ARRET N.
RG N : 13/ 01483
AFFAIRE :
Mme Regine X...épouse Y...
C/
SA CLINIQUE CHENIEUX prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège., SELARL CHALIVAT ROYER LAMBERT CHARLES LAVAUZELLE CARDONNA ROYER, prise en la personne de son Gérant, CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE HTE-VIENNE
JCS-iB
réparation liée à activité médicale
Grosse délivrée à Maître CLERC et DEBERNARD-DAURIAC, avocats
COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE--- = = oOo = =--- ARRET DU 05 MARS 2015--- = = = oOo = = =---
Le CINQ MARS DEUX MILLE QUINZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
Madame Regine X...épouse Y...de nationalité Française née le 10 Juin 1948 à SAINT AGNANT DE VERSILLAT (23300) Profession : Retraité, demeurant ...
représentée par Me Jean-Philippe BOURRA, avocat au barreau de LIMOGES
APPELANTE d'un jugement rendu le 19 SEPTEMBRE 2013 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LIMOGES
ET :
SA CLINIQUE CHENIEUX prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. 18 rue du Général Catroux-87039 LIMOGES CEDEX 1
représentée par Me Philippe CLERC, avocat au barreau de LIMOGES, Me Annie BERLAND, avocat au barreau de BORDEAUX
SELARL CHALIVAT ROYER LAMBERT CHARLES LAVAUZELLE CARDONNA ROYER, prise en la personne de son Gérant 18 Rue du Général Catroux-87000 LIMOGES
représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de LIMOGES et la SCP DAURIAC-PAULIAT-DEFAYE-BOUCHERLE-MAGNE, avocats
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE HTE-VIENNE 22, avenue Jean GAGNANT-87037 LIMOGES CEDEX
représentée par Me Olivier PECAUD, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEES
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Selon avis de fixation du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 22 Janvier 2015 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 26 Février 2015. L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 janvier 2015.
A l'audience de plaidoirie du 22 Janvier 2015, la Cour étant composée de Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, de Madame Christine MISSOUX et de Monsieur Gérard SOURY, Conseillers assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier, Monsieur le Président a été entendu en son rapport, les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 05 Mars 2015 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
--- = = oO § Oo = =--- LA COUR--- = = oO § Oo = =---
Madame Régine X...épouse Y...a subi le 25 janvier 2008 dans les locaux de la CLINIQUE FRANCOIS CHENIEUX une opération de l'épaule droite à la suite de laquelle, sur prescription du médecin, elle a effectué des séances de rééducation dans le cabinet de kinésithérapie situé dans les locaux de la dite clinique et loués par elle à la SELARL CHALIVAT-ROYER LAMBERT.
Le 6 mars 2008, le médecin qui avait effectué l'intervention a prescrit à sa patiente 15 séances de balnéothérapie qui ont été confiées au même cabinet de kinésithérapie.
Lors de la première de ces séances qui a eu lieu le 11 mars 2008, Madame Y...qui était sortie de la piscine de balnéothérapie et se dirigeait vers le vestiaire situé à l'entrée de la salle de travail pour se changer a fait une chute sur son poignet droit qui a entraîné une fracture de l'extrémité inférieure du radius droit.
Elle a subi une opération qui a eu lieu le 12 mars 2008 et a dû être de nouveau hospitalisée en 2011, du 14 au 17 avril, pour subir une nouvelle intervention.
A l'issue d'opérations d'expertises auxquelles il a appelé le cabinet de kinésithérapie et la clinique, le Docteur Z..., mandaté par l'assureur de Madame Y..., a fixé la date de la consolidation au 4 octobre 2011 et retenu au titre des séquelles un déficit fonctionnel permanent de 5 %.
Par acte du 7 mars 2012, Madame Régine X...épouse Y...a fait assigner la SELARL CHALIVAT-ROYER LAMBERT et la SA CLINIQUE FRANCOIS CHENIEUX devant le tribunal de grande instance de LIMOGES pour obtenir réparation du préjudice corporel, liquidé sur la base du rapport susvisé, dont elle les estimait responsables in solidum, le cabinet de kinésithérapie sur le fondement de l'obligation de sécurité qui résultait d'un contrat médical et la clinique sur celui des règles générales de la responsabilité civile.
Par le même acte, Madame Y...a appelé dans la procédure la CPAM de la Haute Vienne qui a demandé le remboursement des prestations versées à la victime au titre de son action subrogatoire.
Par jugement du 19 septembre 2013, le tribunal a débouté Madame Y...et la CPAM de la Haute Vienne de l'intégralité de leurs demandes, aussi bien dirigées contre le cabinet de kinésithérapie qu'à l'encontre de la clinique FRANCOIS CHENIEUX.
Il a condamné Madame Y...a verser à chacune de ces entités une indemnité de 1500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Madame Régine X...épouse Y...a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 21 novembre 2013.
Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 4 décembre 2014, l'appelante demande à la cour :
- de juger que le matériel de balnéothérapie comprend le bassin et tous les abords sur lesquels s'effectue le déplacement des patients en tenue de bain ;
- de dire que l'accident dont elle a été victime le 11 mars 2008 a été causé par l'utilisation d'un matériel médical au sens de l'article L 1142-1 du code de la santé publique, de telle sorte que le cabinet de kinésithérapie est responsable de cet accident au titre d'une obligation de sécurité qui est de résultat ;
- si la cour considérait, comme l'a fait le tribunal, que l'accident n'a pas été causé par un matériel médical, de dire que l'obligation de sécurité qui pèse sur le cabinet de kinésithérapie au titre de l'article 1147 du code civil reste une obligation de résultat et qu'en toute hypothèse, ce dernier n'a pas mis tous les moyens en ¿ uvre pour assurer la sécurité de sa patiente ;
- de constater, notamment, que le cabinet de kinésithérapie est responsable d'un défaut d'assistance et d'information dans l'utilisation de ses locaux ;
- à titre subsidiaire, de faire application de l'article 1384 alinéa 1 du code civil à raison du rôle exercé par le sol et l'organisation des locaux du cabinet dans la réalisation du dommage ;
- de dire que la responsabilité de la clinique, propriétaires des locaux dans lesquels le cabinet de kinésithérapie qu'elle s'est substitué exerce un service qui est rattaché à son activité médicale a engagé sa responsabilité quasi délictuelle sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civile ;
- de condamner in solidum la SELARL-CHALIVAT-ROYER-LAMBERT et la SA CLINIQUE FRANCOIS CHENIEUX à lui payer en réparation des divers chefs de préjudice retenus par le médecin expert mandaté par son assureur la somme totale de 31 330 ¿ ;
- de les condamner in solidum à lui verser une indemnité de 3000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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La CPAM de la Haute Vienne a déposé le 13 mars 2014 des conclusions dans lesquelles elle demande de condamner les deux entités poursuivies par la victime de l'accident à lui rembourser la somme de 10 204, 03 ¿, montant des prestations versées à cette dernière, outre l'indemnité forfaitaire de 1082 ¿ et une indemnité de 1000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 28 mars 2014, la SELARL CHALIVAT-ROYER-LAMBERT demande à la cour de confirmer le jugement, sauf à condamner l'appelante à lui payer des dommages-intérêts de 10 000 ¿ pour procédure abusive.
Elle demande à titre subsidiaire de ramener les indemnités réclamées par Madame Y...à de plus justes proportions et, en toute hypothèse, de la condamner au paiement d'une indemnité de 2000 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
** Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 8 décembre 2014, la CLINIQUE FRANCOIS CHENIEUX demande de confirmer le jugement en ce qu'il l'a mise hors de cause et de condamner l'appelante à lui verser une indemnité de 2000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
A titre subsidiaire, elle demande de réduire à de plus justes proportions les indemnités liquidées sur la base du rapport du docteur Z....
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
Pour seule preuve des circonstances de la chute à l'origine de sa blessure, l'appelante produit un plan établi par elle même qui représente avec précision la configuration du cabinet de kinésithérapie et le lieu de la chute.
Or il résulte de ce plan que Madame Y...a fait une chute, non pas aux abords de la piscine de balnéothérapie comme elle le soutient dans ses conclusions, mais dans la salle de travail du cabinet de kinésithérapie, après être sortie du local séparé dans lequel se trouve cette piscine et dans lequel elle mentionne, par une précision figurant sur le plan, qu'elle s'était séchée.
Il existe, toujours d'après ce plan deux vestiaires, celui du local de la piscine et le vestiaire situé à l'entrée de la salle de travail vers lequel Madame Y...se dirigeait pour se changer lorsqu'elle a chuté, pour une raison inconnue, en tombant sur son poignet droit.
La thèse selon laquelle la chute aurait eu lieu à l'occasion de l'utilisation de la piscine de balnéothérapie qui est effectivement un matériel médical, ou des abords qui font partie de ce matériel (la plage qui entoure la piscine, voire le sol du local où se trouve cette dernière) est par conséquent démentie par les indications du plan établi par la victime elle même.
Sa chute ne peut pas avoir de relation avec ce matériel médical qui se trouve dans un local spécifique alors qu'elle a eu lieu à l'extérieur de celui-ci, dans un autre local, à usage de salle de travail, à l'abri des projections d'eau susceptibles de rendre le sol glissant.
Il est précisé sur le plan que Madame Y...s'était séchée avant de se diriger vers le vestiaire principal qui se trouve à l'entrée de la salle de travail où a eu lieu la chute.
Les longs développements des conclusions de l'appelante afférents à l'obligation de sécurité de résultat qui résulte de l'utilisation d'un matériel médical, à l'absence de protocole, au défaut d'organisation du cabinet et au défaut d'information des patients sont par conséquent inopérants.
La chute qui n'a pas pu être causée par un sol mouillé et dont il n'apparaît pas qu'elle ait eu un facteur étranger à la personne de la victime a eu lieu dans la salle de travail, au cours du trajet normal des patients vers le vestiaire principal du cabinet de kinésithérapie et dans des circonstances qui ne nécessitaient aucune surveillance ni information particulière.
Madame Y...qui effectuait des séances de balnéothérapie dans le cadre de sa convalescence à la suite d'une opération de l'épaule ne présentait aucune infirmité qui aurait justifié qu'elle soit accompagnée au cours de ce trajet qui était dénué de danger ou d'entrave susceptible d'occasionner une chute.
L'accident n'a pas eu pour cause un manquement à l'obligation contractuelle de sécurité pesant sur l'établissement, pas plus qu'il n'a eu pour cause une chose dont celui-ci aurait été responsable, le sol de la salle de travail dans laquelle a eu lieu la chute n'ayant présenté aucune anomalie susceptible de l'expliquer.
Madame Y...qui n'est pas fondée en sa demande dirigée contre le cabinet de kinésithérapie est tout aussi infondée à rechercher la responsabilité de la clinique qui, même si elle est propriétaire du local et de ses équipements, a perdu l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction sur ces derniers par le fait de la location qu'elle a consentie à l'exploitant.
Aucune anomalie ou irrégularité afférente à ces locaux et matériels ayant une relation avec la chute de l'appelante n'est susceptible d'engager sa responsabilité en tant que propriétaire.
Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Même si elle n'est pas dénuée de légèreté, l'action engagée par Madame Y...n'a pas été inspirée par l'intention de nuire, mais seulement par le souci de sauvegarder des intérêts que l'appelante pouvait ressentir comme étant légitimes.
La demande reconventionnelle de dommages-intérêt pour procédure abusive sera rejetée.
En revanche, les deux sociétés intimées sont en droit de réclamer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais occasionnés par la procédure d'appel qui ne sont pas compris dans les dépens, une indemnité complémentaire que la cour fixe à 1 500 ¿ pour chacune.
--- = = oO § Oo = =--- PAR CES MOTIFS--- = = oO § Oo = =---
LA COUR
Statuant par décision contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Rejette la demande reconventionnelle de dommages-intérêts formée par la SELARL CHALIVAT-ROYER-LAMBERT.
Condamne Madame Régine X...épouse Y...à verser à la SELARL CHALIVAT-ROYER-LAMBERT et à la SA CLINIQUE FRANCOIS CHENIEUX, pour chacune, une indemnité de 1 500 ¿.
La condamne aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Marie-Christine MANAUD. Jean-Claude SABRON.