La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/2014 | FRANCE | N°13/00811

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre civile, 06 mai 2014, 13/00811


ARRET N .RG N : 13/00811AFFAIRE :SARL ONE PLUS ONE TECHNOLOGIESC/SAS BUREAU VERITAS CERTIFICATION FRANCEDB/XFBdemande en paiement du prix ou des honoraires formée contre le client et/ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix, ou des honorairesGrosse délivrée àMaître Dominique VAL

COUR D'APPEL DE LIMOGESCHAMBRE CIVILE ARRET DU 06 MAI 2014

Le SIX MAI DEUX MILLE QUATORZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
SARL ONE PLUS ONE TECHNOLOGIESayant son siège social 22 rue du 9 juin 1944 -

19000 TULLEreprésentée par Me Dominique VAL, avocat au barreau de CORREZE
...

ARRET N .RG N : 13/00811AFFAIRE :SARL ONE PLUS ONE TECHNOLOGIESC/SAS BUREAU VERITAS CERTIFICATION FRANCEDB/XFBdemande en paiement du prix ou des honoraires formée contre le client et/ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix, ou des honorairesGrosse délivrée àMaître Dominique VAL

COUR D'APPEL DE LIMOGESCHAMBRE CIVILE ARRET DU 06 MAI 2014

Le SIX MAI DEUX MILLE QUATORZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
SARL ONE PLUS ONE TECHNOLOGIESayant son siège social 22 rue du 9 juin 1944 - 19000 TULLEreprésentée par Me Dominique VAL, avocat au barreau de CORREZE

APPELANTE d'un jugement rendu le 17 mai 2013 par le Tribunal de commerce de BRIVE LA GAILLARDEET :

SAS BUREAU VERITAS CERTIFICATION FRANCE prise en la personne de son Présidentayant son siège social immeuble Le Guillaumet 60 Avenue Charles de Gaulle - 92800 PUTEAUXreprésentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de LIMOGES, et Me Jean-Pierre MONDAN de la SCP BCF et Associés, Avocat au barreau de LYON

INTIMÉE
Selon avis de fixation du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 04 Mars 2014 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 08 avril 2014. L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 janvier 2014.
A l'audience de plaidoirie du 04 Mars 2014, la Cour étant composée de Madame Martine JEAN, Président de chambre, de Monsieur Didier BALUZE et de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Conseillers, assistés de Madame Elysabeth AZEVEDO, Greffier, Monsieur Didier BALUZE a été entendu en son rapport, les Avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Madame Martine JEAN, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 06 Mai 2014 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
LA COUR
Résumé du Litige
Selon les indications des parties, il a été conclu entre elles selon convention du 16 février 2009 une proposition technique et financière pour la validation-détermination d'un projet domestique de "covoiturage dynamique" dit PONCO2 on P. O. N. C.O. ², contrat selon lequel le Bureau Veritas devait effectuer une mission de validation du MPD / MOC, soit le mécanisme de développement propre par mise en oeuvre conjointe
La SARL ONE plus ONE Technologies (ou SARL ONE + ONE) visait l'agrément de l'administration et devait établir à cette fin que son projet était additionnel ou de "l'additionnalité" de son projet.
En clair, la SARL ONE + ONE élaborait un projet d'organisation et de gestion d'un système de co-voiturage sensé participer à la réduction de l'émission des gaz à effets de serre.
Elle entendait obtenir l'agrément de l'administration.
Comme il s'agit de réduire un facteur, un projet en cette matière est dénommé (et doit être) additionnel et pour obtenir l'agrément de l'administration il convient de démontrer notamment "l'additionnalité" du projet.
Le montant de la prestation était de 18.255 ¿ HT, le paiement était prévu de manière échelonnée, par pourcentage en fonction de l'avancement des travaux.
Il a été payé deux factures d'août et octobre 2009, pour 6.549 ¿ et 4.366 ¿ TTC. Le solde de 11.202,06 ¿ TTC n'a pas été réglé.
La SAS Bureau Véritas Certification France (ou le BV) a engagé une action en paiement et par jugement du 17 mai 2013, le Tribunal de Commerce de Brive la Gaillarde a condamné la SARL ONE + ONE à payer au BV la somme de 11.202,06 ¿ avec intérêts en rejetant dans ses motifs la demande reconventionnelle de la SARL ONE + ONE.
** *

La SARL ONE + ONE, appelante, fait valoir en substance que le BV n'a pas exécuté convenablement sa mission qui ne peut être considérée comme satisfaite par le simple dépôt du rapport.
Elle expose que le BV avait conclu que son projet était additionnel, qu'elle s'est heurtée à un refus d'agrément de l'Administration le 19 mai 2010 - ce qui en soi n'est pas la raison de son opposition au paiement - mais que ce refus était motivé par le fait que le dossier remis ne permettait pas d'établir de façon suffisamment probante que le projet était additionnel, ce qui en revanche justifie sa réclamation.
Elle précise qu'elle avait engagé un recours devant le Tribunal Administratif qu'elle a retiré ensuite notamment pour ménager ses relations avec l'Administration.
Elle soutient qu'il y a eu un manquement au devoir de conseil en expliquant qu'il est apparu que le BV s'était rendu compte de non conformités de son projet qu'elle ne lui a cependant pas signalées.
Elle forme une demande de dommages intérêts en considérant que la clause exonératoire de responsabilité figurant dans le contrat vide celui-ci de toute cause et engagement de telle sorte qu'elle est nulle.
La SARL ONE + ONE demande:
- de réformer le jugement,
A titre principal
- de prononcer la résolution du contrat,- de condamner le BV à lui rembourser les sommes déjà réglées, - de rejeter la demande en paiement du solde,

A titre subsidiaire
- de condamner le BV à lui payer 35.000 ¿ de DI
En toute hypothèse
- de condamner le BV à lui payer 35.000 ¿ de DI
- de déclarer la clause sur la responsabilité inapplicable.
** *

Le Bureau Véritas expose qu'il a bien rempli sa mission.
Il expose notamment qu'il est bien accrédité pour la prestation considérée, que le paiement du solde devait intervenir après dépôt de son rapport qui a bien été remis au client, que sa mission ne se limitait pas établir le caractère additionnel du projet et que le refus d'agrément n'a pas résulté que de cet aspect mais de l'insuffisance plus générale du projet, que ONE+ ONE n'a pas continué sa procédure devant le Tribunal Administratif qui seule aurait permis de vérifier si l'analyse du BV était inexacte, que de toute façon ONE + ONE a obtenu ensuite l'agrément de telle sorte qu'elle n'a plus d'intérêt à agir.
Elle estime par ailleurs que la clause limitative de responsabilité est valide.
La SAS BV conclut donc à la confirmation et sollicite 3.000 ¿ pour procédure abusive.
** *

Il est renvoyé aux conclusions ou dernières conclusions des parties déposées par l'appelante le 19 décembre 2013 et par l'intimée le 9 octobre 2013.

Motifs

Il est justifié (par une pièce de l'intimée) du refus d'agrément du Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat (ou le Ministère) , selon lettre du 19 mai 2010.
Il est fait état que le projet aurait été agréé. Le BV produit à ce sujet un constat d'Huissier du 23 juillet 2010 établi à la requête de ONE + ONE mais sans l'annexe qui doit être la partie où l'Huissier a constaté les mentions apparaissant sur un site du Ministère (et faisant état de l'agrément).
Mais la SARL ONE + ONE produit un échange de courriels avec le Ministère des 29 juillet et 3 août 2010 (postérieur donc au 23 juillet 2010) duquel il ressort qu'il y a eu une erreur informatique et que le projet de ONE + ONE est non agréé.
** *

Le rapport de validation préliminaire du BV produit ( Ref France Det/ 0007/2010) fait état globalement du caractère additionnel du projet. Cela n'est pas contesté.
Si dans le paragraphe final (5, opinion de validation, page 15) il est écrit que "sur cette base, le rapport justifie la recommandation d'une opinion de validation avec réserve", il est mentionné par ailleurs en tout cas que le projet est additionnel :
- paragraphe 3.1 ( page 11): le scénario du projet est considéré comme additionnel par rapport au scénario de référence et donc éligible pour recevoir des unités de réductions d'émissions dans le cadre de la MOC ... la conception du projet est saine,
- paragraphe 3.2 - scénario de référence et additionnalité (page 11/12) : ... par conséquent, après avoir effectué ces exclusions, l'activité du projet se trouve être additionnelle par définition. L'EIA (l'entité indépendante accréditée) confirme que seule la commercialisation des URE permet le montage du projet dans des conditions acceptables de rentabilité, ce projet est donc additionnel,
- tableau page 37 : B.5 - "Evaluation et preuve of d'additionnalité": l'activité du projet est additionnelle" OUI, conclusion préliminaire OK, conclusion finale OK.
Le rapport du BV concluait donc au caractère additionnel du projet, ceci même de manière nettement affirmative.
Or, la lettre précitée du 19 mai 2010 montre d'abord de manière circonstanciée que le caractère additionnel du projet n'était guère étayé.
Il est en effet relevé que les éléments fournis dans le cadre du document descriptif du projet ne permettent pas d'établir "de façon suffisamment probante que le projet est additionnel" ... il ne fournit pas "d'éléments précis et objectifs" sur les "principaux facteurs qui devraient être pris en compte dans la démonstration de l'additionnalité".
Il est alors cité qu'il ne comporte "ni un état des lieux circonstancié sur le covoiturage et sur les barrières à sa diffusion, ni un argumentaire solide et cohérent sur la valeur ajoutée du service apporté par PONCO2 par rapport aux outils existants, notamment au regard ... de nombreux sites Internet dédiés sans valorisation carbone, ni enfin et surtout sur le caractère décisif des crédits carbone pour le déclenchement de l'activité.
Il est fait état aussi de l'absence d'un aspect qui constitue pourtant "un paramètre clef" de l'évaluation par les services de l'Etat sur l'additionnalité du projet.
Il ressort ainsi de cette motivation que le projet, par rapport à son caractère additionnel ou non, était présenté de manière des plus sommaire, voire légère, puisque des données sur des éléments de base ou déterminants étaient insuffisantes ou omises.
Par ailleurs, cette lettre signale aussi d'autres aspects défectueux : complexité et caractère payant du système, pas de garanties pour limiter les effets pervers et prévenir les effets d'aubaine, ce qui risque de mettre en péril l'intégrité du dispositif et de mettre en doute la réalité des réductions d'émissions obtenues grâce au projet, interrogation sur la nature même du projet: il n'est pas précisé si l'activité de projet correspond aux trajets de covoiturage effectués par les automobilistes ou si elle renvoie aux services d'intermédiation fournis par l'opérateur-agrégateur.
Si le BV fait valoir que l'ensemble du projet était à revoir, ce qui apparaît effectivement être le cas, il appartenait aussi au BV, lequel avait une mission générale de contrôle de la détermination du projet et de sa validation, et donc un devoir de renseignement adapté et de conseil, d'aviser son client sur ces lacunes importantes.
Ces éléments permettent de statuer sur le présent litige, indépendamment de l'existence ou non d'une procédure devant la juridiction administrative qui aurait porté d'ailleurs sur un autre aspect de la situation, la validité ou non du refus d'agrément.
Il ressort en effet de ces observations que ce projet était très lacunaire, ce qu'évoque d'ailleurs en définitive lui-même le BV, mais tardivement, ce qui laisse entrevoir aussi de toute façon l'issue qu'aurait pu avoir la procédure administrative.
D'ailleurs, le BV ne présente pas réellement d'objections critiques à l'encontre des motifs du refus et, sur la base de cette lettre, il fait valoir qu'en réalité l'ensemble du projet présenté par la SARL ONE + ONE était selon l'administration à revoir.
Ainsi, l'analyse de cette lettre circonstanciée, par rapport à la mission du BV, permet de considérer que celui-ci n'a pas satisfait complètement à celle-ci en ne renseignant pas, n'alertant pas et ne conseillant pas suffisamment son client sur les lacunes de son projet.
Le fait même de la remise matérielle du rapport au client ne justifie pas de l'accomplissement de la mission qui a aussi un aspect qualitatif.
Cependant, il ressort du rapport que certaines prestations ont été réalisées (étude, enquête, analyse du projet ...).
Dans ces conditions, il n'y a pas lieu à résolution du contrat et les factures payées n'auront pas à être répétées, mais il convient de débouter le BV de sa demande en paiement du solde.
** *

Le contrat (conditions spécifiques) contient une clause écartant la responsabilité du BV pour les dommages "spéciaux, indirects et/ou consécutifs" résultant notamment des pertes de bénéfice, de revenus, de contrat, de clientèle, d'usage, de production ou d'interruption d'exploitation.
Il s'agit d'une clause conçue certes de manière assez large mais visant quand même divers types de dommages et n'apparaissant pas exclusive de toute responsabilité.
D'autre part, la somme de 35.000 ¿ n'est pas détaillée (si ce n'est en intégrant le montant global des honoraires), ce qui ne permet pas d'ailleurs de vérifier si elle correspondrait ou non à ces exclusions, et elle n'est pas non plus étayée par des pièces utiles.
En conséquence, cette demande de dommages intérêts ne sera pas admise.
Il apparaît inéquitable de laisser à la SARL ONE + ONE l'intégralité de ses frais irrépétibles. Il lui sera alloué une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile selon précisions au dispositif.
PAR CES MOTIFSLA COUR

Statuant par décision Contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Réforme le jugement,
Rejette les demandes de la SAS Bureau Véritas Certification France, notamment en paiement de la somme de 11.202,06 ¿,
Condamne la SAS Bureau Véritas Certification France à payer à la SARL One Plus One Technologies une indemnité de 2.500 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les autres demandes de la SARL One Plus One Technologies, notamment en remboursement des sommes de 6.549,89 ¿ et 4.366,60 ¿ et en paiement de 35.000 ¿ de dommages intérêts,
Condamne la SAS Bureau Véritas Certification France aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Marie-Christine MANAUD. Martine JEAN.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 13/00811
Date de la décision : 06/05/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.limoges;arret;2014-05-06;13.00811 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award