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22/03/2012 | FRANCE | N°10/01067

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre civile, 22 mars 2012, 10/01067


ARRET N.

RG N : 10/ 01067

AFFAIRE :

COMMUNE DE VAYRES

C/

M. Jacques X..., Mme Maryline Y... épouse X...

MJ-iB

revendication d'un bien immobilier

grosse délivrée à Maître DURAND-MARQUET, avocat

COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
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ARRET DU 22 MARS 2012
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Le VINGT DEUX MARS DEUX MILLE DOUZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :

ENTRE :

COMMUNE DE VAYRES
Mairie-Rue des Bell

es Roses-87600 VAYRES

représentée par Me Christophe DURAND-MARQUET et Me Philippe CLERC, avocats au barreau de LIMOGES

APPELANTE d'un jug...

ARRET N.

RG N : 10/ 01067

AFFAIRE :

COMMUNE DE VAYRES

C/

M. Jacques X..., Mme Maryline Y... épouse X...

MJ-iB

revendication d'un bien immobilier

grosse délivrée à Maître DURAND-MARQUET, avocat

COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
--- = = oOo = =---
ARRET DU 22 MARS 2012
--- = = = oOo = = =---

Le VINGT DEUX MARS DEUX MILLE DOUZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :

ENTRE :

COMMUNE DE VAYRES
Mairie-Rue des Belles Roses-87600 VAYRES

représentée par Me Christophe DURAND-MARQUET et Me Philippe CLERC, avocats au barreau de LIMOGES

APPELANTE d'un jugement rendu le 17 JUIN 2010 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LIMOGES

ET :

Monsieur Jacques X...
de nationalité Française
né le 16 Juin 1954 à SAINTES (17100)
Profession : Agriculteur, demeurant ...-87600 VAYRES

représenté par Me Patrice DELPUECH, avocat au barreau de LIMOGES

Madame Maryline Y... épouse X...
de nationalité Française
née le 17 Août 1958 à SAINTES (17100)
Profession : Agricultrice, demeurant ...-87600 VAYRES

représentée par Me Patrice DELPUECH, avocat au barreau de LIMOGES

INTIMES

--- = = oO § Oo = =---

L'affaire a été fixée à l'audience du 19 Janvier 2012 par application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, la Cour étant composée de Madame Martine JEAN, Président de chambre, de Madame Christine MISSOUX-SARTRAND et de Monsieur Gérard SOURY, Conseillers, assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier. A cette audience, Madame le Président a été entendue en son rapport oral, Maîtres CLERC et
DELPUECH, avocats, ont été entendus en leur plaidoirie.

Puis Madame Martine JEAN, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 22 Mars 2012 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

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LA COUR
--- = = oO § Oo = =---

La cour se réfère expressément en ce qui concerne les faits, la procédure et les demandes et moyens des parties en première instance au jugement frappé d'appel qui en a fait un exposé exacte et complet ; il sera seulement rappelé que les époux X... ont acquis le 16 juin 2003 des époux Z...une propriété agricole d'une superficie de 85 ha 96 a et 99 ca située Commune de VAYRES et que, par acte notarié du 26 octobre 2007, la commune de VAYRES leur a vendu un terrain " anciennement à usage de chemins ruraux " situé à " ... " et cadastré section A no 2032, 2033 et 2034 pour une surface de 82a 7ca au prix de 1. 551, 75 €.

Soutenant que cette vente n'avait été consentie que suite à l'accord donné par les époux X... de rouvrir un chemin rural reliant la route communale no11 et le chemin de " ... ", lesquels n'ont pas donné suite à cet engagement, la commune de VAYRES les a fait assigner devant le tribunal de Grande Instance de Limoges, selon acte du 20 mai 2009, aux fins de les voir condamner à rouvrir ce chemin sous astreinte de 100 € par jour de retard et en paiement des sommes de 5. 000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et 2. 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par jugement du 17 juin 2010, le tribunal a notamment :
- déclaré recevable la demande formulée par la commune de VAYRES qui a qualité pour agir,
- débouté celle-ci,
- condamné la commune de VAYRES à verser à M. et Mme Jacques X... la somme de 1. 200 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- condamné la commune de VAYRES aux dépens.

La commune de VAYRES a interjeté appel de cette décision selon acte du 20 juillet 2010.

Les dernières écritures des parties, auxquelles la Cour renvoie pour plus ample information sur leurs demandes et moyens, ont été déposés les 6 décembre 2011 par la commune de VAYRES et 24 août 2011 par les époux X....

La commune de VAYRES demande à la cour de réformer le jugement, de dire que les époux X... devront être condamnés à libérer toute entrave au passage partant du chemin rural dit de " ... " longeant au nord-est les parcelles cadastrées section A no 1412 et 1411 et rejoignant la voie communale et ce sous astreinte de 200 € par jour de retard, de condamner les époux X... à leur payer la somme de 2. 000 € à titre de dommages et intérêts ainsi qu'une somme identique sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, de les condamner enfin en tous les dépens.
La commune de VAYRES, qui observe que les époux X... ne justifient pas d'une prescription acquisitive sur l'assiette de ce chemin, fait valoir que les époux X... ne font pas la preuve d'un titre de propriété, que le chemin en cause est un chemin rural et non un chemin d'exploitation comme il ressort des présomptions contenues aux articles L 161-1 et suivant du code Rural et de la Pêche Maritime, qu'elle a régulièrement procédé au demeurant à l'entretien du chemin litigieux à l'exception de la portion objet du litige sur laquelle le personnel communal s'est heurté aux obstacles obstruant le passage mis en place par les époux X... eux-mêmes ;
Elle ajoute que les époux X... s'étaient engagés à libérer les lieux à l'occasion de la vente qui leur a été consentie en 2007.

Les époux X..., faisant valoir que le bail à ferme en date du 16 août 1972 qu'ils produisent aux débats ne fait état d'aucune servitude, que l'exploitation a toujours été consacrée à l'activité agricole et que l'ancien fermier des époux Z...confirment qu'il n'y avait sur ces terrains que des chemins d'exploitation, en déduisent que l'action de la commune est prescrite et font observer que d'ailleurs, sur le terrain, l'assiette du chemin n'est plus visible ; ils estiment, en tout cas, que la commune est dans l'incapacité de prouver que le chemin litigieux est un chemin rural alors qu'ils versent aux débats diverses attestations d'où il ressort que le chemin, qui n'a toujours été utilisé que par les riverains, est un chemin d'exploitation ; ils ajoutent que, contrairement à ce que soutient la commune, rien dans l'acte de vente établi en 2007 n'établit qu'ils avaient donné leur accord à la réouverture du chemin litigieux ;
Ils demandent en conséquence à la cour de déclarer irrecevable comme prescrite l'action de la commune de VAYRES et, subsidiairement, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal ; en toutes hypothèses, il sollicite la condamnation de la commune de VAYRES à leur payer la somme de 3. 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que s'il ressort de l'article L 161-1 du Code Rural que " les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales ", l'article L 161-2 du Code Rural prévoyant par ailleurs que " l'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale ", il ne se déduit pas de ces textes que la qualification de chemin rural se trouve nécessairement exclue si une commune n'est pas en mesure d'établir une utilisation actuelle du chemin par le public ou son entretien par ses soins ; que, en effet, un chemin rural est réputé appartenir à la commune sur laquelle il est situé tant que son aliénation n'a pas été réalisée, alors même qu'il a cessé d'être utilisé et entretenu ; que la présomption de l'article L 162-2 du Code Rural susvisé n'a pour objet que de faciliter la preuve de la qualification de chemin rural ;

Attendu certes, en l'espèce, que si la commune de VAYRES produit des attestations selon lesquelles le chemin litigieux a été utilisé par le public jusqu'à ce que M. A..., ancien exploitant des parcelles désormais propriété X..., ne le ferme, les époux X... produisent quant à eux des témoignages d'où il ressort que ce chemin n'était utilisé de longue date que par les riverains en sorte qu'il ne serait pas un chemin rural mais un chemin d'exploitation ;

Mais attendu qu'il ressort du simple examen du cadastre que le chemin litigieux y est parfaitement identifié ; que le cadastre ne le désigne pas comme un simple chemin d'exploitation (trait plein) ; que ce chemin relie par ailleurs le chemin rural de " ... " à la voie communale no11 ; que les époux X... ne produisent aucun titre d'où il pourrait se déduire que ce chemin fait partie intégrante de leur propriété ; que les témoignages qu'ils produisent ne permettent nullement d'exclure que ce chemin ait pu être utilisé par le passé, comme il résulte des témoignages produits par la commune, par d'autres que les exploitants pour se rendre, comme le cadastre permet de le supposer, du lieudit " La Côte " à " ... " ou vice versa, les témoins affirmeraient-ils, sans preuve, que ce chemin est d'exploitation ; que, dans ces conditions, il convient de considérer que la commune de VAYRES apporte bien la preuve de la ruralité du chemin litigieux ;

Et attendu qu'il ressort des pièces versées aux débats par la commune de VAYRES que le chemin litigieux a été classé dans les chemins ruraux par arrêté du maire du 29 décembre 1989 ; qu'il est démontré, à tout le moins, que, dès 1992, le maire de la commune de VAYRES avait demandé à M. A..., alors fermier des terres actuellement propriété X..., de rendre " libre de jour et de nuit " " ce chemin qui est public " ; qu'il s'ensuit que les époux X..., qui ne justifient pas par les pièces qu'ils versent aux débats que leurs auteurs avaient d'ores et déjà prescrit à cette date l'assiette du terrain litigieux, ne peuvent utilement conclure à l'irrecevabilité de la commune de VAYRES ; que la cour ne peut qu'observer en effet à cet égard, que le non usage du chemin par le public depuis plus de trente ans, serait-il même démontré, n'est en tout cas pas de nature à conférer la propriété du chemin litigieux aux riverains qui, comme c'est le cas en l'espèce, n'apportent pas la preuve d'actes de possession conformes à l'article 2261 du Code Civil ; qu'il ne résulte pas en effet des éléments produits par les époux X..., notamment les attestations qu'ils versent à leur dossier, la preuve d'une possession continue et non interrompue, publique, non équivoque et à titre de propriétaire, étant observé qu'aucun témoignage ne permet même de déterminer la date à laquelle le chemin a été fermé et par lequel des exploitants ou propriétaires successifs des parcelles qui le longent ; que la notion de servitude, à laquelle font référence les époux X... dans leurs écritures, est étrangère, par ailleurs au présent litige ;

Attendu qu'il sera fait droit en conséquence à la demande de la commune de VAYRES et dit que les époux X... devront rétablir le libre passage sur le chemin litigieux dans le mois de cet arrêt et, passé ce délai, sous astreinte de 100 € par jour de retard ;

Attendu que la défense à une action en justice est un droit qui ne dégénère en abus qu'en cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol ; que tel n'est pas le cas de l'espèce, d'autant que les époux X... ont vu leur argumentation retenue par les premiers juges ; que la commune de VAYRES sera déboutée en conséquence de sa demande en dommages et intérêts ;

Attendu que les époux X..., qui succombent, seront condamnés à payer à la commune de VAYRES la somme de 1. 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par décision contradictoire mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi,

REFORME le jugement déféré et, statuant à nouveau,

ECARTE les conclusions d'irrecevabilité prises par les époux X...,

DIT que les époux X... devront, dans le mois de cet arrêt et, passé ce délai, sous astreinte de 100 € par jour de retard, supprimer toute entrave sur le chemin reliant celui de
" ... " à la route communale no11 longeant les parcelles dont ils sont propriétaires et cadastrées, de part et d'autre du chemin litigieux section A 1411, 1410, 1409, 1012 et 1013,

DEBOUTE la commune de VAYRES de sa demande en dommages et intérêts,

CONDAMNE les époux X... à payer à la commune de VAYRES la somme de 1. 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

CONDAMNE les époux X... aux dépens d'instance et d'appel qui seront recouvrés, en ce qui concerne ces derniers conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Marie-Christine MANAUD. Martine JEAN.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 10/01067
Date de la décision : 22/03/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

ARRET du 02 juillet 2013, Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 2 juillet 2013, 12-21.203, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.limoges;arret;2012-03-22;10.01067 ?
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