ARRET N° .
N° RG 21/00254 - N° Portalis DBV6-V-B7F-BIF5N
AFFAIRE :
M. [P] [I], Mme [N] [Z]
C/
S.A.M.C.V. SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TR AVAUX PUBLICS 'SMABTP' représentée par le Président de son Conseil d'Administration domicilié en cette qualité au siège de la société., S.A. CAISSE DE GARANTIE IMMOBILIERE DU BATIMENT Société Anonyme Directoire - au capital de 20.887.500 €, inscrite au RCS de PARIS : B 432147049, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
MCS/MS
Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction
Grosse délivrée à Me Solange DANCIE, Me Christophe DURAND-MARQUET, Me Michel LABROUSSE, avocats,
COUR D'APPEL DE LIMOGES
Chambre civile
---==oOo==---
ARRET DU 16 JUIN 2022
---===oOo===---
Le SEIZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX la chambre civile a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
Monsieur [P] [I]
né le 16 Octobre 1968 à [Localité 6], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Michel LABROUSSE de la SCP SCP D'AVOCATS MICHEL LABROUSSE - CELINE REGY - FRANCOIS ARMA ND & ASSOCIES, avocat au barreau de TULLE
Madame [N] [Z]
née le 23 Mars 1979 à [Localité 5], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Michel LABROUSSE de la SCP SCP D'AVOCATS MICHEL LABROUSSE - CELINE REGY - FRANCOIS ARMA ND & ASSOCIES, avocat au barreau de TULLE
APPELANTS d'une décision rendue le 08 FEVRIER 2021 par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE TULLE
ET :
S.A.M.C.V. SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS 'SMABTP' représentée par le Président de son Conseil d'Administration domicilié en cette qualité au siège de la société., demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Christophe DURAND-MARQUET, avocat au barreau de LIMOGES substitué par Me Virgile RENAUDIE, avocat au barreau de BRIVE
S.A. CAISSE DE GARANTIE IMMOBILIERE DU BATIMENT Société Anonyme Directoire - au capital de 20.887.500 €, inscrite au RCS de PARIS : B 432147049, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Solange DANCIE de la SCP SCP DEBLOIS DANCIE, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEES
---==oO§Oo==---
Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 07 Avril 2022. L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 février 2022.
La Cour étant composée de Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre, de Monsieur Gérard SOURY et de Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseillers, assistés de Mme Sophie MAILLANT, Greffier. A cette audience, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, a été entendu en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 25 mai 2022 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
La mise à disposition de cette décision a été prorogée au 09 juin 2022, puis au 16 juin 2022, et les avocats régulièrement avisés.
---==oO§Oo==---
LA COUR
---==oO§Oo==---
Exposé du litige:
Par contrat du 11 avril 2012, M. [P] [I] et Mme [N] [Z] ont confié à la société Centre Ouest Construction la construction d'une maison individuelle sur un terrain leur appartenant, situé à [Localité 4] (19), moyennant la somme révisée de 111 971,46 euros TTC.
Les travaux ont débuté le 11 mars 2013 et les consorts [I]- [Z] ont pris possession de l'ouvrage au mois d'avril 2014.
Exposant avoir procédé à la réception de l'immeuble inachevé avec réserves le 28 mars 2014, sans que l'intervention ultérieure de la société Centre Ouest Construction ne permette d'y remédier, M. [I] et Mme [Z] ont refusé de régler la retenue de garantie et ont fait assigner la SARL Centre Ouest Construction, la SMABTP, son assureur dommage-ouvrage et responsabilité décennale, ainsi que la SA Caisse de garantie immobilière du bâtiment ( CGI BAT), garant de livraison, aux fins d'expertise judiciaire.
Une expertise judiciaire a été ordonnée par arrêt de la Cour d'appel de Limoges du 11 février 2016. L'expert a établi son rapport définitif le 2 décembre 2016 et conclut à l'existence de désordres concernant :
* les volets en bois,
* l'absence d'ajustement des volets en bois de la chambre,
* le scellement des gonds des volets,
* le scellement des arrêts 'marseillais',
* les buttoirs Dardenne,
* l'enduit extérieur,
* la base d'enduit inachevée et l'absence de plinthe,
* l'absence de dépose d'un coffrage en parpaing agglo creux en ciment
* la fixation du radiateur sèche serviettes de la salle de bain,
* le support des consoles radiateurs électriques des 2 chambres,
* le défaut de fonctionnement entre la porte des WC et la porte de la chambre,
* le carrelage mural de la cuisine non réalisé,
* la robinetterie de la cuisine,
* la serrure de la porte d'entrée.
La société Centre Ouest Construction étant placée en liquidation judiciaire le 9 juin 2015,son mandataire judiciaire, la SCP LEURET PIMOUGUET est intervenue volontairement à l'expertise.
Compte tenu des interrogations de l'expert sur la nature des cloisons de distribution, potentiellement contraires aux règles de l'art et aux spécifications contractuelles, M. [I] et Mme [Z] ont sollicité une nouvelle expertise judiciaire, laquelle a été accordée par ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Tulle du 28 février 2017.
L'expert a déposé son rapport définitif le 13 février 2018 .Il conclut à l'existence d'une non-conformité d'ordre contractuel des cloisons de distribution qui ne rend pas l'ouvrage impropre à destination et ne l'affecte pas dans sa solidité générale.
Par acte d'huissier du 17 avril 2018, M. [I] et Mme [Z] ont fait assigner la société SMABTP et la SA CGI BAT aux fins de condamnation solidaire à leur payer la somme de 81 071,08 € au titre de leurs préjudices matériel, de jouissance et moral ainsi qu'aux fins de condamnation de la SA CGI BAT à lui verser la somme de 2 948 € au titre des pénalités de retard.
Par jugement contradictoire du 8 février 2021, le tribunal judiciaire de Tulle a :
-déclaré irrecevable l'action engagée contre la SMABTP, en qualité d'assureur dommage ouvrage ;
-débouté M. [I] et Mme [Z] de l'ensemble de leurs demandes dirigées contre la CGI BAT ;
-condamné la SMABTP, en qualité d'assureur décennal de la SARL Centre Ouest Construction, à verser à M. [I] et Mme [Z] la somme de 204 € en réparation de leur préjudice matériel résultant d'un défaut de fixation du radiateur sèche serviettes de la salle de bain ;
-débouté la SMABTP, de sa demande de déduction du solde du marché non versé par M. [I] et Mme [Z] de sa condamnation ;
-condamné la SMABTP, en qualité d'assureur décennal de la SARL Centre Ouest Construction, à verser à M. [I] et Mme [Z], la somme de 400 € en réparation de leur préjudice de jouissance ;
-débouté M. [I] et Mme [Z] de leur demande au titre d'un préjudice moral ;
-condamné la SMABTP à verser à M. [I] et Mme [Z] la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
-condamné la SMABTP aux dépens de l'instance ;
-ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;
-débouté les parties du surplus de leurs demandes.
****
Appel de la décision a été relevé le 18 mars 2021 par M. [P] [I] et Mme [N] [Z] dans des conditions de forme et de délai non du chef de toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a :
* débouté la SMABTP de sa demande de déduction du solde du marché non versé de sa condamnation ;
* condamné la SMABTP au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
* ordonné l'exécution provisoire.
.
L'affaire a été orientée à la mise en état .
****
Par dernières conclusions signifiées et déposées le 28 octobre 2021,M. [P] [I] et Mme [N] [Z] demandent à la Cour de réformer le jugement en ses dispositions critiquées et de :
-condamner solidairement la SMABTP, ès qualité d'assureur décennal de la société Centre Ouest Construction et d'assureur dommage-ouvrage, et la CGI BAT à leur payer la somme de 68 071,08 € au titre de leur préjudice matériel ;
-condamner la SMABTP, es qualité d'assureur décennal de la société Centre Ouest Construction, et d'assureur dommages-ouvrage, à leur payer la somme de :
* 8 000 € au titre de leur préjudice de jouissance ;
* 5 000 € au titre de leur préjudice moral ;
- condamner la CGI BAT à leur payer la somme de 2 948 € au titre des pénalités de retard ;
- rejeter l'appel incident formé par la SMABTP ;
-condamner les parties succombantes à supporter les dépens, comprenant les frais de la procédure en référé et d'expertise judiciaire, ainsi qu'à leur payer une somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
****
Par conclusions signifiées et déposées le 28 juillet 2021, la SMABTP demande à la Cour de:
- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action engagée contre elle en qualité d'assureur dommages-ouvrage ;
- réformer pour le surplus la décision entreprise ;
statuant à nouveau
- débouter M. [I] et Mme [Z] de leurs demandes formées à son encontre en qualité d'assureur décennal de la société Centre Ouest Construction ;
subsidiairement,
-limiter les désordres décennaux au fixation des radiateurs et attribuer une somme de 465 € à M. [I] et à Mme [Z], somme qui sera déduite du solde du marché qu'ils n'ont pas versé ;
-les débouter de leur demande tendant à sa condamnation de la SMABTP en qualité d'assureur décennal de la société Centre Ouest Construction à réparer les préjudices immatériels ;
-juger que le restant des désordres relève de la garantie de CGI BAT ;
en toute hypothèse,
-condamner in solidum M. [I] et Mme [Z], ou toute autre partie succombante, à lui verser une indemnité de 3 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
-les condamner, sous la même solidarité, ou toute autre partie succombante, aux dépens de première instance et d'appel en accordant pour ces derniers à Maître Christophe DURAND-MARQUET, avocat, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
****
Par conclusions signifiées et déposées le 23 août 2021, la SA CGI BAT demande à la Cour de :
à titre principal
- confirmer le jugement critiqué ;
à titre subsidiaire
-débouter M. [I] et Mme [Z] de leur demande de condamnation solidaire ;
-prendre acte que la garantie peut être mise en 'uvre sous réserve de la franchise et conformément aux dispositions de l'article L231-6 du code de la construction et de l'habitation ;
-constater que la franchise applicable correspond à 5% du montant de la construction, soit 5 598,57 € ;
en tout état de cause
-condamner M. [I] et Mme [Z] ou toute partie succombante à lui verser la somme de 5 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
****
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 16 février 2022.
La Cour pour un plus ample exposé des faits ,de la procédure ,des demandes et moyens des parties ,fait expressément référence à la décision entreprise ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
*Sur les désordres, malfaçons et défauts de conformité dont les consorts [I]- [Z] sollicitent réparation :
Les consorts [I]- [Z] sollicitent la condamnation solidaire de la SMABTP, prise en sa double qualité d'une part, d'assureur responsabilité décennale de la SARL COC et d'autre part, d'assureur dommages- ouvrage, et de la SA Caisse de Garantie Immobilière du Bâtiment prise en sa qualité de garant de livraison, au paiement de la somme de 68 071,08 € TTC au titre de leur préjudice matériel, ladite somme se décomposant de la manière suivante:
- 7456 € représentant le coût des travaux de reprise des désordres retenus par l'expert judiciaire selon l'estimation figurant dans son 1er rapport daté du 2 décembre 2016,
- 60'615,08 € correspondant au coût du remplacement des cloisons non conformes( 49'381,28 euros), au coût du déménagement (7483,80 €) et au coût d'un hébergement provisoire (3750€) selon l'estimation de l'expert judiciaire figurant dans son second rapport daté du 13 février 2018.
Il est établi que la construction a fait l'objet d'un procès verbal de réception avec réserves signé par les parties le 28 mars 2014, qu'à cette date, l'ouvrage n'était pas encore achevé, que divers travaux restaient à effectuer lesquels ont été réalisés postérieurement , que les maîtres d'ouvrage ont pris pour possession de l'immeuble et y ont habité à compter du 20 avril 2014.
Dans leurs écritures devant la cour, ils réaffirment leur volonté de réceptionner l'ouvrage le 28 mars 2014 ; dans un courrier qui leur était adressé, le gérant de la SARL COC indiquait que la réception avait eu lieu à leur demande expresse.
Il s'évince de ces éléments, la volonté commune des parties de réceptionner l'ouvrage le 28 mars 2014, étant rappelé que l'achèvement de l'ouvrage n'est pas une condition de sa réception.
Dans ces conditions, il n'existe aucun motif pour reporter la date de la réception de l'ouvrage au 25 juin 2014 comme le demande la SMABTP.
Les 7 réserves mentionnées au procès-verbal de réception du 28 mars 2014 ont toutes été levées entre le 8 avril 2014 et le 25 juin 2014. Elles ne font pas l'objet des demandes présentées par les consorts [I]- [Z] dans le cadre du présent litige.
*Sur la recevabilité de l'action des consorts [I]- [Z] à l'encontre de la SMABTP prise en sa qualité d'assureur dommages- ouvrage et sur sa demande de mise hors de cause:
C'est par des motifs exempts de critiques que la cour adopte, que le 1er juge a déclaré irrecevable l'action exercée par les maîtres de l'ouvrage contre la SMABTP en sa qualité d'assureur dommages ouvrage faute d'avoir effectué dans le délai imparti et dans les conditions prévues par les textes et le contrat, une déclaration de sinistre auprès de leur assureur, étant rappelé que cette déclaration de sinistre ne peut être effectuée sous la forme d'une assignation en justice comme le prétendent à tort les consorts [I]- [Z].
La décision entreprise sera confirmée de ce chef.
*Sur la recevabilité de l'action des consorts [I]- [Z] contre la SMABTP prise en sa qualité d'assureur décennal de l'entreprise COC:
Les maîtres d'ouvrages disposent d'une action directe contre la SMABTP en tant qu'assureur de l'entreprise COC et leur action dirigée contre cet assureur pris en sa qualité d'assureur de responsabilité décennale est recevable.
*Sur le bien-fondé de l'action des consorts [I]- [Z] à l'encontre de la SMA BTP prise en sa qualité d'assureur de responsabilité décennale de la SARL COC :
Cette action indemnitaire à l'encontre de l'assureur en responsabilité décennale ne peut aboutir que si les désordres et malfaçons dont les maîtres d'ouvrages sollicitent réparation ont la nature de désordres ou de malfaçons à caractère décennal.
-Sur le défaut de conformité des cloisons au contrat:
La seconde expertise effectuée par Monsieur [C], désigné par ordonnance de référé du 28 février 2017, a révélé que l'entreprise avait réalisé des cloisons en panneaux alvéolaires à la place de cloisons PLacostyl prévues au contrat ; l'expert judiciaire indique que c'est une 'malfaçon d'ordre contractuel', qu'il ne s'agit pas d'une malfaçon de construction ou d'un désordre. Il ajoute que cette non-conformité ne rend pas l'ouvrage impropre à sa destination et ne l'affecte pas dans sa solidité générale; il précise seulement que la cloison réalisée a une
résistance mécanique légèrement inférieure à la cloison Placostyl et qu'elle a des performances inférieures en ce qui concerne l'isolation phonique
Il a précisé que la cloison Placostyl est plus coûteuse à réaliser qu'une cloison alvéolaire.
Il a chiffré la moins-value à la somme de 2412 € TTC avec conservation des cloisons distribution alvéolaires. Il a précisé qu'il n'était pas en mesure de chiffrer le préjudice subi par les maîtres d'ouvrage en raison du fait que les performances de la cloison PLACOSTYL particulièrement dans l'isolation phonique sont supérieures à celles mises en place.
Il a chiffré également les travaux consistant à remplacer les cloisons alvéolaires par des cloison Placostyl (60'615,08 €).
Les demandes présentées par les maîtres d'ouvrage contre la SMABTP, assureur de la SARL COC sont fondées sur la responsabilité décennale du constructeur prévue par l'article 1792 du Code civil. Or, s'il est établi que la mise en place de cloisons alvéolaires à la place des cloisons prévues au contrat constitue un défaut de conformité, l'expert judiciaire a bien précisé que ce défaut de conformité ne rendait pas l'ouvrage impropre à sa destination et ne l'affectait pas dans sa solidité générale. Il indique seulement que la cloison réalisée a une résistance mécanique légèrement inférieure à la cloison Placostyl et a des performances en matière d'isolation acoustique moindre.
Le défaut de conformité des cloisons aux stipulations contractuelles ne revêt pas le caractère d'une malfaçon à caractère décennal dès lors que l'expert judiciaire a précisé que les cloisons alvéolaires mise en place ne compromettaient pas la solidité de l'ouvrage ni ne le rendait impropre à sa destination. Les consorts [I]- [Z] ne produisent aucun élément technique qui viendrait contredire les conclusions expertales qui seront donc retenues.
Les consorts [I]- [Z] seront en conséquence déboutées
de leur demande en paiement de la somme de 60'615,08 € à l'encontre de la SMA BTP.
- Sur les désordres et malfaçons décrits par le rapport d'expertise du 2 décembre 2016 :
Seront seuls retenus comme désordres ou malfaçons à caractère décennal, ceux compromettant la solidité de l'ouvrage ou créant une impropriété de destination. Il sera rappelé que les désordres apparents sont couverts par la réception et n'ouvrent pas droit à une action en responsabilité décennale.
1-Pour les volets bois et leurs équipements accessoires :
*Le remplacement du volet de la chambre qui n'a pas été ajusté à l'ouverture maçonnerie ,ce qui le rend impropre à sa destination, sera accordé , soit la somme de 804 € TTC pour sa remise en état;
S'agissant des autres volets, l'expert judiciaire précise qu'ils ne sont pas voilés ,que les lattes des volets bois ont fait uniquement du retrait, qu'il n'y a aucun motif technique pour les remplacer qu'il convient simplement de les repeindre et que cette réparation relevait de la garantie de parfait achèvement .
Dans ces conditions, il sera jugé que les autres volets n'étant pas affectés de désordres ou malfaçons à caractère décennal, la demande en paiement de la somme de 1130,40 € TTC telle qu'estimée par l'expert judiciaire sera rejetée.
*Pour le scellement des gonds des volets bois,, l'expert judiciaire précise que 18 gonds sur 20 ont du jeu; ils bougent sur l'axe de l'encastrement à la man'uvre du volet, il en résulte notamment une fissure de l'enduit et probablement de la surface brique autour du scellement des gonds. Il précise que ce sont des désordres qui vont dans le temps engendrer un descellement des gonds et des dysfonctionnements d'ouverture et fermeture des volets . Cette malfaçon dans la réalisation du scellement des gonds des volets a le caractère d'une malfaçon décennale, dès lors que l'expert indique qu'au cours des années à venir ,avec les différentes man'uvres d'ouverture et fermeture des volets, plus l'action du vent, plus l'accident possible: volet mal accroché qui bat au vent ,la cheville va se desceller et le gond ne sera plus tenu au mur, le volet prendra du jeu sur les autres gonds pour aboutir à sa chute ;ce défaut va se généraliser à tous les gonds avec aggravation jusqu'au décollement de l'enduit périphérique du gond.
Ces malfaçons qui ont une nature décennale, justifient d'allouer au maître de l'ouvrage au titre de la remise en état (scellement des gonds , reprise fissure existante de l'enduit plus brique ) la somme de 3283,20 € TTC selon l'estimation de l'expert, détaillée en page 37 et 38 de son rapport.
*Scellement des arrêts marseillés des volets et reprise de l'enduit de façade:
L'expert judiciaire a constaté que les arrêts marseillés tournent, les chevilles se dévissent et prendront du jeu au cours des années , il a constaté l'éclatement d'enduits à certains arrêts. Il a précisé que le scellement des arrêts marseillais par cheville aurait dû être réalisé avant la réalisation des enduits, il a chiffré à la somme de 180 € TTC le coût de la remise en état.
Cette somme sera allouée au maître d'ouvrage
*Butoirs dardennes des volets en sous linteau:
L'expert judiciaire précise que malgré leur fixation par visserie, ces butoirs pivotent et se détachent. Un est tombé, il précise que la fixation est dans l'épaisseur de la brique et que de ce fait, cette vis ne tient pas parfaitement ; il précise qu'il aurait fallu poser des chevilles et des vis plus long pour scellement dans le béton du linteau. Il indique qu'en raison de ce désordre, le butoir dardenne se déplace, n'est pas parallèle à la façade , à la fermeture le volet ne plaque pas correctement contre le butoir à la fenêtre, le volet n'est pas tenu en linteau et prend du jeu avec vibration sous l'effet du vent. Il propose de remplacer la visserie trop courte ainsi que les chevilles par d'autres plus longues pour scellement dans le linteau béton soit un coût de 108 € TTC. Il s'agit d'une malfaçon de conception et réalisation qui compromet la solidité des volets Il est justifié d'allouer aux maîtrex d'ouvrage la somme de 108 € TTC
2- Sur les désordres relatifs aux enduits extérieurs:
L'expert judiciaire a relevé qu'un enduit s'était détaché à l'arrête de l'avant-toit, qu'il existait une fissuration et un décollement d'enduit aux extrémités des appuis de fenêtres PVC. Il a toutefois considéré qu'il s'agissait de désordres d'ordre esthétique ne mettant pas en cause la solidité de l'ouvrage ; dans ces conditions, la somme de 230 € TTC réclamée sur la base de l'estimation de l'expert en page 42 de son rapport sera rejetée
3-Sur la base des enduits façades arrière côté sud:
Il précise que sur cette façade, l'enduit monocouche n'a pas été arrêté correctement sa base ; il n'a pas été réalisé d'arrête. Il qualifie ce désordre d'ordre esthétique ; il a chiffré à la somme de 396 € TTC le coût de la remise en état. Au regard du caractère esthétique de cette malfaçon la demande en paiement de ladite somme par les maîtres d'ouvrage sera rejetée
4- Sur la présence d'un parpaing agglo creux ciment au pied d'un poteau circulaire:
L'expert judiciaire a relevé qu'un agglo creux ciment a été utilisé pour le coffrage de la fondation d'un poteau et qu'il n'a pas été déposé en fin de travaux. Il dépasse du sol extérieur engazonné peut devenir dangereux. L'expert judiciaire a chiffré à la somme de 91,20 € TTC le coût de retrait de cet agglo .Cette somme sera allouée au maître d'ouvrage
5- Sur la fixation du radiateur sèche serviette salle de bains 2:
L'expert indique que la fixation du radiateur sur cloison a cédé et que le radiateur a chuté sur le sol; l'expert judiciaire indique qu'au regard de la nature alvéolaire de la cloison de distribution il faut réaliser un support en applique sur la cloison qui répartit les charges sur une plus grande surface que 4 chevilles. La malfaçon à l'origine du désordre est celle du type de fixation choisi sur ce type de cloison, l'expert judiciaire chiffre à la somme de 204 € TTC le coût de la fixation du radiateur sèche serviette. Cette somme sera accordée
6-Sur la fixation des supports console radiateurs électriques rayonnant dans les chambres:
L'expert judiciaire précise que le scellement a cédé pour les mêmes raisons que pour le radiateur sèche serviette de la salle de bains ; il sera alloué au maître de l'ouvrage la somme de 252 TTC dès lors que ce désordre a une nature décennale.
7 -Sur le défaut de fonctionnement entre 2 portes:
L'expert judiciaire a relevé que la porte WC sous côté extérieur, poignée proche de la porte de la chambre, porte qui s'ouvre côté intérieur avec poignée côté porte WC. Il a considéré qu'il s'agissait d'une malfaçon de conception la porte WC aurait dû s'ouvrir côté intérieur' ce qui était possible;
Cette malfaçon de conception était visible à la réception ,la somme de 44 € TTC estimée pour y remédier sera rejetée
8-Sur le carrelage mural non réalisé dans la cuisine :
Le carrelage mural de la cuisine n 'a pas été posé . il a été livré et stocké dans la salle de bains il ne s'agit pas d'un désordre nature décennal mais d'un travail inachevé par l'entreprise mise en liquidation judiciaire
Le coût de la pose du carrelage chiffré à 340,80 € par l'expert judiciaire ne saurait être mis à la charge de la SMA BTP
9- Sur le vantail de la fenêtre de la cuisine qui bute sur la robinetterie l'expert judiciaire précise que la fenêtre de la cuisine bute sur la robinetterie L'expert judiciaire mentionne que cette malfaçon résulte de la conception défectueuse entre l'hauteur de l'allège de la fenêtre et la robinetterie posée et que cette malfaçon n'a pas été mise en réserve au PV de réception du 28 mars 2014 ; dans ces conditions, ce défaut de conception apparent a été couvert par la réception et aucune somme ne saurait être allouée au maître d'ouvrage
10-Sur le dysfonctionnement de la serrure de la porte d'entrée ,l'expert judiciaire a noté un dysfonctionnement de la serrure précisant qu'il est nécessaire de la remplacer et qu'il n'est pas en mesure de préciser l'origine de cette malfaçon ;dans ces conditions la demande en paiement de la somme de 84 € TTC correspondant au coût de la fourniture et de la pose d'une serrure sera rejetée.
Au total, la SMABTP en sa qualité d'assureur responsabilité décennale de la SARL COC sera condamnée à payer aux consorts [I]- [Z], la somme totale de 4922,40 € au titre des désordres et malfaçons à caractère décennal dont la SARL COC est responsable.
La SMABTP n'a pas qualité pour demander que la somme de 4922,40 € soit déduite du solde du marché (5598€) que les consorts [I]- [Z] n'ont pas versé à la SARL COC.
Elle est en revanche fondée à solliciter le rejet des demandes présentées par les maîtres d'ouvrages au titre du préjudice de jouissance et du préjudice moral s'agissant de préjudices immatériels non couverts par l'assurance obligatoire.
*Sur l'action de consorts [I]- [Z] à l'encontre de la SA Caisse de garantie immobilière du bâtiment (CGI BAT):
Les conditions générales de l'acte de cautionnement (article 1er )stipulent que l'engagement de la CGI BAT est limité d'une part, au dépassement du prix excédant 5 % du prix garanti de la construction, d'autre part, aux pénalités forfaitaires prévues au contrat en cas de retard de livraison excédant 30 jours.
L'article 2 des conditions générales intitulé' durée de la garantie' dispose que la garantie de la Caisse de garantie cessera :
a).......
b) lorsque le maître d'ouvrage ne se fait pas assister par 1 professionnel habilité, 8 jours après la réception des travaux, si dans ce délai aucune réserve n'a été formulée par écrit(lettre recommandée avec accusé de réception) ou en cas de réserves, lorsque celles-ci seront levées.
Les pénalités de retard cesseront de courir à la réception de la maison faite avec ou sans réserve ou à la livraison ou à la prise de possession de celle-ci par le maître d'ouvrage.
En l'espèce, les travaux ont débuté le 11 mars 2013, le constructeur était tenu contractuellement de livrer la construction le 11 avril 2014, la réception des travaux est intervenue le 28 mars 2014, les maîtres d'ouvrage prenant possession de la construction le 20 avril 2014.
Dans ces conditions, les maîtres d'ouvrage ayant pris possession de l'ouvrage le 20 avril 2014, ils ne peuvent réclamer à la Caisse de garantie du bâtiment aucune pénalité de retard en l'absence de retard de livraison excédant 30 jours. Leur demande en paiement de la somme de 2 948 € sera rejetée.
En outre, si un procès-verbal de réception avec réserves a été établi, il sera relevé que toutes les réserves ont été levées et que les demandes présentées par les maîtres de l'ouvrage dans le cadre de la présente instance n'ont fait l'objet d'aucune réserve à la réception ni dans les 8 jours suivants. La garantie de la Caisse de Garantie du Bâtiment ne peut donc être mobilisée par les maîtres d'ouvrages pour les demandes qu'ils présentent dans le cadre de la présente instance; dans ces conditions, ils doivent être déboutés de l'ensemble de leurs demandes dirigées à l'encontre de la SA Caisse de garantie immobilière du bâtiment( CGI BAT) et la décision du 1er juge sera confirmée de ce chef.
*Sur les demandes accessoires
L'équité commande de condamner la SMABTP à payer aux consorts [I]- [Z] la somme de 2000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, en sus de la somme allouée par le premier juge.
La SMABTP sera déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il serait en outre inéquitable de laisser la Caisse de Garantie du Bâtiment supporter l'intégralité des frais qu'elle a dû exposer pour faire assurer la défense de ses intérêts en cause d'appel ; il lui sera alloué une somme de 1500 € au paiement de laquelle les consorts [I]- [Z] seront condamnés et elle sera déboutée su surplus de sa demande.
---==oO§Oo==---
PAR CES MOTIFS
---==oO§Oo==---
LA COURÂ
Statuant par décision Contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a :
-limité la condamnation de la SMABTP à verser aux consorts [P] [I]- [N] [Z] la somme de 204 € en réparation de leur préjudice matériel résultant d'un défaut de fixation du radiateur sèche serviette de la salle de bains,
-condamné la SMABTP à leur payer la somme de 400 € en réparation de leur préjudice de jouissance,
Statuant de nouveau des chefs infirmés,
Condamne la SMABTP à payer au consorts [P] [I]-[N] [Z] en sus de la somme de 204€ accordée par le premier juge, la somme complémentaire de 4718,40€ TTC au titre du préjudice matériel résultant des désordres et malfaçons à caractère décennal affectant les travaux réalisés par la SARL COC
Déboute les consorts [I]- [Z] de leur demande en réparation d'un préjudice de jouissance et d'un préjudice moral par la SMABTP,
Y ajoutant,
Condamne la SMABTP à payer aux consorts [P] [I]-[N] [Z] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2000 € au titre de leurs frais irrépétibles exposés en cause d'appel,
Condamne les consorts [I]- [Z] à verser à la Caisse de Garantie Immobilière du Bâtiment la somme de 1500 € au titre de ses frais irrépétibles exposés en cause d'appel
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Dit que les dépens d'appel seront supportés par la SMABTP.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
Sophie MAILLANT. Corinne BALIAN.