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15/06/2022 | FRANCE | N°21/00543

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre sociale, 15 juin 2022, 21/00543


ARRÊT N° .



N° RG 21/00543 - N° Portalis DBV6-V-B7F-BIHAD







AFFAIRE :



S.A.S. SEMACA

C/

[M] [X]







GV/MLM





Demande en exécution d'engagements conventionnels, ou tendant à sanctionner leur inexécution

















































G à Me [B] le 15/6/22







COUR D'APPEL DE LI

MOGES



CHAMBRE ECONOMIQUE ET SOCIALE

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ARRÊT DU 15 JUIN 2022

-------------





Le quinze Juin deux mille vingt deux, la Chambre économique et Sociale de la Cour d'Appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :



ENTRE :



S.A.S. SEMACA prise en la personne...

ARRÊT N° .

N° RG 21/00543 - N° Portalis DBV6-V-B7F-BIHAD

AFFAIRE :

S.A.S. SEMACA

C/

[M] [X]

GV/MLM

Demande en exécution d'engagements conventionnels, ou tendant à sanctionner leur inexécution

G à Me [B] le 15/6/22

COUR D'APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE ECONOMIQUE ET SOCIALE

------------

ARRÊT DU 15 JUIN 2022

-------------

Le quinze Juin deux mille vingt deux, la Chambre économique et Sociale de la Cour d'Appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :

ENTRE :

S.A.S. SEMACA prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, dont le siège social est [Adresse 2]

représentée par Me Matthias WEBER, avocat au barreau de POITIERS, vestiaire : 65

APPELANTE d'un jugement rendu le 01 Juin 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LIMOGES

ET :

[M] [X], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assisté de M. [I], défenseur syndical muni d'un pouvoir régulier

INTIME

---==oO§Oo==---

L'affaire a été fixée à l'audience du 02 Mai 2022, après ordonnance de clôture rendue le 14 avril 2022, la Cour étant composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller et de Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, assistés de Monsieur Claude FERLIN, Greffier, Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, a été entendue en son rapport oral, Les conseils des parties ont été entendus en leur plaidoirie ou observations.

Puis, Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 15 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

LA COUR

EXPOSE DU LITIGE

Suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 2 juin 2009, M. [M] [X] a été engagé en qualité de VRP par la société SEMACA spécialisée dans la commercialisation aux entreprises et organismes publics de produits et matériels d'hygiène et de nettoyage.

Sa rémunération était constituée d'un salaire fixe et de commissions. La relation contractuelle est soumise à la convention collective nationale de commerces de gros en date du 23 juin 1970 (IDCC 573).

A compter du 1er janvier 2018, M. [X] a été promu au statut de cadre pour assurer les fonctions de responsable de secteur.

Le 31 mars 2020, il a fait valoir ses droits à la retraite.

Par un courrier du 25 février 2020, M. [X] a sollicité de la SAS SEMACA la régularisation de sa garantie d'ancienneté prévue par la convention collective. La société SEMACA lui a répondu par courrier du 6 avril 2020 qu'il avait été rempli de ses droits.

==0==

Par suite, M. [M] [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Limoges le 11 août 2020 aux fins de voir condamner la SAS SEMACA à lui payer les sommes de :

- 9 053,55 € brut au titre de la régularisation de la prime d'ancienneté en application de la convention collective ;

- 905,35 € brut au titre des congés payés afférents ;

- 10 000 € net de dommages-intérêts pour inexécution de bonne foi du contrat de travail.

Par jugement rendu le 1er juin 2021, le conseil de prud'hommes de Limoges a :

- dit et jugé que M. [X] était éligible à la garantie d'ancienneté prévue par la convention collective nationale du commerce de gros non alimentaire ;

en conséquence,

- condamné la société SEMACA à verser à M. [X] les sommes de :

* 9 053,55 € brut au titre de la prime d'ancienneté,

* 905,35 € brut au titre des congés payés afférents,

* 2 500 € net de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- rappelé que l'exécution provisoire est seulement de droit en application et dans les limites de l'article R. 1454-28 du code du travail pour les créances de nature salariale, la moyenne des trois derniers mois de salaire étant de 3 944,48 € brut et qu'il n'y a pas lieu de l'ordonner pour le surplus ;

- ordonné la remise des documents légaux rectifiés et conformes au jugement sous 30 jours à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 10 € par jour de retard ;

- condamné la société SEMACA à payer à M. [X] la somme de 350 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société SEMACA aux entiers dépens.

Le 17 juin 2021, la société SEMACA a interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions.

==0==

Aux termes de ses dernières écritures déposées le 29 mars 2022, la société SEMACA demande à la cour de :

- réformer le jugement dont appel en tous ses chefs de jugement critiqués ;

Statuant à nouveau,

- débouter M. [X] de l'intégralité de ses demandes ;

- condamner M. [X] à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société SEMACA fait valoir que, conformément à l'accord du 5 mai 1992, seule une garantie d'ancienneté est instaurée et, en aucun cas, le versement d'une prime. Or, la rémunération de M. [X] a toujours été supérieure au barème de cette garantie calculée en fonction de l'ancienneté.

Ainsi, aucune prime d'ancienneté n'avait à figurer sur ses bulletins de salaire, par ailleurs parfaitement conformes aux dispositions de l'article R 3243-1 du code du travail.

Par ailleurs, aucun usage de versement d'une telle prime n'existe dans l'entreprise.

Dès lors, M. [X] ne peut pas invoquer un préjudice né d'une prétendue inexécution de bonne foi du contrat de travail.

Aux termes de ses dernières écritures déposées au greffe le 7 avril 2022, M. [M] [X] demande à la cour de confirmer le jugement du 1er juin 2021 et de condamner la SAS SEMACA à lui payer la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

M. [X] soutient remplir les critères lui permettant de bénéficier de la garantie d'ancienneté en application de la convention collective, sous forme d'une prime d'ancienneté. Il conteste la rédaction de ses bulletins de salaire qui ne lui permettent pas de vérifier sa rémunération effective, en violation des dispositions de l'article R 3243-1 du code du travail. En outre, il existe un usage au sein de la société SEMACA consistant dans le versement de cette prime d'ancienneté, nombre de ses collègues la percevant.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 avril 2022.

SUR CE,

Attaché à la convention collective nationale de commerces de gros du 23 juin 1970, l'accord du 5 mai 1992, relatif à la classification et au salaire conventionnel des salariés du secteur non alimentaire, a instauré, en son article IV, une garantie d'ancienneté dans les termes suivants :

'A. - Garantie d'ancienneté (secteur non alimentaire)

Les salariés du secteur non alimentaire bénéficient d'une garantie d'ancienneté égale à la somme des 12 salaires mensuels conventionnels de l'année civile écoulée, majorée de :

- 5 % après 4 ans d'ancienneté dans l'entreprise ;

- 9 % après 8 ans d'ancienneté dans l'entreprise ;

- 13 % après 12 ans d'ancienneté dans l'entreprise ;

- 17 % après 16 ans d'ancienneté dans l'entreprise.

Pour la détermination de l'ancienneté, on tiendra compte non seulement de la présence continue au titre du contrat en cours, mais également de la durée des contrats antérieurs, à l'exclusion toutefois de ceux qui auraient été rompus pour faute grave ou dont la résiliation aurait été du fait du salarié intéressé ou des périodes de suspension du contrat de travail.

Cette garantie s'applique à chaque salarié en fonction de son niveau et de son échelon pro rata temporis en cas de changement.

Cette garantie est également calculée prorata temporis en cas de départ de l'entreprise en cours d'année ou d'absence non assimilée à un temps de travail au sens du code du travail.

Les éléments de rémunération non pris en compte pour le calcul de la garantie d'ancienneté sont :

- les heures supplémentaires ;

- les majorations de salaires prévues par la CCN des commerces de gros 3044 ;

- les primes liées aux contraintes de l'emploi exercé ;

- les sommes versées n'ayant pas le caractère de salaire ;

-les primes de type 13e mois, c'est-à-dire toutes primes fixes annuelles calculées en référence au salaire de base'.

Ainsi, la convention collective du commerce de gros (secteur non alimentaire) prévoit une majoration individuelle du salaire conventionnel mensuel selon ce barème, le salaire de base ainsi déterminé figurant tel quel sur le bulletin de salaire déterminant la valeur du taux horaire. Ce texte prévoit ainsi une rémunération globale minimum calculée en fonction de l'ancienneté du salarié mais n'institue pas au profit de ce dernier une prime d'ancienneté (Cour de cassation Chambre sociale 16 novembre 2004 - n° 02-47.149 - jurisprudence constante).

Or, la SAS SEMACA justifie que M. [X] a perçu une rémunération globale supérieure au minimum conventionnel prévu par la garantie d'ancienneté.

Ainsi,

-en 2017, le salaire brut hors prime de M. [X] s'élevait à la somme de 43 050,72 €, alors que le minimum conventionnel s'élevait à la somme de 38 281,73 € et la garantie d'ancienneté à 2 807,33 €, soit un total de 41'089,06 € ;

-en 2018, le salaire brut hors prime de M. [X] s'élevait à la somme de 45 644,90 €, alors que le minimum conventionnel s'élevait à la somme de 38 817,67 € et la garantie d'ancienneté à la somme de 3 493,59€, soit un total de 42'311,26 € ;

-en 2019, le salaire brut hors prime de M. [X] s'élevait à la somme de 47'442,46 €, alors que le minimum conventionnel s'élevait à la somme de 39'516,82 € et la garantie d'ancienneté à 3 556,51 €, soit un total de 43'073,33 €.

M. [X] a donc perçu un salaire supérieur à la rémunération globale à laquelle il pouvait prétendre au regard de son ancienneté dans l'entreprise. Dès lors, il a été rempli de ses droits au regard de la garantie d'ancienneté prévue par la convention collective.

- En ce qui concerne l'application de l'article R 3243-1 du code du travail, les bulletins de salaire de M. [X] sont conformes à ces dispositions dans la mesure où y figurent son salaire mensuel ainsi que ses accessoires (congés payés, prime exceptionnelle en février et mars 2018, prime de fin d'année par exemple en décembre 2017...). De plus, ce texte ne prévoit pas l'obligation de faire figurer l'application du barème conventionnel relatif à la garantie d'ancienneté puisqu'il ne s'agit pas d'un accessoire de salaire. Par ailleurs, si aucun versement de commissions n'est mentionné sur ces bulletins de salaire, il convient de considérer que, faute de preuve contraire, M. [X] n'en a pas perçues.

En tout état de cause, même à supposer une violation des dispositions de l'article R 3243-1 du code du travail, la sanction n'en serait pas l'octroi d'une prime d'ancienneté.

- En ce qui concerne l'usage du paiement d'une prime d'ancienneté dans l'entreprise invoqué par M. [X], l'obligation de versement peut effectivement résulter d'un usage, dès lors que sont remplies les conditions de généralité, constance et fixité propres à cette source d'obligation (Cass. soc., 16 mars 1989, n° 87-41.105 : Bull. civ. V, n° 224). Il appartient au salarié d'en rapporter la preuve.

La condition de généralité impose que l'avantage soit reconnu à l'ensemble des salariés ou à l'ensemble d'une catégorie de personnel.

Or, M. [X] produit uniquement les fiches de paye de trois autres salariés faisant état du versement d'une prime d'ancienneté : M. [K], M. [C] et M. [O]. Or, ce dernier est salarié de la société NOUVELLE LIONEL RENAULT située à [Localité 3] (36) qui est distincte de la SAS SEMACA. Ses fiches de paye de février et juillet 2020 sont antérieures à la fusion entre la SAS SEMACA et la société NOUVELLE LIONEL RENAULT intervenue le 26 novembre 2020. Il ne faisait donc pas partie de la même entreprise aux dates considérées.

En conséquence, M. [X] ne démontre pas le caractère général du versement d'une prime d'ancienneté au sein de la SAS SEMACA à l'ensemble des salariés ou à l'ensemble d'une catégorie de personnel.

De plus, le caractère de constance dans le temps de l'octroi de cette prime n'est pas établi puisque les fiches de paye produites ne concernent que quelques mois.

L'usage n'est donc pas caractérisé.

En outre, le versement d'une prime résultant d'une erreur d'interprétation de la convention collective applicable à l'entreprise ne caractérise pas la volonté de l'employeur de créer un usage (Cass. soc., 9 juin 2017, n° 16-17.094 : JurisData n° 2017-010955 ; RJS 2017, n° 579).

Ainsi, au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient de considérer que M. [X] a été rempli de ses droits au titre de l'application de la garantie d'ancienneté. Il doit donc être débouté de sa demande en paiement par régularisation d'une prime d'ancienneté et des congés payés afférents.

Le jugement sera donc infirmé de ce chef.

- Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail

Cette demande fondée sur l'absence de versement de la prime d'ancienneté par la SAS SEMACA ne peut pas prospérer au regard des motifs ci-dessus énoncés, ce versement n'étant pas justifié.

M. [X] doit donc être débouté de sa demande présentée à ce titre.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

M. [X] succombant à l'instance, il doit être condamné aux dépens.

Il est équitable de débouter chacune des parties de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 1er juin 2021 par le conseil de prud'hommes de Limoges ;

Statuant à nouveau, DEBOUTE M. [M] [X] de l'ensemble de ses demandes ;

DEBOUTE chacune des parties de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [M] [X] aux dépens.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

Sophie MAILLANTPierre-Louis PUGNET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00543
Date de la décision : 15/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-15;21.00543 ?
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