ARRET N .
RG N : 17/00399
AFFAIRE :
M. E...  X...  Â
C/
M. Y... X..., SA CA CONSUMER FINANCE
AJ/SB
Prêt - Demande en remboursement du prêt
Grosse délivrée Ã
Me OLIVÉ
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU 20 MARS 2018
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Le vingt Mars deux mille dix huit la Chambre civile de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
Monsieur E... X...   né le [...]         à BRIVE (19100), demeurant [...]                                  Â
représenté par Me Aurélie BROUSSAUD, avocat au barreau de BRIVE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/001983 du 20/07/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Limoges)
APPELANT d'une décision rendue le 18 janvier 2017 par le tribunal d'instance de BRIVE
ET :
Monsieur Y... X... né le [...]      à HAD KOURT, demeurant [...]                               Â
représenté par Me Matthieu LACHAISE de la SELARL LH AVOCATS, avocat au barreau de BRIVE substituée par Me Alexandra DOIZON, avocat au barreau de LIMOGES
SA CA CONSUMER FINANCE, sise [...] Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â
représentée par Me William MAXWELL de la SCP MAXWELL BERTIN BARTHEMY-MAXWELL, avocat au barreau de BORDEAUX, Me Frédéric OLIVE, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMES
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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 15 Février 2018.
L'ordonnance de clôture rendue le 31 janvier 2018.
Conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de Procédure Civile, Mme Axelle JOLLIS, vice-présidente placée près la première Présidente de la Cour d'appel de Limoges, par ordonnance de délégation en date du 11 décembre 2017, magistrat rapporteur, assistée de Mme Sophie BAGES, Greffier, a tenue seule l'audience au cours de laquelle elle a été entendue en son rapport oral.
Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure.
Après quoi, Mme Axelle JOLLIS, vice-présidente placée, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 20 Mars 2018 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Au cours de ce délibéré, Mme Axelle JOLLIS, vice-présidente placée, a rendu compte à la Cour, composée de Madame Johanne PERRIER, Présidente de chambre,de Monsieur Gérard SOURY, Conseiller et de Mme Axelle JOLLIS, vice-présidente placée. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
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LA COUR
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EXPOSE DU LITIGE
Suivant offre préalable acceptée le 25 janvier 2014, la SA CA CONSUMER FINANCE a consenti à Monsieur X...   E... et X... Y...  un crédit affecté au financement d'un véhicule Mini Cooper immatriculé [...] , d'un montant de 7200 euros au taux nominal de 8,05% et TEG de 9,643 % remboursable en 60 mensualités de 151,46 euros, assurance comprise.
Suite à des échéances impayées, l'établissement prêteur a prononcé la déchéance du terme le 14 septembre 2015.
Par acte d'huissier du 27 janvier 2016, la SA CA CONSUMER FINANCE a fait assigner les consorts X... devant le Tribunal d'instance de Brive aux fins d'obtenir le remboursement des sommes dues et la restitution du véhicule aux fins de vente aux enchères.
Par jugement du 18 janvier 2017, le Tribunal d'instance de Brive-la-Gaillarde a :
- condamné solidairement les consorts X... à payer à la société CA CONSUMER FINANCE la somme de 7672,28 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,05% sur la somme de 7154,82 euros à compter du 14 septembre 2015 et taux légal pour le surplus à compter du jugement ;
- ordonné la restitution aux fins de vente aux enchères publiques par les consorts X... à la SA CA CONSUMER FINANCE du véhicule sous peine d'astreinte de 80 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la signification du jugement ;
- dit que le produit de la vente du véhicule viendra en déduction de la créance de la SA CA CONSUMER FINANCE ;
- débouté la SA CA CONSUMER FINANCE du surplus de ses demandes ;
- condamné solidairement les consorts X... aux dépens et à payer à la SA CA CONSUMER FINANCE la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire.
E... X... a interjeté appel de cette décision.
Dans ses conclusions déposées le 26 juin 2017, E... X... demande à la Cour de :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a réduit l'indemnité de 8% à 1 euro ;
- juger la clause de réserve de propriété abusive ;
- débouter la SA CA CONSUMER FINANCE de sa demande de restitution du véhicule et de vente aux enchères publiques ;
- accorder à E... X... des délais de paiement sur 24 mois par versement mensuel de 200 euros ;
- juger que les échéances reportées porteront intérêt au taux légal.
E... X... expose qu'il ne conteste pas la dette en son principe dans la mesure où l'indemnité de 8% reste ramenée à 1 euro.
Il fait valoir que la restitution du véhicule est impossible puisqu'il a déjà été revendu et qu'en tout état de cause, la clause prévoyant la subrogation du prêteur dans la réserve de propriété du vendeur doit être réputée non écrite car abusive au sens de l' ancien article L132-1 du Code de la consommation.
Il précise dans la partie discussion de ses conclusions, sans pour autant en tirer aucune prétention, que son père devrait être mis hors de cause dans la mesure où il aurait signé à sa place le contrat sous la pression du vendeur automobile.
Dans ses conclusions déposées le 13 août 2017, Y...    X... demande à la Cour de le mettre hors de cause, de débouter la SA CA CONSUMER FINANCE de ses demandes à son encontre et de condamner la partie perdante à lui verser la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles.
Subsidiairement, il sollicite avant dire droit une expertise graphologique des documents contractuels.
Y... X... prétend qu'il n'a jamais souscrit le moindre engagement et que c'est son fils E... qui a signé à sa place car le vendeur du véhicule exigeait un co-emprunteur.
Il fait valoir que son fils E... X... en a fait l'aveu judiciaire dans ses écritures et corroborent les éléments ressortant des signatures figurant dans les documents contractuels laissant suspecter une imitation de sa signature.
Dans ses conclusions déposées le 17 août 2017, la SA CA CONSUMER FINANCE demande à la Cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de :
- condamner E... X... à lui payer la somme de 4392 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'ancien article 1153 du Code civil ;
- condamner in solidum E... et Y... X... aux dépens ainsi qu'à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile .
La SA CA CONSUMER FINANCE relève que E... X... ne démontre en rien qu'il a revendu le véhicule et se montre de particulière mauvaise foi pour demander des délais de paiement alors qu'il n'a pas affecté le prix de cette vente au remboursement même partiel du crédit et qu'il a déjà bénéficié de larges délais depuis la déchéance du terme.
L'établissement de crédit fait valoir que c'est pour la première fois en cause d'appel que E... X... prétend avoir signé le contrat de crédit à la place de son père, ce qu'il ne démontre pas, Monsieur Y... X... étant quant à lui resté taisant pendant plus de deux ans malgré les diverses démarches amiables de la société .
La société CA CONSUMER FINANCE justifie sa demande de dommages et intérêts qui correspond à la valeur argus du véhicule par la perte d'une chance de vendre ce véhicule aux enchères et la perte de chance de recouvrement du fait de la disparition d'un des co- emprunteurs.
MOTIFS
Il y a lieu de constater qu'aucune des parties ne remet en cause le montant de la créance détenue par l'établissement de crédit retenu par le premier juge.
Sur la demande de mise hors de cause de Monsieur Y... X...
Il ne peut qu'être relevé que Monsieur E... X... évoque pour la première fois en cause d'appel le fait qu'il aurait signé le contrat de prêt à la place de son père sous la pression du vendeur, allégation à l'appui de laquelle il n'apporte aucun élément de preuve.
Monsieur Y... X... n'a quant à lui pas comparu en première instance pour se défendre ni adressé aucun courrier à l'établissement de crédit pour contester sa signature malgré les courriers de mise en demeure et de relance que lui a adressés la société CA CONSUMER FINANCE . Il ne justifie pas davantage avoir porté plainte contre son fils pour ces faits.
Sur l'offre de prêt et la fiche d'information figurent bien deux signatures différentes pour l'emprunteur et le co-emprunteur. Par ailleurs, la fiche d'information mentionne les revenus nets mensuels de 2095 euros de Monsieur Y... X..., lequel ne fait pas valoir que ce renseignement serait erroné.
Monsieur Y... X... fait valoir que la signature figurant sur le contrat de prêt à l'emplacement co-emprunteur diffère de celles portées sur l'accusé de réception de la mise en demeure qui lui a été adressée et sur un de ses chèques bancaires.
Toutefois, il doit être observé que les signatures portées sur cet accusé de réception et ce chèque sont elles-mêmes différentes, que le chèque est tiré sur un compte appartenant également à Madame X... et date du 16 août 2017, soit postérieurement à l'introduction de l'instance, qu'un accusé de réception peut être signé par un mandataire et que Monsieur Y... X... ne produit aucun document d'identité qui porterait sa signature ou document contemporain de l'offre de prêt.
Ainsi, la seule affirmation tardive de Monsieur E... X... de l'existence d'un comportement frauduleux qui impliquerait le vendeur ne peut suffire à établir la mise hors de cause de son père, et il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise graphologique qui viendrait suppléer la carence de Monsieur Y... X....
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a condamné solidairement les consorts X... à payer à la société CA CONSUMER FINANCE la somme de 7672,28 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,05% sur la somme de 7154,82 euros à compter du 14 septembre 2015 et taux légal pour le surplus à compter du jugement.
Sur la clause de réserve de propriété
L'offre de contrat de crédit affecté prévoit dans ses conditions particulières au titre des suretés que « l'emprunteur reconnaît que la vente faite à son profit est assortie d'une clause de réserve de propriété convenue dès avant la livraison et que le vendeur subroge le prêteur dans le bénéfice de cette réserve de propriété à l'instant même du paiement effectué à son profit par le prêteur. Le prêteur peut opter pour l'inscription d'un gage à la préfecture ce qui implique renonciation au bénéfice de la réserve de propriété. »
En application de l'article L132-1 du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure au 14 mars 2016 (nouvel article L212-1), dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Ces clauses sont réputées non écrites.
Or, conformément à l'avis rendu le 28 novembre 2016 par la Cour de cassation, dès lors que l'auteur du paiement de la chose n'est pas le prêteur qui se borne à verser au vendeur les fonds empruntés par son client afin de financer l'acquisition d'un véhicule, ce client étant devenu, dès la conclusion du contrat de crédit, propriétaire des fonds ainsi libérés entre les mains du vendeur, est inopérante la subrogation consentie par le vendeur au prêteur dans la réserve de propriété.
La clause prévoyant une telle subrogation laisse faussement croire à l'emprunteur, devenu propriétaire du bien dès le paiement du prix au vendeur, que la sûreté réelle a été valablement transmise, ce qui entrave l'exercice de son droit de propriété et a pour effet de créer un déséquilibre significatif à son détriment.
Selon le même avis, est également abusive, sauf preuve contraire, la clause prévoyant la renonciation du prêteur au bénéfice de la réserve de propriété grevant le bien financé et la faculté d'y substituer unilatéralement un gage portant sur le même bien.
En conséquence, il doit être constaté que la clause de réserve de propriété inséré dans le contrat de prêt consenti par la société CONSUMER FINANCE à Monsieur X... est réputée non écrite.
Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il ordonné la restitution aux fins de vente aux enchères publiques du véhicule sous peine d'astreinte et dit que le produit de la vente du véhicule viendra en déduction de la créance de l'établissement de crédit.
La société CA CONSUMER FINANCE ne bénéficiant pas d'une réserve de propriété, elle ne subit aucune perte de chance de revendre le véhicule aux enchères au prix de l'argus et sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
Sur la demande de délais de paiement et les demandes accessoires
Monsieur E... X... ne justifie pas de ses revenus actuels. En février 2016, il justifie avoir perçu 935 euros d'allocation d'aide au retour à l'emploi.
Il ne détaille en rien ses charges et propose un échelonnement de sa dette qui n'apparaît pas compatible avec ses revenus.
Par ailleurs, Monsieur X... ne justifie d'aucun effort de remboursement de sa dette depuis déjà 3 ans et ce alors même qu'il affirme avoir revendu le véhicule sans fournir sur ce point aucun justificatif ni préciser le montant de cette revente.
Au vu de ces éléments, Monsieur X... E... sera débouté de sa demande de d'octroi de délais de paiement.
Messieurs E... et Y... X... , parties succombant pour le principal, seront condamnés aux dépens conformément à l'article 696 du Code de procédure civile et Monsieur Y... X... sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile .
Ils seront également condamnés à payer à la SA CA CONSUMER FINANCE la somme de 800 euros au titre de ses frais irrépétibles.
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PAR CES MOTIFS
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LA COUR,
Statuant par décision contradictoire, mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
CONFIRME le jugement rendu le 18 janvier 2017 par le Tribunal d'instance de Brive-la-Gaillarde en ce qu'il a condamné solidairement les consorts X... à payer à la société CA CONSUMER FINANCE la somme de 7672,28 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,05% sur la somme de 7154,82 euros à compter du 14 septembre 2015 et taux légal pour le surplus à compter du jugement, condamné les consorts X... aux dépens ainsi qu'à payer à la société CA CONSUMER FINANCE la somme de 300 euros au titre des frais irrépétibles ;
INFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;
Statuant de nouveau ;
CONSTATE que la clause de réserve de propriété au profit du prêteur contenu dans le contrat de prêt du 25 janvier 2014 conclu entre la SA CA CONSUMER FINANCE et les consorts X... est réputée non écrite car abusive ;
DÉBOUTE la SA CA CONSUMER FINANCE de ses demandes tendant à la restitution du véhicule et à sa vente aux enchères ;
Y ajoutant ;
DÉBOUTE la SA CA CONSUMER FINANCE de sa demande en dommages et intérêts ;
DÉBOUTE Monsieur E... X... de sa demande de délais de paiement ;
DÉBOUTE Monsieur Y... X... de sa demande formulée sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur E... X... et Monsieur Y... X... aux dépens d'appel ;
CONDAMNE Monsieur E... X... et Monsieur Y... X... à payer à la SA CA CONSUMER FINANCE la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile .
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,
Sophie BAGES. Johanne PERRIER.