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30/09/2008 | FRANCE | N°263

France | France, Cour d'appel de Limoges, Ct0193, 30 septembre 2008, 263


RG N : 07 / 01687
AFFAIRE :
SELARL DUPRAT MIGNET ROUSSIE C / Julio X...

Licenciement
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2008

A l'audience publique de la Chambre sociale de la cour d'appel de LIMOGES, le trente septembre deux mille huit a été rendu l'arrêt dont la teneur suit ;
ENTRE :
SELARL DUPRAT MIGNET ROUSSIE, dont le siège social est 1 Bis Place d'Aine, Boîte Postale 391, 87010 LIMOGES CEDEX
APPELANTE d'un jugement rendu le 20 novembre 2007 par le Conseil de Prud'hommes de LIMOGES
Représentée par Ma

ître Laurent CAPAZZA, avocat au barreau de LIMOGES
ET : Julio X..., demeurant ...

(bénéficiair...

RG N : 07 / 01687
AFFAIRE :
SELARL DUPRAT MIGNET ROUSSIE C / Julio X...

Licenciement
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2008

A l'audience publique de la Chambre sociale de la cour d'appel de LIMOGES, le trente septembre deux mille huit a été rendu l'arrêt dont la teneur suit ;
ENTRE :
SELARL DUPRAT MIGNET ROUSSIE, dont le siège social est 1 Bis Place d'Aine, Boîte Postale 391, 87010 LIMOGES CEDEX
APPELANTE d'un jugement rendu le 20 novembre 2007 par le Conseil de Prud'hommes de LIMOGES
Représentée par Maître Laurent CAPAZZA, avocat au barreau de LIMOGES
ET : Julio X..., demeurant ...

(bénéficiaire d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2008 / 2003 du 24 / 04 / 2008 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Limoges)
Intimé
Représenté par Maître Marine BONNAUD-LANGLOYS, avocat au barreau de LIMOGES
A l'audience publique du 01 septembre 2008, la Cour étant composée de Monsieur Jacques LEFLAIVE, Président de chambre, de Monsieur Philippe NERVE et de Madame Anne-Marie DUBILLOT-BAILLY, Conseillers, assistés de Madame Geneviève BOYER, Greffier, Maître Laurent CAPAZZA et Maître Marine BONNAUD-LANGLOYS, avocats, ont été entendus en leur plaidoirie.
Puis Monsieur Jacques LEFLAIVE, Président de chambre a renvoyé le prononcé de l'arrêt, pour plus ample délibéré, à l'audience du 30 septembre 2008 ;
A l'audience ainsi fixée, l'arrêt qui suit a été prononcé, ces mêmes magistrats en ayant délibéré.

LA COUR

Julio X... a été engagé le 24 octobre 1988 en qualité de coursier par la SCP LABORATOIRE TRUFFIER-DUPRAT-MIGNET, aux droits de laquelle est venu par la suite la SELARL DUPRAT-MIGNET-ROUSSIE. Il a signé une lettre de démission libellée comme suit ;
" Pour faire suite à notre entretien de ce jour je vous confirme ma démission pour raisons personnelles. Avec votre accord je n'effectuerai pas mon préavis. " Un certificat de travail a été établi le 1er février 2006.
Les parties ont signé le 4 avril 2006 un nouveau contrat de travail aux termes duquel Julio X... était engagé comme coursier à compter du 6 avril 2006.
Par lettre recommandée avec accusé réception du 10 mai 2006 la S. E. L. A. R. L. DUPRAT-MIGNET-ROUSSIE a notifié à Julio X... son licenciement pour faute grave en indiquant les motifs suivants :
" Le 20 avril 2006, après avoir posé les clés du véhicule que vous conduisiez pour le laboratoire vous l'avez gardé et utilisé après vos heures de travail alors que votre contrat d'embauche stipulait clairement que vous n'en aviez pas le droit. Pour ce faire, vous avez pris sans autorisation le double des clés de ce véhicule.- Ce même jour vous aviez été arrêté par la police et contrôlé en état d'ébriété au volant de ce véhicule. Placé en cellule de dégrisement, vous ne vous êtes pas présenté à tore travail le vendredi 21 avril et nous n'avons été prévenus que vers 16 heures par le commissariat de police. "

Julio X... a saisi le conseil de prud'hommes de LIMOGES le 31 janvier 2007 aux fins de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner son employeur lui payer les sommes suivantes :
indemnité compensatrice de préavis2 911, 02 €
indemnité de licenciement4 694, 00 €
indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse20 000, 00 €
La S. E. L. A. R. L. DUPRAT-MIGNET-ROUSSIE a conclu au débouté de l'intégralité des demandes de la Julio X... et a réclamé à son encontre 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par jugement du 20 novembre 2007 le conseil de prud'hommes de LIMOGES a débouté Julio X... de ses demandes relatives au licenciement pour faute grave, requalifie la démission en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la S. E. L. A. R. L. DUPRAT-MIGNET-ROUSSIE à verser à Julio X... les sommes suivantes :
dommages- intérêts9 000, 00 €
indemnité compensatrice de préavis2 911, 02 €
congés payés correspondant291, 10 €
indemnité de licenciement 4 694, 00 €
indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile 400, 00 €
La S. E. L. A. R. L. DUPRAT-MIGNET-ROUSSIE a relevé appel de ce jugement le 19 décembre 2007.

Par écritures soutenues oralement à l'audience elle demande à la Cour de réformer le jugement en ce qu'il a requalifié la démission en licenciement et l'a condamnée à payer à Julio X... diverses sommes, d'ordonner à celui-ci le remboursement desdites sommes, de confirmer le jugement pour le surplus de ses dispositions et de condamner Julio X... à lui payer 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle expose l'argumentation suivante au soutien de ses prétentions :
Julio X... a été interpellé le 18 novembre 2005 pour conduite sous l'empire d'un état alcoolique, ce qui a entraîné un retrait immédiat de son permis de conduire. Son employeur ne l'a pas licencié, mais comme il restait à l'effectif sans pouvoir travailler, il l'a autorisé à prendre ses congés payés puis des congés payés par anticipation. Ne pouvant toujours pas reprendre le travail et se trouvant sans ressources, il a demandé le déblocage de la réserve de participation. La société DUPRAT-MIGNET-ROUSSIE s'étant engagée à le reprendre après la suspension de son permis, il a choisi de donner sa démission. Un plan d'épargne d'entreprise a été mis en place en 2002 et les sommes étaient bloquées pour cinq ans. Il n'aurait pu obtenir le déblocage anticipé des sommes placées sans démissionner que s'il démontrait qu'il était en situation de surendettement, ce qu'il n'a pas fait. Il n'a jamais eu de véhicule de fonction et la possibilité qui lui était donnée de ramener le véhicule de service chez lui, lui avait été retirée dès le mois de juillet 2003. Les 17 ans d'ancienneté lui ont été conservés.

Par écritures soutenues oralement à l'audience Julio X... conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions sauf à voir ordonner à l'employeur de remettre une attestation ASSEDIC rectifiée et réclame 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, en exposant l'argumentation suivante :

Pour produire ses effets la démission doit être exprimée librement en dehors de toute pression de l'employeur. Celui-ci lui avait indiqué que le seul moyen de récupérer ses droits sur le plan d'épargne d'entreprise était de démissionner. Sa décision de démissionner était affectée d'un vice puisqu'il aurait pu récupérer ses droits en faisant état d'une situation de surendettement. La S. E. L. A. R. L. DUPRAT-MIGNET-ROUSSIE savait pertinemment que son salarié était en situation de surendettement puisqu'elle verse aux débats les avis à tiers détenteur et un avis de saisie de rémunération. Julio X... n'avait nullement l'intention de démissionner puisqu'il a été réembauché dans les jours qui ont suivi. Cette manoeuvre a permis à la S. E. L. A. R. L. DUPRAT-MIGNET-ROUSSIE de contracter dans des conditions moins avantageuses pour son salarié puisqu'il avait toujours eu le droit d'utiliser le véhicule de service et que les 17 années d'ancienneté n'ont pas été reprises.
SUR QUOI, LA COUR
ATTENDU que les dispositions du jugement dont appel relatives au licenciement notifié le 10 mai 2006 ne sont pas contestées devant la Cour ;
ATTENDU, en ce qui concerne la démission, qu'il est constant entre les parties que Julio X..., qui ne pouvait plus travailler du fait que son permis de conduire était suspendu et se trouvait sans ressources, a démissionné pour obtenir le déblocage immédiat des fonds placés dans un plan d'épargne d'entreprise régi par les articles L. 443-1 et suivants du code du travail dans sa rédaction à l'époque des faits, constitué le 8 novembre 2002.
ATTENDU que l'intimé soutient que son consentement a été vicié du fait de son employeur qui lui aurait prétendu qu'il n'avait pas d'autre possibilité que de démissionner pour obtenir le déblocage des fonds alors qu'il lui suffisait de justifier d'une situation de surendettement et de l'avoir ainsi réembauché dans des conditions moins avantageuses ;
Mais ATTENDU que le contrat de travail ne met nullement à la charge de l'employeur un devoir de conseil à l'égard de ses salariés pour la gestion de leur patrimoine et notamment les conditions pour bénéficier des dispositions de l'article R. 442-17 du code du travail dans sa rédaction antérieure au 1er mai 2008, devenu depuis lors l'article R. 3324-22 du code du travail ;
Que s'il est exact que la cessation du contrat de travail est une des conditions prévues par l'article R. 442-17 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'époque des faits pour permettre au salarié la disponibilité anticipée des fonds placés à son compte sur le plan d'épargne d'entreprise, l'intimé n'apporte pas la preuve qui lui incombe que son employeur lui ait prétendu que la démission était la seule possibilité pour l'obtenir ;
ATTENDU, en toute hypothèse que Julio X... avait toute latitude pour connaître exactement les conditions de la disponibilité anticipée puisque le règlement du plan d'épargne d'entreprise reproduisait intégralement en son article 10 les dispositions de l'article R. 442-17 du code du travail sur les conditions de levée de l'indisponibilité et citait donc notamment la situation de surendettement et il prévoyait qu'il serait déposé à la Direction départementale du Travail, ce qui a été effectif le 9 janvier 2003 et qu'il serait affiché dans l'entreprise sur les emplacements réservés à la communication avec le personnel ;
ATTENDU que l'allégation de l'intimé suivant laquelle son employeur se serait livré à une manoeuvre pour signer un contrat de travail dans des conditions moins avantageuses pour lui est dépourvue de fondement ;
ATTENDU, en effet, que par un avenant du 8 juillet 2003 il avait été convenu que pour ne pas allonger le temps de travail de Julio X..., celui-ci était autorisé à garder le véhicule chez lui le soir à l'exception des veilles de congés payés, des RTT et des fins de semaine mais il lui était rappelé expressément qu'il ne s'agissait pas d'un véhicule de fonctions et qu'il ne devait pas s'en servir pour son usage personnel au-delà de 19 heures 45 ;
Que, contrairement à ce que prétend le salarié, il ne bénéficiait nullement d'un véhicule de fonctions et la faculté de garder le véhicule chez lui le soir, qui a été exclue dans le nouveau contrat de travail, ne constitue pas en soi un avantage en nature ;

ATTENDU, d'autre part, que si le nouveau contrat de travail ne mentionne pas de reprise d'ancienneté, le bulletin de paie établi pour le mois d'avril 2006 mentionne une ancienneté de 17 ans et 6 mois et comporte en plus du salaire de base une prime d'ancienneté de 15 % comme auparavant ;

ATTENDU que dès lors que l'employeur n'a pas retiré un quelconque avantage de la démission et de la signature du nouveau contrat de travail il ne peut pas être soutenu qu'il ait exercé une quelconque pression sur son salarié pour l'amener à démissionner ;
Que, d'autre part, à supposer établi, ce qui n'est même pas démontré au vu des pièces versées aux débats, que l'employeur ait donné des conseils ou des informations erronés à son salarié, celui-ci ne peut pas davantage soutenir que son consentement à la démission s'en serait trouvé vicié dans la mesure où son employeur n'avait aucune obligation à cet égard et où lui-même avait toute latitude pour connaître l'étendue de ses droits ;
ATTENDU que la lettre de démission est dépourvue d'ambiguïté et aucun vice du consentement n'est établi et il y a lieu en conséquence de débouter l'intimé de sa demande de requalification et d'indemnité ;
ATTENDU que le motif de la démission indiqué par l'employeur dans l'attestation destinée à l'ASSEDIC est le retrait du permis ;
Que ce motif n'est pas inexact, la suspension du permis de conduire ne permettant pas au salarié d'exécuter sa prestation de travail et de percevoir un salaire en contrepartie ;
ATTENDU qu'il y a lieu de condamner Julio X... aux dépens et aux frais irrépétibles supportés par l'appelante ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,
Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Constate que les dispositions du jugement du conseil de prud'hommes de LIMOGES du 20 novembre 2007 confirmant le licenciement pour faute grave du 10 mai 2006 et déboutant Julio X... de ses demandes à ce titre ne sont pas contestées devant la Cour ;
Réforme ledit jugement pour le surplus de ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare Julio X... mal fondé en toutes ses demandes et l'en déboute ;
Condamne Julio X... à rembourser à la S. E. L. A. R. L. DUPRAT-MIGNET-ROUSSIE les sommes que lui a versées celle-ci en vertu de l'exécution provisoire de droit du jugement dont appel ;

Condamne Julio X... à payer à la S. E. L. A. R. L. DUPRAT-MIGNET-ROUSSIE 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Julio X... aux dépens de première instance et d'appel.
Cet arrêt a été prononcé à l'audience publique de la Chambre sociale de la cour d'appel de LIMOGES en date du trente septembre deux mille huit par Monsieur Jacques LEFLAIVE, président de chambre.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Ct0193
Numéro d'arrêt : 263
Date de la décision : 30/09/2008

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL - Salaire - Participation aux résultats de l'entreprise - /JDF

Le contrat de travail ne met nullement à la charge de l'employeur un devoir de conseil à l'égard de ses salariés pour la gestion de leur patrimoine et notamment les conditions pour bénéficier des dispositions de l'article R. 442-17, devenu R. 3324-22 du code du travail, dans sa rédaction antérieure au 1er mai 2008


Références :

article R. 442-17, devenu R. 3324-22 du code du travail, dans sa rédaction antérieure au 1er mai 2008

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Limoges, 20 novembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.limoges;arret;2008-09-30;263 ?
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