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16/06/2022 | FRANCE | N°21/00990

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre civile, 16 juin 2022, 21/00990


ARRÊT N° .



N° RG 21/00990 - N° Portalis DBV6-V-B7F-BIIY6







AFFAIRE :



[S] [Z]

C/

[P] [Y] ès qualités de liquidateur judiciaire de Monsieur [J] [V],







GS/MS





Demande en partage, ou contestations relatives au partage



























COUR D'APPEL DE LIMOGES



CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU 16 JUIN 2022

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Le seize Juin deux mille vingt deux, la Chambre civile de la Cour d'Appel de LIMOGES, sur renvoi de la Cour de Cassation, a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :



ENTRE :



[S] [Z], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Anne DEBERNA...

ARRÊT N° .

N° RG 21/00990 - N° Portalis DBV6-V-B7F-BIIY6

AFFAIRE :

[S] [Z]

C/

[P] [Y] ès qualités de liquidateur judiciaire de Monsieur [J] [V],

GS/MS

Demande en partage, ou contestations relatives au partage

COUR D'APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE CIVILE

------------

ARRÊT DU 16 JUIN 2022

-------------

Le seize Juin deux mille vingt deux, la Chambre civile de la Cour d'Appel de LIMOGES, sur renvoi de la Cour de Cassation, a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :

ENTRE :

[S] [Z], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de LIMOGES

APPELANTE d'un jugement rendu le06 Février 2018 par le Tribunal de Grande Instance de La Rochelle

ET :

[P] [Y] ès qualités de liquidateur judiciaire de Monsieur [J] [V],, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Philippe CHABAUD de la SELARL SELARL CHAGNAUD CHABAUD LAGRANGE, avocat au barreau de LIMOGES

INTIMEE

---==oO§Oo==---

Sur renvoi après cassation :

' jugement rendu le 06 Février 2018 par le Tribunal de Grande Instance de La Rochelle

' arrêt rendu le 23 octobre 2019 par la Cour d'Appel de POITIERS

' arrêt rendu le 20 octobre 2021 par la Cour de Cassation

---==oO§Oo==---

Conformément à l'article 1037-1 du code de procédure civile l'affaire a été fixée à l'audience du 14 Avril 2022, la Cour étant composée de Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre, de Monsieur Gérard SOURY, Conseiller et de Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, assistés de Mme Sophie

MAILLANT, Greffier, Monsieur Gérard SOURY, Conseiller, a été entendu en son rapport oral. Les conseils des parties sont intervenus au soutien de leurs clients.

Puis, Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 02 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

La mise à disposition de cette décision a été prorogée au 16 juin 2022 et les avocats des parties régulièrement avisés.

FAITS et PROCÉDURE

Le 24 juillet 1987, M. [J] [V] et son épouse, Mme [S] [Z], mariés sous le régime de la séparation de biens, ont acquis en indivision par moitié un immeuble à [Localité 3].

M. [V] a été mis en liquidation judiciaire le 13 mars 2008, Me [P] [Y] étant désignée en qualité de liquidateur.

Le 9 septembre 2010, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Rochefort a prononcé le divorce des époux [V] mais il a rejeté la demande de prestation compensatoire de l'épouse.

Cette décision a été frappée d'appel et, par arrêt du 14 septembre 2011, rectifié le 14 novembre 2012 sur une erreur de référence cadastrale, la cour d'appel de Poitiers, infirmant le rejet de la demande de prestation compensatoire, a accordé à Mme [Z] un capital de 95 000 euros à ce titre, sous la forme de l'abandon par M. [V] de sa part indivise dans l'immeuble précité.

Soutenant que les aspects patrimoniaux de cet arrêt étaient inopposables à la procédure collective du mari faute d'avoir été appelé en cause, le liquidateur a assigné Mme [Z] devant le tribunal de grande instance de La Rochelle pour obtenir le partage de l'indivision et, préalablement, la vente aux enchères de l'immeuble indivis.

Par jugement du 6 février 2018, le tribunal de grande instance a déclaré non avenu l'arrêt du 14 septembre 2011 en ses dispositions relatives à la prestation compensatoire du fait du dessaisissement de M. [V] et il a ordonné le partage de l'immeuble indivis avec possibilité de partage en nature ou vente amiable dans les douze mois, sous réserve de l'accord du liquidateur, ou licitation à l'expiration du délai.

Mme [Z] a relevé appel de ce jugement et, par arrêt du 23 octobre 2019, la cour d'appel de Poitiers a seulement infirmé les chefs de décision déclarant non avenu l'arrêt du 14 septembre 2011 et autorisant le partage en nature ou vente amiable de l'immeuble indivis dans les douze mois ou licitation à l'expiration du délai et, statuant à nouveau de ces chefs, la cour d'appel a:

- déclaré inopposable à la liquidation judiciaire de M. [V] le transfert de propriété de l'immeuble à titre de prestation compensatoire,

- ordonné la licitation de cet immeuble sur la mise à prix de 100 000 euros.

Mme [Z] ayant formé un pourvoi, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, par arrêt du 20 octobre 2021, a cassé dans toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers du 23 octobre 2019 pour violation de l'article L.641-9, I, du code de commerce au motif que le liquidateur, qui entend rendre inopposable à la procédure collective l'abandon, à titre de prestation compensatoire, d'un bien personnel du débiteur marié sous le régime de la séparation des biens qui a été décidé par le juge du divorce, doit exercer une tierce opposition contre cette disposition du jugement de divorce.

Les parties ont été renvoyées devant la cour d'appel de Limoges.

Par acte du 11 février 2022, le liquidateur a assigné Mme [Z] devant la cour d'appel de Limoges en tierce opposition incidente formée contre l'arrêt rendu par la cour d'appel de Poitiers le 14 septembre 2011 et l'arrêt rectificatif du 14 novembre 2012. Il demande que ces arrêts soient déclarés inopposables à la liquidation judiciaire de M. [V] en ce qu'ils ont décidé l'abandon à Mme [Z] de la part indivise de celui-ci à titre de prestation compensatoire. Il sollicite la vente aux enchères publiques sur licitation de cet immeuble.

MOYENS et PRÉTENTIONS

Mme [Z] conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de la tierce opposition incidente formée par le liquidateur pour litispendance, méconnaissance des règles d'ordre public régissant la compétence des juridictions ainsi que défaut de qualité et d'intérêt à agir. Subsidiairement, elle demande à la cour d'appel de se déclarer incompétente pour statuer sur cette tierce opposition incidente et de renvoyer les parties devant la cour d'appel de Poitiers. Très subsidiairement, sur le fond, Mme [Z] demande que le liquidateur soit débouté de son action en l'absence de tierce opposition formée contre l'arrêt lui accordant une prestation compensatoire.

Le liquidateur demande la jonction de sa tierce opposition à la procédure sur renvoi de cassation. Il conclut à la confirmation du jugement du 6 février 2018. Subsidiairement, il demande d'accueillir sa tierce opposition incidente et de déclarer inopposables à la liquidation judiciaire de M. [V] l'arrêt rendu par la cour d'appel de Poitiers le 14 septembre 2011 et l'arrêt rectificatif du 14 novembre 2012 en ce qu'ils ont décidé l'abandon à Mme [Z] de la part indivise de celui-ci à titre de prestation compensatoire. Il sollicite la vente aux enchères publiques sur licitation de cet immeuble.

MOTIFS

Il convient de bien distinguer la procédure de divorce d'entre les époux [V]-[Z] de l'action engagée par le liquidateur tendant à voir déclarer la décision du juge du divorce relative à la prestation compensatoire inopposable à la procédure collective du mari.

Il doit être rappelé que Mme [Z] a déposé sa requête en divorce devant le juge aux affaire familiales de Rochefort le 15 juillet 2007, après ordonnance de non conciliation du 13 juillet 2007.

M. [V] a été mis en liquidation judiciaire le 13 mars 2008.

Mme [Z] a assigné son mari en divorce le 12 janvier 2010.

La Cour de cassation rappelle dans son arrêt du 20 octobre 2021 que, nonobstant le dessaisissement de M. [V] de l'administration et de la disposition de ses biens par l'effet de sa liquidation judiciaire, ce dernier avait qualité pour défendre seul à l'action en divorce engagée par son épouse et que ce droit propre s'étendait à la demande de prestation compensatoire formée par celle-ci.

Statuant sur l'appel formé par Mme [Z] à l'encontre du jugement rendu le 9 septembre 2010 par le juge aux affaires familiales de Rochefort qui rejetait sa demande de prestation compensatoire, la cour d'appel de Poitiers, par arrêt du 15 septembre 2011, a réformé ce chef de décision pour condamner M. [V] à payer à Mme [Z] un capital de 95 000 euros à titre de prestation compensatoire qui prendra la forme d'un abandon au profit de celle-ci de la part indivise de son mari sur l'immeuble de [Localité 3].

Saisi par le liquidateur de M. [V] qui, prétextant son absence à la procédure de divorce, lui demandait de déclarer inopposables à la liquidation judiciaire le jugement de divorce du 9 septembre 2010 et l'arrêt du 15 septembre 2011, ainsi que l'arrêt rectificatif du 14 novembre 2012, le tribunal de grande instance de La Rochelle, par le jugement déféré du 6 février 2018, a déclaré l'arrêt du 14 septembre 2011 'non avenu' après avoir retenu que M. [V] était dessaisi de ses droits et actions sur son patrimoine en vertu de l'article L.641-9 du code de commerce.

Or, cette motivation méconnaît le droit propre reconnu à M. [V] -rappelé par la Cour de cassation- qui donne qualité à ce dernier pour défendre seul à l'action en divorce engagée par son épouse, droit qui s'étend à la défense à la demande de prestation compensatoire formée par celle-ci.

Dans son arrêt du 20 octobre 2021, la Cour de cassation dit pour droit que le liquidateur, qui entend rendre inopposable à la procédure collective l'abandon, à titre de prestation compensatoire, d'un bien personnel du débiteur marié sous le régime de la séparation des biens qui a été décidé par le juge du divorce, doit exercer une tierce opposition contre cette disposition du jugement de divorce. Cette juridiction en déduit au cas d'espèce (paragraphe 11 de l'arrêt) qu'il incombait au liquidateur de M. [V] de former tierce opposition au jugement de divorce pour faire déclarer inopposable à la liquidation judiciaire la disposition de ce jugement ayant décidé l'abandon à Mme [Z] de la part de M. [V] dans l'immeuble acquis par eux en indivision.

Pour prétendre satisfaire aux prescriptions de la Cour de cassation, le liquidateur de M. [V] a, par acte du 11 février 2022, assigné Mme [Z] devant la cour d'appel de Limoges en 'tierce opposition incidente' formée contre l'arrêt rendu par la cour d'appel de Poitiers le 14 septembre 2011 et l'arrêt rectificatif du 14 novembre 2012.

Le liquidateur, qui n'était pas partie à la procédure de divorce de M. [V], est recevable à former une tierce opposition contre les arrêts précités.

Cependant, l'article 588, alinéa 1er, du code de procédure civile dispose que la tierce opposition incidente à une contestation dont est saisie une juridiction est tranchée par cette dernière si elle est de degré supérieur à celle qui a rendu le jugement ou si, étant d'égal degré, aucune règle de compétence d'ordre public n'y fait obstacle.

La cour d'appel de Limoges, juridiction de renvoi sur l'action engagée par le liquidateur, est d'un degré égal à la cour d'appel de Poitiers qui a statué sur la prestation compensatoire réclamée par Mme [Z]. Mais la cour d'appel de Limoges n'est pas juge d'appel des décisions rendues par le juge aux affaires familiales de Rochefort qui est le juge du divorce compétent y compris pour statuer sur les demandes de prestations compensatoires, sauf à méconnaître les règles d'ordre public qui régissent la compétence de la juridiction du divorce. La portée de l'arrêt de cassation renvoyant les parties devant la cour d'appel de Limoges est limitée à l'action engagée par le liquidateur et ne saurait emporter dévolution du litige relatif à la prestation compensatoire.

La cour d'appel de Limoges n'est donc pas compétente pour statuer sur la tierce opposition du liquidateur, laquelle devra être formée devant la cour d'appel de Poitiers.

Il sera surabondamment observé que le liquidateur n'a assigné en tierce opposition incidente que la seule Mme [Z], alors même que son mari a évidemment vocation à être partie à cette procédure en vertu de son droit propre à défendre seul à cette action relative à la prestation compensatoire dont il est débiteur.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'arrêt rendu le 20 octobre 2021 par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation;

ORDONNE la jonction de la tierce opposition incidente formée par Me [P] [Y], liquidateur judiciaire de M. [J] [V], contre l'arrêt rendu par la cour d'appel de Poitiers le 14 septembre 2011 et l'arrêt rectificatif du 14 novembre 2012, avec la procédure de renvoi après cassation opposant Mme [S] [Z] à Me [P] [Y], es qualités;

Se DÉCLARE incompétente au profit de la cour d'appel de Poitiers pour statuer sur la tierce opposition formée par Me [P] [Y], liquidateur judiciaire de M. [J] [V], contre l'arrêt rendu par la cour d'appel de Poitiers le 14 septembre 2011 et l'arrêt rectificatif du 14 novembre 2012;

INFIRME le jugement rendu le 6 février 2018 par le tribunal de grande instance de La Rochelle, sauf en sa disposition rejetant l'exception d'incompétence de Mme [S] [Z];

Statuant à nouveau,

DÉBOUTE Me [P] [Y], liquidateur judiciaire de M. [J] [V], de son action;

Vu l'équité, DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;

DIT que les dépens seront pris en frais privilégiés de la liquidation judiciaire de M. [J] [V].

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

Sophie MAILLANT. Corinne BALIAN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/00990
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;21.00990 ?
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