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15/01/2015 | FRANCE | N°13/00244

France | France, Cour d'appel de Limoges, Cc, 15 janvier 2015, 13/00244


ARRET N.
RG N : 13/00244
AFFAIRE :
Consorts X...
C/
Consorts Y... et autres
SUCCESSION
COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE--- = = oOo = =--- ARRET DU 15 JANVIER 2015--- = = = oOo = = =---

Le QUINZE JANVIER DEUX MILLE QUINZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
Madame Jacqueline Z... veuve X... prise en sa qualité d'héritière de Monsieur Albert X... de nationalité Française, née le 20 Juillet 1918 à WASSY (52), Retraitée, demeurant...-75020 PARIS 20

représen

tée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC, avocat au barreau de LIMOGES, Me Benoit DESCLOZEAUX, avocat au...

ARRET N.
RG N : 13/00244
AFFAIRE :
Consorts X...
C/
Consorts Y... et autres
SUCCESSION
COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE--- = = oOo = =--- ARRET DU 15 JANVIER 2015--- = = = oOo = = =---

Le QUINZE JANVIER DEUX MILLE QUINZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
Madame Jacqueline Z... veuve X... prise en sa qualité d'héritière de Monsieur Albert X... de nationalité Française, née le 20 Juillet 1918 à WASSY (52), Retraitée, demeurant...-75020 PARIS 20

représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC, avocat au barreau de LIMOGES, Me Benoit DESCLOZEAUX, avocat au barreau des Hauts-de-Seine.
Madame Catherine X... épouse A... prise en sa qualité d'Héritière de Monsieur Albert X... de nationalité Française, née le 14 Février 1954 à VILLENEUVE SAINT GEORGES (94), Retraitée, demeurant...-34400 SAINT JUST

représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC, avocat au barreau de LIMOGES, Me Benoit DESCLOZEAUX, avocat au barreau des Hauts-de-Seine.
Monsieur Christian X... pris en sa qualité d'Héritier de Monsieur Albert X... de nationalité Française, né le 14 Février 1954 à VILLENEUVE SAINT GEORGES (94), Dentiste, demeurant... 27000 EVREUX

représenté par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC, avocat au barreau de LIMOGES, Me Benoit DESCLOZEAUX, avocat au barreau des Hauts-de-Seine.
Monsieur Jean-Pierre X... pris en sa qualité d'Héritier de Monsieur Albert X... de nationalité Française, né le 27 Mars 1943 à PARIS (12ème), Ingénieur, demeurant...-78350 JOUY EN JOSAS

représenté par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC, avocat au barreau de LIMOGES, Me Benoit DESCLOZEAUX, avocat au barreau des Hauts-de-Seine.
Monsieur Michel X... pris en sa qualité d'Héritier de Monsieur Albert X... de nationalité Française, né le 24 Avril 1957 à PARIS (19ème), Retraité, demeurant...-91450 ETIOLLES

représentée Me Anne DEBERNARD-DAURIAC, avocat au barreau de LIMOGES, Me Benoit DESCLOZEAUX, avocat au barreau des Hauts-de-Seine.
APPELANTS d'un jugement rendu le 10 AVRIL 2012 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE GUERET
ET :
Madame Marie Louise B... épouse C... de nationalité Française, née le 27 Juin 1952 à PARIS 14ème, Professeur, demeurant...-45700 VILLEMANDEUR

représentée par Me Xavier TOURAILLE, avocat au barreau de CREUSE
Monsieur Frédéric Y... Représenté par son administrateur ad'hoc l'UDAF DES HAUTS DE SEINE dont le siège social est 10, bis avenue du Général Leclerc-92211 SAINT-CLOUD CEDEX agissant poursuites et diligences de son directeur domicilié en cette qualité audit siège de nationalité Française, né le 11 Février 1956 à LIVRY GARGAN, Sans profession, demeurant...-93190 LIVRY GARGAN

représenté par Me Christophe DURAND-MARQUET, avocat au barreau de LIMOGES
Madame Marie-France Y... épouse D... de nationalité Française, née le 02 Mai 1943 à LIVRY-GARGAN (SEINE ST/ DENIS), demeurant...-74320 SEVRIER

représentée par Me Emilie BONNIN-BERARD, avocat au barreau de CREUSE
Madame Odile Y... épouse E... de nationalité Française, née le 01 Février 1947 à LIVRY-GARGAN (SEINE ST/ DENIS), Professeur, demeurant...-74140 DOUVAINE

représentée par Me Emilie BONIN-BERARD, avocat au barreau de CREUSE
Monsieur Robert Y... de nationalité Française, né le 12 Décembre 1939 à NICE (06), demeurant...-92160 ANTONY

représenté par Me Laurent BOUCHERLE, avocat au barreau de LIMOGES
Madame Alice Y..., venant aux droits de son père M. Didier Y..., décédé, assignée en reprise d'instance de nationalité Française, née le 20 Avril 1995 à PARIS (75012), demeurant...-37000 TOURS

non représentée bien que régulièrement assignée
INTIMES
--- = = oO § Oo = =---
Selon avis de fixation du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 27 Novembre 2014 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 8 Janvier 2015. L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 octobre 2014.
A l'audience de plaidoirie du 27 Novembre 2014, la Cour étant composée de Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, de Madame Christine MISSOUXet de Monsieur Gérard SOURY, Conseillers assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier, Monsieur le Président a été entendu en son rapport, les avocats de la cause sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Monsieur Jean-Claude SABRON, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 15 Janvier 2015 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
--- = = oO § Oo = =--- LA COUR--- = = oO § Oo = =--

Lucienne X... et Louis H... se sont mariés le 16 décembre 1937 après avoir adopté par contrat de mariage le régime de la communauté réduite aux acquêts.
Aucun enfant n'est né de leur mariage qui n'a jamais été dissous.
Louis H... a entretenu une relation adultère avec une dame Y... avec laquelle il a eu cinq enfants qu'il a reconnus et dont le premier, Robert Y..., est né le 12 décembre 1939, deux après la date de son mariage avec Lucienne X....
Après Robert Y... sont nés, le 2 mai 1943 Marie France Y..., le 1er février 1974 Odile Y..., le 11 décembre 1948 Didier Y... et le 11 février 1956 Frédéric Y....
Louis H... a en outre reconnu un sixième enfant, Marie Louise B..., née le 27 juin 1952 de sa relation avec une dame B....
Il est décédé le 27 novembre 1994 à SAINT VAURY, dans le département de la Creuse où il était propriétaire de biens immobiliers lui appartenant en propre, constitués par une maison rurale et diverses parcelles de terre sises sur la commune de SAINT ALPINIEN.
Par testament olographe du 25 mars 1980, il avait institué légataire universelle sa fille Marie Louise B....
Maître F..., notaire à AUBUSSON, a établi un projet d'état liquidatif de la communauté ayant existé entre Louis H... et Lucienne X... et de la succession de Louis H....
Ce projet a été adressé en juillet 1997 à Lucienne X..., après la date de son décès qui était survenu le 17 janvier 1997, époque à laquelle elle était domiciliée à PARIS.
Lucienne X... qui n'avait pas d'enfant a légué à son frère, Albert X..., l'universalité de ses biens, constitués par des liquidités placées sur divers comptes pour une valeur totale de l'ordre de 159 000 ¿ selon la déclaration de succession établie le 5 août 1997 par Maître G..., notaire à OUVILLE LA RIVIERE (Seine Maritime).
L'envoi en possession d'Albert X..., légataire à titre universel, a été prononcé par ordonnance du président du tribunal de grande instance de PARIS du 23 juin 1997.
Celui-ci s'est acquitté de droits de succession d'un montant de 67 844 ¿ et il a reçu la somme de 89 168 ¿.
Huit années plus tard, par actes des 14, 15, 17 et 24 juin 2005, deux des enfants adultérins reconnus par Louis H..., Madame Marie France Y... épouse D... et Madame Odile H... épouse E..., ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de GUERET aux fins de liquidation-partage de la communauté ayant existé entre Lucienne X... et leur père et de la succession de celui-ci :
- Albert X... à qui elles réclamaient le rapport d'une somme de 157 013, 18 ¿ en invoquant un recel des actifs de la communauté dissoute par le décès de Louis H... ;
- M. Robert Y..., M. Didier Y..., le représentant légal de Frédéric Y..., majeur sous tutelle, et Madame Marie Louise B..., devenue épouse C....
Didier Y... est décédé le 10 août 2006.
Il a laissé à sa succession sa fille unique, Alice Y... qui est mineure.
Par acte du 18 décembre 2006, Madame Agnès I... veuve Y... a été appelée dans la procédure en sa qualité de représentante légale de sa fille Alice.
Enfin, par acte du 29 novembre 2010, a été appelé dans la procédure l'administrateur ad hoc désigné pour représenter M. Frédéric Y....
Ces derniers n'ont pas constitué avocat.
Une ordonnance du juge de la mise en état en date du 10 octobre 2007 a désigné un expert aux fins de description et d'estimation des biens immobiliers et mobiliers de la de la communauté et de la succession.
L'expert, M. J..., a déposé son rapport le 19 juin 2009.
La description et l'estimation des biens immobiliers de Louis H... situés sur la commune de SAINT ALPINIEN (maison, granges, parcelles de terres et bois) et celle du mobilier laissé à son décès sont relatées dans le jugement entrepris.
Pour le surplus, l'expert s'est limité à rappeler que la succession de Lucienne X... veuve H... avait été réglée par Maître G..., notaire, le 5 août 1997.
Le tribunal de grande instance de GUERET a par jugement du 10 avril 2012 :
- dit M. Albert X... recevable à invoquer les dispositions de l'article 1442 du code civil ;
- dit que dans les rapports entre les époux, la dissolution de la communauté réduite aux acquêts ayant existé entre Louis H... et Lucienne X... veuve H... avait pris effet au 1er janvier 1949 ;
- constaté qu'au jour de son décès (17 janvier 1997) Lucienne X... veuve H... détenait une somme de 842 626, 63 francs correspondant à un actif ayant dépendu de la communauté (déduction faite des sommes reçues de la succession de son père et de sa soeur Paulette) ;
- débouté Mesdames K... et L... de leur demande d'application du recel ;
- condamné M. Albert X... à rapporter à l'indivision successorale de Louis H... la somme de 64 224, 59 ¿ (421 313, 3 francs) représentant la moitié de l'actif de communauté ;
- débouté Albert X... de sa demande de dommages-intérêts ;
- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage d'une part de la communauté de biens ayant existé entre Louis H... et Lucienne X... et, d'autres part, de la succession de Louis H... ;
- commis pour y procéder Maître Q..., notaire à AUBUSSON ;
- désigné Maître R..., commissaire priseur, pour procéder à la vente des biens mobiliers ;
- constaté qu'à raison des dispositions testamentaires du 25 mars 1980, Madame Marie Louise B... épouse C... venait à la succession de Louis H... pour la quotité disponible de 2/ 8ème et pour ses droits réservataires de 1/ 8ème et que diverses parcelles attenantes à l'immeuble d'habitation devaient lui être attribuées, en vertu du testament, sur la base d'une évaluation à 116 000 ¿ ;
- dit qu'il serait procédé à la barre du tribunal à la vente aux enchères publiques des autres biens immobiliers indivis, ce en quatre lots et mises à prix définis dans le dispositif du jugement ;
- dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile, ni à exécution provisoire ;
- dit que les dépens, frais d'expertise compris, seraient pris en frais privilégiés de partage.
**
M. Albert X... est décédé le 17 août 2012.
Ses ayants droits, Madame Jacqueline Z... veuve Albert X..., M. Jean Pierre X..., M. Michel X..., M. Christian X... et Madame Catherine X... épouse A... ont relevé appel du jugement sus visé par déclaration remise au greffe le 21 février 2013.
Dans leurs dernières conclusions qui ont été déposées le 12 mars 2014, les appelants demandent à la cour en visant les articles 1442, 1491, 765 et 759 du code civil :
- de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a fixé au 1er janvier 1949 la date d'effet de la dissolution de la communauté ayant existé entre Lucienne X... et Louis H... ;
- de la confirmer en ce qu'elle a rejeté la demande d'application des règles du recel ;
- d'infirmer la décision en ce qu'elle a condamné Albert X... à rapporter à l'indivision successorale Louis H... la somme de 64 224, 59 ¿ au titre de la moitié de l'actif de la communauté ;
- de dire qu'il n'est pas justifié d'un quelconque actif de communauté au 1er janvier 1949 ;
- d'ordonner la communication par la SCP SAVARY et autres associés, notaires à PARIS, des déclarations de succession et tous documents concernant les successions d'Antonin X..., père de Lucienne M..., et de Paulette X... veuve N..., sa soeur ;
- de dire qu'il est justifié de l'existence de biens propres de Lucienne X... provenant de la succession de son père et de ses deux s ¿ urs (Paulette et Gilberte), en titres et liquidités qui ont été placés et sont exclusivement à l'origine des sommes mentionnées dans la déclaration de succession établie par Maître G... ;
- de dire qu'il n'y a pas lieu à un quelconque rapport à l'indivision successorale de Louis H... ;
- de condamner Mesdames K... et L... à leur verser la somme de 20 000 ¿ à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, outre une indemnité de 5 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.
**
Dans leurs dernières conclusions qui ont été déposées le 24 mars 2014, Madame Marie France Y... épouse D... et Madame Odile Y... épouse E... qui forment un appel incident demandent à la cour :
- de dire les consorts X... irrecevables à demander l'application de l'article 1442 du code civil à laquelle Albert X... a implicitement renoncé en s'appropriant l'actif de la communauté avant toute liquidation ;
- de dire que, dans les rapports entre les époux, la dissolution de la communauté ayant existé entre Louis H... et Lucienne X... a pris effet à la date du décès du premier, soit le 27 novembre 1994 ;
- de dire qu'Albert X... a diverti sciemment des actifs de la communauté H...-X... et d'appliquer la sanction du recel successoral à ses héritiers à hauteur de la somme de 103 587, 40 ¿ (déduction faite des sommes reçues par Lucienne X... de son père et de ses soeurs de celle de 150 949, 23 ¿ qui représente le total de ses avoirs en compte à la date du décès, le 17 janvier 1997) ;
- à titre subsidiaire, si la cour n'entendait pas faire droit à la demande fondée sur l'article 1477 du code civil, de condamner les consorts X... à rapporter à l'indivision successorale de Louis H... la somme de 51 793, 70 ¿ au titre de la moitié de cet actif de communauté ;
- de débouter les consorts X... de leur demande de dommages-intérêts ;
- de les condamner à leur verser la somme de 5 000 ¿ à titre de dommages-intérêts, outre une indemnité du même montant sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de débouter M. Robert Y... de ses demandes d'attribution en nature ;
- de condamner les consorts X... aux entiers dépens.
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Dans ses dernières conclusions qui ont été déposées le 3 décembre 2013, M. Robert Y... demande à la cour :
- de statuer ce que de droit sur l'appel des consorts X... ;
- de confirmer la décision entreprise en ses dispositions non critiquées, sauf à préciser qu'en l'absence d'opposition des co-indivisaires, lui seront attribuées sur la base de l'évaluation de l'expert judiciaire les parcelles 46, 50, 56, 57, 58, 91, 104, 113, 154, 156, 167 et 168, avec la grange, de la section AD (commune de SAINT ALPINIEN).
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Dans ses dernières conclusions, déposées le 3 avril 2014, l'UDAF DES HAUTS DE SEINE, en sa qualité d'administrateur ad'hoc de M. Frédéric Y..., demande de statuer ce que de droit sur l'appel des consorts X..., sur l'appel incident des Mesdames D... et E... et sur les demandes de M. Robert Y....
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Dans ses dernières conclusions, déposées le 18 mars 2014, Madame Marie Louise B... épouse C... demande à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a dit que les effets de la dissolution de la communauté seraient reportés au 1er janvier 1949 et que M. Albert X... aurait à rapporter la somme de 64 224, 59 ¿ à la succession de Louis H... ;
- de dire que le partage de la communauté s'effectuera en considération de la date du décès de Louis H... (27 novembre 1994) ou, subsidiairement, de la date du jugement rendu le 8 octobre 1959 par le tribunal d'instance de PARIS qui a condamné Louis H... au versement d'une contribution aux charges du mariage ;
- de dire que les consorts X..., venant aux droits d'Albert X..., devront rapporter à la succession de Louis H... la somme de 63 119, 22 ¿ ;
- de condamner les appelants à lui verser une indemnité de 5 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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Mademoiselle Alice Y... qui a atteint l'âge de la majorité le 20 avril 2013 n'a pas constitué avocat bien qu'elle ait été assignée et que les conclusions des autres parties lui aient été signifiées.
LES MOTIFS DE LA DECISION
Monsieur Albert X... est entré en possession de son legs avec la conviction que les biens laissés par sa s ¿ ur, séparée de Louis H... depuis de nombreuses années, étaient des propres venant de la succession de leur père et de deux autres s ¿ urs prédécédées.
Cela ne l'empêchait nullement, par conséquent, d'opposer aux deux enfants naturels qui l'ont assigné huit ans plus tard en liquidation de la communauté issue du mariage, non dissous, de Lucienne X... et leur auteur, Louis H..., les dispositions des articles 1442 et 1491 du code civil qui donnent le droit à l'un des époux ou à ses héritiers de demander que l'effet de la dissolution de la communauté soit reporté à la date la cessation de toute cohabitation et collaboration.
Le fait que, confronté à la revendication de ces deux enfants naturels, Albert X... ait, dans le cadre d'une expertise judiciaire ordonnée avant dire droit, fait état de sa volonté de réclamer une récompense à la communauté supposée ne permet pas de considérer qu'il ait renoncé à se prévaloir du texte précité lors des débats sur le fond.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a dit Albert X... recevable en sa demande tendant à faire remonter à la date à laquelle toute cohabitation et collaboration entre sa s ¿ ur et Louis H... avait cessé l'effet de la dissolution de la communauté ayant existé entre ces derniers, comme aurait pu le faire Lucienne X... qui, à son décès, lui a transmis ses droits.
Il est constant, Madame D... et Madame E... l'ont au demeurant expressément reconnu dans leurs conclusions en première instance, que la séparation de Lucienne X... et de Louis H... remontait à plus de 70 ans lorsque l'action a été introduite à l'encontre du frère auquel elle avait légué ses biens.
Dans leurs conclusions signifiées en septembre 2011, Madame D... et Madame E... indiquent à la page 8 que « le délai qui s'est écoulé depuis la cessation de la cohabitation et de la collaboration entre les époux O... est de plus de 70 ans » et, un peu plus loin, qu'il est « constant que (leur) séparation remonte à plus de 70 ans » (pièce no 24 des appelants).
Cette séparation, en tout cas en ce qui concerne la communauté de vie, remonte à l'année 1939 au cours de laquelle est né le premier enfant adultérin issu de la relation de Louis H... avec Madame Y... (il s'agit de Robert Y... qui est né le 12 décembre 1939).
C'est dés lors à bon droit que le premier juge a fixé au 1er janvier 1949 la date de la cessation de la cohabitation et de la collaboration entre les époux au vu de la lettre par laquelle Lucienne X... a expliqué au soutien d'une demande de dégrèvement fiscal qu'après avoir été abandonnée par Louis H... en 1948, ils avaient depuis lors établi des déclarations d'impôts distinctes.
La procédure en contribution aux charges du mariage qui a donné lieu à la condamnation prononcée contre Louis H... par un jugement du tribunal d'instance de Paris du 8 octobre 1959 n'a quant à elle pour origine que la situation de besoin dans laquelle Lucienne X... s'était trouvée à la suite de la non reconduction du bail du logement dans lequel elle avait continué de résider, seule, depuis la séparation.
C'est par conséquent au 1er janvier 1949, et non à la date du décès de Louis H..., survenu le 27 novembre 1994, qu'il convient de rechercher s'il existait un actif de communauté.
Or, entre la date de leur mariage, célébré le 16 décembre 1937, et le 1er janvier 1949, date à laquelle remonte la dissolution de leur communauté, les époux P... qui n'étaient âgés que d'une vingtaine d'année et débutaient dans leur vie professionnelle n'ont réalisé aucun achat immobilier ni acquêt d'aucune sorte susceptible de donner un contenu à la dite communauté.
Louis H... s'est très vite désintéressé de son épouse puisque sa nouvelle compagne lui a donné un premier enfant en 1939, deux ans après le mariage, et la situation très modeste de Lucienne X..., employée de commerce à Paris, ne lui permettait pas de faire des économies.
Les seuls événements susceptibles d'expliquer le fait que Lucienne X... ait été en possession d'un capital de près de 160 000 ¿ à son décès, survenu le 17 janvier 1997, sont postérieurs à la date à laquelle remonte l'effet de la dissolution de la communauté.
Ces événements consistent dans l'ouverture de la succession du père de Lucienne X... qui était propriétaire d'un portefeuille d'actIons et d'un immeuble de rapport situé à Paris, lequel est décédé en 1960, de l'ouverture de la succession d'une soeur qui détenait elle aussi un portefeuille de titres et qui est décédée en 1979, de la vente par les héritiers de l'immeuble sus évoqué, réalisée par un acte du 24 mars 1980, et de l'ouverture de la succession d'une deuxième soeur, décédée en 1988.
Les revenus des biens propres qui ont ainsi été transmis à Lucienne X... ne sont pas tombés dans la communauté dont la dissolution remonte à une date bien antérieure à leur acquisition.
La présomption de l'article 1402 du code civil ne peut être appliquée à aucun de ces actifs dont la source est postérieure au 1er janvier 1949.
L'action de Mesdames Marie France Y... épouse D... et Odile Y... épouse E... est infondée en ce qui concerne la liquidation de la communauté ayant existé entre Lucienne X... et Louis H... dés lors que cette communauté n'avait pas d'actif à la date à laquelle sa dissolution a pris effet.
Il convient d'infirmer le jugement entrepris qui a pour conséquence, particulièrement inique, de faire rapporter par les ayants droits d'Albert X... l'héritage de celui-ci dans la succession d'un tiers qui ne dispose d'aucun droit sur les biens qui le compose.
Madame Marie France Y... épouse D..., Madame Odile Y... épouse E... et Madame Marie Louise B... épouse C... qui s'est joint à l'action de celles-ci doivent être déboutées de leur demande de liquidation partage de la communauté ayant existé entre Lucienne X... et Louis H... ainsi que de leur demande de rapport par les héritiers d'Albert X... de tout ou partie des sommes reçues par celui-ci dans la succession de Lucienne X....
L'application des règles du recel est quant à elle sans objet.
**
Les dispositions du jugement entrepris qui concernent l'ouverture des opérations de liquidation et de partage de la succession de Louis H... ne font pas l'objet d'un appel et sont définitives.
La demande de Robert Y... concernant l'attribution de certaines parcelles dont le tribunal a ordonné la licitation n'est pas irrecevable comme constituant une demande nouvelle dans la mesure où elle ne porte que sur les modalités du partage.
Par ailleurs, aucun incident n'a été formé devant le conseiller de la mise en état à propos de la recevabilité des conclusions dans lesquelles cette demande est formée.
Toutefois, sur le fond, M. Robert Y... ne justifie d'aucune condition susceptible de lui permettre, en l'absence d'accord de ses cohéritiers, de prétendre à l'attribution préférentielle de ces biens.
Sa demande sera rejetée.
**
L'action poursuivie par Madame Marie France Y... épouse D..., Madame Y... épouse E... et Madame Marie Louise B... C... n'est pas dénuée de légèreté dans la mesure où celles-ci n'ignoraient pas que leur auteur et Lucienne X... vivaient séparément depuis de très nombreuses années.
Toutefois, elles ne connaissaient pas l'origine des actifs qui avaient été légués à celui-ci et paraissent avoir agi dans le but de sauvegarder des droits qu'elles pouvaient croire légitime ; il n'est pas prouvé qu'elles l'aient fait avec la seule intention de nuire.
Les appelants seront déboutés de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.
En revanche, les ayants droits d'Albert X... sont en droit de réclamer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre des trois héritières susnommées de Louis H... une indemnité de 5 000 ¿.
de la procédure d'appel.
--- = = oO § Oo = =--- PAR CES MOTIFS--- = = oO § Oo = =---

LA COUR
Statuant par décision rendue par défaut et par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Réforme le jugement entrepris et, statuant à nouveau ;
Déboute Madame Marie France Y... épouse D..., Madame Y... épouse E... et Madame Marie Louise B... épouse C... de leur demande de liquidation de la communauté ayant existé entre Louis H... et Lucienne X..., respectivement décédés le 27 novembre 1994 et le 17 janvier 1997, ainsi que de leur demande tendant à ce que soit rapportée dans la succession de Louis H... tout ou partie des sommes reçues par Albert X... au décès de sa soeur, Lucienne X....
Confirme le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions, sauf en ce qui concerne les frais et dépens de première instance.
Rejette la demande de M. Robert Y... tendant à ce que lui soit attribuées une partie des parcelles inclues dans les lots dont le jugement a ordonné la vente.
Condamne Madame Marie France Y... épouse D..., Madame Y... épouse E... et Madame Marie Louise B... épouse C... à verser à Madame Jacqueline Z... veuve d'Albert X..., M. Jean Pierre X..., M. Michel X..., M. Christian X... et Madame Catherine X... épouse A... une indemnité, unique et globale, de 5 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Confirme, seulement en ce qui concerne la liquidation et le partage de la succession de Louis H..., les dispositions du jugement qui ont dit que les dépens seraient pris en frais privilégiés de liquidation partage.
Condamne Madame Marie France Y... épouse D..., Madame Y... épouse E... et Madame Marie Louise B... épouse C... aux dépens exposés en première instance par Albert X... ainsi qu'à l'intégralité des dépens.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Marie-Christine MANAUD. Jean-Claude SABRON.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Cc
Numéro d'arrêt : 13/00244
Date de la décision : 15/01/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.limoges;arret;2015-01-15;13.00244 ?
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