ARRET N.
RG N : 14/ 01406
COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 23 FEVRIER 2016
AFFAIRE :
M. Thierry X..., M. Bernard Y..., Mme Sabine Z... épouse Y...
C/
SOCIETE GENERALE
DB/ MCM
Grosse délivrée à Me PREGUIMBEAU, avocat.
Le VINGT TROIS FEVRIER DEUX MILLE SEIZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
Monsieur Thierry X... de nationalité Française, né le 05 Juin 1947 à CAEN (14000), demeurant...-87400 LE CHATENET EN DOGNON
représenté par Me Paul GERARDIN, avocat au barreau de LIMOGES
Monsieur Bernard Y... de nationalité Française, né le 15 Décembre 1945 à LIMOGES (87000), demeurant...-87420 SAINT VICTURNIEN
représenté par Me Paul GERARDIN, avocat au barreau de LIMOGES
Madame Sabine Z... épouse Y... de nationalité Française, née le 22 Mai 1948 à BOSGUERARD DE MARCOUVILLE (27520), demeurant...-87420 SAINT VICTURNIEN
représentée par Me Paul GERARDIN, avocat au barreau de LIMOGES
APPELANTS d'un jugement rendu le 02 OCTOBRE 2014 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LIMOGES
ET :
SOCIETE GENERALE dont le siège social est 29, Boulevard HAUSSMANN-75009 PARIS
représentée par Me Nathalie PREGUIMBEAU de la SELARL AEGIS, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEE Selon calendrier de procédure du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 05 Janvier 2016 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 2 février 2016. L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 octobre 2015.
A l'audience de plaidoirie du 05 Janvier 2016, la Cour étant composée de Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, de Monsieur Didier BALUZE et de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Conseillers assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier, Monsieur le Conseiller BALUZE a été entendu en son rapport, les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 23 Février 2016 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
LA COUR
Exposé du litige
La Société Générale a consenti à la SCI Elie Berthet (créée en 1992) un prêt immobilier de 56 000 ¿ selon acte du 22 mars 2004 avec le cautionnement solidaire, à hauteur de 84 000 ¿ chacun, de M. Thierry X..., gérant de la SCI, et de Monsieur et Madame Bernard et Sabine Y..., associés.
Suite à des impayés, la Société Générale a actionné l'emprunteur et les cautions, lesquels ont opposé le caractère disproportionné de leur engagement et le manquement de la banque à son devoir de mise en garde, moyens qui n'ont pas été retenus par le tribunal.
Ainsi, par jugement du 2 octobre 2014, le tribunal de grande instance de Limoges a :
- condamné la SCI résidence Elie Berthet à payer à la Société Générale la somme de 35 048, 35 euros avec intérêts capitalisables,
- prononcé la déchéance de la Société Générale du droit aux pénalités et intérêts contractuels à l'égard des trois cautions,
- condamné Monsieur X... et Monsieur et Madame Y..., solidairement entre eux, à payer à la Société Générale la somme de 33 466, 24 euros outre intérêts capitalisables,
- débouté la SCI Elie Berthet, M. X... et Monsieur et Madame Y... de leur demande de dommages-intérêts et de report de paiement.
M. X... et Monsieur et Madame Y..., les trois cautions donc, ont interjeté appel.
Une ordonnance du conseiller la mise en état du 10 juin 2015 a enjoint à la Société Générale de communiquer au conseil des appelants divers relevés de compte de la SCI Résidence Elie Berthet.
Les appelants exposent que la banque avait consenti précédemment deux autres prêts immobiliers à la SCI avec également leur cautionnement solidaire :
- le 3 août 2000 : un prêt de 85 065, 55 euros avec leur cautionnement à chacun la concurrence 110 586, 52 euros,
- le 12 novembre 2003 : un prêt de 250 000 euros avec engagement de caution de chacun à concurrence de 325 000 ¿,
Soit au total, avec le troisième prêt, des engagements de caution à hauteur de presque 520 000 ¿.
Ils font valoir qu'il convient d'examiner la situation de chacune des cautions séparément.
Ainsi en résumé, ils indiquent que M. X... avait un revenu annuel net de l'ordre de 12 000 ¿ et un patrimoine immobilier de 80 000 ¿, M. Y..., un revenu de 21 000 ¿ et un patrimoine immobilier de 48 000 ¿, Mme Y..., un revenu annuel net de l'ordre de 1. 700 ¿ et un patrimoine de 150 000 ¿.
Les appelants soutiennent donc que leur engagement de caution était disproportionné et que la banque a manqué à son devoir de mise en garde, Monsieur et Madame Y... faisant valoir plus particulièrement qu'ils ne peuvent être considérés comme l'a fait le tribunal comme des cautions averties.
Ils demandent à titre principal :
- de condamner la Société Générale à payer à chacun 165 000 ¿ de dommages et intérêts,
- d'ordonner la compensation de cette condamnation avec les sommes dues au titre des trois concours financiers,
- et de débouter en toute hypothèse la banque de sa demande au titre du prêt du 2 mars 2004.
Subsidiairement, ils demandent de prononcer la déchéance du droit à intérêts frais et accessoires à défaut d'information annuelle des cautions et, compte tenu des règles de calcul à appliquer en conséquence et des perceptions opérées par la banque, ils demandent de limiter la condamnation à la somme de 17 164, 17 euros.
Subsidiairement enfin, ils sollicitent un report de paiement à deux ans.
La Société Générale conclut à la confirmation du jugement.
Elle fait valoir d'abord qu'il n'est pas justifié d'un préjudice de 165 000 ¿ par caution alors qu'elle n'engageait aucune poursuite à l'encontre des cautions « pour les prêts souscrits par la SCI pour l'acquisition des immeubles ».
Elle estime ensuite que dans la mesure où les cautions n'invoquent pas la sanction spécifique de l'article L 341-4 du code de la consommation, elles ne peuvent solliciter de dommages-intérêts.
La banque considère de toute façon qu'il n'y avait pas disproportion compte tenu des revenus, du patrimoine personnel des cautions et de celui de la SCI.
Elle estime aussi que M. et Mme Y... étaient des cautions averties.
Enfin, la Société Générale s'en remet à droit sur la déchéance des intérêts contractuels mais sollicite les intérêts au taux légal, comme l'a retenu le tribunal.
Elle sollicite une indemnité supplémentaire en cause d'appel au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Il est renvoyé aux conclusions des parties déposées par les appelants le 3 septembre 2015 et par l'intimée le 30 mars 2015
MOTIFS
La Société Générale a donc consenti successivement trois prêts à la SCI Elie Berthet avec le cautionnement solidaire de chacun des appelants, concours financiers dont certaines caractéristiques sont les suivantes selon les pièces produites :
1o)- acte de prêt sous-seings privés du 28 juin 2000 et acte notarié du 3 août 2000 :
- montant de 558 000 frs ou 85 066, 16 euros,- acquisition d'appartements neufs, lots 3 et 4,- durée 192 mois ou 16 ans, différé de 12 mois et amortissement sur 180 mois,- mensualités en période de différé de : 2786, 28 francs ou 424, 76 euros ; en période d'amortissement : 4839, 26 francs ou 737, 74 euros,- cautionnement solidaire de chacun des trois appelants, l'engagement de cautionnement dans l'acte sous seings privés de Monsieur et Madame Y... porte sur la somme de 725 400 frs soit 110 586 ¿,
2o)- acte de prêt sous-seings privés du 29 août 2003 :
- il y aurait eu ensuite à ce sujet une acte authentique le 12/ 11/ 2003 (non produit),- montant : 250 000 ¿,- acquisition appartements anciens numéros 11-13-14-32-33-41,- durée totale 168 mois soit 14 ans, dont différé : 24 mois, et amortissement : 144 mois,- mensualités en période de différé : 708, 33 euros, en période d'amortissement : 2143, 72 euros,- cautionnement solidaire de chacun des trois appelants pour 325 000 ¿,
3o)- acte de prêt sous-seings privés du 22 mars 2004 :
- montant de 56 000 ¿,- travaux appartement anciens numéros 11-13-14-32-33-41,- durée totale 168 mois avec 24 mois de différé et 144 mois d'amortissement,- mensualités en période de différé : 163, 33 euros, en période d'amortissement : 482, 83 euros,- cautionnement solidaire de chacun des trois appelants à concurrence de 84 000 ¿.
La situation matérielle des cautions à l'époque de la conclusion du troisième prêt peut être schématisée ainsi selon les indications de celles-ci et les quelques pièces produites :
1o)- M. Thierry X... :
Revenus :
- selon avis d'imposition sur le revenu 2004 : RIC de 22 000 ¿, déficit foncier de 10 083 ¿,
- il aurait été souhaitable de produire l'avis d'imposition sur le revenu de l'année précédente car un revenu foncier peut être fluctuant et l'existence d'un déficit, passager,
Patrimoine foncier :
- propriété rurale au Chatenet en Dognon en Haute-Vienne, de 9 ha 76 a 10 ca, selon donation dans le contrat de mariage du 23 septembre 1971, valeur à l'époque de 22 000 frs soit 3353 ¿,
- selon donation-partage du 29 octobre 1988 (page 17) :
- une maison d'habitation avec jardin au Chatenet en Dognon Haute-Vienne d'une valeur de 30 000 fr.,- la moitié indivise avec un frère sur une propriété agricole, valeur de la moitié : 252 000 fr.,- moitié indivise avec un frère de la nue-propriété d'une propriété agricole à Moissannes en Haute-Vienne, moitié évaluée à 135 000 fr. Soit au total droits immobiliers de 417 000 frs ou 63 570 ¿
- deux appartements dans une copropriété à Limoges (vu acte du 2 avril 2002 et conclusions appelants page cinq), valeur selon l'acte de 2002 de : 22 867, 35 x 2 = 45 734, 70 euros
-Montant global de ces valeurs : 112 657, 70 euros,
2o)- M. Bernard Y... :
- avis d'impôt sur le revenu 2003 : salaire : 25 288, revenus non commerciaux : 1581, revenus capitaux mobiliers nets : 300, revenus fonciers nets : 1404, soit au total 28 573 ¿ ou 2381 ¿ par mois,
- selon donation partage du 20 septembre 1980 : propriété indivise d'une maison d'habitation à Balledent en Haute-Vienne et d'une propriété agricole à Asnière sur Vegre dans la Sarthe (objet d'un bail rural) le tout évalué à 1 254 000 frs, soit pour chacun des quatre enfants : 313 500 frs ou 47 792 ¿
3o)- Mme Sabine Y... :
- pas de revenus professionnels personnels,
- selon donation-partage du 11 janvier 1975 (extraits) : une maison de maître avec terrain, 1 ha 93 a 86 ca, à St Victurnien en Haute-Vienne : 380 000 frs, diverses parcelles sur la même commune pour 79 ha 48 a 45 ca : 650 000 frs, biens loués, soit au total 985 000 frs ou 150 161 ¿.
La caution peut engager la responsabilité de la banque en cas de disproportion de son engagement par rapport à sa situation patrimoniale (vu les articles 2288 et 1147 du Code civil, et la jurisprudence issue de l'arrêt " Macron ", Cour de Cassation, chambre commerciale, 17 juin 1997).
Cette responsabilité en cas d'engagement disproportionné de la caution se recoupe à l'égard de celle-ci avec l'obligation du banquier de mise en garde en cas de risque d'endettement excessif de la caution.
L'article L 341-4 du code de la consommation du code n'est applicable qu'aux cautionnements souscrits après l'entrée en vigueur de la loi du 1er août 2003.
En l'occurrence, seuls les deuxième et troisième prêts sont susceptibles de relever de cet article.
Mais de toute façon, les deux régimes ne sont pas exclusifs l'un de l'autre.
Leurs fondements sont différents.
S'il y a un texte particulier dans le code de la consommation en cas de disproportion du cautionnement, la responsabilité civile contractuelle de droit commun pour manquement du banquier à certaines de ses obligations, au titre des articles 2288 et 1147 du Code civil, subsiste et a vocation à s'appliquer d'une manière générale à ce genre de situation. Les sanctions ne sont pas non plus similaires : sorte de déchéance pour le créancier professionnel du bénéfice du cautionnement dans un cas, allocation de dommages intérêts à la caution dans l'autre cas.
Il convient donc de considérer que la caution ayant souscrit, postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 1er août 2003, un engagement qu'elle estime disproportionné, n'est pas obligée d'agir de ce chef exclusivement sur le fondement de l'article L 341-4 du code de la consommation, mais peut préférer et choisir de mettre en cause seulement la responsabilité civile contractuelle de la banque pour cautionnement disproportionné sur le fondement des articles 2288 et 1147 du Code Civil.
Il convient de rappeler que dans ce cadre-là (demande au titre de la responsabilité civile pour engagement disproportionné et/ ou manquement au devoir de mise en garde-article 1147 du Code civil), la caution avertie n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de la banque.
M. X... est le gérant et l'associé majoritaire de la SCI Elie Berthet qui a acquis et financé divers logements sous sa direction. Il a été associé d'une autre SCI, vu l'acte du 2 avril 2002 dans lequel il est mentionné comme exerçant la profession de maître d'oeuvre. Son avis d'impôt sur le revenu 2004 susvisé fait état de revenus industriels et commerciaux. Il n'allègue d'ailleurs pas être une caution non avertie.
Il s'agit donc d'une caution avisée. Il ne soutient pas non plus que la banque aurait eu sur la situation de l'emprunteur principal des informations inconnues de lui-même. Il est rappelé qu'il n'invoque pas l'article L 341-4 du code de la consommation (s'appliquant, lui, également à la caution avertie).
Cela étant, de toute façon et d'une manière générale, par rapport tout d'abord au seul troisième prêt, il n'y avait pas de disproportion pour chacune des cautions.
Ce prêt du 22 mars 2004 était d'un montant de 56 000 ¿.
M. X... avait des droits immobiliers résultant de la donation-partage de 1988 évalués à l'époque à 63 500 ¿ environ et deux appartements d'une valeur de l'ordre de 45 700 ¿.
M. Bernard Y... avait un revenu annuel de l'ordre de 28 500 ¿ et des droits immobiliers évalués en 1980 à près de 48 000 ¿.
Si Madame Y... n'avait pas de revenus professionnels personnels, elle avait la maison de maître sus évoquée et diverses parcelles de terrain de 79 ha. Si ces biens étaient loués, ils avaient quand même été estimés en 1975 à 150 000 ¿.
Ces biens immobiliers permettaient à chacune des cautions d'être en mesure d'assurer leur engagement pour 84 000 ¿.
Par rapport ensuite à l'ensemble des engagements de cautions dont le montant cumulé à l'occasion du troisième prêt s'élevait alors à 519 586 ¿, il peut être rappelé qu'il appartient aux cautions d'établir le caractère disproportionné de l'engagement.
Or, ils fournissent certes des éléments sur le patrimoine immobilier qui permettent d'en connaître la consistance, mais avec des valeurs le plus souvent anciennes, voire très anciennes.
À part les deux appartements de M. X..., les valeurs des autres actifs immobiliers pour les trois cautions sont celles résultant d'actes de 1971, 1975, 1980 et 1988, soit entre 16 ans et 33 ans avant le prêt de 2004.
Les cautions ne produisent pas de justificatifs sur la valeur actualisée de leur patrimoine immobilier à l'époque de ce troisième prêt.
Même en considérant que le patrimoine immobilier de chaque caution ne lui permettait pas de garantir un tel montant d'engagement, la disproportion du cautionnement-sur le fondement invoqué en l'espèce-ne peut aboutir qu'à une indemnisation et celle-ci ne s'opère qu'en fonction du préjudice qui serait subi, lequel s'apprécie à l'époque à laquelle la juridiction statue.
En d'autres termes, si une disproportion lors du cautionnement, eu égard au montant de l'engagement à cette époque, n'existe pas quand la caution est actionnée en paiement, eu égard au montant alors de la dette, de telle sorte qu'il n'y a pas de situation préjudiciable de ce chef, l'action en responsabilité contre la banque sur le fondement des articles 2288 et 1147 du Code Civil ne peut aboutir, en l'absence de préjudice.
Or en l'occurrence, la créance au titre du troisième prêt pour laquelle les cautions sont actionnées ne s'élève qu'à la somme de 18 600 ¿ environ selon ce qui sera précisé ci-dessous.
La Société Générale indique qu'à ce jour elle n'a engagé aucune poursuite à l'encontre des cautions pour les prêts souscrits par la SCI pour l'acquisition des immeubles. Si tel n'est pas le cas en fait pour le troisième prêt, cela vaut au moins pour les deux autres, étant rappelé que le deuxième est le plus important.
En tout cas, pour ces deux autres prêts, s'il y a eu des mises en demeure à l'égard de M. X... et de M. Bernard Y... pour 46 700 ¿ et 78 400 ¿ environ, elles sont en date du 9 août 2013. Et, il n'est pas justifié d'engagement de voie d'exécution à l'égard des cautions pour les créances au titre de ces deux autres prêts.
Pour la créance au titre du prêt litigieux, il convient d'observer que les appelants indiquent que la SCI a mis en vente ses biens immobiliers et que le prix de ces sessions devrait permettre de désintéresser la banque demanderesse. Il peut s'en déduire que les cautions n'auront pas à supporter ces dettes.
Il est d'ailleurs produit divers mandats de vente de 2013 pour cinq lots (alors qu'il apparaît qu'il y avait 2 + 6 appartements financés par les deux premiers prêts), ces mandats (ceux de l'agence Alexandron) mentionnent des prix de vente pour un montant global de l'ordre de 273 000 ¿, il y a eu déjà une vente début 2014 pour 27 000 ¿, voire une autre en 2014 pour 28 000 ¿ (il est produit simplement un extrait d'un compromis de vente).
Par ailleurs, les cautions ne font pas état de changements significatifs dans la composition, la consistance de leur patrimoine immobilier personnel, lequel permet à chacune de garantir une dette de l'ordre de 18 600 ¿. Il peut être observé à cet égard notamment que les biens immobiliers sus évoqués de Mme Y... étaient donnés en 1975 avec réserve d'usufruit de ses parents et il n'est pas précisé si celle-si subsiste toujours. Il peut être ajouté enfin qu'il n'apparaît pas que les financements en eux-mêmes étaient spécialement risqués. Il s'agit d'opérations de financements pour des investissements locatifs assez habituels, en l'occurrence dans une rue centrale de Limoges.
Le premier et le troisième prêt étaient chacun respectivement d'un montant moyen. Le deuxième prêt était certes d'un montant important mais pour l'acquisition de six logements.
Si les revenus locatifs pour les années citées (de 2005 à 2012) n'ont pas toujours été très fructueux (35 600 ¿ quand même en 2007, 33 700 ¿ en 2008), cela peut résulter des aléas du marché locatif.
Les prêts ont été remboursés pendant plusieurs années :- le premier prêt (août 2000) : incidents à partir de janvier 2011, régularisation en septembre 2011, impayé à partir d'octobre 2011,- le deuxième prêt (août 2003) : des incidents à partir de décembre 2009, suivis de régularisation, situation mise à jour en juillet 2012, impayé à partir d'octobre 2012,- le troisième prêt (mars 2004) : incidents à partir de janvier 2011, régularisation en septembre 2011, impayé à partir d'octobre 2011.
Si la SCI a mis en vente divers logements pour apurer les créances au titre des prêts, il n'apparaît pas que cette mise en vente concerne tous les lots.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, en l'absence en définitive de préjudice actuel caractérisé, la demande de dommages-intérêts ne peut aboutir.
Sur l'action en paiement et la créance de la Société Générale, les cautions ne discutent pas la validité, la régularité de leur engagement. L'éventuelle responsabilité d'une banque en cas de cautionnement disproportionné et/ ou de manquement au devoir de mise en garde conduit à l'allocation de dommages intérêts, si toutes les conditions de cette responsabilité sont réunies, mais non au rejet de la demande en paiement de la créance résultant du prêt qui subsiste en elle-même, étant rappelé qu'en l'occurrence il n'est pas invoqué l'application de l'article L 341-4 du code de la consommation.
En ce qui concerne la créance invoquée, il est produit :
- le contrat de prêt sur offre acceptée le 22 mars 2004, avec les engagements de cautions solidaires de M. Thierry X..., M. Bernard Y... et Madame Sabine Y... pour 84 000 ¿,
- un décompte de créance pour la période du 7 janvier 2011 au 4 septembre 2013, pour 35 825, 69 euros, ledit décompte faisant référence à un engagement numéro 704106001367,
- des mises en demeure du 21 avril 2011 et 6 et 9 août 2013.
Ces pièces établissent le principe de la créance.
Il n'est pas justifié en revanche de l'information annuelle que la banque doit fournir aux cautions en application de l'article L 313-22 alinéa premier du code monétaire et financier. L'intimée ne soutient pas d'ailleurs avoir satisfait à cette obligation.
Le non-respect de cette mesure est sanctionné par la déchéance des intérêts échus (et uniquement des intérêts). Et, comme le font valoir les appelants : « les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affecté prioritairement au règlement du principal de la dette » (article précité, alinéa 2).
Le principal en l'occurrence est de 56 000 ¿ et, en vertu de cette règle, il convient donc de déduire de cette somme tous les versements réalisés au titre de ce prêt.
Les consorts X... et Y... produisent divers décomptes de la SCI Résidence Elie Berthet sur la période de juin 2004 à janvier 2011 sur lesquels il est coché divers versement pour des échéances de prêt, des intérêts débiteurs et des frais ou indemnités de retard, avec un récapitulatif de l'ensemble de ces mouvements débiteurs.
Selon les sondages de contrôle, les débits pour échéances de prêt concernent bien un prêt référencé 704 10 600 1367. Il y a eu aussi un règlement de 4174, 43 euros le 28 septembre 2011, vu le décompte de la banque précité. Soit au total 36 648, 37 euros.
Il apparaît que le compte considéré de la SCI concernait les remboursements de prêts. Il est décompté des indemnités de retard pour 1673, 86 euros et des intérêts débiteurs pour 3542, 09 euros, ceci pour l'ensemble des prêts (il n'y a que quelques indemnité de retard rattachées à tel prêt en fin de période).
Ces divers décomptes et montants (36 648, 37 euros, 1673, 86 euros, 3542, 09 euros) ne sont pas en eux-mêmes spécialement discutés.
Les appelants ont opéré à juste titre un prorata au titre des intérêts débiteurs décomptés sur le compte de prélèvement des échéances, en plus de celles-ci, prorata qu'il convient également d'appliquer aux indemnités de retard.
Les versements se rattachant donc au prêt en cause sont de 513, 60 euros pour le prorata des intérêts débiteurs du compte et (1673, 86 x 14, 50 % =) 242, 70 euros pour le prorata des indemnités retard.
Le montant global des versements à déduire est donc de : 36 648, 37 + 513, 60 + 242, 70 euros = 37 404, 67 euros.
En conséquence, la créance à l'égard des cautions est de : 56 000-37 404, 67 = 18 595, 33 euros.
La sanction précitée ne fait pas obstacle à l'application des intérêts selon le droit commun, soit au taux légal à compter de la mise en demeure.
Les appelants justifient que la SCI Elie Berthet a mis en vente divers appartements, mais ceci depuis 2013.
Il n'est pas fait de proposition de paiement échelonné et les débiteurs ne fournissent pas d'explication et de pièces sur leur situation matérielle actuelle, notamment de revenus.
Il n'y a pas eu de versement récent.
Dans ces conditions, la demande de délais de paiement n'est pas fondée.
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties leurs frais non répétibles. La demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile sera donc rejetée et le jugement réformé de ce chef.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par décision contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme le jugement en ce qu'il a débouté M. Thierry X... et les époux Y... de leurs demandes de dommages-intérêts et de report de paiement,
Réforme le jugement pour le surplus (en ses dispositions relatives à M. Thierry X..., M. Bernard Y... et Madame Sabine Y...),
Prononce la déchéance de la Société Générale du droit aux intérêts au taux contractuel à l'égard des trois cautions,
Condamne solidairement M. Thierry X..., M. Bernard Y... et Madame Sabine Y... à payer à la SA Société Générale la somme de 18. 595, 33 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 août 2013, capitalisables selon les modalités prévues à l'article 1154 du Code civil,
Rejette les demandes contraires ou pour le surplus, notamment au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamne solidairement M. Thierry X..., M. Bernard Y... et Madame Sabine Y... aux dépens.