ARRET N. RG N : 13/ 00683 AFFAIRE : Mme Véronique X... C/ SOCIETE GENERALE PLP-iB prêt Grosse délivrée à Maître DES CHAMPS DE VERNEIX, avocat
COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE CIVILE ARRET DU 06 MAI 2014
Le SIX MAI DEUX MILLE QUATORZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :
ENTRE :
Madame Véronique X... de nationalité Française née le 27 Septembre 1964 à Profession : Directeur (rice) commercial (e), ...-87000 LIMOGES représentée par Me Etienne DES CHAMPS DE VERNEIX, avocat au barreau de LIMOGES, Me Aurélie ABBAL, avocat au barreau de MONTPELLIER
APPELANTE d'un jugement rendu le 04 AVRIL 2013 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LIMOGES
ET :
SOCIETE GENERALE 21, Place Jourdan-87000 LIMOGES représentée par Me Dominique FONTANA, avocat au barreau de PARIS, Me Delphine CHENE, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEE
Selon avis de fixation du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 04 Mars 2014 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 08 Avril 2014. L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 janvier 2014.
A l'audience de plaidoirie du 04 Mars 2014, la Cour étant composée de Madame Martine JEAN, Président de chambre, de Monsieur Didier BALUZE et de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Conseillers assistés de Madame Elysabeth AZEVEDO, Greffier, Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Conseiller a été entendu en son rapport, les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Madame Martine JEAN, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 06 Mai 2014 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
LA COUR
Faits, procédure :
Suivant offre préalable acceptée le 5 avril 2002 la SOCIETE GENERALE a consenti à Véronique X... un prêt d'un montant de 57 615 euros remboursable en 195 mensualités, destiné à financer l'acquisition d'un appartement en l'état futur d'achèvement.
Mme X... a remboursé le solde du prêt par anticipation le 7 février 2010.
Par acte du 14 février 2012 Mme X... a fait assigner la SOCIETE GENERALE aux fins de la voir condamner à lui verser une somme correspondant à la différence entre le taux conventionnel et le taux légal en alléguant que la mention erronée du taux effectif global était de 5, 3358 % alors que ce taux aurait dû s'élever à 6, 5565 % après intégration des frais de notaire et d'assurance.
Par jugement du 4 avril 2013 le Tribunal de Grande Instance de Limoges a rejeté la fin de non-recevoir de la prescription décennale et a débouté Mme X... de l'ensemble de ses demandes après avoir considéré que la banque n'avait pas à intégrer dans le Taux Effectif Global (TEG) le coût de l'assurance dans la mesure où cette charge n'était pas connue lors de la souscription du contrat de prêt, qu'en revanche les frais de notaire étaient déterminables ce qui a rendu erroné le TEG indiqué mais que l'erreur restait mineure, que Mme X... avait intégralement réglé le solde de son prêt en février 2010 par anticipation, qu'elle avait engagé sa procédure deux ans plus tard et qu'il n'y avait donc pas lieu de prononcer la déchéance du droit aux intérêts, même partiellement.
Vu l'appel interjeté par Véronique X... le 31 mai 2013 ;
Vu les conclusions no 2 communiquées par courriel au greffe le 30 octobre 2013 pour Véronique X... laquelle demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, de juger qu'il sera fait application du taux légal au contrat de prêt et de dire que du solde dû par Mme X... sera déduite la somme de 9 184, 41 euros correspondant à la différence engendrée par le passage du taux conventionnel au taux légal ;
Vu les conclusions no 1 communiquées par courriel au greffe le 3 septembre 2013 pour la SOCIETE GENERALE laquelle demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions, subsidiairement si la Cour devait prononcer la déchéance de son droit aux intérêts, de la limiter à un euro ;
Vu l'Ordonnance de clôture intervenue le 22 janvier 2014 et le renvoi de l'affaire à l'audience du 4 mars 2014 ;
DISCUSSION
Attendu qu'au stade de la procédure d'appel la décision entreprise a été acceptée par la SOCIETE GENERALE en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action engagée par Véronique X... qu'elle avait soulevée en première instance ;
Que le litige est donc circonscrit au calcul du montant du TEG que la banque devait faire apparaître dans son offre de prêt et à la sanction de son éventuelle irrégularité ;
Attendu, s'agissant du calcul du TEG, que c'est par de justes motifs, suffisamment détaillés et adoptés par la Cour, que les premiers juges, après avoir relevé que les frais de notaire, issus de tarifs réglementés, étaient déterminables par la banque lors de la conclusion du contrat de prêt, à tout le moins selon l'estimation que le notaire était en mesure de faire et qui s'élevait à 2 550 euros, ont considéré que le montant du TEG qui figurait dans l'offre, sans intégrer une quelconque somme à ce titre, était erroné ;
Attendu, s'agissant du coût de l'assurance, que si l'offre de prêt a été émise le 22 mars 2002 et que le contrat d'assurance n'a été souscrit qu'ultérieurement le 18 octobre 2002 avec toutefois une date d'effet au 5 août 2002, il apparaît que l'offre de prêt proposée par la SOCIETE GENERALE comportait dans la rubrique relative aux frais une mention selon laquelle une délégation d'assurance était faite à son profit pour le compte de Véronique X... par l'assureur GENERALI pour une somme de 57 615 euros, un « Numéro de contrat » étant même mentionné, le 01020051 ;
Attendu que postérieurement à la conclusion du contrat de prêt Mme X... a conclu un contrat d'assurance avec la Compagnie GENERALI France assurances-vie qui s'est engagée à payer au décès de l'assurée un capital stipulé payable à la SOCIETE GENERALE ;
Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'offre de prêt faite par la SOCIETE GENERALE à Mme X... était subordonnée à la conclusion par cette dernière d'un contrat d'assurance que cette banque considérait comme étant obligatoire comme cela résulte en outre de l'offre de prêt qu'elle a établie et qui porte mention, à la page 2, dans un tableau intitulé « coût total du prêt » du coût, non renseigné, de l'assurance-groupe « dit obligatoire, surprime technique comprise mais hors surprime médicale éventuelle », information rappelée en fin de contrat, au-dessus de la signature du prêteur, dans la case récapitulant les frais comme cela a été précédemment rappelé, mais avec la précision complémentaire référencée « f » qu'en cas de surprime affectant un assuré « à titre obligatoire, l'emprunteur, le co-emprunteur et la caution recevront une notification écrite du montant des surprimes et du nouveau TEG en résultant qu'ils devront accepter par écrit » ;
Attendu qu'il incombait donc à la SOCIETE GENERALE, qui avait subordonné l'octroi du crédit à la souscription d'une assurance, de s'informer auprès du souscripteur du coût de celle-ci avant de procéder à la détermination du taux effectif global dans le champ duquel un tel coût entrait impérativement ;
Que le jugement entrepris sera réformé de ce chef ;
Attendu que la mention d'un TEG de 5, 3358 % était donc erronée et inférieure au montant réel du TEG qui aurait dû être calculé par la SOCIETE GENERALE après intégration, des frais de notaire, au moins selon une estimation, et d'assurance ;
Attendu que s'agissant de la sanction de l'irrégularité de la mention du montant de ce Taux Effectif Global dans l'offre de prêt c'est à juste titre que les premiers juges ont rappelé qu'il s'agissait d'un manquement aux exigences légales relatives au contenu de l'offre préalable susceptible d'entraîner pour le prêteur la déchéance du droit aux intérêts laquelle restait toutefois facultative et modulable, pouvant être totale ou partielle ;
Attendu qu'aux termes de conclusions dont le raisonnement est quelque peu confus, puisque Mme X..., dont il est rappelé qu'elle s'est acquittée du remboursement du solde du prêt en cause par anticipation le 7 février 2010, demande toutefois à la présente juridiction de juger que « du solde dû par elle sera déduite la somme correspondant à la différence engendrée par le passage du taux conventionnel au taux d'intérêt légal, soit la somme de 9 184, 41 euros », il apparaît toutefois clairement qu'elle évalue son préjudice au montant de cette dernière somme ce qui constitue la limite maximum de son éventuelle indemnisation ;
Attendu que dans la mise en ¿ uvre de ce pouvoir d'appréciation parmi les éléments pris en considération la Cour d'appel entend préciser qu'elle exclut de considérer que le préjudice subi par Mme X... correspond à la différence entre le montant des intérêts au taux conventionnel qu'elle a réglé et le montant de ces mêmes intérêts calculé en fonction du taux légal, dès lors que Mme X... n'aurait jamais obtenu un taux de crédit correspondant au taux légal, que son préjudice doit en réalité s'analyser en la perte de chance d'avoir pu obtenu un prêt à des conditions plus avantageuses avec un établissement de crédit concurrent en ayant invoqué la réalité du Taux Effectif Global selon les conditions qui lui étaient faites par la SOCIETE GENERALE ;
Attendu qu'eu égard à l'ensemble des éléments de la cause, il apparaît qu'il y a lieu de faire application à la SOCIETE GENERALE, qui a omis d'appliquer deux critères du calcul du Taux Effectif Global, de la sanction partielle de la déchéance du droit aux intérêts mais d'en limiter le montant à la somme de 1 000 euros au paiement de laquelle elle doit être condamnée Mme X... lui ayant réglé la totalité de sa dette au titre du prêt en cause, y compris le montant des intérêts conventionnels ;
Que le jugement déféré sera réformé en conséquence ;
Que la SOCIETE GENERALE, qui succombe, devra prendre en charges les dépens de première instance et d'appel mais que l'équité ne justifie pas d'allouer une somme quelconque sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
INFIRME le jugement entrepris rendu le 4 avril 2013 par le Tribunal de Grande Instance de Limoges sauf en ce qu'il a ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture et le rejet de la fin de non-recevoir tirée de la prescription ;
Statuant à nouveau pour le surplus ;
Faisant application à la SOCIETE GENERALE de la déchéance partielle du droit aux intérêts ;
CONDAMNE la SOCIETE GENERALE à verser à Véronique X... une somme de 1 000 euros ;
CONDAMNE la SOCIETE GENERALE aux dépens de première instance et d'appel dont distraction selon les règles fixées par l'article 699 du code de procédure civile ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande en paiement de la somme de 5 000 euros présentée par Mme X... ;
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Marie-Christine MANAUD. Martine JEAN.