ARRET N.
RG N : 15/ 00711
AFFAIRE :
M. Jean-Claude X...
C/
SCP A...B...Y...C..., SCI THEMIS
JCS/ MCM
Grosse délivrée à Me Abel-Henri PLEINEVERT, avocat
COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE--- = = oOo = =--- ARRET DU 19 MAI 2016--- = = = oOo = = =---
Le DIX NEUF MAI DEUX MILLE SEIZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
Monsieur Jean-Claude X...de nationalité Française, né le 05 Janvier 1949 à LIMOGES (87000), architecte DPLG, demeurant ...-87000 LIMOGES
représenté par Me Raphaël SOLTNER de la SELARL SOLTNER-MARTIN, avocat au barreau de LIMOGES substitué par Me Elvina JEANJON, avocat au barreau de LIMOGES
APPELANT d'un jugement rendu le 21 MAI 2015 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LIMOGES
ET :
SCP A...B...Y...C...SCP de Notaires associés, dont le siège est ...-87240 AMBAZAC, prise en la personne de son représentant légal,
SCI THEMIS dont le siège social est rue de la Chaudière-87240 NANTIAT, prise en la personne de son représentant légal,
représentées par Me Abel-Henri PLEINEVERT, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEES
--- = = oO § Oo = =--- Selon avis de fixation du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 17 Mars 2016 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 6 Mai 2016. L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 février 2016.
A l'audience de plaidoirie du 17 Mars 2016, la Cour étant composée de Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, de Monsieur Gérard SOURY et de Monsieur Serge TRASSOUDAINE, Conseillers assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier, Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre a été entendu en son rapport, les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 19 Mai 2016 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
--- = = oO § Oo = =--- LA COUR--- = = oO § Oo = =---
La SCP A...-B...-C...-Y...est titulaire d'un office notarial situé à AMBAZAC et dispose également d'un établissement secondaire sur la commune de NANTIAT.
Ces locaux secondaires ont été réalisés en 1994 sous la maîtrise d'oeuvre de M. Jean Claude X..., architecte DPLG.
Un contrat d'architecte avait été signé en 1988 avec la SCI THEMIS qui est propriétaire des locaux, donnés à bail à la société civile professionnelle ; les associés de la SCI sont trois des quatre notaires associés dans cette dernière, Maître A..., Maître B...et Maître Y....
Le 13 juin 2006, a été déposée au nom de la SCI et de la SCP, sur des plans établis par M. X..., une demande de permis de construire en vue de la réalisation de travaux d'agrandissent des locaux secondaires de NANTIAT.
Le 25 juin 2008, Maître Géraldine Y...a adressé à M. X...une lettre à l'entête de la SCP dans laquelle elle le priait « de trouver ci-joint une copie du permis de construire reçu ce jour afin de lancer les appels d'offres dans les meilleurs délais ».
M. X...a réalisé une esquisse, un avant projet sommaire (APS), un avant projet détaillé (APD), un projet et une partie des prestations d'assistance aux contrats de travaux.
Il également établi un cahier des clauses techniques particulières (CCTP) et le cahier des clauses administratives particulières (CCAP).
Le 25 janvier 2008 l'architecte a adressé à Maître Y..., pour signature, une proposition de contrat dans laquelle ses honoraires étaient fixés à 38 090 € correspondant à 13 % du montant prévisionnel des travaux, de 293 419, 05.
Aucune suite n'ayant été donnée par les notaires à cette proposition, M. X...a adressé le 31 décembre 2009 à « l'office notarial », adresse de NANTIAT, une note d'honoraires d'un montant de 27 561, 16 € calculé sur la base des prestations réalisées.
Après de vaines relances et une mise en demeure délivrée par courrier recommandé avec accusé de réception du 15 septembre 2011, l'architecte a par acte du 31 mars 2014 fait assigner la SCP A...-B...-C...-Y...et la SCI THEMIS devant le tribunal de grande instance de LIMOGES en paiement de la somme de 27 561, 16 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure.
Les défendeurs lui ont opposé la prescription de deux ans de l'article L 137-2 du code de commerce et, subsidiairement, celle, d'une durée de cinq ans, prévue par l'article 2224 du code civil issu de la loi du 17 juin 2008.
Le tribunal a par jugement du 21 mai 2015 :
- jugé que la prescription applicable était celle de l'article 2224 du code civil et que le délai de cinq ans avait couru à compter du 25 janvier 2008, date de la lettre par laquelle M. X...avait adressé à l'office notarial sa proposition de contrat pour signature ;
- déclaré irrecevable comme prescrite l'action en paiement exercée contre la SCP A...-B...-C...-Y...et la SCI THEMIS.
- condamné M. X...aux dépens et au paiement d'une indemnité de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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M. Jean Claude X...a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 11 juin 2015.
Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 28 septembre 2015, il demande à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a dit inapplicable la prescription de l'article L 137-2 du code de la consommation ;
- de dire que la prescription de cinq ans prévue par l'article 2224 du code civil a commencé à courir, non à compter de la date d'envoi de sa proposition de contrat dans laquelle l'estimation des travaux n'était que prévisionnelle, mais à compter du 31 décembre 2009, date d'envoi de sa note d'honoraires, dans la mesure où ce n'est qu'à cette date qu'il pouvait connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ;
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré l'action prescrite et de condamner solidairement la SCP A...-B...-Y...et la SCI THEMIS à lui payer la somme de 27 561, 16 € avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2011, date de la première mise en demeure ;
- de les condamner solidairement à lui verser une indemnité de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 17 juin 2015, la SCP A...-B...-C...-Y...et la SCI THEMIS demandent à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris ;
- à titre subsidiaire, si la cour accueillait la position défendue par l'appelant sur le point de départ de la prescription, d'infirmer le jugement en ce qu'il a écarté l'application de la prescription de deux ans prévue par le code de la consommation ;
- encore plus subsidiairement, de dire les demandes en paiement irrecevables comme mal dirigées, et, en toute hypothèse, de les dire non fondées en l'absence de convention ;
- de condamner l'appelant à leur verser, pour chacune, une indemnité de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LES MOTIFS DE LA DECISION
La demande d'honoraires porte sur des travaux d'extension de locaux professionnels au profit de sociétés constituées en vue de l'exercice d'une activité professionnelle.
La SCP A...-B...-C...-Y...et la SCI THEMIS qui est propriétaire des locaux professionnels que le projet consistait à agrandir ne peuvent pas être assimilées à des consommateurs au sens de l'article L 137-2 du code de la consommation, de telle sorte que la prescription de deux ans prévue par ce texte n'est pas applicable comme l'a retenu à bon droit le premier juge.
En revanche, M. X...ne conteste pas l'application de la prescription prévue par l'article 2224 du code civil qui est issu de la loi du 17 juin 2008, comme d'ailleurs l'article L 137-2 du code de commerce.
Aux termes de ce texte, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
Selon M. X..., le jour où il pouvait connaître les faits lui permettant d'exercer son droit serait la date de sa note d'honoraires du 31 décembre 2009 dans la mesure où, à la date de l'envoi de sa proposition de contrat pour signature qui est celle que le tribunal a retenue, l'estimation des travaux n'était que prévisionnelle.
Toutefois, toutes les prestations qui sont facturées par M. X...étaient réalisées avant même qu'il ait adressé à l'étude des notaires, le 25 janvier 2008, une proposition de contrat fixant ses honoraires à 13 % du montant prévisionnel des travaux, évalué à 293 000 €, ce qui établissait le total des honoraires à 38 090 € si l'intégralité de la mission avait été accomplie.
Dans ce projet de contrat, le détail des honoraires dus au taux de 13 % sur chaque poste réalisé était évalué, les prestations énumérées comme faites étant les suivantes :
- esquisses ;
- APS (avant projet sommaire) ;
- APD (avant projet définitif) ;
- PRO (projet).
Le poste ACT (assistance au contrat de travaux) était décrit comme en cours de réalisation.
Les notaires n'ayant pas donné suite à cette proposition de convention, aucune autre prestation que celles qui avaient été évaluées dans ladite proposition n'a été accomplie.
Les autres postes prévus par la proposition de convention, à savoir les postes VISA, DET et AOR sont restés non réalisés.
Il résulte de ces observations qu'à la date de sa proposition de convention, le 25 janvier 2008, l'architecte avait non seulement exécuté, mais également évalué l'intégralité des prestations qui sont prises en compte dans sa note d'honoraires adressée aux notaires le 31 décembre 2009.
Cette note est établie pour les missions réalisées au 25 janvier 2008, date de l'envoi de la proposition de convention, au même taux de 13 % et sur la base de l'évaluation que cette proposition avait faite au sujet des prestations déjà réalisées.
M. X...avait par conséquent parfaitement connaissance à la date du 25 janvier 2008 de tous les faits qui lui permettaient d'exercer l'action qu'il n'a engagée que par assignation du 31 mars 2014.
En réalité, la prescription n'a pas couru à compter du 25 janvier 2008 dans la mesure où cette date est antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008.
Ladite loi a prévu à son article 26 que ses dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter de son entrée en vigueur, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
La prescription des actions en recouvrement d'honoraires des architectes, non commerçants, contre les non commerçants était avant la loi du 17 juin 2008 de 30 ans, conformément au droit commun, et non de deux ans comme le relèvent les intimées.
La loi du 17 juin 2008 est entrée en vigueur le 19 juin 2008, date à laquelle, à fortiori, M. X...avait connaissance des faits lui permettant d'exercer le droit à honoraires qu'il invoque.
L'action en paiement devait donc être exercée avant le 19 juin 2013.
M. X...qui a fait assigner la SCP et la SCI par acte du 31 mars 2014 est par conséquent irrecevable en ses demandes, l'action étant prescrite aussi bien contre la SCP qu'à l'encontre de la SCI nonobstant la facture éditée pour les mêmes causes à l'égard de cette dernière le 14 novembre 2014, dans le cadre de la procédure.
Le jugement doit être confirmé en toutes ses dispositions.
Les sociétés intimées sont en droit de réclamer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité qu'au regard des circonstances du litige, la cour fixe, pour chacune, à 1 000 €.
--- = = oO § Oo = =--- PAR CES MOTIFS--- = = oO § Oo = =---
LA COUR
Statuant par décision contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 mai 2015 par le tribunal de grande instance de LIMOGES.
Y ajoutant, condamne M. Jean Claude X...à verser à la SCP A...-B...-C...-Y...et à la SCI THEMIS, pour chacune, une indemnité de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le condamne aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Marie-Christine MANAUD. Jean-Claude SABRON.