ARRET N.
RG N : 13/ 00664
AFFAIRE :
SARL CARTRIDGE WORLD KORBEN
C/
SCI DU ROUCHON BAS
GS/ MCM
PAIEMENT LOYERS
Grosse délivrée à Me ROUQUIE, avocat
COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE--- = = oOo = =--- ARRET DU 24 SEPTEMBRE 2015--- = = = oOo = = =---
Le VINGT QUATRE SEPTEMBRE DEUX MILLE QUINZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
SARL CARTRIDGE WORLD KORBEN représentée par ses gérants domiciliés en cette qualité audit siège. dont le siège social est 48 bis, rue Pierre et Marie Curie-19360 MALEMORT SUR CORREZE
représentée par Me Philippe CHABAUD de la SELARL MAURY CHAGNAUD CHABAUD, avocat au barreau de LIMOGES, Me Vincent ROUDIE, avocat au barreau de CORREZE
APPELANTE d'un jugement rendu le 19 AVRIL 2013 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BRIVE
ET :
SCI DU ROUCHON BAS prise en la personne de sa gérante Mme Danielle X..., dont le siège social est 48 bis rue Pierre et Marie Curie-19360 MALEMORT SUR CORREZE
représentée par Me Corinne ROUQUIE, avocat au barreau de CORREZE
INTIMEE
--- = = oO § Oo = =---
Selon avis de fixation du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 26 mars 2015 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 23 avril 2015. L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 février 2015. A l'audience du 26 mars 2015, l'affaire a été renvoyée et fixée à celle du 25 juin 2015 par avis de fixation du Conseiller de la Mise en Etat du 8 avril 2015 avec arrêt à rendre le 24 septembre 2015.
A l'audience de plaidoirie du 25 Juin 2015, la Cour étant composée de Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, de Madame Christine MISSOUX et de Monsieur Gérard SOURY, Conseillers assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier, Monsieur le Conseiller SOURY a été entendu en son rapport, les avocats des parties sont intervenus au soutient des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 24 Septembre 2015 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
--- = = oO § Oo = =--- LA COUR--- = = oO § Oo = =---
FAITS et PROCÉDURE
Par acte du 13 janvier 2005, la SCI du Rouchon bas (la bailleresse) a donné à bail commercial à la société Cartridge world Korben (la locataire), exploitant un commerce de recyclage de cartouches d'encre, un local situé à Malemort (19) moyennant un loyer annuel de 6 000 euros outre les charges.
Soutenant que la locataire avait manqué à son obligation de paiement des loyers et charges, la bailleresse l'a assignée devant le tribunal de grande instance de Brive.
Saisi sur un incident à l'initiative de la locataire, le juge de la mise en état a décidé, le 1er juin 2011, que le tribunal de grande instance était valablement saisi, l'action ne relevant pas de la compétence de la juridiction des loyers commerciaux.
La bailleresse ayant fait procéder à des travaux en façade des locaux loués ayant nécessité la dépose des enseignes de la locataire, cette dernière a saisi le juge des référés qui a condamné sous astreinte, le 20 janvier 2011, la bailleresse à remettre en place ces enseignes. Cette décision a été réformée par la cour d'appel par arrêt du 22 décembre 2011 qui retient l'existence de contestations sérieuses.
La bailleresse a assigné sa locataire devant le tribunal de grande instance de Brive, statuant au fond, qui, après jonction des procédures, a, par jugement du 19 avril 2013 rendu sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- débouté la locataire de son exception d'incompétence du tribunal de grande instance au profit de la juridiction des loyers commerciaux,- condamné la locataire à payer à sa bailleresse un rappel de loyers et charges et taxes foncières ainsi qu'une somme au titre d'un changement de serrure,- rejeté les demandes de la bailleresse au titre des fluides et en paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive,- dit que la locataire avait manqué à ses obligations en ne payant pas l'indexation du loyer automatiquement due, ni sa quote part de la taxe foncière et, en conséquence, prononcé la résolution judiciaire du bail,- dit que la locataire devra libérer les lieux dans le mois de la signification du jugement, sous astreinte, et l'a condamnée à payer une indemnité d'occupation, outre les charges,- débouté la locataire de sa demande reconventionnelle tendant à obtenir la ré-installation des enseignes.
La locataire a relevé appel de ce jugement.
MOYENS et PRÉTENTIONS
La locataire conclut à la nullité de la procédure qui relève, selon elle, de la compétence du juge des loyers commerciaux. Subsidiairement, elle soutient que son arriéré de loyers était limité à la somme de 549, 84 euros, consignée en compte Carpa, et qu'elle n'avait pas à rembourser la taxe foncière d'une SCI Saviot Lasserre avec laquelle elle n'avait aucun lien de droit. Elle fait valoir que la résiliation du bail ne se justifie pas, sauf à décider que cette résiliation est intervenue aux torts de la bailleresse. Elle réclame des dommages-intérêts en réparation de ses préjudices.
La bailleresse conclut à la confirmation du jugement, sauf à lui allouer un complément d'arriéré de loyers et de remboursement de taxe foncière au titre de l'année 2013 ainsi que des dommages-intérêts pour préjudice moral et appel abusif.
MOTIFS
Sur la compétence.
Attendu que la locataire, qui conclut à la réformation de l'ordonnance du juge de la mise en état du 1er juin 2011, n'a pas relevé appel de cette décision, sa déclaration d'appel ne visant que le jugement du tribunal de grande instance du 19 avril 2013.
Attendu que l'action engagée par la bailleresse portant sur le paiement des loyers et des charges et non sur la fixation du loyer, c'est à juste titre que le tribunal de grande instance a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la locataire au profit de la juridiction des loyers commerciaux et qu'il a retenu sa compétence pour statuer sur le présent litige.
Sur le rappel de loyers.
Attendu que la locataire reproche au premier juge d'avoir statué ultra petita en allouant à la bailleresse, à titre de rappel de loyers, une somme supérieure à celle réclamée par cette dernière..
Mais attendu que la décision condamnant la locataire à payer 4 532, 52 euros TTC à titre de rappel de loyers sur la période comprise entre 2005 et octobre 2012 se situe dans la limite des prétentions de la bailleresse qui réclamait une somme de 5 275 euros à ce titre sur la même période.
Attendu que le premier juge a fait une exacte application des stipulations du contrat de bail relatives à la révision du loyer en décidant, au terme d'une motivation que la cour d'appel adopte, qu'il incombait à la locataire de calculer chaque année le loyer indexé et d'en acquitter spontanément le montant à la bailleresse, sans qu'il soit besoin pour cette dernière de lui adresser une notification de cette indexation annuelle ; que la locataire a admis ne pas avoir acquitté cette indexation mais s'oppose à la bailleresse sur le montant du rappel consécutif à cette situation.
Attendu que le premier juge a procédé au calcul du montant du loyer révisé sur la période comprise entre l'année 2005 jusqu'au mois d'octobre 2012 inclus et il a abouti à un montant total dû de 63 392, 86 euros TTC qui n'est pas critiqué par la locataire.
Attendu que les parties s'opposent sur le montant des versements effectués par la locataire pendant la période précitée, la locataire se fondant sur une attestation de son expert comptable pour soutenir avoir versé une somme de 68 234, 25 euros.
Mais attendu qu'il résulte de l'attestation de l'expert comptable que le montant de 68 234, 25 euros ne correspond pas seulement aux seuls loyers mais qu'il englobe aussi les charges.
Et attendu que, procédant au calcul du rappel du seul arriéré de loyers sur la période précitée, le premier juge, qui a pris en compte les justificatifs émanant du cabinet comptable de la locataire mentionnant les loyers versés, a exactement retenu, au terme d'une motivation que la cour d'appel adopte, que la bailleresse n'avait perçu qu'une somme totale de 58 860, 34 euros TTC, en sorte que la locataire, qui a admis ne pas avoir acquitté la part du loyer correspondant à l'indexation annuelle, restait devoir une somme de 4 532, 52 euros TTC, avec intérêts au taux contractuel à compter de la date de l'exigibilité du loyer ; que ce chef de décision sera confirmé.
Sur la taxe foncière.
Attendu qu'après avoir rappelé les clauses du bail commercial stipulant l'obligation pour la locataire de rembourser à sa bailleresse les taxes foncières afférentes aux lieux loués, le premier juge a constaté, par des motifs que la cour d'appel adopte, que la bailleresse avait supporté les taxes foncières établies par l'administration fiscale au nom de la SCI Saviot Lasserre à laquelle elle succédait en qualité de bailleur, en sorte que la locataire lui devait remboursement de la somme de 2 265, 60 euros sur la période comprise entre 2005 et 2012 ; que cette somme sera majorée du montant de 140, 46 euros représentant le remboursement prorata temporis (5 mois) de la taxe foncière 2013, soit un total de 2 406, 06 euros qui produira, pour les motifs retenus par le premier juge, intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 9 mars 2010.
Sur la résiliation du bail.
Attendu que le manquement de la locataire à ses obligations de paiement de l'indexation du loyer et de remboursement de sa quote part de la taxe foncière présente une gravité qui justifie, non pas la résolution du bail commercial comme décidé à tort par le tribunal de grande instance, mais sa résiliation à la date du jugement, sans indemnisation du locataire fautif ; qu'il s'ensuit que c'est à juste titre, en conséquence de cette résiliation, que le premier juge a ordonné, sous astreinte, la libération des lieux loués dans le mois de la signification de sa décision.
Et attendu que c'est à juste titre que le premier juge a décidé que la locataire était tenue au paiement du loyer mensuel de 763, 43 euros TTC par mois à compter du mois de novembre 2012 inclus jusqu'au 19 avril 2013, date du jugement déféré prononçant la résiliation du bail.
Sur le demande de la bailleresse tendant au paiement du loyer entre le 19 avril 2013, date de résiliation du bail, et le 1er juin 2013.
Attendu que la locataire a quitté les lieux loués le 3 juin 2013 ; que la bailleresse ne peut prétendre au paiement d'un loyer pour la période postérieure à la résiliation du bail mais seulement à une indemnité d'occupation qui n'est pas réclamée en l'espèce ; qu'en tout état de cause, la locataire fait la preuve par l'attestation de son expert comptable du paiement du loyer dû pour les cinq premiers mois de l'année 2013, ce qui inclut la période objet de la demande de la bailleresse ; que cette demande sera rejetée.
Sur la prise en charge des frais de pose d'une serrure.
Attendu que le premier juge a exactement retenu que la pose d'une serrure sur une porte d'entrée ne participait pas du clos des locaux loués et que les frais afférents devaient être supportés par la locataire.
Sur la demande de la locataire en indemnisation de son préjudice commercial.
Attendu que la locataire estime avoir subi un trouble commercial dont il réclame réparation du fait de la dépose de son enseigne commerciale en raison des travaux entrepris par sa bailleresse sur la façade des locaux loués.
Mais attendu que la locataire ne conteste pas que la dépose de ses enseignes était nécessaire à l'exécution des travaux entrepris par la bailleresse ; que le bail stipule que cette dernière se réserve le droit d'effectuer tous travaux qu'elle jugerait nécessaires, sans indemnité ou diminution de loyer au profit de la locataire, quelles que soient l'importance et la durée de ces travaux, et que celle-ci devra déposer à ses frais et sans délai toutes décorations ou installation dont l'enlèvement serait utile à leur exécution ; que l'entreprise Foussat, qui a réalisé les travaux de rénovation de la façade, atteste avoir été autorisée par la locataire à déposer son enseigne en lui demandant de la jeter car elle ne lui servait plus à rien ; que si, en l'occurrence, les travaux de bardage de la façade se sont étalés sur six mois, la locataire ne prétend pas que cette durée serait anormalement longue par suite d'une faute de la bailleresse ; qu'en l'état de la clause du bail précitée, la locataire ne peut prétendre être indemnisée de la dépose de son enseigne pour les besoins de l'exécution des travaux entrepris par sa bailleresse ;
Et attendu qu'à l'issue des travaux, il appartenait au locataire de faire poser sa nouvelle enseigne sur les supports métalliques mis en place à cet effet en façade de l'immeuble ; que, dès lors, la résistance opposée par la bailleresse à la demande de sa locataire tendant au rétablissement de l'enseigne ne peut être qualifiée d'abusive et ne saurait donner lieu à indemnisation ;
Que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes indemnitaires de la locataire.
Sur la demande de dommages-intérêts de la bailleresse.
Attendu, que si elles s'avèrent non fondées en droit, les contestations de la locataire ne peuvent être de ce seul fait qualifiées d'abusives ; qu'il en va de même de son appel ; que la demande de la bailleresse en paiement de dommages-intérêts de ces chefs sera rejetée.
Sur l'article 700 du code de procédure civile.
Attendu que l'équité ne justifie pas l'application de ce texte en cause d'appel.
--- = = oO § Oo = =--- PAR CES MOTIFS--- = = oO § Oo = =---
LA COUR
Statuant par décision contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
CONFIRME le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Brive le 19 avril 2013, sauf à porter au montant de 2 406, 06 euros (au lieu de 2 265, 60 euros) la somme due par la société Cartridge world Korben à la SCI du Rouchon bas au titre de la taxe foncière des années 2005 à 2013 ;
REJETTE les demandes de la SCI du Rouchon bas en paiement :- des loyers entre le 19 avril 2013, date de la résiliation du bail, et le 1er juin 2013,- de dommages-intérêts pour résistance et appel abusifs ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
CONDAMNE la société Cartridge world Korben aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Marie-Christine MANAUD. Jean-Claude SABRON.