ARRET N.
RG N : 12/ 01136
AFFAIRE :
Lucie X...C/ SA BANQUE TARNEAUD
GS-iB
caution
Grosse délivrée Selarl DAURIAC COUDAMY, avocats
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU 06 MAI 2014
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Le six Mai deux mille quatorze la Chambre civile de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
Lucie X...de nationalité Française née le 29 Novembre 1965 à RAVENSBURG (ALLEMAGNE) (99) Profession : Sans profession, demeurant ...-87700 AIXE SUR VIENNE
représentée par Me Joël FRUGIER, avocat au barreau de LIMOGES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 12/ 6015 du 13/ 12/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Limoges)
APPELANTE d'un jugement rendu le 30 JUILLET 2012 par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE LIMOGES
ET :
SA BANQUE TARNEAUD Service Contentieux 2 et 6 rue Turgot-87000 LIMOGES
représentée par la SELARL DAURIAC-COUDAMY-CIBOT SELARL, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEE
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Selon avis de fixation du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 18 Février 2014 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 18 Mars 2014. L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 janvier 2014
Conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de Procédure Civile, Monsieur Gérard SOURY, magistrat rapporteur, assisté de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier, a tenu seul l'audience au cours de laquelle Monsieur Gérard SOURY, Conseiller a été entendu en son rapport, les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure
Après quoi, Monsieur Gérard SOURY, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 06 Mai 2014 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Au cours de ce délibéré, Monsieur Gérard SOURY, a rendu compte à la Cour, composée de Monsieur Gérard SOURY, Conseiller, de Monsieur Didier BALUZE, Conseiller faisant fonction de Président et de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Conseiller. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
--- = = oO § Oo = =--- LA COUR--- = = oO § Oo = =---
FAITS et PROCÉDURE
Le 9 mars 2010 l'EURL Lingerie LC, dirigée par Mme Lucie X..., a ouvert un compte courant dans les livres de la banque Tarneaud (la banque) qui lui a, par ailleurs, consenti un prêt professionnel d'un montant de 75 000 euros le 16 mars 2010.
Mme X...s'est portée caution solidaire de son entreprise au profit de la banque :- le 18 mars 2010 en garantie du remboursement du prêt à concurrence de la somme globale de 48 750 euros, dans la limite de 50 % de l'encours du prêt en principal, intérêts, commissions, frais et accessoires,- le 20 septembre 2010, en garantie de toutes sommes dues par L'EURL à concurrence du montant de 11 700 euros.
L'entreprise ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la banque a déclaré sa créance et assigné Mme X...devant le tribunal de commerce de Limoges en exécution de son engagement de caution. Mme X...s'est opposée à cette prétention et a formé une demande reconventionnelle en dommages-intérêts en reprochant notamment à la banque une faute à l'occasion de l'exécution de la convention " Webaffaires ".
Par jugement du 30 juillet 2012, le tribunal de commerce a notamment, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :- accueilli la demande en paiement de la banque,- condamné la banque à prendre à sa charge 50 % des pertes subies par l'EURL Lingerie LC sur les ventes effectuées via le site Internet, cette dette venant en déduction de celle de Mme X...,- accordé des délais de paiement à Mme X....
Mme X...a relevé appel de ce jugement.
MOYENS et PRÉTENTIONS
Mme X...conclut au rejet de la demande de la banque qui ne peut se prévaloir d'une créance certaine, liquide et exigible en l'état de la liquidation judiciaire de l'EURL débitrice principale. Subsidiairement, elle demande que sa dette soit réduite de 6 674, 33 euros correspondant au montant des opérations frauduleuses que la faute de la banque a permis de réaliser et elle réclame des dommages-intérêts en soutenant que la banque a abusivement soutenu l'EURL débitrice principale et a obtenu un engagement de garantie disproportionné aux revenus et patrimoine de la caution. Elle sollicite la réduction de la clause pénale et des délais de paiement.
La banque conclut à la confirmation du jugement, sauf à rejeter les demandes de Mme X...tendant :- à voir réduire sa dette à raison de l'exécution de la convention " Webaffaires ",- à l'octroi de délais de paiement.
MOTIFS
Sur le bénéfice de discussion opposé par la caution.
Attendu que Mme X...soutient que la banque ne peut se prévaloir d'une créance certaine, liquide et exigible en l'état de la liquidation judiciaire de l'EURL débitrice principale et qu'il convient d'attendre l'issue de cette procédure collective.
Mais attendu que la banque produit les cautionnements souscrits par Mme X...les 18 mars et 20 septembre 2010 desquels il résulte que celle-ci s'est engagée en qualité de caution solidaire avec renonciation au bénéfice de discussion ; qu'elle ne peut donc s'opposer à la mise en oeuvre de son obligation de garantie par le créancier en soutenant qu'il convient d'attendre l'issue de la liquidation judiciaire de l'EURL débitrice principale.
Sur la créance de la banque.
Attendu que la banque produit une décompte de ses créances arrêté au 13 mai 2011 faisant apparaître qu'il lui reste dû par l'EURL débitrice principale :-18 151, 04 euros au titre du compte courant,-75 921, 21 euros au titre du prêt comprenant une l'indemnité d'exigibilité anticipée dont le montant de 2 102, 62 euros n'est pas manifestement excessif en sorte qu'il n'y a pas lieu de le réduire.
Attendu, au vu de ce décompte, que c'est à juste titre que le tribunal de commerce a condamné Mme X..., en sa qualité de caution de l'EURL débitrice principale, à payer à la banque :-11 700 euros, plafond de son engagement de caution du 20 septembre 2010, au titre du compte courant,-37 960, 60 euros, correspondant à 50 % de l'encours du prêt en principal, intérêts, commissions, frais et accessoires, en exécution de son engagement de caution du 18 mars 2010 souscrit en garantie du remboursement du prêt, ces sommes étant assorties des intérêts au taux contractuel à compter du 14 mai 2011.
Sur l'action en responsabilité de Mme X....
Attendu que Mme X...reproche à la banque :- d'avoir été négligente dans l'exécution de la convention " Webaffaires ",- de lui avoir fait souscrire des engagements de caution disproportionnés à ses revenus et patrimoine,- d'avoir abusivement soutenu l'EURL débitrice principale.
1) L'exécution de la convention " Webaffaires "
Attendu que Mme X...n'est pas dénuée d'expérience commerciale puisqu'elle fait état, dans ses relations avec la banque, d'une précédente activité professionnelle en qualité de gérante libre et elle indique avoir dirigé un établissement dans lequel elle avait auparavant eu la charge du management d'une équipe.
Attendu que Mme X...a été victime d'opérations frauduleuses pour un montant de 6 674, 33 euros commises au moyen du système de paiement à distance par carte sur le réseau internet " Webaffaires " auquel elle avait adhéré auprès de la banque ; que la convention régissant ce système de paiement indique expressément qu'il ne constitue pas une garantie de paiement mais seulement un dispositif sécuritaire qui vise à réduire le risque d'impayé émis par le porteur pour contestation, le principe du programme étant de demander à l'internaute de s'authentifier au moment du paiement, afin de limiter l'utilisation frauduleuse d'un numéro de carte sur internet, à l'insu de son propriétaire ; que le dispositif proposé à Mme X...offrait deux niveaux de protection selon la fonction choisie :- fonction annulation : toutes transactions non annulées par le client seront systématiquement envoyées en banque pour traitement,- fonction validation : toutes transactions non validées par le client seront systématiquement annulées ; que Mme X...a expressément opté pour la fonction " annulation " ; qu'elle n'a pas demandé l'annulation des transactions litigieuses qui concernaient de nouveaux clients qui payaient au moyen de cartes Visa et Mastercard délivrées par la banque Citibank aux Etats-Unis ; qu'en l'absence d'annulation de sa part, Mme X...ne peut reprocher à la banque d'avoir débité le compte de l'EURL du montant des transactions impayées, conformément à la convention faisant la loi des parties ; que la responsabilité de la banque ne peut donc être recherchée de ce chef.
2) La disproportion des engagements de caution souscrits par Mme X...au regard de ses revenus et patrimoine.
Attendu que Mme X...s'est engagée en qualité de caution :- le 18 mars 2010 à concurrence de la somme globale de 48 750 euros,- le 20 septembre 2010 à concurrence du montant de 11 700 euros.
Attendu que la banque s'est renseignée sur la solvabilité de Mme X...préalablement à la souscription de ses engagements de garantie, qu'elle produit deux fiches de renseignements signées par Mme X...qui ne comportent pas les mêmes informations s'agissant des revenus et patrimoine de celle-ci ; que la banque admet que Mme X...était au chômage, et bénéficiaire du RSA, lorsqu'elle l'a sollicitée pour financer son entreprise et qu'elle devait rembourser deux prêts personnels représentant une charge annuelle de 5 698 euros et 1 500 euros ; qu'elle a déclaré à la banque être propriétaire de sa résidence principale d'une valeur comprise entre 165 000 et 180 000 euros, en sorte qu'en l'absence de toute anomalie apparente, la banque ne pouvait imaginer que ce bien était, en réalité, en indivision avec les enfants de Mme X...; qu'au vu des informations données par Mme X...à la banque, et en l'état du succès escompté de l'opération commerciale financée sur la base de bilans prévisionnels émanant d'un expert comptable, c'est à juste titre que le tribunal de commerce a retenu que le montant des engagements de garantie n'était pas disproportionné au regard des revenus et du patrimoine de la caution.
3) Le soutien abusif.
Attendu que la banque a consenti à l'EURL débitrice principale un prêt professionnel d'un montant de 75 000 euros le 16 mars 2010 ; que ce prêt, qui était concomitant à la création de l'entreprise, a été accordé sur la base de bilans prévisionnels sérieux émanant d'un expert comptable qui permettaient d'augurer du succès de l'opération commerciale financée ; que Mme X...ne démontre pas qu'à la date du prêt, la banque pouvait penser que l'entreprise était vouée à l'échec, étant observé que celle-ci n'a été mise en redressement judiciaire que le 7 avril 2011, sa liquidation judiciaire n'intervenant que le 6 octobre suivant ; que la responsabilité de la banque ne peut être engagée du chef d'un soutien abusif.
Sur les délais de paiement.
Attendu que le tribunal de commerce a autorisé Mme X...à s'acquitter de sa dette de caution en 24 pactes mensuels ; que ce chef de décision, qui n'est pas utilement critiqué par la banque, sera confirmé.
PAR CES MOTIFS
La cour d'appel statuant par décision contradictoire, mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement rendu par le tribunal de commerce de Limoges le 30 juillet 2012, sauf en sa disposition condamnant la banque tarneaud à prendre en charge 50 % des pertes subies sur les ventes effectuées via le site internet, soit 3 337, 16 euros à déduire de la dette de Mme Lucie X...;
Statuant à nouveau de ce chef,
DÉBOUTE Mme Lucie X...de son action en responsabilité à l'encontre de la banque Tarneaud ;
CONDAMNE Mme Lucie X...à payer à la banque Tarneaud une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme Lucie X...aux dépens.
LE GREFFIER, LE CONSEILLER,
Marie-Christine MANAUD. Gérard SOURY.
En l'empêchement légitime du Président, cet arrêt est signé par Monsieur Gérard SOURY, Conseiller qui a siégé à l'audience de plaidoirie et participé au délibéré.