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29/06/2015 | FRANCE | N°14/00667

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre civile, 29 juin 2015, 14/00667


COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE--- = = oOo = =--- ARRET DU 29 JUIN 2015--- = = = oOo = = =---

ARRET N.
RG N : 14/ 00667
AFFAIRE :
SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C 2V
C/
SAS GENEDIS

FIXATION DU PRIX DU BAIL

Le VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE QUINZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C 2V dont le siège social est 3, Chemin de Saquet Bas-19000 TULLE

représentée par Me Philippe CHABAUD de la SELARL MAURY CHAGNAUD CHABAUD, avocat au bar

reau de LIMOGES, Me Cédric PARILLAUD, avocat au barreau de CORREZE
APPELANTE d'un jugement rendu...

COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE--- = = oOo = =--- ARRET DU 29 JUIN 2015--- = = = oOo = = =---

ARRET N.
RG N : 14/ 00667
AFFAIRE :
SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C 2V
C/
SAS GENEDIS

FIXATION DU PRIX DU BAIL

Le VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE QUINZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE C 2V dont le siège social est 3, Chemin de Saquet Bas-19000 TULLE

représentée par Me Philippe CHABAUD de la SELARL MAURY CHAGNAUD CHABAUD, avocat au barreau de LIMOGES, Me Cédric PARILLAUD, avocat au barreau de CORREZE
APPELANTE d'un jugement rendu le 06 MAI 2014 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BRIVE
ET :
SAS GENEDIS dont le siège social est Zone Industrielle, Route de PARIS-14127 MONDEVILLE

représentée par Me Marie BRU-SERVANTIE, avocat au barreau de TULLE, Me Jacques GUILLEMIN, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE

--- = = oO § Oo = =---

Selon avis de fixation du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 28 Mai 2015 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 25 Juin 2015. L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 avril 2015.
A l'audience de plaidoirie du 28 Mai 2015, la Cour étant composée de Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, de Madame Christine MISSOUX et de Mme Sophie BRIEU, Conseillers assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier, Monsieur SABRON, Président de chambre, a été entendu en son rapport, les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 29 Juin 2015 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
--- = = oO § Oo = =---
LA COUR--- = = oO § Oo = =---

Selon un acte reçu le 10 octobre 2002 par Maître X..., notaire à BRIVE, la SCI C2V a donné à bail à la SAS GENEDIS pour une durée de 9 ans un local à usage industriel de 3271 m2 situé à BRIVE, dans la ZAC dite du Mazaud.
Le loyer annuel était fixé à la somme de 199 343, 84 HT, révisable annuellement en fonction de la variation de l'indice national du coût de la construction.
L'activité de la société locataire consiste dans l'exploitation à l'enseigne PROMOCASH d'un fonds de commerce de vente en libre service de gros de tout produit concernant les métiers de la bouche.
Au terme du bail, soit au 31 août 2011, le loyer annuel s'élevait, compte tenu de l'indexation, à la somme de 267 282, 44 ¿.
Par acte d'huissier en date du 21 mars 2012, le preneur a notifié au bailleur en application des dispositions de l'article L 145-10 du code de commerce une demande de renouvellement, pour 9 ans, du bail qui s'était poursuivi par tacite reconduction.
Le nouveau bail a pris effet à compter du 1er avril 2012.
A l'occasion de ce renouvellement, le preneur qui estimait que la valeur locative des lieux était inférieure au loyer résultant de l'application de la règle du plafonnement a sollicité une réduction du loyer commercial que le bailleur a refusée.
Par acte du 6 juin 2012, la société GENEDIS a fait assigner le bailleur, la SCI C2V, devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de BRIVE aux fins de fixation du montant du prix du loyer, sur le fondement de l'article L 145-33 du code de commerce, à la somme annuelle hors charges et hors taxe de 198 120 ¿.
Le juge des loyers commerciaux a par jugement avant dire droit du 16 avril 2013 désigné un expert avec mission, notamment, de déterminer la surface utile et pondérée des locaux loués et de rechercher tous éléments de fait visés à l'article L 145-33 du code de commerce permettant de déterminer la valeur locative des lieux.
L'expert, M. José Z..., a déposé le 30 septembre 2013 un rapport dans lequel il a estimé la valeur locative des locaux, pour une surface pondérée de 3 049, 21 m2, à la somme de 279 216, 15 ¿ HT, soit 91, 57 le m2 compte tenu d'un abattement de 15 % sur une valeur locative de 107, 74 ¿ le m2 tenant compte de la spécificité de l'activité du preneur.
Le juge des loyers commerciaux devant lequel les deux parties ont déposé des mémoires conformément aux dispositions de l'article R 145-31 du code de commerce a par jugement du 6 juillet 2014 :
- fixé à compter du 1er avril 2012 à la somme de 240 245, 95 ¿ HT le loyer annuel du bail renouvelé dû par la SAS GENEDIS ;
- dit que la SCI C2V devrait restituer à la SAS GENEDIS le trop perçu de loyers depuis le 1er avril 2012 ;
- dit que les dépens qui incluraient le coût de l'expertise seraient partagés pour moitié par les parties.
**
La SCI C2V a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 28 mai 2014.
Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 21 novembre 2014, elle demande à la cour :
- de rejeter le moyen d'irrecevabilité tiré par la société intimée de l'absence de dépôt de mémoire devant la cour ;
- de réformer le jugement en ce qu'il a, selon elle de manière non cohérente et en méconnaissance des critères de détermination de la valeur locative, écarté la référence aux loyers des locaux d'une superficie de moins de 1000 m2 ;
- d'homologuer les conclusions du rapport d'expertise en ce qu'elles ont fixé le montant de la valeur locative de l'immeuble loué à la société GENEDIS à la somme de 279 276, 15 ¿ hors taxes par an à la date du 1er avril 2012 ;
- de dire que la société GENEDIS continuera de payer le montant du loyer contractuellement prévu à hauteur de 267 282, 44 ¿ hors taxes par an à compter du 1er avril 2012 ;
- de condamner la société GENEDIS à lui verser une indemnité de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 27 janvier 2015, la société GENEDIS demande à la cour :
- de constater la caducité de l'appel pour défaut de notification d'un mémoire préalable par la société bailleresse en méconnaissance des dispositions des articles R 145-31 et R 145-33 du code de commerce ;
- à titre subsidiaire, de la recevoir dans son appel incident et de fixer le loyer du bail renouvelé au 1er avril 2012 à la somme annuelle de 213 430 ¿, soit 70 ¿ le m2, en tenant compte de la particularité de son activité de vente en libre service de gros, destinée à des professionnels adhérents de son réseau ;
- de condamner la SCI C2V à lui verser une indemnité de 5 250 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il est renvoyé aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé de l'argumentation des parties.
LES MOTIFS DE LA DECISION
Ce n'est pas la cour qui a ordonné une expertise, de telle sorte que la formalité du dépôt d'un rapport prévue après expertise par les articles R 145-31 et R 145-33 du code de commerce n'est pas de nature à invalider les explications qui ont été fournies par conclusions par l'appelante.
Au surplus, il résulte des dispositions de l'article 914 du code de procédure civile que le conseiller de la mise en état, lorsqu'il est désigné et jusqu'à son dessaisissement, est seul compétent pour prononcer la caducité de l'appel, pour déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel.
Les parties ne sont plus recevables à invoquer la caducité ou l'irrecevabilité après son dessaisissement, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement.
Il résulte de ces dispositions que la SAS GENEDIS n'est pas recevable à invoquer devant la cour la caducité de la déclaration d'appel de la SCI C2V.
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L'expert a estimé la valeur locative en se basant, comme il le lui était demandé dans sa mission, sur les critères des articles L 145-33 et R 145-2 et suivants du code de commerce, à savoir :
- les caractéristiques du local considéré dont il a relevé qu'elles étaient parfaitement adaptées à l'activité de la société locataire ;
- la destination des lieux en retenant qu'on n'était pas en présence d'un bail tous commerces et que la segmentation de l'activité était forte ;
- les obligations respectives des parties ;
- les facteurs locaux de commercialité, particulièrement favorables dans la ZAC du Mazaud que ce soit au regard de l'accessibilité, de la fréquentation ou de la concentration de l'activité commerciale ;
- les prix couramment pratiqués dans le voisinage, par unité de surface, et concernant des locaux équivalents.
A ce propos, les locaux d'une superficie inférieure à 300 m2 ont été écartés et n'ont été retenus que les valeurs des locaux d'une superficie supérieure, après pondération, précision étant faite que « ces valeurs augmentent assez sensiblement au fur et à mesure que la superficie baisse ».
L'expert ajoute qu'à l'inverse, il en va de même pour les bâtiments de grande amplitude où les valeurs sont écrêtées, comme c'est le cas pour le bâtiment BRICO DEPOT, d'une superficie de 6 484 ¿ et dont le loyer au m2 n'est que de 83, 28 ¿ qui, lui, a été retenu parmi les loyers de comparaison.
Ainsi, par référence aux loyers des 10 locaux du voisinage dont la superficie est comprise entre 300 et 6 484 m2, l'expert parvient à une valeur locative moyenne de 107, 73 ¿.
L'erreur matérielle concernant la superficie de l'immeuble BRICO DEPOT n'a pas de conséquence dans la mesure où le loyer au m2 correspond bien à la superficie réelle qui est de 6 484 m2.
Le premier juge ne pouvait pas, sans dénaturer le rapport de l'expert judiciaire, ne retenir que le loyer moyen de 4 locaux d'une superficie de plus de 1 000 m2 parmi lesquels figure le local BRICO DEPOT qui, par sa superficie de plus de 6 fois supérieure à ce critère, n'était pas, dans une telle optique, un élément de comparaison cohérent.
L'évaluation de l'expert n'est cohérente que si l'on prend en compte la moyenne de l'ensemble des valeurs comparatives recensées dans le voisinage (excluant les locaux de moins de 300 m2 qu'on ne peut pas considérer comme des éléments de comparaison pertinents).
Par ailleurs, l'expert a pris en compte la particularité de l'activité du preneur qui est une activité de commerce de gros et non de détail, segmentant sensiblement l'activité et par conséquent la clientèle potentielle.
Bien qu'on puisse contester l'opposabilité de cette spécificité au bailleur qui est en droit de se référer aux seuls critères objectifs énumérés par l'article L 145-33 du code de commerce, il a été appliqué à ce titre à la valeur locative moyenne qui s'établissait à la somme de 107, 74 ¿ le m2 un abattement de 15 %, ce qui ramène cette valeur à 91, 57 ¿ le m2.
La valeur locative à considérer est en conséquence de 91, 57 ¿ x 3 049, 21 m2 pondérés = 279 216, 15 ¿.
Les expertises produites par la société GENEDIS qui concernent l'évaluation de la valeur locative de magasins PROMOCASH situés à LA TESTE, en Gironde, et à MAXEVILLE, près de Nancy, sont des éléments d'appréciation dénués de pertinence au regard du critère légal des prix pratiqués dans le voisinage.
Il y a lieu de réformer le jugement et de retenir la valeur locative retenue par l'expert, ce qui, cette valeur étant supérieure au prix qui résulte de l'application du contrat, prive de fondement la demande de la société GENEDIS tendant à une diminution du prix du loyer.
Ainsi, comme le demande la société bailleresse dont l'appel est fondé, la société GENEDIS continuera de payer le montant du loyer contractuellement prévu à hauteur de 267 282, 44 HT par an à compter du 1er avril 2012.
La société appelante est en droit de réclamer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité que la cour fixe à 2 000 ¿.

--- = = oO § Oo = =--- PAR CES MOTIFS--- = = oO § Oo = =---

LA COUR
Statuant par décision Contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Dit l'appel de la SCI C2V recevable.

Réforme le jugement entrepris et, statuant à nouveau ;
Dit qu'il y a lieu de retenir la valeur locative telle qu'elle a été évaluée par l'expert, M. José Z..., dans son rapport du 30 septembre 2013.
Dit que cette valeur étant supérieure au prix du loyer qui résulte de l'application du contrat, la SAS GENEDIS continuera de payer le montant du loyer contractuellement prévu à hauteur de 267 282, 44 ¿ hors taxe par an à compter du 1er avril 2012.
Dit n'y avoir lieu à restitution.
Condamne la SAS GENEDIS à payer à la SCI C2V une indemnité de 2 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La condamne aux dépens de première instance, en ce compris les frais d'expertise, ainsi qu'aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par Maître Philippe CHABAUD, avocat au Barreau de LIMOGES, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Marie-Christine MANAUD. Jean-Claude SABRON.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 14/00667
Date de la décision : 29/06/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.limoges;arret;2015-06-29;14.00667 ?
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