La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/06/2015 | FRANCE | N°14/00516

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre civile, 29 juin 2015, 14/00516


COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE--- = = oOo = =--- ARRET DU 29 JUIN 2015--- = = = oOo = = =---

ARRET N.
RG N : 14/ 00516
AFFAIRE :
M. Daniel X...
C/
Mme Agnès Y... épouse X...

demande en divorce pour faute

Le VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE QUINZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
Monsieur Daniel X... de nationalité Française né le 11 Décembre 1948 à CASABLANCA (MAROC) Retraité, demeurant...-59 WATTIGNIES représenté par Me Philippe GRIMAUD, avocat au barr

eau de LIMOGES

APPELANT d'un jugement rendu le 24 DECEMBRE 2013 par le JUGE AUX AFFAIRES FAMILIA...

COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE--- = = oOo = =--- ARRET DU 29 JUIN 2015--- = = = oOo = = =---

ARRET N.
RG N : 14/ 00516
AFFAIRE :
M. Daniel X...
C/
Mme Agnès Y... épouse X...

demande en divorce pour faute

Le VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE QUINZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
Monsieur Daniel X... de nationalité Française né le 11 Décembre 1948 à CASABLANCA (MAROC) Retraité, demeurant...-59 WATTIGNIES représenté par Me Philippe GRIMAUD, avocat au barreau de LIMOGES

APPELANT d'un jugement rendu le 24 DECEMBRE 2013 par le JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES DE LIMOGES

ET :
Madame Agnès Y... épouse X... de nationalité Française née le 20 Février 1952 à LIMOGES (87000) Retraitée, demeurant...-87170 ISLE représentée par Me Frédérique AVELINE, avocat au barreau de LIMOGES

INTIMEE

--- = = oO § Oo = =---
Communication a été faite au Ministère Public le 02 avril 2015 et visa de celui-ci a été donné le 14 avril 2015
Selon calendrier de procédure du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 1er juin 2015 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 1er septembre 2015. L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 avril 2015.
A l'audience de plaidoirie du 1er juin 2015, la Cour étant composée de Monsieur SABRON, Président de chambre, de Madame MISSOUX et de Madame BRIEU, Conseillers, assistés de Madame AZEVEDO, Greffier. A cette audience, en chambre du conseil, Monsieur SABRON a été entendu en son rapport, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur SABRON, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 29 juin 2015 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
--- = = oO § Oo = =--- LA COUR--- = = oO § Oo = =---

Madame Agnès Y... et M. Daniel X... se sont mariés le 22 décembre 1973 à LIMOGES après avoir adopté selon contrat reçu le 20 décembre 1973 par Maître Z..., notaire à LIMOGES, le régime de la séparation de biens.
Ils ont eu trois enfants qui sont aujourd'hui majeurs.
Le père de M. X... est décédé le 3 décembre 1976 et ce dernier a perçu à l'issue des opérations de liquidation-partage de la succession une somme de 24 075, 32 ¿.
Selon un acte du 14 juin 1977, les époux ont acquis en indivision, à concurrence de deux tiers pour le mari et d'un tiers pour l'épouse, un terrain situé sur la commune de l'ISLES (Haute Vienne).
Ils ont fait construire sur ce terrain une maison à usage d'habitation dans laquelle a été établi le logement de la famille.
Cette opération a été financée au moyen de divers prêts.
M. X... a perdu sa mère en 1998 et il a perçu à l'issue des opérations de liquidation-partage de l'indivision successorale une somme de 78 008, 78 ¿.
Madame Agnès X... née Y... a pris sa retraite en décembre 2010 à l'âge de 58 ans à la suite d'une maladie cancéreuse.
M. Daniel X... qui est lui aussi retraité a déposé une requête en divorce le 30 septembre 2011.
Une ordonnance de non conciliation en date du 10 janvier 2012 a constaté l'acceptation par les époux du principe de la rupture du mariage, accordé la jouissance de l'immeuble indivis et des meubles s'y trouvant au mari moyennant une indemnité d'occupation à fixer lors des opérations de liquidation-partage de l'indivision, dit que les époux participeraient au remboursement des crédits immobiliers dans la proportion de leurs droits indivis et désigné un notaire chargé d'établir un projet d'état liquidatif.
Par acte du 27 mars 2012, M. Daniel X... a fait assigner son épouse en divorce devant la juridiction des affaires familiales du tribunal de grande instance de LIMOGES.
L'épouse a formulé par conclusions une demande de prestation compensatoire.
Le tribunal a par jugement du 24 décembre 2013 :
- prononcé le divorce des époux pour acceptation du principe de la rupture du mariage sur le fondement de l'article 233 du code civil ;
- ordonné la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux, aucun accord n'ayant été trouvé devant le notaire précédemment désigné ;- mis à la charge de M. Daniel X... une prestation compensatoire d'un montant de 10 000 ¿ ;

- fait masse des dépens et dit que chaque partie en supporterait la moitié.
**
M. Daniel X... a relevé appel de ce jugement par déclaration du 23 avril 2014, uniquement en ce qu'il a mis à sa charge une prestation compensatoire.
Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 13 février 2015, il demande à la cour :
- de constater que les époux qui exerçaient tous deux la profession de technicien de laboratoire dans la même entreprise ont des revenus mensuels, constitués de pensions de retraite, qui sont équivalents (2281 ¿ pour le mari et 2275 ¿ pour l'épouse) ;
- de constater que, si l'épouse a souffert d'une maladie dont elle est aujourd'hui guérie, lui-même souffre d'une infirmité congénitale consistant dans des troubles de l'audition ;
- de dire qu'il résulte des articles 270 et 271 du code civil que le droit à une prestation compensatoire ne peut être reconnu que si la disparité dans la situation des époux est créée par la rupture du mariage, ce qui n'est pas le cas en présence d'une disparité préexistante et ayant perduré sous le régime de la séparation de biens ;
- de constater que l'acquisition dans la proportion de 2/ 3-1/ 3 de l'immeuble indivis n'a été possible que grâce aux fonds propres qui lui ont été dévolus au titre de la succession de son père, décédé en 1976, et que, s'agissant du financement de la construction, il a « consacré non seulement ses salaires mais encore ses revenus au remboursement des emprunts tout en participant à l'ensemble des charges du mariage » ;
- d'infirmer le jugement et de dire que Madame Agnès Y... n'est pas en droit de prétendre au versement d'une prestation compensatoire ;
- de condamner l'intimée aux dépens et au paiement d'une indemnité de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
**
Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 10 mars 2015, Madame Agnès Y... demande à la cour :
- de constater, alors qu'elle a réglé plus que sa part dans les échéances d'emprunt, qu'elle n'a droit qu'au tiers de l'actif net de l'indivision immobilière, le projet d'état liquidatif de Maître A... ayant fixé les droits du mari à 168 360, 73 ¿ et ceux de l'épouse à 77 322, 20 ¿ ;
- de constater qu'il existe une légère différence de revenus mensuels, ceux de M. X... s'établissant à 2 281 ¿ alors qu'elle même ne perçoit que 2 026 ¿ depuis qu'elle n'exerce plus de mandat de conseillère municipale ;
- de constater que la disparité entre les époux provient surtout de ce que le mari dispose seul d'un patrimoine qu'il conservera après la rupture du mariage ;
- d'accueillir son appel incident et de fixer à 50 000 ¿ le montant de la prestation compensatoire dont M. X... est redevable en raison de la disparité que la rupture du mariage crée dans la situation des époux ;
- de condamner M. X... à lui verser une indemnité de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LES MOTIFS DE LA DECISION

La vie commune a duré 39 ans et les époux qui sont d'accord sur le principe du divorce sont aujourd'hui âgés de 63 ans en ce qui concerne Madame Y... et de 65 ans en ce qui concerne M. X....
Ils se sont mariés sous le régime de la séparation de bien, à une date à laquelle M. X... n'avait pas encore hérité de ses parents, et ils ont tous les deux exercé jusqu'à l'âge de la retraite un emploi similaire (technicien de laboratoire) au sein de la même entreprise.
Les trois enfants du couple sont aujourd'hui majeurs.
Il n'apparaît pas que Madame Y... ait conservé des séquelles de la maladie qui l'a amenée à anticiper son départ à la retraite qui a eu lieu en décembre 2010.
Le handicap de M. X... qui souffre d'une insuffisance auditive n'a pas été un obstacle à son intégration socio-professionnelle, même s'il a rendu cette intégration plus difficile, et il n'apparaît pas qu'il se traduise après le divorce par des répercussions personnelles et économiques qui rendraient la situation de l'appelant plus précaire.
Les indemnités qui ont été versées à Madame Y... au titre d'un mandat électoral n'ont pas un caractère permanent et, selon cette dernière, elles ne sont plus perçues puisqu'elle n'exercerait plus ses fonctions de conseillère municipale.
Il subsistera dés lors au détriment de l'épouse une légère disparité, d'environ 250 ¿ par mois, dans les ressources respectives après la rupture du mariage.
En effet, les pensions de retraite que perçoivent les époux depuis la date du jugement de divorce sont de 2 284 ¿ pour M. X... et de 2026 ¿ pour Madame Y....
En réalité, la principale disparité résulte de la situation patrimoniale respective des époux.
La disparité qui ouvre droit au versement d'une prestation compensatoire est aux termes de l'article 270 du code civil celle qui est créée par la rupture du mariage.
Selon l'article 271 du même code, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.
Le même texte énonce que le juge prend notamment en considération « le patrimoine estimé ou prévisible des époux tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ».
La disparité ne s'analyse pas différemment selon que les époux étaient mariés sous le régime de la communauté ou sous celui de la séparation de bien ; dans les deux cas, il importe seulement d'apprécier si la rupture du mariage crée ou non une disparité dans les conditions de vie respectives.
En l'espèce, les époux qui se sont mariés sous le régime de la séparation de biens sont en indivision sur le bien immobilier qu'ils ont acquis pendant le mariage pour y établir la résidence de la famille, M. X... à hauteur des deux tiers et Madame Y... à hauteur de seulement un tiers.
Il en résulte une disparité consécutive à la rupture du mariage dés lors que, par suite de cette rupture, Madame Y... qui ne bénéficie plus de la situation de son ex époux ne percevra à l'issue de la liquidation de l'indivision, selon le projet d'état liquidatif établi par le notaire désigné par l'ordonnance de non conciliation, qu'une somme de l'ordre de 77 322, 20 ¿ alors que les droits de son conjoint devraient s'élever à 168 360, 78 ¿.
Par ailleurs, le patrimoine doit être pris en compte pour la détermination de la prestation compensatoire même s'il appartient en propre au débiteur individuel.
C'est ainsi qu'on doit tenir compte, contrairement à ce que soutient M. X..., des biens dont un des époux a hérité de ses parents au cours du mariage et qu'il a pu conserver à la date du divorce.
En effet, Madame Y... n'a pas de fortune personnelle et la rupture du mariage la prive des avantages indirects que lui aurait procuré la communauté de vie si celle-ci n'avait pas été rompue par le divorce.
Or M. X... a reçu dans la succession de son père qui est décédé en 1976, après le mariage des époux séparés de bien, un capital de 24 075 ¿ puis, dans la succession de sa mère qui est décédée en 1998, un capital de 78 008, 78 ¿.
Ces sommes n'ont pas pu être intégralement investies dans l'acquisition de l'immeuble indivis puisque l'essentiel des dépenses qui étaient relatives aux travaux de construction ont été financées par des emprunts au remboursement desquels l'épouse qui avait un salaire a participé.
Le notaire indique au demeurant dans son projet d'état liquidatif que M. X... ne peut pas prétendre à la restitution des sommes héritées de ses parents à défaut de rapporter la preuve de ce que celles reçues dans la succession de son père aient servie à la construction de la maison et que celles reçues dans la succession de sa mère aient été mises sur un compte autre qu'à son nom.
Ces preuves ne sont pas davantage rapportées devant la cour, de telle sorte qu'on doit considérer que les sommes que M. X... a recueillies par héritage ont été, au moins pour partie, placées, ce qui, même si l'héritage n'est pas considérable, lui permet de bénéficier à la date de la rupture du mariage de conditions de vie plus aisées que celles de son épouse qui n'a pas de biens personnels.
Bien que les époux soient séparés de bien, Madame Y... aurait tiré un avantage indirect de la situation patrimoniale de son époux par l'effet de la communauté de vie et de l'obligation de secours auxquelles la rupture du mariage met fin.
C'est par conséquent à bon droit que le premier juge a retenu que la rupture du mariage créait une disparité dans les conditions de vie respectives qui ouvrait le droit au profit de l'épouse au versement d'une prestation compensatoire.
En revanche, le capital alloué à Madame Y... n'est pas suffisant pour compenser cette disparité au regard des éléments d'appréciation sus examinés ; il y a lieu de le porter à la somme de 15 000 ¿.
Madame Y... est en droit de réclamer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais occasionnés par la procédure d'appel qui ne sont pas compris dans les dépens, une indemnité que la cour fixe à 2 500 ¿

PAR CES MOTIFSLA COUR

Statuant par décision Contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, après débats en chambre du conseil et en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement prononcé le 24 décembre 2013 par la juridiction des affaires familiales du tribunal de grande instance de LIMOGES en ce qu'il a dit que Madame Agnès Y... était en droit de prétendre au versement d'une prestation compensatoire.

Le réforme sur le montant et, statuant à nouveau ;
Fixe à 15 000 ¿ la prestation compensatoire dont M. Daniel X... est redevable à l'égard de Madame Agnès Y....
En tant que de besoin, le condamne au paiement de cette somme.
Condamne M. X... à verser à Madame Y... une indemnité de 2 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Le condamne aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

E. AZEVEDO. J-C. SABRON.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 14/00516
Date de la décision : 29/06/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.limoges;arret;2015-06-29;14.00516 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award