ARRET N.
RG N : 12/ 00438
AFFAIRE :
Jean Pierre Z... Es qualité de curateur de Madame Isabelle X... Y..., Isabelle X...- Y... C/ SARL BOUGNOTEAU réprésentée par son gérant domicilié en cette qualité audit siège.
MJ-iB
paiement de sommes
Grosse délivrée la SCP Chabaud Chagnaud Maury, avocats
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU 22 MAI 2013
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Le vingt deux Mai deux mille treize la Chambre civile de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par la mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
Jean Pierre Z..., ès qualité de curateur de Madame Isabelle X... Y... de nationalité Française né le 29 Octobre 1954 à SAINT JUNIEN (87200) demeurant...
représenté par Me Marie Jeanne MOUDOULAUD, avocat au barreau de LIMOGES
Isabelle X...- Y... de nationalité Française née le 27 Août 1954 à LIMOGES (87000) demeurant...
représentée par Me Marie Jeanne MOUDOULAUD, avocat au barreau de LIMOGES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/ 2551 du 05/ 07/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Limoges)
APPELANTS d'un jugement rendu le 15 FEVRIER 2012 par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE LIMOGES
ET :
SARL BOUGNOTEAU réprésentée par son gérant domicilié en cette qualité audit siège. Dont le siège social est 30 rue Georges Fourest-87100 LIMOGES
représentée par Me Philippe CHABAUD de la SCP MAURY CHAGNAUD CHABAUD SCP, avocat au barreau de LIMOGES
INTIMEE
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Selon avis de fixation du Conseiller de la Mise en Etat, l'affaire a été fixée à l'audience du 27 Mars 2013 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 7 Mai 2013. L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 février 2013
Conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de Procédure Civile, Madame Martine JEAN, magistrat rapporteur, assisté de Madame Elysabeth AZEVEDO, Greffier, a tenu seul l'audience au cours de laquelle Madame le Président a été entendue en son rapport, Maîtres MOUDOULAUD et CHABAUD, avocats, ont été entendus en leur plaidoirie et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure
Après quoi, Madame Martine JEAN, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 22 Mai 2013 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Au cours de ce délibéré, Madame Martine JEAN, a rendu compte à la Cour, composée de Madame Martine JEAN, Président de chambre, de Monsieur Didier BALUZE, Conseiller et de Monsieur Gérard Z..., Conseiller. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
--- = = oO § Oo = =--- LA COUR--- = = oO § Oo = =---
La SAS BOUGNOTEAU a, selon devis du 21 octobre 2010, réalisé pour le compte d'Isabelle X...-Y... des travaux de changement d'une chaudière de chauffage central pour une somme de 7. 822, 57 € ;
La SAS BOUGNOTEAU n'ayant pu obtenir, malgré rappels et mise en demeure, paiement de sa facture, a fait assigner Isabelle X...- Y... devant le tribunal d'instance de Limoges aux fins d'obtenir paiement de la somme de 7. 822, 57 € outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 29 avril 2011 et de celle de 700 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Selon jugement du 15 février 2012, la juridiction du premier degré, devant laquelle Jean-Pierre Z... est intervenu en sa qualité de curateur d'Isabelle X...- Y..., a notamment :- déclaré Isabelle X...- Y... tenue au paiement envers la SAS BOUGNOTEAU de la somme de 7. 822, 57 € avec intérêts au taux légal à compter du 29 avril 2011,- déclaré la SAS BOUGNOTEAU tenue au paiement envers Isabelle X...- Y... de l'indemnité de 2. 000 €,- opérant compensation entre ces créances, condamné Isabelle X...- Y... à payer à la SAS BOUGNOTEAU la somme de 5. 822, 57 € avec intérêts au taux légal sur la somme de 7. 822, 57 € entre le 29 avril 2011 et le jugement, et sur la somme de 5. 822, 57 € à compter du jugement jusqu'à parfait paiement,- ordonné l'exécution provisoire,- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,- condamné Isabelle X...-Y... aux dépens.
Isabelle X...-Y..., assistée de son curateur, a interjeté appel de cette décision selon déclaration du 13 avril 2012.
Les dernières écritures des parties, auxquelles la Cour renvoie pour plus ample information sur leurs demandes et moyens, ont été transmises à la cour les 12 juillet 2012 par Isabelle X...-Y... et Jean-Pierre Z... et 28 août 2012 par la société BUGNOTEAU.
Isabelle X...-Y... et Jean-Pierre Z... demandent à la cour, par réformation du jugement déféré, de prononcer la nullité du contrat conclu entre Mme X...- Y... et la SAS BOUGNOTEAU, de débouter cette société et, subsidiairement, de condamner la société BOUGNOTEAU à payer à Mme X...- Y... la somme de 7. 822, 57 € à titre de dommages et intérêts avec compensation entre les créances réciproques des parties.
Isabelle X...- Y... et son curateur soutiennent que la première n'était pas en mesure d'apprécier l'engagement qu'elle a pris en sorte que l'acte ne peut être considéré comme valable eu égard au trouble mental dont elle souffrait à l'époque et dont elle souffre toujours ; ils estiment qu'elle n'a pu en tout cas donner un consentement valable dès lors qu'ayant été placée sous le régime de la curatelle, son défaut de capacité à agir est démontré ; ils ajoutent que la SAS BOUGNOTEAU s'est montré négligente en commençant les travaux sans que lui ait été versé l'acompte de 30 % prévu à la commande en sorte que Mme X...- Y... est fondée à lui réclamer la somme de 7. 822, 57 € à titre de dommages et intérêts.
La SAS BOUGNOTEAU conclut à la confirmation en ce que Mme X...- Y... a été condamnée à lui payer le montant de sa prestation mais forme appel incident pour voir réformer le jugement en ce qu'elle a été condamnée à payer à Mme X...- Y... la somme de 2. 000 € à titre de dommages et intérêts ; elle sollicite enfin paiement d'une somme de 900 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
La SAS BOUGNOTEAU estime qu'il n'est pas démontré que Mme X...- Y... était en état d'insanité d'esprit lorsqu'elle a accepté le devis, que la validité de la convention est établie, que Mme X...- Y... avait capacité pour contracter alors même qu'elle se trouvait sous curatelle, qu'enfin elle n'a elle-même commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que les appelants concluent à la nullité de l'acte en ce que, d'une part, Mme X...- Y... se trouvait en état d'insanité d'esprit au moment de l'acte et, d'autre part, elle n'avait pas la capacité pour s'engager utilement dès lors qu'elle avait été placée sous curatelle renforcée ; qu'ils estiment qu'en tout cas la société BOUGNOTEAU a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
Sur l'annulation de l'acte
Attendu, en premier lieu, qu'il ressort des dispositions de l'article 414-1 du Code Civil que pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit et que c'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental ;
Attendu certes que Mme X...- Y... a été placée, selon jugement du 16 avril 2009 du juge d'instance de Limoges, sous le régime d'une curatelle renforcée ; que cette seule circonstance est insuffisante toutefois à établir l'état d'insanité d'esprit de cette dernière au moment de la commande passée à l'entreprise BOUGNOTEAU ; que s'il ressort du certificat médical du Dc Le Jan du 12 janvier 2009 que Mme X...- Y... présente des troubles sévères de la personnalité, qu'elle est influençable et ne peut juger convenablement de sa situation et des décisions à prendre pour remédier à ses difficultés, ce document est insuffisant à caractériser son état d'insanité d'esprit au sens de l'article 414-1 du Code Civil susvisé ; que ni l'expert ni le juge n'ont d'ailleurs considéré que l'état de Mme X...- Y... relevait d'une procédure de tutelle, ce qui se serait justifié si Mme X...- Y... se trouvait, suite à un état d'insanité d'esprit, dans l'incapacité de gérer seul ses biens ; que la mesure de curatelle est prononcée en effet pour toute personne qui, sans être hors d'état d'agir elle-même, a seulement besoin d'être assistée ou contrôlée d'une manière continue dans les actes importants de la vie civile ;
Attendu, en second lieu, que constitue un acte d'administration, selon le décret du 22 décembre 2008 relatifs aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle les travaux d'amélioration utiles et les réparations d'entretien des immeubles de la personne protégée ;
Or attendu que, selon les dispositions de l'article 467 du Code Civil, la personne en curatelle ne peut, sans l'assistance de son curateur, faire aucun acte qui, en cas de tutelle, requerrait une autorisation du juge ou du conseil de famille ; que, a contrario, une personne sous curatelle peut passer seule des actes d'administration, sauf à ce qu'ils puissent être rescindés pour lésion ou réduits dans les termes des dispositions des articles 465 alinéa1 et 435 du Code Civil, lesquelles toutefois ne sont pas en l'espèce invoquées ;
Attendu en conséquence que la nullité de l'acte ne peut être prononcée, que ce soit pour insanité d'esprit au moment de sa conclusion ou défaut de capacité à agir de Mme X...- Y... ;
Attendu ainsi que le jugement mérite confirmation en ce qu'il a dit Mme X...- Y... tenue au paiement de la somme de 7. 822, 57 € ;
Sur la responsabilité de la SAS BOUGNOTEAU
Attendu que pour engager la responsabilité de la SAS BOUGNOTEAU, le premier juge a considéré que celle-ci avait commis une faute en commençant les travaux sans réclamer paiement de l'acompte de 30 % prévu dans son devis, ce qui lui aurait permis de vérifier la capacité et le sérieux de la commande ;
Attendu toutefois que la clause prévoyant le paiement d'un acompte est insérée dans le seul intérêt de l'entreprise ; que celle-ci ne commet en conséquence aucune faute contractuelle en n'en exigeant pas le paiement ;
Et attendu que la mauvaise foi ne se présume pas ; qu'à défaut de preuve de la mauvaise foi de la société BOUGNOTEAU, il ne peut être admis qu'elle n'ait cherché qu'à conclure un marché " coûte que coûte ", d'autant qu'elle a été appelée par l'intéressée elle-même et qu'il n'est pas contesté que l'installation de chauffage de Mme X...-Y... était déficiente ; que ni sa mauvaise foi ni son imprévoyance coupable n'étant caractérisées, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande en dommages et intérêts de Mme X...- Y... ;
Attendu en définitive que le jugement sera confirmé en ce qu'il porte condamnation de Mme X...- Y... mais réformé pour le surplus pour débouter cette dernière et son curateur de leur demande en dommages et intérêts ;
Attendu que l'équité conduit à condamner Mme X...- Y... au paiement d'une somme de 600 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre des procédures d'instance et d'appel ; que Mme X...- Y..., qui succombe, sera condamnée en tous les dépens ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
CONFIRME le jugement en ce qu'il a déclaré Isabelle X...- Y... tenue de payer à la SAS BOUGNOTEAU la somme de 7. 822, 57 € avec intérêts à compter de la mise en demeure du 15 février 2012,
REFORME la décision pour le surplus,
Statuant à nouveau,
CONDAMNE Isabelle X...- Y... à payer à la SAS BOUGNOTEAU la somme de 7. 822, 57 € outre intérêts au taux légal à compter du 15 février 2012,
DEBOUTE Isabelle X...- Y... de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts,
CONDAMNE Isabelle X...- Y... à payer à la SAS BOUGNOTEAU la somme de 600 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre de la première instance et de l'instance d'appel,
CONDAMNE Isabelle X...- Y... en tous les dépens d'instance et d'appel qui seront recouvrés, en ce qui concerne ces derniers, conformément aux dispositions de la loi sur l'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Elysabeth AZEVEDO. Martine JEAN.