour de :
'- dire la société AIG EUROPE irrecevable et à tout le moins mal fondée en son appel ;
- subsidiairement, confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a statué sur la responsabilité de la société SOLAIRE DEPOT et les indemnisations qui lui ont été accordées à ce titre ;
- dire en conséquence qu'elle figurera au passif de la liquidation judiciaire de la société SOLAIRE DEPOT pour les sommes suivantes :
* 41 005 € pour les travaux de remise en état ;
* 44 590,70 € au titre de la perte de production électrique ;
* 10 000 € au titre du préjudice financier ;
* 2 000 € au titre de la privation de jouissance ;
* 2 000 € d'indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
* intérêts, Pour mémoire ;
*les dépens dont les frais d'expertise judiciaire ;
Soit un total, pour mémoire, de 99 595,70 € ;
- constater que le jugement du 17 avril 2019 condamne la société AIG EUROPE (assureur de la société SCHEUTEN SOLAR SYSTEMS BV) et ALLIANZ NEDERLAND SCHADEVERZEKERING (assureur de la société ALRACK) à garantir la société SOLAIRE DEPOT des condamnations prononcées dans les proportions respectives de 99 595,70 € x 40 % = 39 838,28 € et 99 595,70 € x 60 % = 59 757,42 € outre, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les sommes de 3 000 € x 40 % = 1 200 € et 3 000 € x 060 % = 1 800 € ;
- les condamner à supporter dans lesdites proportions les frais de première instance et d'appel.'
La société VELLEINE considère qu'au regard de l'expertise - qu'aucune des parties ne conteste - elle doit nécessairement être indemnisée de l'ensemble des préjudices par la société SOLAIRE DEPOT. Elle précise que ce sont les modules de cette dernière qui se sont avérés défectueux, les panneaux étant garantis par ladite société pendant 20 ans.
Aux termes de ses écritures du 24 octobre 2022, la société ALLIANZ BENELUX NV demande à la cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel et, statuant à nouveau, à titre principal, de :
'- dire mal fondées les demandes dirigées à l'encontre d'ALRACK B.V. ou, à titre subsidiaire, prononcer un partage de responsabilité entre SCHEUTEN SOLAR et ALRACK ;
A titre subsidiaire, de :
- dire que la police responsabilité civile d'ALLIANZ BENELUX ne couvre pas le sinistre de la société VELLEINE ;
- en conséquence, débouter SOLAIRE DEPOT, AIG EUROPE et toute autre demanderesse de l'intégralité de leurs demandes contre ALLIANZ BENELUX, en sa qualité d'assureur responsabilité civile d'ALRACK ;
A titre plus subsidiaire :
- en application du droit néerlandais régissant la police d'ALLIANZ BENELUX, prononcer le sursis de tout paiement de la part d'ALLIANZ BENELUX dans l'attente de la fixation définitive des réclamations des victimes (et demandeurs en garantie) éligibles à la couverture de la police AB afin de pouvoir fixer définitivement le montant dû sur une base de prorata ;
En tout état de cause, de :
- juger irrecevable la demande de condamnation formulée par la société VELLEINE à l'encontre de la société ALLIANZ BENELUX NV au titre des frais de première instance et d'appel, s'agissant d'une demande nouvelle ;
- condamner la société SOLAIRE DEPOT et AIG EUROPE à payer à la société ALLIANZ BENELUX la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société SOLAIRE DEPOT et toute autre partie succombante aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire.'
La compagnie ALLIANZ BENELUX NV conteste une quelconque responsabilité de son assuré, la société ALRACK, la société SCHEUTEN SOLAR étant le concepteur du boîtier en ce qu'elle a donné l'ensemble des instructions dans la réalisation du produit et donc, seule à l'origine des défauts de conception, ALRACK ayant été considérée comme une partie tiers et non comme le fabriquant d'un produit dangereux pour les consommateurs par l'homologue néerlandais de la DGCCRF. En ce sens, elle précise que l'intégration de l'installation photovoltaïque dans la toiture a été un facteur aggravant dont elle ne peut être tenue pour responsable.
En outre, la compagnie d'assurance soutient que la société SOLAIRE DEPOT ne peut engager la responsabilité de son assuré sur le fondement contractuel en l'absence d'un contrat les liant, ni sur celle du fait des produits défectueux. Elle rappelle également qu'en l'absence de responsabilité de la société qu'elle couvre, sa garantie ne peut pas jouer, sa police ne pouvant en tout état de cause être mise en jeu en l'absence de dommages à des biens autres que les boîtiers Solexus, conformément aux stipulations de la police d'assurance. De même, elle précise que le rapport contractuel avec son assuré et donc la police d'assurance est soumis au droit néerlandais.
A titre subsidiaire, elle indique qu'une éventuelle condamnation entraîne nécessairement l'application du droit néerlandais régissant la police qui et donc l'interdiction de tout paiement par l'assureur avant la connaissance complète des victimes qui seront indemnisées, si elles sont éligibles, au prorata.
[U][Z][Y][V] [S], ès qualités, [H] [V] [O], ès qualités, n'ont pas constitué avocat pour les sociétés dont ils sont respectivement les liquidateurs.
Par courrier du 26/04/2022 la conseil de la société AIG EUROPE SA a informé la Cour que cettte dernière n'entendait pas faire désigner de mandataire ad hoc aux fins de représentation de la société SOLAIRE DEPOT.
Les autres parties ont adopté la même position.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 février 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
1. Sur la situation de la société SOLAIRE DEPOT
Des conclusions d'intimé et d'appel incident ont été déposées au nom et pour le compte de cette société lorsqu'elle était in bonis. Postérieurement à ses écritures elle a été placée en liquidation judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 27 février 2020. Le mandataire liquidateur, Maître [P], n'ayant pas constitué ès qualités, les dernières conclusions de la compagnie AIG EUROPE SA lui ont été signifiées par acte d'huissier en date du 25 janvier 2022.
Cette procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif par un jugement du tribunal de commerce de Paris du 26 janvier 2021, et malgré cette nouvelle situation aucune des parties, interpellées à ce sujet par la Cour, n'a souhaité solliciter la désignation d'un administrateur ad hoc pour les besoins de sa liquidation. Or le jugement de clôture a mis fin à la mission de tous les organes de cette procédure, y compris celles du liquidateur.
Il y a donc lieu de constater que la présente juridiction n'est saisie d'aucune écriture pour le compte de la liquidation de la société SOLAIRE DEPOT.
2. Sur l'intervention de la société AIG EUROPE SA
Il sera constaté que la société AIG EUROPE SA, prise en son établissement néerlandais, vient en lieu et place de la société AIG EUROPE LTD, prise en son établissement néerlandais, suite à la fusion-absorption du 1er décembre 2018.
Aucune contestation n'a été élevée à ce sujet par les autres parties.
3. Sur l'irrecevabilité de l'appel de la société AIG EUROPE SA soulevée par la société VELLEINE
Cette fin de non recevoir, présentée dans le dispositif des conclusions de la société VELLEINE est manifestement une formule de style en l'absence de toute motivation dans le corps de ses écritures, étant au surplus relevé qu'il n'est pas allégué que le moyen d'irrecevabilité a été révélé postérieurement au dessaisissement du conseiller de la mise en état lequel dispose d'une compétence exclusive pour déclarer un appel irrecevable, en application des dispositions de l'article 914 du code de procédure civile.
L'appel de la société AIG EUROPE sera jugé recevable.
4. Sur la recevabilité de la demande présentée par la société VELLEINE de condamnation de la société AIG EUROPE à supporter les frais de première instance et d'appel en proportion du niveau de leur garantie retenue par le tribunal
La société AIG EUROPE fait valoir qu'il s'agit d'une demande directe dirigée contre elle pour la première fois en cause d'appel, laquelle serait irrecevable pour constituer une prétention nouvelle, au sens de l'article 564 du code de procédure civile.
En réalité la société VELLEINE, qui demande à la Cour, à titre subsidiaire, de confirmer le jugement déféré, ne sollicite pas, dans le dispositif de ses écritures, le bénéfice d'une indemnité à son profit mais propose à la Cour une répartition des 'frais de première instance et d'appel ' qui ne peuvent être que les dépens, étant relevé que ceux de la procédure d'appel n'existaient pas en première instance.
Cette demande, qui n'est pas une demande incidente faute d'impliquer pour la juridiction la nécessité d'examiner le fond du litige, et ne constitue qu'une demande accessoire d'ordre purement procédural qui n'a pas le caractère d'une nouvelle prétention au sens dudit article. Elle est donc recevable.
5. Sur l'origine du sinistre
L'expert, M. [L] conclut son rapport en indiquant que la cause du sinistre (détérioration d'un boîtier de connexion en conséquence d'une mise à feu incidente interne) 'est à imputer à un défaut à caractère sériel dans la conception et la réalisation des boîtiers de connexion ALRACK SOLEXUS montés en sous-face des panneaux SCHEUTEN p6-66.'
Cet expert a fourni les précisions suivantes dans le corps de son rapport :
« Aux termes de nos travaux et après dépose des modules, il nous a été possible de déterminer que le foyer limité survenu le 25 août 2012 (voir photos n°23 et 24) s'était déclaré depuis un panneau doté d'un boîtier de connexion ALRACK SOLEXUS.
Les liaisons mâles-femelles + et - au niveau des cartes électroniques de ces ensembles étaient, à plus ou moins brève échéance, génératrice de « fretting corrosion » dont l'évolution était à même d'initier des mises à feux incidentes, telles que cela a été mis en évidence sur l'un des composants examinés (voir photos n°5 à 7, 23 et 24) et démontrés par le laboratoire IC2000 dont nous reproduisons les conclusions avec l'accord de GROUPAMA GRAND EST qui a financé ces travaux dans des dossiers similaires à celui qui nous préoccupe ici (PJ n°3 et 9.13.1). »
Ces affirmations techniques, justifiées par les diligences accomplies par l'expert, ne sont pas véritablement contredites et doivent être considérées comme intégralement fiables.
Le sinistre, constitué par l'amorce d'un incendie d'un panneau photovoltaïque, trouve son origine dans la conception et la réalisation d'un boîtier de connexion de marque ALRACK Solexus.
6. Sur les responsabilités
6.1 Sur la responsabilité de la société SOLAIRE DEPOT
Il résulte des pièces produites que, selon facture du 4 novembre 2010, pour un prix de prix de 92 261,59 €, la société SOLAIRE DEPOT a fourni à la société VELLEINE 130 panneaux photovoltaïques avec en sous-face une isolation en 'Stirodur', installés par la société ABM RENOV le 27 janvier 2011sur le toit du hangar agricole exploité par la société VELLEINE.
Le jugement entrepris n'est pas critiqué en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société SOLAIRE DEPOT sur le fondement des vices cachés définis par les article 1641 et suivants du code civil ainsi que sur celui de la non-conformité de la chose vendue.
Les premiers juges étaient fondés à retenir la responsabilité du vendeur des panneaux photovoltaïques dès lors qu'il restait garant, vis à vis du maître d'ouvrage, des matériaux qu'il employait et des éléments incorporés à son ouvrage.
L'évaluation des préjudices effectuée en première instance n'est pas contestée et se présente de la manière suivante :
* 41 005 € pour les travaux de remise en état ;
* 44 590,70 € au titre de la perte de production électrique ;
* 10 000 € au titre du préjudice financier ;
* 2 000 € au titre de la privation de jouissance ;
En revanche, aucune condamnation ou fixation de créances ne peut être prononcée ou ordonnée à l'encontre de la société SOLAIRE DEPOT ou de son passif. Sa liquidation judiciaire a été clôturée pour insuffisance d'actifs suivant jugement du tribunal de commerce de Paris du 26 janvier 2021. Elle n'est pas représentée par un mandataire ad hoc et ne dispose plus de la personnalité dite morale. Il sera toutefois précisé que la société VELLEINE justifie avoir déclaré sa créance à ce titre à la procédure collective, le 31/03/2020, pour un montant total de 115 721,67 €.
6.2 Sur la responsabilité de la société SCHEUTEN SOLAR SYSTEMS BV
Selon l'article 1386-1 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime.
La société SCHEUTEN SOLAR est le fabricant des panneaux voltaïques vendus à la société VELLEINE alors qu'ils étaient défectueux pour avoir intégré un composant susceptible de provoquer par incendie la destruction de l'ouvrage sur lequel il était installé. En l'occurrence la mise à feu provoquée par une surchauffe des connecteurs lors du passage des fluides électriques a révélé le risque d'incendie et fait mettre en arrêt le fonctionnement des panneaux puis leur démontage.
Le défaut de sécurité du produit est avéré ainsi que son lien de causalité avec le dommage subi par la société VELLEINE et la responsabilité de la société SCHEUTEN SOLAR est engagée envers cette dernière.
6.3 Sur la responsabilité de la société ALRACK BV
Selon l'article 1386-8 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, en cas de dommage causé par le défaut d'un produit incorporé dans un autre, le producteur de la partie composante et celui qui a réalisé l'incorporation sont solidairement responsables.
En l'occurrence l'expertise révèle que la défectuosité des panneaux solaires a pour origine le boîtier fabriqué par la société ALRACK dont l'assureur ne démontre pas qu'elle a agi sous la direction et sur les instructions de la société SCHEUTEN SOLAR. C'est par une argumentation détaillée et justifiée par les pièces produites que le tribunal a établi que si la société SCHEUTEN est le concepteur des panneaux photovoltaïques, les connecteurs linéaires qui sont défaillants ont été conçus et réalisés par la société ALRACK, sans exigence spécifique du donneur d'ordre. Les deux phénomènes de relaxion et de corrosion par frottement sont les cause ayant dégradé les composants de conception ALRACK installés dans les boîtiers.
7. Sur les actions en garantie
7.1 Sur l'action en garantie à l'encontre de l'assureur AIG EUROPE LIMITED
Les premiers juges ont fait une exacte appréciation des faits de la cause en considérant que la société SHEUTEN SOLAR SYSTEMES BV était responsable de la survenance du sinistre à hauteur de 40 % pour avoir sciemment commercialisé le boîtier 'Solexus' plusieurs mois après avoir pris connaissance de graves dysfonctionnements systémiques qui causaient sa fonte.
Le Tribunal a toutefois débouté son assureur, la société AIG EUROPE SA de ses demandes relatives à la réduction de ses obligations en l'absence de connaissance de l'étendue de la couverture du risque. Se fondant sur ce motif elle l'a condamnée à garantir la société SOLAIRE DEPOT de toutes condamnations prises contre elle dans les limites de sa part de responsabilité.
Il sera d'abord rappelé que le contrat conclu entre la société SCHEUTEN SOLAR SYSTEMS BV, de droit néerlandais, et la société SOLAIRE DEPOT, de droit français, pour la fourniture de panneaux photovoltaïques, est un contrat international. Selon l'article 4, 1 a) du Règlement CE 593/2008 ROME I du 17 juin 2008 sur « la loi applicable aux obligations contractuelles » : « Le contrat de vente de biens est régi par la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle. »
La société SCHEUTEN SOLAR BV ayant son siège aux Pays Bas, c'est la loi en vigueur dans cet état, qui est applicable.
La compagnie AIG EUROPE produit la police AIG n°70.08.2229 du 28 octobre 2008, les conclusions du liquidateur judiciaire de la société SCHEUTEN du 31 août 2015, qui se prévaut des termes de la police AIG n°70.08.2229 dans le cadre d'une procédure relative au présent préjudice dont le caractère est sériel, et communique lui-même la police AIG n°70.08.2229 du 28 octobre 2008 en pièce n°6. Il s'agit d'un véritable aveu judiciaire de la part de l'assuré.
La compagnie AIG EUROPE SA, venant aux droits de la compagnie AIG EUROPE LIMITED, rapporte la preuve que la société SCHEUTEN SOLAR avait accepté les termes, limites, plafonds et exclusions de la police AIG n° 70.08.2229.
Or l'assureur de responsabilité ne peut être tenu à garantie envers la victime que lorsque la responsabilité de son assuré est établie et que le risque est garanti par la police.
En l'occurrence selon l'article 4.4.1 des conditions générales de la police AIG EUROPE 'Est exclue de l'assurance, la responsabilité pour des dommages à des biens livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité » et aux termes de l'article 4.4.2.1 des mêmes conditions générales « Est exclue de l'assurance, la responsabilité pour le remplacement, la correction, la réparation ou le rappel de biens livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité (') »
Ainsi cette polie d'assurance ne garantit pas les dommages aux biens livrés ni leur remplacement.
La garantie de la société AIG EUROPE LIMITED n'est donc pas acquise à ce titre et le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné cette société à garantir la société SOLAIRE DEPOT de sa condamnation à verser à la société VELLEINE 40% de la somme de 41 005 € au titre des travaux de remise en état.
Par ailleurs la clause G. 24 des conditions particulières de la police AIG EUROPE exclut la couverture des pertes d'exploitation consécutives à la non-livraison ou la livraison insuffisante d'énergie. :
« G.24 : Exclusion de la non-livraison ou de la livraison insuffisante d'énergie. La responsabilité au titre d'un préjudice et/ou de frais ' ainsi que le préjudice en découlant ' du fait de l'absence de transport ou du transport insuffisant d'énergie solaire par des produits en verre/des panneaux solaires livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité ».
En outre selon l'article 4.4.3 des Conditions générales ' est exclue de l'assurance la responsabilité pour des dommages et des frais procédant de l'impossibilité d'utiliser (de façon adéquate) des biens livrés ou au niveau desquels les activités ont été réalisées, et ce sans considération de la personne ayant subi le préjudice et de la personne ayant exposés les frais. »
Ainsi les frais et pertes qui sont consécutifs à l'impossibilité d'utiliser de façon adéquate les panneaux photovoltaïques livrés par la société SCHEUTEN, sont donc exclus en application de ces dispositions.
La garantie de la société AIG EUROPE LIMITED n'est donc pas acquise au titre de la perte de production électrique, des préjudices financier et de privation et de jouissance et le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné cette société à garantir la société SOLAIRE DEPOT de sa condamnation à verser à la société VELLEINE 40% de la somme de 44 590,70 € au titre de la perte de production électrique, 10 000 € au titre du préjudice financier et 2 000 € au titre du préjudice de privation de jouissance.
7.2 Sur l'action en garantie à l'encontre de l'assureur ALLIANZ BENELUX N.V
La société ALLIANZ BENELUX N.V verse au débat un exemplaire complet de la police d'assurance, comprenant les conditions générales et particulières souscrites par la société ALRACK, certes non signé mais dont l'existence n'a jamais été contestée par cette dernière ni son liquidateur, alors qu'en outre depuis 2012, elle a été partie à toutes les expertises judiciaires dans ce litige sériel.
Cette police d'assurance est régie par le droit néerlandais (article 9 sur le droit applicable), ce que ne peut remettre en cause l'existence au profit de la victime d'une action directe contre l'assureur de la société ALRACK sur le fondement du droit français.
Or la police dont bénéficie ALRACK auprès d'ALLIANZ BENELUX est une
assurance responsabilité civile, limitée aux dommages aux personnes et aux biens ' autres que les biens de l'assuré - causés par l'assuré à des tiers ou du fait du produit de son assuré et expressément définis dans la police.
Ces éléments résultent sans équivoque de l'article 3 relatif aux exclusions et inclusions particulières :
'3.5. Bien livré / prestation de service fournie.
Non couvertes sont les demandes d'indemnisation de:
3.5.1. dommages a des biens livrés par ou sous la responsabilité de l'assuré. »
...
3.2.4. L'assureur responsabilité civile ne peut être tenu à une couverture plus large que
celle conclue'.
Ainsi cette exclusion de garantie écarte les dommages subis par les biens livrés mais laisse subsister la garantie des dommages causés par les bien livrés.
Dans l'espèce l'installation photovoltaïque a été mise à l'arrêt avant tout départ de feu, de manière préventive, de sorte que n'est pas caractérisé un dommage matériel, au sens du contrat d'assurance, en dehors de celui qui affecte le boîtier, lequel est expressément exclu de la garantie.
La garantie de la société ALLIANZ BENELUX n'est donc pas acquise pour l'ensemble des chefs de préjudice dont l'indemnisation a été fixée et le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné cette société à garantir la société SOLAIRE DEPOT de sa condamnation à verser à la société VELLEINE 60% de toutes condamnations prises contre elle, y compris les demandes indemnitaires d'article 700 et de dépens.
8. Sur les demandes accessoires
La société VELLEINE a été victime d'un sinistre lui ayant causé un préjudice dont elle ne peut obtenir l'indemnisation en raison de la procédure collective à laquelle a été soumise son cocontractant et des spécificités des contrats d'assurance des sociétés responsables. Si, en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, chaque partie supportera la charge de ses dépens, l'équité commande de condamner les deux société d'assurance, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du même code, à lui verser une indemnité de, 1 200 € à la charge de la société AIG EUROPE SA et 1 800 € à la charge de la société ALLIANZ BENELUX N.V.
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PAR CES MOTIFS
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La Cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort, par mise à disposition au greffe et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
CONSTATE que la présente juridiction n'est saisie d'aucune écriture pour le compte de la liquidation de la société SOLAIRE DEPOT dont la procédure de liquidation judiciaire a été clôturée pour insuffisance d'actif le 26 janvier 2021 ;
CONSTATE que la société AIG EUROPE SA, prise en son établissement néerlandais, vient en lieu et place de la société AIG EUROPE LTD, prise en son établissement néerlandais, consécutivement à la fusion-absorption du 1er décembre 2018 ;
DECLARE recevable l'appel interjeté par société AIG EUROPE SA ;
DECLARE recevable la demande présentée par la société VELLEINE de condamnation de la société AIG EUROPE à supporter les frais de première instance et d'appel en proportion du niveau de leur garantie retenue par le tribunal ;
CONFIRME le jugement rendu le 17 avril 2019 par le tribunal de commerce de Guéret sauf en ce qu'il a :
- condamné la société SOLAIRE DEPOT à verser à la société VELLEINE les sommes de 41 005 € pour les travaux de remise en état, 44 590,70 € au titre de la perte de production électrique, 10 000 € au titre du préjudice financier et 2 000 € au titre de la privation de jouissance,
- condamné la société AIR EUROPE LIMITED, assureur de SCHEUTEN SOLAR SYSTEMES BV à relever indemne la société SOLAIRE DEPOT dans la limite de 40 % de toutes condamnations prononcées contre elle ;
- condamné la société ALLIANZ BENELUX N.V assureur de la société ALRACK BV à relever indemne la société SOLAIRE DEPOT dans la limite de 60 % de toutes condamnations prononcées contre elle ;
- statué sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau ;
JUGE que la société AIG EUROPE SA venant aux droits de la société AIG EUROPE LTD ne couvre pas le sinistre de la société VELLEINE ;
REJETTE toutes demandes présentées à son encontre ;
JUGE que la société ALLIANZ BENELUX N.V ne couvre pas le sinistre de la société VELLEINE ;
REJETTE toutes demandes présentées à son encontre ;
DIT que chaque partie supportera ses dépens de première instance et d'appel ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société AIG EUROPE SA à verser à la société VELLEINE une indemnité de 1 200 €;
CONDAMNE la société ALLIANZ BENELUX N.V à verser à la société VELLEINE une indemnité de 1 800 €;
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.